Texte intégral
SONIA MABROUK
Bienvenue à vous et bonjour Gabriel ATTAL.
GABRIEL ATTAL
Bonjour.
SONIA MABROUK
Est-ce que vous reconnaissez que votre politique des tests est défaillante, à l'heure actuelle ?
GABRIEL ATTAL
Oui, et c'est pour ça qu'Olivier VERAN a fait des annonces hier. Qu'est-ce qui s'est passé ? on a suivi les recommandations de l'OMS, qui appelle à tester, tester, tester, donc on a très fortement développé les capacités de tests en France, et la France est aujourd'hui un des pays, au monde, qui teste le plus quand on rapporte au niveau, au nombre d'habitants, on teste plus qu'en Allemagne, on teste plus qu'en Espagne, on teste plus qu'en Italie, je crois que c'est 1,2 million de tests par semaine qui sont maintenant réalisés. Et comme on teste beaucoup, et qu'il y a beaucoup de Français, qui du coup viennent se faire tester, il y a de l'embouteillage dans un certain nombre de villes. Ce n'est pas le cas partout, mais notamment dans les métropoles, vous avez des gens qui doivent attendre plusieurs jours pour avoir un rendez-vous pour se faire tester, et ensuite plusieurs jours pour avoir le résultat, et donc, non seulement pour les gens c'est très désagréable, mais en plus, en termes d'efficacité, l'intérêt de tester massivement c'est de pouvoir dire très vite aux gens s'ils sont contaminés ou pas. Et donc, pourquoi Olivier VERAN s'est exprimé hier ? pour annoncer qu'on allait être plus efficace, d'abord en fixant des vrais critères de priorisation et des vraies plages horaires dans les laboratoires, de priorisation…
SONIA MABROUK
Oui, mais sans obligation, par exemple, d'avoir une ordonnance pour se faire tester, donc les files d'attente, Gabriel ATTAL, vont continuer à s'allonger et le système à "s'emboliser."
GABRIEL ATTAL
On continue à tester largement et, par exemple, effectivement on n'a pas retenu le fait de dire il faut une prescription médicale pour tout le monde pour se faire tester, parce qu'on sait que, avoir un rendez-vous chez le médecin on ne l'a pas forcément tout de suite, et encore une fois notre intérêt c'est que les gens se fassent tester vite. En revanche, ce qu'a annoncé hier Olivier VERAN c'est une deuxième file, une double file, pour les gens qui ont une ordonnance…
SONIA MABROUK
Ça c'est un gage d'efficacité une double file, vraiment ?
GABRIEL ATTAL
Oui, c'est un gage d'efficacité, parce que des gens qui ont une prescription médicale, des gens qui sont contacts de personnes positives, des gens qui sont des personnels soignants et qui donc sont au contact de beaucoup de Français et de malades, ils doivent pouvoir être testés avant les autres, et donc, créneaux réservés pour se faire tester, on va mettre en place des barnums de tests qui leur seront réservés aussi, il y en a 20 en Ile-de-France qui vont être installés à partir de la semaine prochaine, il y en aura d'autres en France, et donc oui on assume de dire qu'il y a des personnes qui sont prioritaires, qui doivent pouvoir se faire tester tout de suite, et ça va aussi de désengorger pour le reste. Par ailleurs…
SONIA MABROUK
Et vous assumez de dire que, c'était ma première question, qu'à l'heure actuelle la politique de tests est défaillante ?
GABRIEL ATTAL
Ce que je dis c'est qu'on n'est pas parfaitement efficace sur les tests, il faut l'assumer…
SONIA MABROUK
C'est un euphémisme.
GABRIEL ATTAL
Mais moi je ne suis pas là pour vous dire "tout va très bien Madame la marquise" quand ce n'est pas le cas, le fait est qu'aujourd'hui on voit qu'il y a des files d'attente, qu'il y a des gens qui n'arrivent pas à se faire tester. Et donc, la première chose que je vous ai dit c'est, la priorisation, la deuxième chose c'est qu'il y a une nouvelle génération de tests, qui va arriver au mois d'octobre, les tests antigéniques. Qu'est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire que c'est la même manière de tester qu'on le fait aujourd'hui, c'est-à-dire l'écouvillon nasal qui n'est pas très agréable, voilà, mais par contre le résultat est obtenu en moins de 30 minutes parce qu'il est testé sur place.
SONIA MABROUK
Et il faut espérer qu'on en ait suffisamment. Mais, le président de la République a eu raison de mettre la pression ainsi, notamment sur le ministre de la Santé ?
GABRIEL ATTAL
Le président il a demandé qu'on soit plus efficace, voilà, c'est une demande qui est collective…
SONIA MABROUK
Il a demandé, je suppose, individuellement au ministre de la Santé en charge de cette situation.
GABRIEL ATTAL
C'est une demande à tout le gouvernement. Vous savez, aujourd'hui, tout le gouvernement est mobilisé sur cette question…
SONIA MABROUK
Il ne l'était pas suffisamment alors !
GABRIEL ATTAL
A l'évidence non, à l'évidence non, mais il faut le reconnaître. Vous savez, moi, encore une fois, je ne suis pas là pour me cacher les yeux et me dire que tout va bien, voilà. C'est une épidémie, encore une fois, qui est historique, c'est une maladie qui est nouvelle, dont on découvre des choses chaque jour, j'ajoute quand même qu'un certain nombre de difficultés qu'on rencontre, nos voisins et les autres pays les rencontrent aussi, quand on parle des embouteillages devant les tests, regardez la presse en Grande-Bretagne, je crois, dans d'autres pays, les Unes c'est, les embouteillages pour se faire tester, parfois il faut faire des dizaines, des centaines de kilomètres pour se faire tester, voilà, c'est un enjeu qui vient percuter tous les grands pays, et donc il faut y répondre.
SONIA MABROUK
Y répondre avec clarté et lisibilité. Pouvez-vous nous expliquer, Gabriel ATTAL, vous dites la situation est inquiétante, mais en même temps on va assouplir le protocole sanitaire à l'école.
GABRIEL ATTAL
Ce qu'a dit Olivier VERAN, hier, c'est qu'on a reçu un avis de la Haute autorité de santé, qui fait la synthèse des recherches médicales, qui dit quoi ? qui dit que les enfants font peu de formes graves, c'est très rare, et surtout qu'ils transmettent peu le virus, c'est les scientifiques qui le disent, c'est-à-dire qu'il y a peu de contaminations, d'un enfant vers un autre, ou d'un enfant vers un adulte, il peut y avoir des contaminations…
SONIA MABROUK
Les scientifiques varient, vous le savez, tout comme les politiques d'ailleurs.
GABRIEL ATTAL
Mais justement, c'est parce que, là, la Haute autorité elle rend un avis parce que, on commence à avoir une doctrine scientifique suffisamment nourrie pour pouvoir rendre cet avis, nous on se fie à ce qui est…
SONIA MABROUK
Vous ne prenez pas de risque, parce que j'imagine des parents d'élèves qui nous écoutent ce matin, qui se disent "ça va changer, alors qu'on nous dit que la situation est inquiétante et que le virus est tout aussi dangereux que…"
GABRIEL ATTAL
Moi j'entends parfaitement les doutes et les inquiétudes, je les comprends, quand on a des enfants on veut être sûr qu'ils sont parfaitement en sécurité. On a mis en place un protocole sanitaire, avec les données scientifiques, dont on disposait, qui était très protecteur, et ce que Jean-Michel BLANQUER va annoncer c'est un nouveau protocole sanitaire, qui sera tout aussi protecteur…
SONIA MABROUK
Quand va-t-il l'annoncer, comme ça, ça sera plus efficace ?
GABRIEL ATTAL
Dans les prochains jours…
SONIA MABROUK
En début de semaine ?
GABRIEL ATTAL
Au début de semaine prochaine.
SONIA MABROUK
Comme ça les enseignants, évidemment, les personnels de l'Education, auront ce nouveau protocole sanitaire.
GABRIEL ATTAL
Bien sûr, les parents d'élèves, pour que tout le monde puisse se fonder là-dessus.
SONIA MABROUK
Sur le plan social à présent, Gabriel ATTAL. Une réunion doit se tenir ce lundi sur BRIDGESTONE Béthune, entre gouvernements, élus locaux, dont bien sûr Xavier BERTRAND, et puis les syndicats. Est-ce que vous avez ce matin l'assurance que les responsables surtout, de l'équipementier de l'usine, seront aussi présents à cette réunion ?
GABRIEL ATTAL
Bien sûr, si on provoque une réunion, c'est précisément pour échanger avec la direction de BRIDGESTONE. J'ai eu encore ma collègue Agnès PANNIER-RUNACHER, qui est en charge du dossier auprès de Bruno LE MAIRE, hier, elle m'a confirmé que la réunion aurait lieu lundi et que BRIDGESTONE serait présent.
SONIA MABROUK
En tant que porte-parole du gouvernement, quel engagement pouvez-vous, avez-vous les moyens de prendre ce matin, pour rassurer les salariés et leurs familles, ou du moins une partie de ces salariés ?
GABRIEL ATTAL
L'engagement c'est qu'on va tout faire pour trouver un avenir pour ces salariés.
SONIA MABROUK
Vous trouvez que c'est un engagement tout faire ?
GABRIEL ATTAL
Oui, parce que moi, je vais vous dire, moi je crois…
SONIA MABROUK
C'est vague !
GABRIEL ATTAL
Mais moi je crois que la volonté politique elle peut changer les choses, elle peut changer le cours des choses, sinon je ferai autre chose et je ne serais pas là devant vous ce matin.
SONIA MABROUK
Monsieur ATTAL, vous voulez qu'on vous cite la longue liste des promesses qui n'ont pas été tenues sur ces sites sociaux ?
GABRIEL ATTAL
Mais, est-ce que ça marche à chaque coup ? Evidemment non. Mais est-ce que c'est pour ça qu'il ne faut pas essayer ? Eh ben non ! Quand on regarde ce qui s'est passé à ASCOVAL, on nous disait "c'est fini, il n'y aura aucun avenir pour cette usine", on a trouvé un avenir. Quand on regardait à Hayange, on nous disait "c'est impossible, il ne se passera rien", on a sauvé aussi l'activité. Quand on regarde ARC, c'est pareil, on arrive à développer d'autres activités. Donc là, très concrètement, qu'est-ce qu'on va chercher à faire ? On va chercher à voir, avec la direction de BRIDGESTONE, si on peut faire évoluer l'activité industrielle, avoir d'autres types de pneus qui correspondent plus à la demande, pour que l'activité continue….
SONIA MABROUK
Mais quels moyens de pression vous avez ?
GABRIEL ATTAL
Et si ce n'est pas possible, on regardera pour développer d'autres types d'industries sur le site, c'est ça qui va être fait par le gouvernement.
SONIA MABROUK
Il peut y avoir un changement total d'industrie, de production sur le site ?
GABRIEL ATTAL
C'est ce qu'ils vont regarder, c'est la discussion qui va avoir lieu, mais moi, ce que je veux dire, c'est qu'il y a une mobilisation absolue pour ce site, et ce que je peux rajouter c'est qu'il y a aussi une forme de concorde politique autour de ce dossier. On est, avec Xavier BERTRAND, sur ce dossier, on travaille main dans la main avec lui, avec les élus locaux…
SONIA MABROUK
Mais il met la pression Xavier BERTRAND justement, et peut-être qu'il pourrait vous poser cette question : de quels moyens précis dispose l'État pour faire reculer ou pour faire changer BRIDGESTONE ?
GABRIEL ATTAL
Mais, d'abord on a mis en place plein d'outils dans le cadre du plan de relance, précisément pour accompagner les entreprises qui sont en difficulté, et pourquoi est-ce qu'on a réagi très vivement quand il y a eu l'annonce par BRIDGESTONE, c'est parce qu'ils n'ont même pas regardé, ils n'ont même pas proposé, de s'emparer de ces outils, alors qu'il y a eu des réunions pour leur présenter, etc.
SONIA MABROUK
Oui… Monsieur ATTAL, est-ce que vous avez un moyen de pression ?
GABRIEL ATTAL
Moi je crois à la pression politique, je crois, oui je crois que…
SONIA MABROUK
C'est de la naïveté, non ?
GABRIEL ATTAL
Et ensuite, je vais vous dire…
SONIA MABROUK
Un équipementier international japonais, vous allez lui dire "attention, le gouvernement français va se fâcher" ?
GABRIEL ATTAL
Mais non, mais non, va aussi leur dire regardez les dispositifs qu'on met en place dans le cadre du plan de relance, regardez comment est-ce qu'on accompagne les entreprises dans ce moment difficile, avec l'activité partielle de longue durée, pour, quand les commandes se réduisent, que l'État vienne compenser cette perte d'activité avec de l'argent pour permettre de maintenir les salariés, de les former pour évoluer vers d'autres professions, ça fait partie des outils qu'on développe, les accords de performance collective aussi, et donc on va regarder.
SONIA MABROUK
Justement, c'est très bien que vous en parlez, les accords de performance collective, et on en parle peu. En mai dernier, un projet d'accord de performance collective, présenté par la direction de BRIDGESTONE, a été rejeté par les salariés, l'accord, qui proposait de travailler plus, avait pour objectif de tenter d'améliorer la compétitivité de l'usine, et à cette époque-là une députée de votre majorité dit ceci, "rejeter cet accord de compétitivité c'est de l'inconscience, vous verrez les conséquences" vous saviez déjà à l'époque ce qui allait se passer.
GABRIEL ATTAL
Je vais vous dire, il y a une certitude, c'est que le dialogue social n'a pas été au rendez-vous dans cette entreprise, et sur ce site en particulier.
SONIA MABROUK
Ah, ça veut dire que les syndicats ont leur responsabilité ?
GABRIEL ATTAL
Il y a des responsabilités partagées, il faut être deux pour dialoguer, peut-être qu'à un moment certains n'ont pas été suffisamment autour de la table, peut-être qu'à un moment c'était d'autres, honnêtement, l'attitude de la direction, depuis un an, c'est-à-dire quand il y a des propositions qui sont faites, ne pas répondre, et là annoncer une fermeture sans autre alternative, ça ne me semble pas non plus être une attitude très constructive. Moi je ne veux pas regarder en arrière et dire où sont les torts et où ne sont pas les torts, ce que je veux c'est qu'aujourd'hui on arrive à trouver une solution, et c'est pour ça que le gouvernement est mobilisé.
SONIA MABROUK
Alors, vous veillez aux secteurs justement en difficultés, il y en a un qui est en grande difficulté, c'est le secteur aérien, et parmi, Gabriel ATTAL, les 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat, il y a la piste d'une éco-contribution de 4 milliards et quelques pour compenser les émissions de CO2. Est-ce qu'elle sera mise en place ?
GABRIEL ATTAL
Alors, peut-être qu'il faut revenir sur la méthode. On a, à la sortie du grand débat national, décidé de mettre en place une Convention citoyenne pour le climat, ça veut dire qu'il y a 150 Français, tirés au sort, avec des quotas pour représenter les différents âges, origines géographiques, origines sociales, qui ont réfléchi à des mesures, à des propositions, pour l'avenir de la planète et pour protéger le climat. Ils ont rendu ces propositions au printemps dernier, je crois, et aujourd'hui, qu'est-ce qui se passe ? Il y a un travail qui est fait, par ces citoyens, avec les parlementaires, avec des chefs d'entreprise, avec les responsables des différents secteurs, pour avoir un regard exigeant sur ces différentes propositions…
SONIA MABROUK
Et tout ça pour nous dire quoi alors ?
GABRIEL ATTAL
Mais tout ça pour vous dire qu'il y a un travail qui est en cours, et que moi je ne vais pas…
SONIA MABROUK
Attendez, vous êtes porte-parole du gouvernement, est-ce qu'il y a plusieurs paroles dans votre gouvernement ? Ici même, sur Europe 1, il y a quelques jours, le ministre des Transports dit "non, il ne peut pas y avoir cette éco-contribution, ça va être catastrophique sur le plan social parce qu'il peut y avoir jusqu'à 120 000, 150 000 suppressions d'emplois." Sur cette même antenne la ministre de la Transition écologique, Barbara POMPILI - ça vous fait sourire - dit l'inverse, "non, non, non, attendez, on va voir, et puis ce sont les propositions de la Convention citoyenne." Vous penchez pour quel ministre ?
GABRIEL ATTAL
D'abord, il peut y avoir plusieurs avis et plusieurs sensibilités.
SONIA MABROUK
C'est dur d'être porte-parole !
GABRIEL ATTAL
Je vous confirme – il peut y avoir plusieurs avis, plusieurs sensibilités, première chose. Ensuite, il y a un travail qui est en cours, avec ces citoyens qui ont été tirés au sort, et avec l'ensemble des responsables des différents secteurs, donc, on ne veut pas dire aujourd'hui telle proposition elle va être abandonnée ou telle proposition elle va être retenue, on a le droit d'avoir une sensibilité. Cette proposition c'est vrai qu'elle a été faite à un moment qui…
SONIA MABROUK
Mais elle n'est pas abandonnée, ça c'est une information ce matin.
GABRIEL ATTAL
Qui n'était pas le moment de crise qu'on connaît aujourd'hui, et on voit que le secteur aérien, aujourd'hui, il est dans de très grandes difficultés. J'étais hier en déplacement dans le Val-d'Oise, avec Bruno LE MAIRE, je peux vous dire que les aéroports qui sont à l'arrêt et qui tournent à faible régime ça a un impact très concret pour beaucoup d'emplois. Moi je considère, évidemment, que quand vous avez un secteur qui est quasiment sous l'eau, vous ne lui plongez pas la tête dans l'eau encore plus profond…
SONIA MABROUK
Bon, je crois que vous avez donné la réponse, elle ne devrait pas être mise en place.
GABRIEL ATTAL
Non, il n'y a pas de réponse aujourd'hui, pourquoi ? Parce que, il y a un travail qui est fait par ces citoyens qui ont été tirés au sort, avec des parlementaires et avec les responsables des différents secteurs, et c'est finalement de cette discussion que va sortir une décision.
SONIA MABROUK
Et plus largement, dans le cadre du plan de relance, vous serez en déplacement un petit peu partout pour parler de déclinaisons justement de ce plan de relance sur le domaine territorial. Merci Gabriel ATTAL, d'avoir été notre invité, je souhaite une belle journée, ainsi qu'à nos auditeurs.
GABRIEL ATTAL
Merci.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 5 octobre 2020