Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Olivier DUSSOPT, bonjour.
OLIVIER DUSSOPT
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ministre chargé des Comptes publics. Les Comptes publics, c'est notre argent, ce sont nos impôts, on va en parler. On va en parler, mais je voudrais commencer avec le coronavirus, les derniers chiffres : 81 morts en 24 heures, taux de positivité 7,5%. Ça monte. Tous les indicateurs pour mesurer l'évolution de l'épidémie seront publiés chaque jour pour plus de transparence, c'est la volonté du président de la République. Pourquoi ? Pour faire comprendre aux Français que l'épidémie s'aggrave ?
OLIVIER DUSSOPT
D'abord pour assurer la transparence, c'est important quand on connaît une crise, et puis effectivement pour permettre à chacun de mesurer la situation. Nous sommes dans une situation épidémique qui, comme vous l'avez dit, s'aggrave, qui nécessite de prendre un certain nombre de mesures, qui nécessite surtout, là où des mesures moins radicales peuvent être mises en oeuvres, là où ne nous sommes pas dans une alerte totale, qui nécessite de faire extrêmement attention, de respecter les gestes barrières, de s'imposer à nous-mêmes des contraintes qui ne sont pas agréables, mais qui sont utiles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais pourquoi rappeler tous les jours ? Tous les jours. C'est parce qu'une partie des Français rejette les mesures prises ? Vous sentez qu'il y a cette contestation en France, cette colère en France, contre ce que les restaurateurs, par exemple, appellent la "dictature sanitaire" ?
OLIVIER DUSSOPT
D'abord, je pense qu'il faut faire attention aux mots qu'on emploie. Je ne sais pas s'il y a une opposition, s'il y a une colère, je sens qu'il y a une forme de lassitude et c'est normal…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et une incompréhension.
OLIVIER DUSSOPT
C'est normal que les Français…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et une incompréhension.
OLIVIER DUSSOPT
… puissent s'interroger, puissent trouver le temps long, puissent trouver les mesures contraignantes. Elles le sont, elles le sont, mais nous sommes face à une épidémie qui évolue, nous sommes face à une situation sanitaire qui n'est pas bonne, et donc il faut faire extrêmement attention. Vous citez les restaurateurs…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
OLIVIER DUSSOPT
Evidemment, si j'étais restaurateur, si vous l'étiez, apprendre que l'on doit fermer plus tôt, apprendre que l'on doit fermer son établissement après avoir connu la période de confinement, c'est une nouvelle qui est dramatique, qui est dramatique économiquement, qui est dramatique moralement. Notre responsabilité au sein du gouvernement et particulièrement au ministère de l'Economie et des Finances, nous y travaillons avec Bruno LE MAIRE, c'est de mettre en place ce dispositif qui protège, qui accompagne, qui permette d'indemniser. Ça ne remplace pas, pour un restaurateur, la possibilité d'ouvrir et de voir ses clients. Mais notre responsabilité, et nous le faisons depuis le début de la crise, c'est de mettre en place tous les outils, pour les aider, les accompagner et les protéger.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, alors, les outils, j'y reviens, comment est-ce que vous les accompagnez, chômage partiel, exemption de charges sociales, on en parlait hier encore, prime de solidarité jusqu'à 10 000 € par mois, mais il y a des loyers à payer, qui continueront à être payés, certains restaurateurs ont des loyers qui se montent à 10, 15 000 ou 20 000 € par mois, donc la prime de 10 000 € c'est insuffisant. Les banques par exemple, les banques ne reportent plus les prêts, les banques ne reportent plus les prêts, ça y est, exigent maintenant les remboursements des prêts. Les assureurs ne prendront pas en charge une seconde fois les pertes d'exploitation.
OLIVIER DUSSOPT
Les assureurs ont été très peu nombreux à prendre en charge les pertes d'exploitation, il faut d'abord le noter. Parce que…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, trop peu nombreux.
OLIVIER DUSSOPT
Mais vous savez aussi…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Trop peu nombreux ?
OLIVIER DUSSOPT
Attendez, avant de dire trop peu ou suffisamment, il faut aussi rappeler le cadre du droit et dire que la prise en charge des pertes d'exploitation est un point extrêmement compliqué en droit. Par contre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon. Enfin, de toute façon, ça ne sera plus pris en charge.
OLIVIER DUSSOPT
Revenons à l'essentiel. Vous avez rappelé les mesures que nous avons prises. Elles sont extrêmement importantes, elles sont majeures et elles sont inédites. Vous dites que dans tel ou tel cas ça peut être insuffisant. Je ne vais pas vous dire le contraire. Je ne vais pas vous dire le contraire parce qu'effectivement, je l'ai dit, lorsque vous dites à un restaurateur, lorsque vous dites à un commerçant de fermer son établissement, cela a forcément des conséquences, et les outils que nous mettons en place visent à les protéger de…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Eh bien il va mettre la clé sous la porte.
OLIVIER DUSSOPT
… au maximum.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comment peut-il faire ?
OLIVIER DUSSOPT
Donc nous avons mis en place des prêts garantis par l'Etat, je les ai évoqués, vous avez vous-même évoqué l'activité partielle, nous renforçons les dispositifs de prise en charge du chômage partiel, nous montons la possibilité d'indemnisation mensuelle à 10 000 € pour les commerces de moins de 20 salariés, qui font moins de 2 millions de chiffre d'affaires et qui sont fermés par mesure administrative, comme c'est le cas notamment à Marseille pour citer cet exemple. Ce sont des mesures qu'aucun pays n'a prises, qui n'avaient jamais été prises en France, qui sont majeures, qui ont un coût pour les finances publiques, que nous assumons, parce que c'est la même manière d'aller…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quel est le coût d'ailleurs ? Vous avez mesuré le coût potentiel ?
OLIVIER DUSSOPT
Oui, lorsqu'on évoque les mesures qui ont été annoncées spécifiquement, qu'Elisabeth BORNE rappelait devant vous hier notamment en matière d'indemnisation, nous sommes sur 150 à 200 millions d'euros par mois.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça coûte à l'Etat 150 à 200 millions d'euros par mois.
OLIVIER DUSSOPT
Oui, et ça s'inscrit dans cadre de la mise en oeuvre de ce qu'on appelle le fonds de solidarité. Ce fonds de solidarité qui vise à aider les indépendants, les TPE, que nous avons créé dès le mois de mars, avec une aide à 1 500 € pour les petits commerces qui étaient fermés etc. Ce fonds solidarité nous avions prévu 9 milliards d'euros. Nous en avons dépensé aujourd'hui un peu plus de 6 et donc nous avons, sur ce fonds de solidarité, les marges pour tenir le financement des mesures que vous avez évoquées.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Olivier DUSSOPT, avant de faire les comptes publics ensemble, je voudrais que l'on s'attarde quelques instants sur la décision de la Commission européenne qui lance une consultation auprès de tous les citoyens de l'Union, sur l'utilisation des pièces de 1 et 2 centimes d'euros, les petites pièces, ces petites monnaies. Vous êtes favorable à leur suppression ?
OLIVIER DUSSOPT
Non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non ?
OLIVIER DUSSOPT
Non, parce que je pense que la monnaie est importante, et je verrai ce que donne la consultation de la Commission européenne.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans 14 pays de l'Union européenne on a pris de l'avance, et notamment dans quatre pays où là on les a totalement supprimées.
OLIVIER DUSSOPT
Vous savez, si j'avais la garantie que les arrondis se fassent au bénéfice du consommateur, peut-être que j'y serais favorable. Je ne suis pas sûr que les arrondis se fassent au bénéficie du consommateur.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous êtes contre cette suppression.
OLIVIER DUSSOPT
A titre personnel j'y suis contre. Il y a une consultation de la Commission européenne, laissons la consultation se dérouler.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Les comptes publics alors. Hausse vertigineuse de la dette, j'ai regardé le budget, hausse vertigineuse de la dette, plan de relance, la dette on sera à 117 milliards d'euros, c'est ça à peu près, fin de l'année ?
OLIVIER DUSSOPT
Non. La dette, nous serons à 117,5% du PIB.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Du PIB. Pardon…
OLIVIER DUSSOPT
117,5% de la production de richesses.
JEAN-JACQUES BOURDIN
117,5% de la production, ma langue a fourché.
OLIVIER DUSSOPT
C'est un peu moins que ce que nous avons craint au mois de juin et de juillet, nous imaginions franchir la barre des 120%. L'économie résiste mieux que ce que …
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est 3 000 milliards, près de 3 000 milliards.
OLIVIER DUSSOPT
Un peu moins, nous aurons un PIB qui sera à 2 300 milliards d'ici la fin de l'année, donc 117%, nous sommes plutôt autour de 2 600 milliards.
JEAN-JACQUES BOURDIN
2 600 milliards. Et bientôt 3 000.
OLIVIER DUSSOPT
C'est vertigineux, mais c'est…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah c'est vertigineux, parce qu'il va bien falloir la rembourser. Comment ?
OLIVIER DUSSOPT
Mais pourquoi est-ce qu'il y a cette dette ? Avant de d'évoquer son remboursement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui…
OLIVIER DUSSOPT
Parce que vous avez raison de préciser qu'il faut la rembourser. La dette, ça se rembourse…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais oui.
OLIVIER DUSSOPT
Pourquoi est-ce que cette dette se creuse au cours de l'année 2020 ? Parce que nous avons répondu à la crise. Quand on regarde ce qui s'est passé et ce qui se passe sur les comptes de l'Etat en 2020, qu'est-ce qui se passe L'activité économique ralentit et donc les recettes fiscales diminuent et donc nous avons une perte de recettes pour toutes les administrations publiques d'environ 70 milliards d'euros Et dans le même temps nous avons fait face à la crise avec des dépenses supplémentaires, le Fonds solidarité que j'ai évoqué, le chômage partiel, c'est 30 milliards d'euros, et donc forcément ça creuse le déficit, et nous allons avoir un déficit de l'Etat en 2020 qui va être autour de 195 milliards d'euros. Evidemment ça contribue à creuser la dette et à renforcer la dette. Par ailleurs, je ne veux pas être trop technique, mais quand vous avez un PIB qui baisse, forcément si votre dette était stable, ça fait augmenter le pourcentage en rapport. C'est un problème de dénominateur. L'année prochaine nous avons un objectif, c'est de réduire ces déficits, de réduire à nouveau le poids de la dette pour retrouver une trajectoire de finances publiques qui soit soutenue. Mais…
JEAN-JACQUES BOURDIN
En espérant que la relance et que la croissance soient là.
OLIVIER DUSSOPT
En faisant tout pour que la croissance soit là et le plan de relance y es. Mais si nous pouvons faire cela, je termine sur ce point, c'est parce que nous avons fait des efforts notamment au cours des trois dernières années, qui nous permettent d'être crédibles sur les marchés financiers, qui nous permettent de tenir dans ce contexte de crise et de pouvoir financer les mesures que nous mettons en place. Donc nous bénéficions des efforts qui ont été faits. Ça doit être temporaire, parce que le Premier ministre l'a dit, Bruno LE MAIRE et moi y veillons, la dégradation des comptes publics c'est une conséquence de la crise, c'est un passage obligé pour répondre à la crise économique, et surtout sanitaire que nous connaissons, ça ne peut pas durer tout le temps.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Olivier DUSSOPT, parlons des impôts, nos impôts, les impôts des entreprises. Alors, pas de hausse d'impôts dites-vous.
OLIVIER DUSSOPT
Pas de hausse d'impôt.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et vous assénez cela. Pas de hausse d'impôts. Alors on va entrer dans le détail, parce que moi j'en ai trouvé des hausses d'impôts…
OLIVIER DUSSOPT
Ah…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais oui j'en ai trouvé.
OLIVIER DUSSOPT
Moi j'ai aussi des baisses…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, d'accord. Alors, la taxe foncière, elle baissera ?
OLIVIER DUSSOPT
La taxe foncière, vous le savez comme moi, la taxe foncière…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ce n'est pas l'Etat.
OLIVIER DUSSOPT
Le taux est voté par les communes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, je sais je sais.
OLIVIER DUSSOPT
Et les valeurs locatives sont réévalués chaque année Il n'y a aucune augmentation de la taxe foncière qui soit à l'initiative de l'Etat, et il faut noter, parce qu'il faut rendre à César ce qui est à César, que les communes au cours des deux, trois dernières années, sont particulièrement raisonnables sur les questions d'impôts.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le prix des cigarettes.
OLIVIER DUSSOPT
Il va augmenter au 1er janvier.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc les taxes vont augmenter.
OLIVIER DUSSOPT
Prévu depuis très longtemps.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui d'accord, mais enfin c'est une hausse d'impôt.
OLIVIER DUSSOPT
Pardonnez-moi, j'ai fait une petite erreur, 1er novembre et non pas 1er janvier.
JEAN-JACQUES BOURDIN
1er novembre. Combien ?
OLIVIER DUSSOPT
Ça sera la dernière hausse de fiscalité du tabac…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et l'année prochaine ?
OLIVIER DUSSOPT
Il n'y aura pas de hausse de fiscalité sur le tabac l'année prochaine. Il y a…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc pas de hausse du prix des cigarettes l'année prochaine.
OLIVIER DUSSOPT
Soyons très précis. 1er novembre, dernière augmentation de la fiscalité sur le tabac, et la cible qui était le paquet au prix moyen de 10 € est atteinte. Ensuite, chaque mois de janvier, les prix du tabac sont indexés sur l'inflation, mais il n'y aura pas de hausse de fiscalité sur le tabac en 2021.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Augmentation des taxes sur les activités polluantes oui ou non ?
OLIVIER DUSSOPT
Oui, il y a des activités polluantes qui font l'objet d'une taxation qui peut être renforcée, on a évoqué les questions de malus…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc voilà une hausse de taxes.
OLIVIER DUSSOPT
Oui, mais vous ne tenez peut-être pas compte, quand on évoque des taxes qu'on appelle comportementales, c'est un mot un peu barbare, du caractère incitatif Lorsque des malus sont mis sur des véhicules ou des engins qui sont polluants, l'objectif est d'orienter la consommation, d'orienter les usages sur des engins qui ne sont pas…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il y aura augmentation.
OLIVIER DUSSOPT
… et de ne pas payer la taxe.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc augmentation de taxes sur les activités polluantes, taxe sur les produits ultra-transformés à forte empreinte carbone. Oui, non ?
OLIVIER DUSSOPT
Ça c'est le cas, c'est une trajectoire qui est votée depuis longtemps.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et qui sera continue.
OLIVIER DUSSOPT
Je vous laisse aller au bout. Mais si vous me le permettez…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non, je vais au bout, parce que j'ai repris, vous savez pourquoi ?
OLIVIER DUSSOPT
Je ferai la liste des baisses.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'ai repris la convention. Vous savez pourquoi ? Parce que j'ai repris la Convention citoyenne sur le climat.
OLIVIER DUSSOPT
Toutes les mesures proposées par la Convention ne sont pas appliquées, vous le savez.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Elles ne sont pas appliquées, toutes les mesures.
OLIVIER DUSSOPT
Le président de la République a mis un certain nombre…
JEAN-JACQUES BOURDIN
146 sur 149. Est-ce que vous appliquerez les 146 mesures ?
OLIVIER DUSSOPT
Là aussi, permettez-moi d'être précis, il y a des échanges en ce moment entre la Convention citoyenne, les parlementaires, les ministères, il y a un certain nombre de propositions qui sont faites, qui sont intéressantes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on n'appliquera pas les 146 mesures.
OLIVIER DUSSOPT
… d'autres qui se heurtent à des difficultés techniques Je prends un exemple pour illustrer et puis après je parlais de baisses d'impôts. Je prends un exemple pour illustrer : la convention citoyenne propose de diminuer la TVA sur les transports ferroviaires et les voyages en train.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, de 10 à 5,5%.
OLIVIER DUSSOPT
Ça n'est pas conforme au droit européen L'idée peut être intéressante…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on oublie.
OLIVIER DUSSOPT
Mais ça n'est pas conforme.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On oublie.
OLIVIER DUSSOPT
La question ça n'est pas d'oublier, c'est de dire ce que l'on peut faire et ce que l'on ne peut pas faire. Un mot, parce que vous avez recherché ici ou là, soit des exemples de taxation qui existent…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, j'ai pris la liste…
OLIVIER DUSSOPT
… soit des propositions qui sont…
JEAN-JACQUES BOURDIN
La liste des 146 propositions.
OLIVIER DUSSOPT
C'est ce que je dis, vous avez cherché soit des exemples qui existent, soit la liste des propositions qui sont faites par la Convention. Ce qui est important aussi à noter, nous nous l'avons dit et souligné hier, c'est que les impôts dans ce pays baissent, et entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2021, avec ce que nous proposons au Parlement, les impôts au total baisseront de 45 milliards d'euros en 4 ans, la moitié pour les entreprises, la moitié sur les ménages.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il y aura une…
OLIVIER DUSSOPT
Au mois d'octobre, 80% des Français ne paient plus de taxe d'habitation, c'est à souligner, et l'année prochaine, les 20% de Français qui en paient encore, verront leur taxe d'habitation baisser.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que le malus sur les véhicules polluants sera augmenté ?
OLIVIER DUSSOPT
Il y a, dans la loi de finances que nous avons présentée hier, une disposition qui dit que le niveau de déclenchement du malus est abaissé. Actuellement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il ne sera pas augmenté.
OLIVIER DUSSOPT
Attendez, je vais au bout. Actuellement le malus se déclenche au-dessus de…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est compliqué.
OLIVIER DUSSOPT
Oui, la fiscalité énergétique c'est très compliqué.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah ben c'est très compliqué, alors qu'elle pourrait être assez simple, non ?
OLIVIER DUSSOPT
Actuellement, vous avez…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Augmenter le malus sur les véhicules polluants, ça ne me paraît pas très compliqué. Augmenter le malus sur les véhicules les plus lourds, ça ne me paraît pas très compliqué.
OLIVIER DUSSOPT
Alors, je reviendrai sur ce deuxième exemple. Rien n'est compliqué quand on veut augmenter. Nous, ce que nous voulons, c'est que ce soit soutenable et incitatif. Ce que nous allons faire…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous n'augmentez pas.
OLIVIER DUSSOPT
Ce que nous allons faire, c'est que nous baissons le seuil d'émission de CO2 par kilomètre, à partir duquel se déclenche le malus. C'est un peu technique mais nous sommes au-dessus de 130 grammes par kilomètre parcouru, et nous allons progressivement aller à 123. Il faut savoir que les voitures neuves en France, en moyenne, produisent plutôt autour de 112 grammes. Et ensuite nous avons la possibilité d'augmenter le malus maximum pour que les modèles les plus polluants puissent avoir un malus plus important, tout en veillant à ce que ce soit soutenable. La question…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Augmentation d'une taxe.
OLIVIER DUSSOPT
La question que vous avez évoquée du malus par rapport au poids des véhicules, c'est une proposition de la Convention citoyenne, qui n'est pas dans le projet de loi de finances tel que je l'ai présenté hier avec Bruno LE MAIRE, et qui peut faire l'objet de débat. J'appelle juste…
JEAN-JACQUES BOURDIN
De débat ? C'est-à-dire d'amendements à l'Assemblée nationale ?
OLIVIER DUSSOPT
Actuellement il y a des échanges avec les différents ministres, avec les parlementaires. Mais j'appelle juste l'attention sur deux choses. La première sur ce point particulier : il faut faire attention à ne pas être dans une vision ou dans une attitude qui soit shadokienne. Aujourd'hui nous subventionnons et nous accompagnons la relocalisation de production industrielle. La 3008 qui est un très beau véhicule, je ne vais pas faire de la publicité à cette marque-là, mais un très beau véhicule, produit à Sochaux, un des premiers sites industriels en France, nous accompagnons PEUGEOT, et il serait dommage de subventionner une production sur le territoire français et ensuite de taxer sa consommation et son achat par les Français. Il faut faire attention à ne pas subventionner et taxer par la suite. Ensuite, nous avons une ligne de mire…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sauf qu'on n'arrivera pas pour l'instant, vous le savez, à produire une 3008 sur le territoire français, au même prix que la production d'une 3008 à l'étranger.
OLIVIER DUSSOPT
C'est notamment la raison pour laquelle nous baissons les impôts de production…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et c'est ce que dit le patron de PSA.
OLIVIER DUSSOPT
Il le dit, et c'est la raison pour laquelle nous baissons les impôts de production puisque j'ai dit que la taxe d'habitation allait baisser, les impôts de production…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je vais y venir aux impôts de production…
OLIVIER DUSSOPT
… vont baisser…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais je voudrais finir, pardon, je voudrais revenir sur ce que j'ai vu, parce que pas de taxe supplémentaire sur les billets d'avion, on est bien d'accord.
OLIVIER DUSSOPT
Là aussi c'est une proposition. Je vois…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est encore une proposition de… Non mais parce que vous êtes en contradiction avec vos engagements sur l'environnement.
OLIVIER DUSSOPT
Mais non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comment « mais non » ? Votre budget est en contradiction. Il faut assumer ! Pourquoi pas, mais il faut assumer.
OLIVIER DUSSOPT
Moi j'assume tout, sauf ce qui est faux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon ?
OLIVIER DUSSOPT
Ce budget consacre un milliard de plus sur le budget du ministère de la Transition écologique, justement à financer ces politiques. En plus du milliard supplémentaire nous avons un plan de relance, et sur les 100 milliards il y en a plus de 30 qui sont consacrés à la transition écologique et à la préparation de l'avenir. Nous accompagnons cela d'un effort de transparence qui n'a jamais été fait, puisque tout à l'heure avec Barbara POMPILI et Bruno LE MAIRE, j'aurai l'occasion de présenter ce qu'on appelle le budget vert, qui permet d'évaluer l'effet sur l'environnement de chacune des dépenses, dépenses budgétaires et dépenses fiscales, de l'Etat et des administrations publiques. Et par ailleurs…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les bonus sur l'achat de véhicules verts vont baisser.
OLIVIER DUSSOPT
Ils vont baisser progressivement, cela dit…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ils vont baisser ! Pardon, Olivier DUSSOPT…
OLIVIER DUSSOPT
Quelques chiffres…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais ils vont baisser. Voilà. Vous voulez que je vous dise autre chose ?
OLIVIER DUSSOPT
Non, laissez-moi aller au bout de cette question-là. Ils sont à 7 000 € aujourd'hui pour l'achat d'un véhicule électrique, nous allons passer à 6 000 € l'année prochaine et 5 000 € ensuite.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, ça va baisser.
OLIVIER DUSSOPT
Nous les avions augmentés, avant, et pour répondre à la crise. Au mois de juin 2020, nous avons vendu plus de véhicules, ce n'est pas nous qui les avons vendus, ce sont les producteurs, qu'en juin 2019…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tant mieux.
OLIVIER DUSSOPT
Et donc nous avons atteint nos objectifs. L'objectif, quand on est ministre des Comptes publics justement, c'est de faire en sorte que les dispositifs soient bien calibrés et qu'ils soient efficaces. Je ne suis pas là pour dépenser plus qu'il ne faut, et dont nous dépensons pour être incitatif et efficace et ça l'est avec ces dispositifs.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, Olivier DUSSOPT, je vais m'arrêter sur tout ce qui est environnement. Je voudrais parler des aides publiques accordées aux entreprises. Allez-vous les conditionner ?
OLIVIER DUSSOPT
Nous travaillons sur des contreparties.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quelles contreparties ?
OLIVIER DUSSOPT
Et nous avons dit que nous étions ouverts à une discussion sur des contreparties qui sont…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous travaillez sur les contreparties. Quelles contreparties ?
OLIVIER DUSSOPT
Un mot sur la démarche et la méthode…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non non non, moi je veux aller direct…
OLIVIER DUSSOPT
Ah si, c'est important.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On n'a pas le temps Olivier DUSSOPT, je veux aller direct : quelles contreparties ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est important, nous ne voulons pas nous inscrire dans un système de conditions, avec un nombre d'emplois précis, parce que nous savons que personne ne sait le compter, et nous ne voulons pas créer une usine à gaz. Notre objectif c'est le redressement de l'économie, c'est la relance, et c'est faire en sorte que l'on retrouve le niveau de richesses.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça j'ai compris, tout pour l'entreprise.
OLIVIER DUSSOPT
Ah non, pas tout pour l'entreprise.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah beaucoup : baisse de 10 milliards d'euros des impôts de production, portant sur les entreprises.
OLIVIER DUSSOPT
Et quand on mobilise…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Chèque en blanc aux entreprises Olivier DUSSOPT.
OLIVIER DUSSOPT
Aucun chèque en blanc. Quand on mobilise 30 milliards d'euros pour financer le chômage partiel, quand l'OCDE, pas le gouvernement mais l'OCDE dit que la France est le pays qui a le mieux protégé le niveau de salaire des salariés menacés par la crise et par le chômage, ça n'est pas tout pour l'entreprise. Quand nous mettons en oeuvre des primes pour accompagner les ménages sur la rénovation de leur logement, pour changer leur véhicule, vous les avez évoquées, quand nous mettons en place des mesures en direction du monde étudiant, quand nous mettons en place le Ségur et les investissements dans les hôpitaux et dans les EHPAD, ça n'est pas tout pour les entreprises. Pr contre, nous avons un…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, quelles contreparties ? Quelles contreparties ?
OLIVIER DUSSOPT
Nous les avons évoquées…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lesquelles ?
OLIVIER DUSSOPT
Ce que nous souhaitons c'est que les entreprises…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je ne sais pas moi. La présence de filiales dans les paradis fiscaux, on conditionne, je ne sais pas moi, l'intéressement imposé dans toutes les entreprises, pourquoi pas, proposition du MoDem. Il y en a beaucoup !
OLIVIER DUSSOPT
Sur la question des paradis fiscaux nous y veillons déjà. Bruno LE MAIRE a eu l'occasion de le dire, je crois ici même. Nous n'accordons pas de garanties sur les prêts prix garantis par l'Etat, ni de subventions aux entreprises dont le siège social est dans un paradis fiscal ou qui dispose d'une filiale sans réalité économique dans un paradis fiscal.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, quelles contreparties possibles ?
OLIVIER DUSSOPT
Nous avons ouvert aujourd'hui les discussions sur ces questions-là, de contreparties…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lesquelles ?
OLIVIER DUSSOPT
Comment est-ce qu'on peut améliorer les questions de gouvernance ? Comment est-ce qu'on peut améliorer les questions de dialogue social ? Comment est-ce qu'on peut améliorer la place des femmes, la place des salariés dans la gouvernance des entreprises ? Comment est-ce que l'on fait pour justement, vous l'avez évoqué, qu'il y ait plus entreprise qui aient recours, qui mettent en oeuvre des outils de partage de richesse, que ce soit de la participation…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il y aura des contreparties.
OLIVIER DUSSOPT
Ou de l'intéressement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il y aura des contreparties.
OLIVIER DUSSOPT
Nous voulons avoir cette discussion, par contre je précise, nous ne serons pas dans de la conditionnalité au cas par cas, emploi par emploi, car ce que nous voulons, c'est que l'économie reparte, et pour que l'économie reparte il ne faut pas d'usine à gaz, il ne faut pas dire qu'on donne des aides et enfermer les aides dans des carcans ; il faut que ces aides soient mobilisés, que le plan de relance soit efficace, que les emplois soient créés, et que fin 2022 nous ayons retrouvé le niveau de richesse que nous avons connu avant la crise.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. Votre objectif aussi c'est de faire en sorte que les Français consomment, donc puisent dans leur épargne qui est considérable aujourd'hui.
OLIVIER DUSSOPT
Considérable…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors il y a la Prime Rénov, rénovation thermique, la reconversion donc du parc automobile, vous l'avez dit, il y a quelques mesures aussi, mais moi je voudrais vous poser une question sur le financement de la loi dépendance, là je quitte le budget. Le financement de la loi dépendance, la nouvelle branche de la Sécurité sociale…
OLIVIER DUSSOPT
La cinquième branche.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, la cinquième branche. Comment financer ?
OLIVIER DUSSOPT
D'abord c'est une super avancée, créer une cinquième branche autour de l'autonomie…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tous les gouvernements l'ont promise.
OLIVIER DUSSOPT
Créer une cinquième branche sur l'autonomie et la prise en charge de la dépendance, ça concerne toutes les familles.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Projet de loi en 2021.
OLIVIER DUSSOPT
Projet de loi en 2021. Actuellement un premier rapport nous a été rendu, sur des questions de financement, un rapport fait par…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Augmentation de la CSG par exemple, dit ce rapport, jusqu'à 9,2% pour les retraités.
OLIVIER DUSSOPT
Nous avons dit, et c'est la ligne que nous défendons, j'ai essayé de vous le dire tout à l'heure, avec Bruno LE MAIRE nous défendons une ligne unique. Nous ne voulons pas augmenter les prélèvements obligatoires et donc nous sommes, pour la question de la dépendance et l'autonomie, face à un véritable enjeu, il faut que nous puissions dégager des recettes, il faut que nous puissions réaliser des économies, sans rogner sur les droits, parce que ça serait contre-productif, mais nous ne voulons pas augmenter les prélèvements obligatoires.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comment allez-vous financer ?
OLIVIER DUSSOPT
Je vous donne une illustration. Lorsqu'Emmanuel MACRON a été élu, tout à l'heure nous parlions du PIB et du poids de la dette, le niveau des prélèvements obligatoires était supérieur à 45%. Fin 2019 nous avions atteint 44%. Notre objectif malgré la crise, c'est d'être en dessous de 44, 43,8 pour être précis, fin 2021, parce que nous considérons qu'on ne répond pas à une crise en augmentant les impôts. Ça pose aujourd'hui, ça nous met face à une responsabilité, un enjeu, c'est que lorsqu'on crée de nouvelles politiques, lorsqu'on crée de nouveaux droits, et c'est un honneur que d'appartenir à un gouvernement qui crée des nouveaux droits sur la dépendance autonomie, comme je suis extrêmement fier d'appartenir au gouvernement qui a mis en place et qui met encore en place progressivement le reste à charge zéro sur les lunettes, les soins dentaires. Il faut…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, alors Olivier DUSSOPT, comment allez-vous financer ?
OLIVIER DUSSOPT
Il faut continuer les réformes structurelles, il faut dégager des marges, il faut faire en sorte que sans augmenter les prélèvements obligatoires, parce qu'on on s'appuie sur la croissance et la production de richesse, nous puissions trouver ses financements.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien. J'ai une dernière question sur les autoroutes. Fin des concessions en 2022.
OLIVIER DUSSOPT
Pour une partie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, pour une grande partie, donc des concessions qui vont rapporter beaucoup d'argent, puisque, entre 2023 et 2036 les dividendes versés atteindront 40 milliards d'euros. Il y a peut-être quelques pressions exercées sur les sociétés qui gèrent.
OLIVIER DUSSOPT
Il y a un certain nombre de discussions qui sont déjà ouvertes, je pense notamment…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je ne sais pas moi…
OLIVIER DUSSOPT
Je pense notamment à des discussions sur la prise en charge en termes d'entretien, d'investissement, non pas des seules autoroutes mais des abords et des voies d'accès. Je pense au fait que nous avons…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Baisse de tarifs sur les véhicules propres par exemple ?
OLIVIER DUSSOPT
Je pense au fait que l'année dernière par exemple nous avons indexé la taxe payée par les sociétés d'autoroutes sur l'inflation, pour contribuer au financement d'infrastructures comme le canal Seine – Nord. Vous faites, si j'entends bien, une proposition, c'est de verser au débat une modulation des tarifs de la part des sociétés d'autoroutes…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, en fonction de… véhicules propres, covoiturage par exemple.
OLIVIER DUSSOPT
Vous êtes le premier à le faire, finalement vous êtes presque un représentant de la Convention citoyenne…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, je ne suis pas presque, mais je vous donne une idée.
OLIVIER DUSSOPT
Donc peut être que cette idée sera versée au débat.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Olivier DUSSOPT d'être venu nous voir.
OLIVIER DUSSOPT
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 2 octobre 2020