Déclaration de M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation, sur les néonicotinoïdes, à l'Assemblée nationale le 5 octobre 2020.

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Circonstance : Discussion à l'Assemblée nationale, après engagement de la procédure accélérée, d'un projet de loi

Texte intégral

M. le président. L'ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire pour les betteraves sucrières (nos 3298, 3358).
Présentation

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Nous partageons tous un engagement résolu en faveur de la transition agroécologique et l'objectif d'une agriculture moins dépendante aux pesticides. Toutefois, nous sommes aujourd'hui face à une impasse, une situation exceptionnelle à laquelle nous devons apporter une réponse et qui concerne la filière betterave, filière d'excellence française qui représente 46 000 emplois.

Je le dis clairement, il ne s'agit aucunement d'opposer économie à écologie. La question n'est pas là. La question est celle de notre souveraineté : souhaitons-nous faire la transition agroécologique avec une filière de la betterave sucrière française ou acceptons-nous sa disparition ? Là est le sujet.

Car oui, la filière de la betterave est aujourd'hui en danger. La faute en revient à ce puceron dont nous ne connaissons encore que peu de choses. Les premières récoltes confirment la crainte que nous avions, avec des parcelles lourdement touchées. Ces pucerons, dont l'hiver doux a favorisé la démultiplication, transmettent un virus qui bloque le métabolisme de la plante, sa photosynthèse, et de ce fait la création de sucres dans son bulbe racinaire.

Or, contrairement à ce que certains affirment, il n'existe pas à ce jour d'alternative d'échelle, qu'elle soit économique, chimique ou agronomique. Par ailleurs, toutes les cultures peuvent être touchées, même les cultures bio. Que feriez-vous donc si vous étiez agriculteur betteravier ? Vous avez deux possibilités : continuer à planter de la betterave, avec le risque de subir de lourdes pertes, de ne pas réussir à soigner vos plantes, de perdre de l'argent, ou bien planter des céréales. Évidemment, vous planteriez des céréales. Et là, en l'espace d'un an, ce sont les sucreries qui fermeraient faute d'intrants.

Toutes celles et tous ceux d'entre vous qui viennent de territoires où existent des sucreries connaissent l'équilibre fragile de ces outils industriels, équilibre encore plus fragilisé depuis la fin des quotas votée en 2013. Or, si les sucreries ferment, c'est tout simplement la fin d'une filière d'excellence. Donc, non, il ne s'agit pas d'opposer économie à écologie : il s'agit d'une question de souveraineté.

Oui, nous sommes tous ici favorables à l'arrêt des néonicotinoïdes. Oui, nous sommes tous ici favorables à la transition agroécologique. Personne ici n'a le monopole de l'agroécologie. D'ailleurs, les premiers à la souhaiter sont les agriculteurs eux-mêmes. Mais cette transition agroécologique, je le dis clairement, ne peut consister à tuer une filière française pour importer ensuite du sucre de Pologne, d'Allemagne ou de Belgique, tous pays moins-disants que nous sur le plan environnemental. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Charles de Courson applaudit aussi.) Non, cela ne peut pas être ainsi ! Ce texte n'est donc en rien un renoncement.

D'abord, il montre bien qu'aujourd'hui, 92 % des usages des néonicotinoïdes ont trouvé des substitutions grâce à la loi de 2016 défendue par ma collègue Barbara Pompili, que je salue.

Par ailleurs, ce texte manifeste à la fois l'humilité de reconnaître quand nous sommes dans une impasse et le courage d'affronter le temps. Affronter le temps, c'est peut-être ce qu'il y a de plus dur en politique. C'est ce à quoi nous sommes tous confrontés. Jamais je ne jetterai la pierre à celles et ceux qui souhaitent aller le plus vite possible : cette impatience, je la partage, et je suis sûr qu'elle est partagée sur tous les bancs de cette assemblée, quelles que soient nos opinions politiques.

M. Maxime Minot. Exactement !

M. Julien Denormandie, ministre. Mais ce qu'il y a de plus difficile dans la nature, c'est le temps. La recherche agronomique, ce ne sont pas juste des cellules que nous développons dans une boîte de Petri : ce sont des tests dans les champs, qui prennent du temps – et l'on dit d'ailleurs souvent que dans une vie d'agriculteur, on n'a qu'une cinquantaine de tests possibles. Voilà la réalité agricole.

Ce texte, enfin, c'est le choix de faire la transition agroécologique avec la filière française, et non à son détriment. Car les autres États membres, eux, peuvent apporter une réponse à leurs betteraviers. Le règlement européen sur la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques permet, par dérogation, d'utiliser des produits non autorisés « lorsqu'une telle mesure s'impose en raison d'un danger qui ne peut être maîtrisé par d'autres moyens raisonnables ». C'est ce qu'utilisent aujourd'hui onze pays européens sur quatorze, et c'est cette dérogation que le projet de loi vous propose de mettre en place.

Comme vous le voyez, celui-ci est très clair : il donne la possibilité d'utiliser une dérogation dès lors qu'aucune alternative crédible n'existe. Permettez-moi de m'y arrêter quelques instants. Non, il n'existe pas aujourd'hui d'alternative crédible. Tout d'abord, les produits chimiques qui ont été utilisés au cours de l'hiver 2019-2020 ont également des impacts environnementaux et se sont révélés inefficaces. Ensuite, les méthodes agronomiques – la modification des écosystèmes pour favoriser les auxiliaires, l'évolution du parcellaire et des itinéraires techniques – nécessitent du temps pour être mises au point et déployées. Malgré les efforts de recherche déjà consentis, il est clair que cela prendra encore du temps. Car, qu'on le veuille ou non, dans la nature, faire pousser une haie, cela prend du temps. Dans le plan de relance, nous consacrerons d'ailleurs plus de 50 millions d'euros à favoriser la plantation de haies.

Quant à la mise sous perfusion économique de la filière envisagée par certains, elle n'est pas non plus possible au regard de l'encadrement européen. Je le dis clairement, indemniser à 100 % la filière pour la mettre sous perfusion n'est pas possible ; les règles européennes sont très claires sur ce point.

M. Sébastien Jumel. Changez l'Europe !

M. Julien Denormandie, ministre. Vous pensez bien que si une alternative était sur la table, non seulement je ne serais pas là devant vous cet après-midi, mais je ne vous proposerais pas non plus de voter un texte de loi fondé sur l'article 53 du règlement européen qui, je le répète, n'autorise cette dérogation que « lorsqu'une telle mesure s'impose en raison d'un danger qui ne peut être maîtrisé par d'autres moyens raisonnables ». Cela n'aurait aucun sens.

M. Maxime Minot. Exactement !

M. Julien Denormandie, ministre. Plus précisément, ce projet de loi vise à réintroduire, comme c'est le cas pour tous les États membres et jusqu'en 2023 au maximum, la possibilité de recourir à cet article 53 du règlement européen et de solliciter des dérogations si la situation le nécessite. Ces dérogations pourront être accordées par arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et du ministre de la transition écologique.

Ce texte s'inscrit aussi dans un plan plus global. D'abord, il faut s'assurer que nous pourrons sortir de l'impasse actuelle à l'horizon 2023. Pour cela, nous consacrerons 7 millions d'euros supplémentaires, mobilisés au travers d'un programme de recherche, public et privé, à accélérer l'identification d'alternatives véritablement efficaces…

M. Ugo Bernalicis. Qu'avez-vous donc fait depuis tout ce temps ?

M. Julien Denormandie, ministre. …et leur déploiement en conditions réelles. Cela passera par une combinaison de plusieurs avancées concernant la recherche variétale, le biocontrôle, mais aussi les pratiques agronomiques. Nous maintiendrons la pression sur les acteurs pour nous assurer que des solutions viables soient disponibles le plus rapidement possible.

Ensuite, il faut limiter au maximum l'impact environnemental, notamment sur les insectes pollinisateurs. Notre position est claire, les dérogations ne doivent être accordées que pour la betterave sucrière, qui répond à deux spécificités : elle n'entre pas en floraison et la production de betterave est fortement liée à la pérennité de l'outil industriel.

M. Maxime Minot. Eh oui !

M. Julien Denormandie, ministre. Des engagements sont également demandés à la filière : la mise en place d'un plan de prévention à l'échelle des exploitations, la restriction de l'implantation de cultures attractives pour les abeilles après culture de la betterave, mais aussi la mise en place d'un plan « pollinisation » d'ici la fin de l'année avec comme objectif, notamment, la question de leur alimentation entre le mois de mars et l'été, car nous savons qu'il y a là un sujet important.

Ces engagements ont été officialisés le 22 septembre dernier. L'INRAE – Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement – et l'ITB – Institut technique de la betterave – m'ont présenté leur plan de recherche d'alternatives opérationnelles contre la jaunisse de la betterave sucrière, et la filière betterave-sucre son plan d'action pour limiter les impacts.

Ce projet de loi a été enrichi lors des nombreux échanges que nous avons eus en commission du développement durable, dont je salue l'ancienne et la nouvelle présidente, et en commission des affaires économiques, dont je salue le président. Je tenais à remercier chacun d'entre vous pour la qualité des travaux que nous avons menés ensemble et pour les avancées qu'ils ont permises.

Vos rapporteurs, ainsi que certains d'entre vous, ont pu procéder à de nombreuses auditions. Les débats ont été nombreux et intenses en commission, mais surtout de très bon niveau ; ils ont été conduits dans l'écoute, le respect et la transparence.

Trois avancées majeures ont pu être réalisées, de manière constructive, tout en respectant ce qui relève du domaine de la loi et ce qui doit rester du domaine réglementaire, afin que le dispositif demeure opérant.

Ces avancées sont pour moi nécessaires, et je sais que nous aurons à nouveau des échanges à ce sujet. La première consiste en la création d'un conseil de surveillance incluant les parlementaires…

M. Sylvain Maillard. Très bien !

M. Julien Denormandie, ministre. …qui veillera à ce que le plan global soit mis en oeuvre et à ce que 100 % des usages des néonicotinoïdes trouvent des alternatives d'ici à 2023.

Mme Mathilde Panot. Comme celui sur le glyphosate ! Beau succès !

M. Julien Denormandie, ministre. La deuxième concerne l'interdiction de semer des cultures attractives de pollinisateurs après l'usage de substances néonicotinoïdes, afin de réduire l'exposition des insectes, et la troisième l'inscription du terme « betteraves sucrières » non seulement dans le titre du projet de loi, mais aussi dans le corps de la loi, avec les interrogations juridiques que cela emporte et dont nous avons déjà beaucoup parlé.

Mme Mathilde Panot. Ce sera donc autorisé pour toutes les cultures !

M. Julien Denormandie, ministre. Mesdames et messieurs les députés, j'aborde ce débat avec la conviction que les échanges constructifs que nous avons eus en commission pourront se poursuivre dans la même sérénité et la même volonté d'écoute dans cet hémicycle. C'est un texte difficile, un texte important, un texte qui ne veut pas opposer économie et écologie mais qui appelle à la souveraineté – la souveraineté d'une filière qui a besoin de vivre si nous souhaitons continuer à la transformer pour qu'elle puisse, dans la durée, être un fleuron de l'agriculture française. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem, ainsi que sur de nombreux bancs du groupe LR. – M. Charles de Courson applaudit également.)

(…)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre. Je veux, pour commencer, remercier de leurs propos Stéphane Travert, Bruno Millienne, Lise Magnier et Julien Dive.

M. Maxime Minot. Ah quand même ! C'est le meilleur !

M. Julien Denormandie, ministre. Je n'avais pas oublié M. Dive, monsieur Minot.

M. Roland Lescure, président de la commission des affaires économiques. Comment oublier Julien Dive ?

M. Julien Denormandie, ministre. Monsieur Millienne, je pense comme vous que le développement des haies, également évoqué par M. Benoit, est important. Conformément à l'engagement que j'ai pris dans le cadre du plan de relance, une enveloppe de 50 millions lui sera allouée.

Monsieur Dive, un plan ambitieux en faveur de la pollinisation est en effet nécessaire – d'autres l'ont également souligné. Il n'est nullement contradictoire avec le projet de loi, bien au contraire. Les deux sujets doivent être abordés de manière volontariste. M. Turquois l'a rappelé à juste titre : l'accès des abeilles à la nourriture est difficile au printemps. C'est ce problème que nous devons régler.

Monsieur Potier, nous nous connaissons bien et nous respectons nos positions respectives. J'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt du plan B que vous proposez et je vous remercie de ce travail. Je remercie également les députés de la majorité et ceux de l'opposition de leurs diverses propositions. Mais vous reconnaissez vous-même, monsieur le député, qu'il ne sera possible de se passer des néonicotinoïdes "qu'à terme". La question est là : de combien de temps avons-nous besoin ? Et quelle solution nous permettra d'éviter d'utiliser ces insecticides ?

Vous avez par ailleurs rappelé à juste titre, parce que vous connaissez bien le sujet, que les secteurs agricole et agroalimentaire sont en pleine mutation. Bien qu'entamée il y a longtemps, cette mutation est trop peu évoquée. Je vous remercie donc de l'avoir mentionnée.

Dans le plan B que vous proposez, les financements sont également abordés. Est-il possible d'accompagner financièrement la filière de la betterave – de la mettre sous perfusion, en quelque sorte – le temps de trouver une solution de remplacement aux néonicotinoïdes ? Je le répète, quelle que soit la source de financement, qu'il s'agisse d'une taxe ou d'une redevance, il n'est pas possible d'indemniser à 100% les agriculteurs betteraviers. Ces derniers peuvent être tentés, en conséquence, de se tourner vers une autre culture plus rentable. Là réside toute la difficulté. Pourquoi sommes-nous aujourd'hui au milieu du gué ? Parce qu'il n'est pas possible d'indemniser les producteurs de betteraves à 100%.

Monsieur Benoit, vous avez évoqué la durée d'application de la dérogation : faut-il qu'elle soit d'un, de deux ou de trois ans ?

Le projet de loi est fondé, je le répète, sur l'article 53 du règlement européen concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques. Cet article indique précisément que, dès lors qu'il existe une autre solution crédible, il n'est pas possible à un État membre d'utiliser la dérogation prévue. Il y a quelques années, la France avait d'ailleurs dénoncé au niveau européen son utilisation par la Lituanie et la Roumanie alors que les conditions nécessaires ne semblaient pas réunies.

Le projet de loi ne vise donc pas à fixer un délai maximal qui serait laissé à la profession : dès lors qu'une autre solution aura été trouvée, les ministres chargés de l'environnement et de l'agriculture – qu'il s'agisse de Barbara Pompili et moi-même ou de nos successeurs – n'auront plus la possibilité de recourir à la dérogation.

S'agissant de la pollinisation, que vous avez également abordée, j'ai déjà répondu.

Monsieur le président Chassaigne, j'examinerai très attentivement votre proposition de loi visant à assurer un régime public d'assurance et de gestion des risques en agriculture. C'est une question que je suis de près. Pour le reste, je serais bien incapable de faire les contorsions que vous m'invitez à éviter. Comme je l'ai dit en répondant à M. Potier, nous devons trouver, collectivement, une solution pour passer le gué.

Je sais que vous connaissez parfaitement le monde agricole, monsieur le président Chassaigne. La difficulté, j'y insiste, est que les betteraviers ne cultivent plus uniquement de la betterave, comme cela pouvait être le cas il y a vingt ans ; ils y consacrent 10 à 15% de leurs surfaces. Au moment où nous parlons, les agriculteurs planifient l'assolement. Les betteraviers ont le choix : ils peuvent cultiver soit de la betterave, soit autre chose, par exemple des céréales.

Mettez-vous à leur place. Premièrement, le rendement de la betterave peut, dans certaines parcelles, chuter de 50%, voire davantage – le rendement des premières récoltes est pire encore que les estimations ne le laissaient présager. Deuxièmement, l'incertitude est complète, car personne n'est en mesure de prédire l'évolution de la maladie : cette année, le virus est parti du Sud et s'est propagé vers le Nord ; l'année dernière, il a progressé d'Est en Ouest. Troisièmement, comme je l'ai indiqué à M. Potier, nous ne pouvons pas créer de système assurantiel indemnisant les agriculteurs à 100%, car la réglementation européenne nous en empêche. La règle "de minimis", en particulier, limite à 20 000 euros l'ensemble des aides accordées à un agriculteur sur trois exercices, ce qui n'est pas du tout à la hauteur des pertes subies.

Dans ces conditions, que faites-vous si vous êtes betteravier ? Vous plantez des céréales. Or, si les betteraviers plantent tous des céréales cette année, les sucreries fermeront l'année prochaine, et il ne sera plus possible ensuite de cultiver de la betterave.

M. Maxime Minot. Exactement ! Le raisonnement est pertinent !

M. Julien Denormandie, ministre. Vous connaissez cette phrase de Richelieu, monsieur le président Chassaigne : « La politique consiste à rendre possible ce qui est nécessaire. »

M. Sylvain Maillard. Excellent mot du cardinal !

M. Julien Denormandie, ministre. La sortie des néonicotinoïdes est effectivement nécessaire ; l'enjeu est de la rendre possible. J'aurais évidemment préféré ne pas avoir à intervenir devant vous cet après-midi.

M. Roland Lescure, président de la commission des affaires économiques. À ce sujet !

M. Julien Denormandie, ministre. Oui, à ce sujet, bien sûr. La transition écologique est nécessaire, mais de quelle manière voulons-nous la rendre possible ? En permettant à la filière de passer le gué, pour qu'elle continue à vivre, ou bien en nous contenant de proférer des incantations et d'invoquer le caractère nécessaire de la transition ? Le courage, aujourd'hui, consiste à rendre cette transition possible. Il faut notamment mettre la pression en matière de recherche et développement. C'est pourquoi le Gouvernement y consacrera 7 millions d'euros et sera représenté, de même que les assemblées, au sein du système de gouvernance prévu.

Madame la ministre Batho, vous avez parlé d'"empoisonnement des terres de France". Or vous n'avez jamais rappelé le référentiel. Vous n'avez jamais évoqué l'utilisation récurrente aujourd'hui de certains produits au-dessus des nappes phréatiques.

Mme Mathilde Panot. Vous n'avez aucun argument, monsieur le ministre !

M. Julien Denormandie, ministre. Quant à l'empoisonnement des terres de Pologne, vous n'en avez rien à faire.

M. Sylvain Maillard. Eh oui !

M. Julien Denormandie, ministre. Demain, nous allons continuer à importer des productions qui se soldent par l'empoisonnement de terres européennes ; ce sera l'écologie du chacun pour soi. Telle n'est pas la conception de l'écologie que j'ai enracinée en moi. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Charles de Courson et Mme Lise Magnier applaudissent également. – Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

Par ailleurs, lorsque vous affirmez à la tribune que le Gouvernement trompe les députés en prétendant que la dérogation sera circonscrite à la betterave, vous jetez la suspicion – car il s'agit bien de cela, vous en rendez-vous compte ? – sur un ministre de la République, alors que vous avez été vous-même ministre de la République. C'est une honte, je vous le dis comme je le pense. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Charles de Courson et Mme Lise Magnier applaudissent également. – Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

Mme Mathilde Panot. C'est plus bas que terre, monsieur le ministre !

M. Julien Denormandie, ministre. Enfin, vous avez appelé les députés de la majorité présidentielle à voter en conscience. Mais où donc était votre conscience, madame la ministre, lorsque le gouvernement dont vous étiez membre a approuvé, au Conseil "agriculture et pêche" de juin 2013, la réforme de la PAC qui a mis fin aux quotas ? Cessez d'en appeler à la conscience des autres ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR.)

Mme Mathilde Panot. Votre argumentation est faible, monsieur le ministre !

M. Bruno Millienne. Oh, ça va, madame Panot !

M. Julien Denormandie, ministre. Monsieur Falorni, il ne s'agit pas d'un renoncement, et nous n'opposons pas l'économie à l'écologie ; c'est notre souveraineté qui est en jeu. Je veux réaliser la transition écologique. C'est précisément dans cet objectif que je me suis engagé dans la filière agricole, il y a vingt-cinq ans. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.) Cependant, pour réaliser une transition, encore faut-il qu'il y ait une filière ! Sans filière, on ne peut pas faire de transition, si ce n'est avec soi-même, ce qui revient à tourner en rond. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM, sur plusieurs bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe LR.)


source http://www.assemblee-nationale.fr, le 14 octobre 2020