Interview de Mme Marlène Schiappa, ministre de la citoyenneté, à CNews le 8 octobre 2020, sur les violences contre les forces de l'ordre, le séparatisme, l'interruption volontaire de grossesse et les néonicotinoïdes.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Média : CNews

Texte intégral

LAURENCE FERRARI
Bonjour Marlène SCHIAPPA.

MARLENE SCHIAPPA
Bonjour.

LAURENCE FERRARI
Bienvenue sur le plateau de la matinale de Cnews.

MARLENE SCHIAPPA
Merci.

LAURENCE FERRARI
L'actualité ce matin ce sont ces deux policiers en civil blessés par balle hier soir dans le Val-D'oise à Herblay, agressés par trois individus qui les ont d'abord frappés, puis leur ont dérobé leurs armes de service, deux policiers de la PJ de Cergy, dont un touché grièvement. D'abord, est-ce que vous avez des nouvelles de leur état de santé ?

MARLENE SCHIAPPA
Oui, on est lien, le ministre de l'Intérieur, Gérald DARMANIN, va se rendre au chevet de ces policiers. Moi je voudrais rappeler quand même, parce qu'on a entendu beaucoup de choses sur les plateaux de télévision ces derniers mois, je voudrais rappeler que c'est le quotidien de la vie des policiers, des gendarmes, des pompiers parfois, que d'être menacés. On vient de passer la période de la rentrée scolaire, eh bien nous il y a des policiers qui nous ont dit "mon petit garçon de 8 ans il n'ose pas dire à l'école que son papa est policier, parce que sinon il va être menacé et c'est nous mettre en danger", et ça c'est absolument anormal, je crois qu'on doit davantage protéger ceux qui nous protègent, et j'adresse tous mes voeux de rétablissement, prompts et rapides, à ces deux policiers.

LAURENCE FERRARI
Dix-huit policiers par jour, disait un responsable syndical policier, il y a quelques instants sur le plateau de Romain DESARBRES, c'est inadmissible.

MARLENE SCHIAPPA
C'est complètement inadmissible, et je crois qu'on sort complètement du rôle, de la vision du rôle des policiers qu'on devrait avoir, les policiers sont là pour nous protéger, les policiers sont là pour maintenir l'ordre républicain, s'il n'y a plus d'ordre républicain ça veut dire que c'est l'ordre des clans qui s'installe et que chacun maintient son ordre comme il le peut. Donc je crois qu'il est important de rappeler que le rôle des policiers c'est de nous protéger, toutes et tous, peu importe qui que nous soyons, quelles que soient nos croyances, nous appartenances politiques, notre lieu de vie, donc je crois que respecter les policiers, les gendarmes, les pompiers, c'est quand même la moindre des choses.

LAURENCE FERRARI
Agresser un policier, c'est là que commence le séparatisme dans notre pays ?

MARLENE SCHIAPPA
Oui, on peut le dire de cette manière. Moi j'observe que, effectivement, il y a un danger à exercer, aujourd'hui, quand on est un membre des forces de l'ordre. Pour le 14 juillet, avec Gérald DARMANIN, nous avons reçus au ministère de l'Intérieur les gendarmes, les policiers, qui ont été blessés dans l'exercice de leurs fonctions, et puis il y avait aussi des familles, parce qu'il y a aussi des policiers, des gendarmes, qui sont tués, dans l'exercice de leurs fonctions, et donc c'est extrêmement difficile quand vous voyez des parents qui viennent de perdre leur enfant dans la pleine fleur de l'âge parce qu'il était, la nuit, à pied d'oeuvre, pour protéger les Françaises et les Français, et qu'il a été tué dans l'exercice de ses fonctions, c'est quelque chose d'insupportable.

LAURENCE FERRARI
Le séparatisme, c'était l'intitulé du projet de loi qui doit arriver prochainement devant l'Assemblée, pourquoi avoir retiré le mot séparatisme, est-ce que c'est un recul, un premier recul ?

MARLENE SCHIAPPA
Alors, d'abord on n'a pas retiré le mot séparatisme, ce projet de loi…

LAURENCE FERRARI
Le président l'a prononcé à plusieurs reprises.

MARLENE SCHIAPPA
Le résident l'a prononcé, Gérald DARMANIN également, moi aussi, nous sommes, avec Gérald DARMANIN, en train de travailler sur ce projet de loi. Le titre du projet de loi c'est comme un titre de livre, en général il se décide à la fin, et même pendant le débat parlementaire, les députés, les sénateurs, peuvent proposer des amendements pour modifier le titre, donc c'est un titre, pour la laïcité, pour renforcer les valeurs de la République, pour la neutralité des services publics, mais aussi contre les séparatismes, et nous déciderons collectivement du titre à la fin.

LAURENCE FERRARI
Alors, qu'est-ce qu'il y aura dedans ? Est-ce que, par exemple, l'apprentissage de l'arabe à l'école va faire partie de ce projet de loi ou pas ?

MARLENE SCHIAPPA
Alors, dans ce texte il y a plusieurs piliers, si vous me permettez l'expression, notamment un volet important sur la neutralité des services publics, je le dis parce que c'est vraiment une des mesures phares, c'est-à-dire que, à l'heure actuelle vous êtes contraint à la neutralité religieuse, si vous êtes fonctionnaire, mais quand il y a une délégation de service public, par exemple dans les transports, il y a une zone grise du droit, donc nous nous voulons combler toutes ces zones grises, et donc la neutralité elle sera étendue. Pour vous répondre sur le fond sur la question de l'apprentissage de la langue arabe…

LAURENCE FERRARI
Est-ce qu'il sera dans ce projet de loi ?

MARLENE SCHIAPPA
Alors, c'est quelque chose que défend Jean-Michel BLANQUER, effectivement, qui a été annoncé par le président de la République, mais pourquoi ? l'idée ce n'est pas qu'on s'est réveillé un matin en se disant « tiens, ce serait formidable de faire de l'arabe avec le russe, le portugais, etc. », l'idée c'est de se dire qu'à l'heure actuelle il y a beaucoup d'enfants qui apprennent l'arabe dans un contexte plus communautaire, et nous considérons qu'il est plus positif que l'Education nationale s'engage et propose l'apprentissage de cette magnifique langue. Vous savez, moi j'ai fait du russe, quand j'étais au lycée, j'ai fait de l'anglais, de l'allemand, du Russe, ce n'est pas parce que j'ai fait du russe que je suis devenue une dangereuse communiste, je crois qu'on peut étudier la langue arabe et les civilisations qui sont liées sans qu'il y ait…

LAURENCE FERRARI
Il y a déjà des collégiens et des lycéens, il y en a déjà, je crois, 15.000 qui étudient déjà l'arabe en deuxième ou troisième langue.

MARLENE SCHIAPPA
Exactement.

LAURENCE FERRARI
Là on parle de l'enseigner du CE1 jusqu'au collège, donc c'est un moment où l'apprentissage du français se fait, vous le savez parfaitement, vous avez des enfants. Comment faire, encore une fois, pour qu'ils sachent lire, écrire, compter, en sortant de cette école primaire ?

MARLENE SCHIAPPA
Alors, d'abord je veux être très claire, il s'agit d'une option, parce que dès lors qu'on parle de langue arabe c'est la machine à fantasmes et tout le monde commence à dire « on ne va plus enseigner le français, maintenant on va tous parler arabe, etc. », ce n'est pas du tout ça dont il s'agit, là on a un petit peu de xénophobie, pardon, derrière. Il y a des classes dans lesquelles on apprend l'anglais, l'italien, ma fille aînée a fait du chinois à l'école, tout s'est très bien passé, donc je crois qu'apprendre une nouvelle langue c'est toujours une richesse et c'est toujours une ouverture aux autres, et je rappelle que ce sera optionnel, bien évidemment.

LAURENCE FERRARI
L'ancien ministre de l'Education nationale, Luc FERRY, qui était à votre place hier matin, estime qu'il faut retirer cette disposition du texte, parce que cela favoriserait l'islamisation de la France.

MARLENE SCHIAPPA
Vous savez, je crois que Laurent WAUQUIEZ parle arabe, il a dit à plusieurs reprises qu'il parlait très bien arabe, je n'ai pas le sentiment que Laurent WAUQUIEZ soit un dangereux séparatiste, donc je crois que là on confond un peu tout, nous nous voulons lutter vraiment très fermement contre l'islamisme qui représente un danger et qui mène à la violence et aux actions violentes contre la République, mais nous voulons aussi que chacun puisse apprendre de nouvelles langues, et je rappelle encore une fois que dans les options il y a un panel très large, on apprend le portugais en option aussi, on apprend l'italien, on fait du latin, du grec, c'est toujours une richesse, je le répète, qui d'apprendre…

LAURENCE FERRARI
Qui sont des filières d'excellence, comme le chinois ou le russe.

MARLENE SCHIAPPA
Exactement.

LAURENCE FERRARI
Sur la fin de l'école à la maison, l'obligation d'être scolarisé à 3 ans, vous y êtes favorable, est-ce que vous pensez sérieusement que tous les enfants qui aujourd'hui sont très heureux d'être à la maison et d'avoir à la chance d'être enseignés par leur père ou leur mère, vont reprendre le chemin des écoles de la République, vous ne pensez pas qu'il va y avoir création d'autres écoles confessionnelles, toutes confessions confondues d'ailleurs ?

MARLENE SCHIAPPA
Alors, moi j'y suis très favorable, pourquoi ? parce que je pense que c'est une mesure qui nous permettra justement de faire en sorte de rétablir une forme d'égalité, la pire inégalité de destin c'est quand vous avez un enfant qui a la chance d'aller à l'école, de recevoir un enseignement, des options de langues par exemple, que les parents ne parlent pas toujours, des maths, de rencontrer d'autres enfants, d'être confrontés à l'altérité et de se construire en tant que citoyen en dehors de l'école. Catherine KINTZLER, la philosophe, dit que l'école c'est un espace de respiration républicaine, parce qu'on est aussi en dehors de sa famille, moi j'y suis très favorable. Maintenant j'entends aussi les parents qui pour, telle ou telle raison, par exemple un enfant qui a été victime de harcèlement scolaire très grave, ou des parents qui sont dans une situation de déplacement géographique permanent, j'entends les demandes de ces parents, Jean-Michel BLANQUER va mener des consultations à cet égard…

LAURENCE FERRARI
Il y aura des dérogations donc !

MARLENE SCHIAPPA
Il y aura un débat. L'idée c'est que la seule dérogation ce soit le motif de santé, maintenant il y a des consultations, un débat, et nous verrons sur quoi nous aboutirons.

LAURENCE FERRARI
La question du voile pour les accompagnants scolaires, elle est évidemment importante, le président ne souhaite pas l'interdire, pour les mamans voilées qui accompagnent les enfants, est-ce que vous êtes sur la même ligne, et est-ce qu'au fond il n'y a pas beaucoup d'hypocrisie là-dessus, parce que ça arrange tout le monde que ces mamans voilées soit là pour ces sorties scolaires, car bien souvent ce sont les seules, puisqu'elles ne travaillent pas et qu'elles sont à la maison, qui accompagnent les enfants ?

MARLENE SCHIAPPA
Mais complètement, et là encore je pense que les gens parfois attendent qu'on soit caricatural, c'est-à-dire, moi je défends à la fois très fermement la lutte contre l'islamisme, je défends très fermement la laïcité, les grands principes de la loi de 1905, mais dans le même temps je ne crois pas que la maman qui a en foulard, qui est en France depuis 30 ans, représente une menace pour la République parce qu'elle a amené une tarte aux pommes à la kermesse, et moi j'ai été élue dans des quartiers, notamment dans des écoles, où, effectivement, toutes les mères qui étaient autour de la table, à la réunion, portaient en foulard, un voile, un boubou, donc je ne crois pas qu'il faille effectivement les interdire.

LAURENCE FERRARI
Et dans ces cas-là les mères qui travaillent sont très heureuses de trouver les mamans qui accompagnent leurs enfants dans les sorties scolaires.

MARLENE SCHIAPPA
Moi je crois que l'école c'est aussi le moment où tout le monde se mélange, et les parents, quel que soit l'endroit d'où ils viennent, dans le respect évidemment des règles et de la loi.

LAURENCE FERRARI
La lutte contre la polygamie, elle fera partie du projet de loi.

MARLENE SCHIAPPA
Absolument.

LAURENCE FERRARI
Elle est déjà interdite, vous le savez, l'article 147 du Code civil. Vous dites on va retirer ou ne pas donner le titre de séjour à ceux qui sont polygames et qui arrivent de l'étranger, c'est déjà dans une ordonnance de 1945, précisé dans la loi Pasqua de 93, comment est-ce que vous allez faire concrètement, parce que personne n'arrive en disant « je suis polygame, donnez-moi un titre de séjour » ?

MARLENE SCHIAPPA
Absolument, vous avez tout à fait raison. Eh bien là, en fait, on est exactement dans la zone grise du droit, c'est ce que je disais tout à l'heure, la différence entre le droit réel, le droit formel pardon, et le droit réel. En théorie, en France, la polygamie est interdite, est-ce que ça veut dire que personne ne vient en situation de polygamie en France ? Non. Pourquoi ? parce qu'il y a des gens qui, dans des pays où la polygamie est autorisée, se marient plusieurs fois, prennent une, deux, trois, quatre, cinq, je ne sais pas combien d'épouses, et arrivent en France dans cette situation de polygamie avec des mariages contractés à l'étranger, et en général c'est révélé par les contrôles de la CAF, qui s'aperçoivent qu'il y a plusieurs familles déclarées avec une même personne, et donc ils voient qu'il y a plusieurs mariages qui ont été contractés à l'étranger. Et donc, effectivement, nous ne délivrerons plus, après cette loi, de titre de séjour à des personnes en situation de polygamie, jusqu'à ce qu'elles se mettent évidemment en conformité, et si quelqu'un a eu un titre de séjour et que par un contrôle il est révélé qu'il y a une polygamie, le titre sera retiré. Si vous permettez une phrase de précision, parce que j'ai vu les réseaux sociaux, beaucoup s'exciter autour de ce sujet en disant « quoi, vous allez interdire les troupes, le polyamour, l'infidélité », tout va bien, ce qu'on interdit, l'interdiction qu'on renforce, c'est la polygamie, c'est le fait d'être marié et donc de contracter un mariage de droit avec plusieurs personnes, ce qui est déjà interdit par la loi, mais on renforce cette interdiction pour tout le monde, il ne s'agit pas d'aller légiférer la vie privée et les infidélités des uns et des autres. Je ne sais pas si… mais en tout cas c'est le cas.

LAURENCE FERRARI
Mais en même temps comment prouver que quelqu'un n'est plus polygame, parce que vous dites on va retirer le titre de séjour jusqu'à ce que la personne se mette en conformité, d'abord, un, ça veut dire que la personne restera sur le sol français, et deux, ça veut dire qu'on va faire quoi, on va faire toc-toc, « est-ce que vous êtes encore polygame ? », "ah ben non, évidemment !"

MARLENE SCHIAPPA
Non, ce n'est pas ce qu'on va faire et ce n'est pas ce qui se passe d'ailleurs à l'heure actuelle dans les contrôles, ce qui se passe c'est qu'en fait le titre de séjour ne sera pas accordé, et je dis jusqu'à ce que la personne se mette en conformité parce qu'il peut y avoir une demande, la personne en situation de polygamie, on n'accorde pas le titre de séjour, et puis si quelques années après la personne s'intègre, adopte les valeurs de la République française et décide de mettre fin à cette situation de polygamie, et présente une demande avec un mariage qui correspond au droit français, eh bien là la demande pourra être étudiée.

LAURENCE FERRARI
Ça sera quand même très compliqué à prouver.

MARLENE SCHIAPPA
Ça sera compliqué, mais si c'était simple je serais à la plage en ce moment, je ne serais pas là en train de d'expliquer les choses et ensuite dans des réunions pour préparer cette loi, ce n'est pas parce que c'est compliqué qu'on doit renoncer.

LAURENCE FERRARI
L'IVG, la proposition de loi va démarrer aujourd'hui à l'Assemblée nationale pour allonger le délai d'accès à l'IVG de 2 semaines, passer de 12 à 14 semaines, ça indigne un certain nombre de gynécologues, obstétriciens, le professeur Israël NISAND qui dit que le délai c'est juste pour compenser les carences dans l'accueil des jeunes femmes qui souhaitent avorter, les délais sont trop longs, c'est pour ça que ça en pousse certaines à aller à l'étranger. Vous êtes favorable à cet allongement de 12 à 14 semaines ou pas ?

MARLENE SCHIAPPA
Moi je suis assez d'accord avec l'analyse d'Israël NISAND, une fois n'est pas coutume, et c'est ce que j'ai toujours dit au demeurant. Je comprends qu'on veuille entendre les femmes qui nous disent « je suis dans une détresse absolue et je dois aller à avoir recours à l'IVG à l'étranger et je veux pouvoir avoir recours à l'IVG en France, dans mon pays, et bénéficier de tout ce qui existe dans mon pays », je comprends, et c'est normal que les députés aient voulu entendre la détresse de ces femmes. Maintenant je pense qu'on répond peut-être un tout petit peu à côté. Moi, comme vous le savez, j'ai été élue en Sarthe, je suis originaire de Corse, je suis maintenant parisienne, et je vois très bien que sur l'ensemble du territoire français le maillage territorial pour avoir un accès à l'IVG n'est pas le même, il y a des inégalités de territoires terribles. Et pourquoi on en arrive à des situations où des femmes sont à 14 semaines de grossesse et veulent avoir accès à l'IVG ? ce n'est pas parce qu'elles ont attendu 14 semaines, dans l'immense majorité des cas c'est parce que, quand elles se sont aperçus qu'elles étaient enceintes et qu'elles ont voulu avoir accès à l'IVG, elles n'ont pas trouvé de rendez-vous immédiats, donc à mon humble avis l'urgence c'est vraiment d'avoir un maillage territorial efficace et de rendre de nouveau attractif la profession de gynécologue, parce qu'on a aussi une pénurie de gynécologues, et notamment gynécologue qui veuillent pratiquer ces IVG.

LAURENCE FERRARI
Ça, ça prend 10 ans évidemment, la formation de nouveaux gynécologues. "On ne peut pas se définir comme progressiste, avoir porté le sujet de l'égalité femmes-hommes pendant 3 ans et ne pas voter un texte comme celui-ci" dit Aurore BERGE. Qu'est-ce que vous le dites ?

MARLENE SCHIAPPA
Je connais l'engagement féministe d'Aurore BERGE, et elle est parlementaire, donc elle a une liberté de vote, moi je ne dis pas aux gens "ne votez pas ce texte", ce n'est pas ça que je dis, ce que je dis c'est que, de ce que j'ai pu observer, parfois, les réponses sont un tout petit peu compliquées, plus compliquée que oui, non…

LAURENCE FERRARI
Et ça crée beaucoup de tensions dans la majorité, on l'a vu aussi il y a quelques jours avec le vote sur les néonicotinoïdes. La majorité elle existe toujours ou c'est une majorité fantôme ?

MARLENE SCHIAPPA
Il y a des débats. Vous savez, il y a 2 ans, quand tout le monde votait comme un seul homme on nous disait "vous avez une majorité godillot"…

LAURENCE FERRARI
Comme un seul homme ?…

MARLENE SCHIAPPA
C'est une expression, comme un seul être humain ; tout le monde nous disait " ah, c'est une majorité godillot, personne ne pense, etc.", et maintenant qu'il y a des petites nuances qui s'expriment on dit "ah, vous n'êtes pas d'accord, etc."

LAURENCE FERRARI
Des petites nuances, vous êtes gentille, c'est un peu plus que ça, mais bon !

MARLENE SCHIAPPA
Oui, mais, en général, finalement il y a un vote qui se produit, et je trouve aussi normal qu'il y ait des débats sur des sujets importants comme les néonicotinoïdes, qui sont difficiles, tout le monde n'est pas expert de la question des néonicotinoïdes, donc je trouve ça intéressant qu'il y ait aussi des débats et que sensibilités s'expriment, ça ne me choque pas.

LAURENCE FERRARI
Vous publiez ce livre, « Entre toutes les femmes, 11 rencontres exceptionnelles » chez Grasset, c'est des rencontres avec des femmes exceptionnelles qui ont subi des traumatismes et qui ont surmonté ça, qui ont fait preuve de résilience, et est-ce que… ce n'est pas, au fond, je me suis demandé pourquoi vous aviez quitté le ministère de l'Egalité femmes-hommes qui était le combat de votre vie, pour aller sur celui de la citoyenneté, est-ce que c'est parce que, toutes ces histoires, vous le dites dans ce livre, « à la vérité je n'ai plus de place dans mon disque dur intérieur pour enregistrer toutes les histoires de violences sexuelles qu'on me confie par centaines tous les jours, ça déborde, je ne peux plus en être dépositaire », c'est pour ça que vous avez quitté ce ministère ?

MARLENE SCHIAPPA
Non, ce n'est pas directement lié, mais vous voyez, on y revient toujours, c'est le combat de ma vie, et donc même au ministère de l'Intérieur je travaille avec les forces de l'ordre pour mieux les former, mieux les accompagner dans la prise en charge des femmes victimes de violences conjugales, on travaille sur les questions de certificats de virginité, de polygamie, donc la protection des femmes je ne la quitterai jamais, mais le président de la République a souhaité me confier d'autres responsabilités dans un ministère régalien, celui de l'Intérieur, mais vous voyez, j'y reviens toujours, parce qu'à chaque fois que je rencontre une femme qui a une vie exceptionnelle, je me dis mais cette femme mérite d'être mise en lumière et qu'on puisse raconter son histoire, et donc c'est pour ça que j'ai voulu leur tendre le micro et rediriger un peu la lumière vers elles.

LAURENCE FERRARI
Oui, et puis il y a vraiment, dans ces histoires, celles de Valérie, de toutes les autres, beaucoup de leçons à tirer pour toutes les femmes. Un dernier mot d'une femme exceptionnelle, prix Nobel de chimie, deux femmes, c'est incroyable, dont une Française, Emmanuelle CHARPENTIER, malheureusement elle ne travaille pas en France, elle ne cherche pas en France, elle cherche en Allemagne et en Suède car le gouvernement, elle fustige le gouvernement français, n'aide pas les chercheurs. C'est complètement aberrant.

MARLENE SCHIAPPA
D'abord moi je veux commencer par la féliciter, voilà, on a eu Marie CURIE, Irène JOLIOT-CURIE, maintenant une nouvelle prix Nobel de la paix française, je crois que c'est très positif, et d'abord on doit s'en réjouir collectivement. Et puis c'est aussi un peu la victoire de l'Europe, parce qu'il me semble, si je ne dis pas de bêtises, qu'elle cherche en Suède, et que donc il y a une mobilisation européenne sur la recherche. Mais vous savez, le président de la République est déterminé à faire en sorte d'attirer les chercheurs, il avait lancé une initiative d'ailleurs il y a 1,5 an ou 2 ans pour dire que la France était aussi un endroit où les chercheurs, les chercheuses singulièrement, étaient plus que les bienvenus.

LAURENCE FERRARI
Mais il faudra le prouver avec des actes.

MARLENE SCHIAPPA
Oui, absolument.

LAURENCE FERRARI
Merci Marlène SCHIAPPA.

MARLENE SCHIAPPA
Merci.

LAURENCE FERRARI
« Entre toutes les femmes, 11 rencontres exceptionnelles », chez Grasset, merci d'être venue sur Cnews.

MARLENE SCHIAPPA
Merci beaucoup.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 12 octobre 2020