Texte intégral
M. le président. L'ordre du jour appelle le débat sur l'allongement des délais de paiement et les mesures pour y remédier en temps de crise.
La conférence des présidents a décidé d'organiser ce débat en deux parties. Dans un premier temps, nous entendrons les orateurs des groupes puis le Gouvernement ; nous procéderons ensuite à une séquence de questions-réponses.
(…)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
M. Cédric O, secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques. Les retards de paiement affaiblissent nos entreprises, en premier lieu les plus petites, les plus vulnérables et les plus fragiles d'entre elles. En effet, ils déséquilibrent les trésoreries des TPE-PME, les contraignant à recourir à des financements de court terme auprès de leur banque. Ces retards peuvent, dans les cas les plus graves, conduire à des défaillances d'entreprises pourtant viables. Enfin, ils comportent un risque de contagion des difficultés de trésorerie entre entreprises : lorsqu'elles ne sont pas financièrement capables d'assumer les retards de leurs clients, elles sont tentées de les reporter sur leurs fournisseurs, D'après les chiffres du dernier rapport de l'observatoire des délais de paiement, en l'absence de retards, les PME bénéficieraient de 19 milliards d'euros de trésorerie supplémentaire, et les ETI de 7 milliards.
M. Maxime Minot. Ce n'est pas un bon argument !
M. Cédric O, secrétaire d'État. Pour toutes ces raisons, ces retards sont tout simplement inacceptables, surtout quand ils sont le fruit de pratiques délibérées, mais également quand ils sont liés à une absence manifeste de soin apporté au fait de payer ses partenaires dans les temps.
L'État est donc mobilisé pour garantir le respect des délais de paiement, en tant que payeur ainsi qu'en effectuant des contrôles et en proposant un accompagnement adapté.
Plusieurs parlementaires ont évoqué les retards de l'État. Or il a pris ses responsabilités en tant que payeur. En l'espèce, je confirme mon accord avec les propos de M. Bernalicis.
M. Maxime Minot. Ça, c'est un scoop !
M. Cédric O, secrétaire d'État. Je le confirme : nous constatons une convergence inattendue de nos propos dans ce débat…
M. Ugo Bernalicis. Notre accord se fonde sur les faits !
M. Cédric O, secrétaire d'État. En effet : si l'on regarde les chiffres dans le détail, contrairement à certaines idées reçues qui ont la vie dure, on s'aperçoit que, depuis une dizaine d'années, les délais de paiement des services de l'État se sont considérablement améliorés : de 2011 à 2019 – ce qui recouvre plusieurs majorités –, au niveau national, le délai global de paiement en matière de commande publique est tombé de quarante-cinq à dix-neuf jours ; et, selon le dernier rapport de l'observatoire des délais de paiement, ils se sont encore améliorés de deux jours entre 2018 et 2019. Cette dynamique est le résultat d'une vraie prise de conscience et d'une amélioration des procédures de traitement des factures, en particulier par la numérisation.
Néanmoins, ces chiffres cachent des disparités fortes au sein du secteur public – là encore, je vous renvoie à l'intervention de M. Bernalicis –, et des retards importants demeurent dans certaines collectivités, notamment de grande taille. Cette situation n'est pas acceptable et appelle une correction car la puissance publique doit être irréprochable.
Depuis l'adoption de la loi de modernisation de l'économie de 2008, plusieurs réformes ont été engagées pour assurer un contrôle plus strict des délais de paiement et lutter contre les retards. Les contrôles de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sont toujours mieux ciblés. Les sanctions ont été renforcées et peuvent désormais dépasser 1 million d'euros dans les cas les plus graves. Elles sont par ailleurs systématiquement publiées. Voici d'autres chiffres : en 2019, la DGCCRF a contrôlé plus de 1 500 établissements ; à l'issue des contrôles, 271 procédures d'amende administrative, représentant au total 34 millions d'euros, ont été lancées ; depuis 2014, 1 186 amendes administratives, représentant au total 65 millions d'euros, ont été prononcées.
Au-delà des contrôles de la DGCCRF, le médiateur des entreprises apporte un soutien aux entreprises pour trouver des solutions amiables aux contentieux, en particulier à ceux qui portent sur les délais de paiement. Son action permet de rétablir et de faciliter le dialogue entre les entreprises. Les deux parties présentes lors de la médiation prennent un engagement juridique réciproque, aux conditions dont elles conviennent. Du fait de cet accord commun, dont les termes sont construits par les deux parties, l'accord est respecté dans la quasi-totalité des cas. Le médiateur des entreprises est saisi chaque mois de plus d'une soixantaine de demandes de médiation relatives à ces questions.
De toute évidence, la crise sanitaire, devenue économique, a eu un impact conjoncturel important sur les délais de paiement, pour trois raisons, dont la contribution a été plus ou moins équivalente : premièrement, la désorganisation de la chaîne de paiement, du fait du confinement et du télétravail, surtout au printemps dernier, car les entreprises n'étaient alors pas prêtes pour dématérialiser ces procédures et les traiter à distance ; deuxièmement, les difficultés financières de certaines entreprises qui ne pouvaient tout simplement pas payer leurs factures ; troisièmement, les pratiques délibérées de certaines entreprises qui souhaitaient anticiper et préserver leur trésorerie.
Pour éviter une dégradation des délais de paiement, nous avons pris des mesures fortes dès les premiers jours de la crise. La priorité a évidemment été d'aider financièrement les entreprises directement touchées par la crise, ce qui a contribué à éviter des retards de paiement trop importants. Il s'agit notamment des mesures permettant de soulager la trésorerie des entreprises.
Nous avons d'abord instauré les prêts garantis par l'État : plus de 130 milliards d'euros de prêts ont été contractés par les entreprises touchées. Nous avons constitué un fonds de solidarité pour les entreprises des secteurs les plus touchés : près de 12 milliards d'euros leur ont ainsi été versés. Enfin, nous avons créé des dispositifs d'activité partielle, d'exonération et de report de charges.
Concernant plus particulièrement la question des délais de paiement, nous avons installé un comité de crise, présidé par les médiateurs des entreprises et du crédit. Depuis le mois de mars dernier, ce comité réunit régulièrement les organisations professionnelles, les chambres consulaires et la DGCCRF afin de détecter les signaux faibles et de les traiter. Ce comité de crise a permis de faire remonter les pratiques d'une quarantaine de grandes entreprises ou d'ETI qui ont délibérément ralenti les délais de paiement. Après l'intervention du médiateur des entreprises, les pratiques se sont normalisées. Dans le même temps, le comité de crise a valorisé l'action de seize grandes entreprises et ETI qui ont décidé, à l'inverse, d'accélérer les paiements pour préserver la trésorerie de leurs fournisseurs. Depuis plusieurs mois, le comité ne reçoit heureusement plus de signalements.
Ainsi, les différentes mesures prises par le Gouvernement ont permis de contenir l'impact sur les délais de paiement et d'éviter une dégradation trop brutale. Si la situation a été très tendue au deuxième trimestre, elle s'est plus ou moins normalisée au cours des derniers mois. En effet, après une multiplication par dix des demandes de médiation au cours du deuxième trimestre, les chiffres du quatrième trimestre montrent un retour à la normale. S'agissant des retards de paiement, les chiffres semblent suivre la même évolution : la situation tend à s'améliorer.
Cependant, au cours des derniers mois, le retard moyen s'est allongé de deux jours par rapport à l'avant-crise, effaçant les gains obtenus ces dernières années. Ces retards se sont notamment accrus dans les secteurs les plus touchés par les mesures prises pour limiter la circulation du virus.
Quant aux délais de paiement publics, ils ne semblent pas s'être allongés du fait de la crise. En effet, le nombre de cas signalés au médiateur des entreprises pour des problèmes de paiement d'organismes publics n'a pas évolué en valeur absolue au cours des derniers mois par rapport à l'année dernière. Ces données doivent encore être consolidées, notamment dans le prochain rapport de l'observatoire des délais de paiement, qui sera publié en mars prochain.
Au-delà des actions de l'État, une partie de la solution demeure entre les mains des entreprises, en particulier des plus grandes d'entre elles. Il faut en appeler à la responsabilité de chacun, en particulier à celle des grands donneurs d'ordres. Il n'est évidemment pas question que la crise devienne une excuse pour repousser des paiements et induire des retards risquant d'être fatals pour nos PME.
Nous sommes vigilants face à ce type de pratiques. Nous avons d'ailleurs demandé à la DGCCRF de poursuivre ses contrôles et de s'assurer qu'il n'y a eu aucun comportement inacceptable de rétention volontaire des paiements pendant la crise. Au cours des prochains mois, les grandes entreprises et les ETI ayant bénéficié d'un PGE seront ciblées dans le cadre du contrôle des délais de paiement, afin de vérifier que l'aide apportée par l'État a bien été utilisée pour payer les fournisseurs.
Lorsque la crise sera passée, il est capital que nous puissions retrouver très rapidement le niveau des retards de paiement observé en 2019, à savoir onze jours environ. Mais, au-delà, nous devons reprendre une dynamique de réduction de ces retards de paiement, pour passer, à l'horizon 2021, sous les dix jours.
Aux Pays-Bas, je le rappelle, les retards sont en moyenne de quatre jours ; en Allemagne, de sept jours. Même si la France fait désormais partie des bons élèves européens en la matière, les retards de paiement qui y sont pratiqués ne sont pas une fatalité. Il faut que le respect des délais de paiement devienne une véritable culture et « percole » au sein même des organisations.
La politique de publication du nom des entreprises faisant l'objet de sanctions en matière de délais de paiement, engagée en 2015, visait à sensibiliser les dirigeants des entreprises à cette question. Il faut maintenant que cette sensibilisation, cette culture du paiement dans les temps, imprègne toutes les strates de la chaîne de paiement. La dématérialisation du traitement des factures sera un levier complémentaire pour parvenir à une baisse des délais.
Je prendrai maintenant le temps de répondre à quelques questions qui m'ont été posées.
S'agissant des ménages, monsieur Wulfranc,…
M. Maxime Minot. Excellent M. Wulfranc !
M. Cédric O, secrétaire d'État. …sans nier l'importance du surendettement pendant la crise, je vous renvoie à une éventuelle discussion ultérieure, car le débat du jour porte sur les entreprises.
Monsieur Bernalicis, je vous confirme que nous n'avons pas prévu d'annuler la dette, ni la dette détenue par la BCE ni la dette privée. J'ai déjà participé à un débat à ce sujet dans cet hémicycle il y a quelques mois. C'est d'ailleurs une question qui divise les économistes, par-delà les sensibilités politiques.
M. Philippe Gosselin. Il y a de moins en moins de libéraux, monsieur le secrétaire d'État !
M. Cédric O, secrétaire d'État. En effet, certains économistes situés traditionnellement à l'extrême gauche, s'opposent à une annulation de la dette, tandis que des économistes plus libéraux la soutiennent.
M. Ugo Bernalicis. Je ne les connais pas, ceux-là…
M. Cédric O, secrétaire d'État. Le débat transcende dons les partis politiques. En tout état de cause, je suggère que nous ne le relancions pas à cet instant et je vous confirme, je le répète, que le Gouvernement n'a le projet d'annuler ni la dette privée ni la dette publique.
Madame Pires Beaune, il faut être conscient que toute modification de l'ordre des créanciers prioritaires dans le cadre des procédures collectives aurait des conséquences très importantes sur le financement de l'économie, les relations inter-entreprises et l'économie réelle. Le Gouvernement ne projette pas de modifier cet ordre.
Bruno Le Maire, Alain Griset et moi sommes particulièrement attentifs à la question des délais de paiement et attendons un sursaut des entreprises. L'évolution des délais de paiement sera suivie scrupuleusement. Si cela ne suffit pas, nous n'excluons pas de mettre en place des outils plus contraignants à l'avenir, après la sortie de la crise. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
M. le président. Nous en venons aux questions. Je vous rappelle que la durée des questions et celle des réponses sont limitées à deux minutes et qu'il n'y a pas de droit de réplique.
La parole est à M. David Corceiro.
M. David Corceiro. Monsieur le secrétaire d'État, je vous pose cette question au nom de mon collègue Philippe Bolo, nommée rapporteur de la commission des affaires économiques pour l'audition de Mme Laure de La Raudière, qui se déroule en ce moment.
La crise que nous traversons actuellement augmente considérablement la vulnérabilité des entreprises. Dès lors, nous devons être d'autant plus vigilants quant à l'allongement des délais de paiement. Depuis le début de la législature, nous avons à plusieurs reprises adopté des dispositions qui permettent de lutter contre cette dérive. Tel fut notamment le cas avec la loi PACTE : sous l'impulsion du président Mignola, nous avons voté un aménagement de l'affacturage inversé.
Si l'allongement des délais de paiement concerne principalement quelques grands groupes publics, champion des économies hors la loi consistant à faire de l'argent sur le dos des PME, l'État est également concerné par ce fléau.
La responsabilité de l'État est particulièrement visible dans le dispositif MaPrimeRénov', qui comprend plusieurs étapes : constitution du dossier ; devis ; réalisation des travaux ; émission d'une facture ; règlement de la facture après demande de paiement par le particulier ; enfin, règlement de l'entreprise. Un tel enchaînement d'étapes ne garantit aucunement que l'entreprise obtienne un paiement rapide après les travaux.
C'est pourquoi mon collègue Philippe Bolo souhaite vous interroger sur la cohérence des aides publiques, monsieur le secrétaire d'État. Comment l'État vérifie-t-il que les procédures d'attribution des aides ne contribuent pas à l'allongement des délais de paiement ? Par ailleurs, dans le cadre de la loi PACTE, le Gouvernement a défendu le principe d'une base de données publique accessible aux entreprises, permettant à chacune d'entre elles de connaître, avant de s'engager, le délai de paiement pratiqué par le donneur d'ordres public. Malheureusement, cette base n'a jamais vu le jour sous cette forme. Dès lors, comment le Gouvernement entend-il concrétiser les lois et les règlements visant à réduire les délais de paiement ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Comme vous l'avez indiqué, monsieur Corceiro, la loi PACTE comprend plusieurs dispositions qui permettent d'améliorer les délais de paiement, qui portent tant sur l'affacturage inversé que sur la transparence des délais de paiement publics. Nous travaillons pour donner une traduction concrète à ces dispositions, mais, vous en conviendrez, l'année 2020 a été un peu particulière et a pu ralentir certains projets, notamment celui de la base de données des délais de paiement des collectivités territoriales.
Les services du médiateur des entreprises sont mobilisés pour progresser en matière d'affacturage inversé et faire de la pédagogie à propos de cette solution, qui peut s'avérer gagnant-gagnant pour les entreprises. Sachez que le comité de mise en oeuvre du paiement fournisseurs anticipé s'est réuni le 22 décembre dernier et a adopté un plan de travail ambitieux.
Votre question relative au paiement de MaPrimeRénov' a trait non pas au délai de paiement, mais, de manière plus générale, à la rapidité d'attribution des aides. L'État veille toujours à l'efficacité des dispositifs qu'il instaure, et il faut toujours trouver un équilibre entre ciblage et simplicité, entre contrôle pour éviter les fraudes et rapidité d'exécution. D'ailleurs, les dispositifs d'aide que nous avons mis en place pendant la crise sanitaire sont plutôt des modèles de simplicité et de rapidité. Rappelons que le dispositif MaPrimeRénov' permet aux ménages de toucher plus rapidement les aides puisqu'il remplace un crédit d'impôt. Si le système a pu rencontrer des retards, dus notamment à la crise sanitaire, il va effectivement faciliter, raccourcir et simplifier les procédures. Pour un échange plus approfondi sur la question, je vous invite à prendre contact avec le ministère chargé du logement, qui publiera dans les prochaines semaines un bilan du fonctionnement du dispositif pour l'année 2020.
M. le président. La parole est à M. Alain David.
M. Alain David. Il y a un an, nous observions avec incrédulité la situation à Wuhan, supposément lointaine. Aujourd'hui, hélas, la crise sanitaire est encore présente au plus près de nous et ne cesse d'inquiéter. Parallèlement à ces préoccupations pour la santé de nos concitoyens, la santé de notre économie en général et celle d'un grand nombre d'entreprises en particulier sont préoccupantes.
Parmi les conséquences économiques et sociales qui risquent malheureusement de s'amplifier dans les mois à venir, la question des délais de paiement devient aiguë, plusieurs orateurs l'ont signalé. Alors que l'observatoire des délais de paiement de la Banque de France notait dans ses derniers rapports annuels une amélioration de la situation, tant pour les entreprises que pour les organismes publics, la covid-19 va, hélas, causer des ravages en cette matière aussi.
Pourtant, de plan de relance en collectif budgétaire, des sommes importantes ont été injectées dans l'économie afin de limiter les effets de la crise. Force est de constater que cela ne suffit pas et que bon nombre d'entreprises de nos territoires se heurtent à des difficultés extrêmes. Il semble donc urgent de trouver des solutions pour éviter que d'éventuelles faillites ne se propagent et ne créent un véritable tsunami de dépôts de bilan, lorsque les URSSAF, l'administration fiscale et les banques se rappelleront au bon souvenir des entreprises.
À cet effet, le groupe Socialistes et apparentés a proposé à plusieurs reprises, notamment lors de l'examen du projet de loi PACTE, de revenir sur le principe des créanciers privilégiés, dont bénéficient notamment l'État et les organismes sociaux. Dans la situation de crise historique que nous traversons, monsieur le secrétaire d'État, ne pourrait-on pas imaginer une expérimentation temporaire consistant à mettre ce principe entre parenthèses, de sorte que l'on évite une propagation galopante des défauts de paiement ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Vous évoquez une crainte, partagée par l'ensemble des pouvoirs publics, celle des défaillances d'entreprises en raison de la crise. La vérité oblige à dire que pour le moment, et après que des indicateurs aient démontré qu'il y a eu un problème lors du premier confinement, notamment en matière de délais de paiement, les choses semblent – je dis bien « semblent » – à peu près sous contrôle.
Pour connaître avec exactitude la situation macroéconomique, il faut attendre la publication, en mars, du rapport de l'Observatoire des délais de paiement. Mais les indicateurs dont nous disposons laissent penser que compte tenu de l'intervention massive de l'État dans l'économie, avec les prêts garantis, le fonds de solidarité ou le chômage partiel, les choses sont, pour le moment, plutôt sous contrôle.
Cela se reflète d'ailleurs très concrètement dans les chiffres de défaillances d'entreprises que nous avons pour 2020 : celles-ci restent très limitées par rapport à ce à quoi nous pourrions nous attendre.
Évidemment, ce qui s'annonce sensible et qui nécessitera d'être géré d'une manière très fine, c'est, au fond, le désengagement progressif de l'État dans l'économie, au fur et à mesure que la crise sanitaire s'allégera et que l'activité repartira. Soyez assurés que Bruno Le Maire, Alain Griset ou encore Agnès Pannier-Runacher portent à cette question une très grande attention, dans la perspective, évoquée par certains parlementaires, du début des remboursements des prêts garantis par l'État, étape qui nous fera sortir d'une forme d'anesthésie générale de l'économie par l'État.
Dans cette optique, nous n'avons à ce jour pas prévu de modifier l'ordre des créanciers privilégiés ou de dégrader le rang de l'État. Une telle mesure aurait un impact considérable. Nous resterons néanmoins attentifs à la situation collective et individuelle des entreprises pour faire en sorte que la sortie de crise se passe le mieux possible.
M. le président. La parole est à M. M'jid El Guerrab.
M. M'jid El Guerrab. Ma question porte sur l'attitude des acheteurs publics vis-à-vis de leurs fournisseurs ou prestataires, notamment dans le cadre des marchés publics. Comme l'ont dit fort justement mes collègues avant moi, les retards de paiement sont un fléau qui peut mettre en difficulté de nombreuses entreprises. À cet égard, nous savons que les petites entreprises sont les plus fragiles, surtout dans ce contexte économique dégradé où les niveaux de trésorerie peuvent fondre très rapidement.
Certes, un panel de sanctions existe pour dissuader les mauvais payeurs d'accumuler les retards de paiement aux dépens de leurs fournisseurs. L'application de ces sanctions administratives et leur publication vont dans le bon sens.
La crise sanitaire et économique que nous connaissons met en difficulté de nombreuses entreprises. Je tiens à saluer la réactivité du Gouvernement qui, dès le début du premier confinement, a instauré un comité de crise sur la dégradation des délais de paiement. Mon collègue Vincent Ledoux l'a rappelé dans son propos, des pistes de réflexion sont à l'étude pour améliorer la situation, comme la création d'une agence de notation des délais de paiement.
Il est également indispensable que les acteurs publics – collectivités territoriales, État, établissements publics – donnent l'exemple. Je pense notamment au secteur des travaux publics, où les retards de paiement sont plus importants qu'ailleurs.
Monsieur le secrétaire d'État, envisagez-vous également des mesures concrètes pour réduire les retards de paiement d'acheteurs publics que l'on présente souvent, à tort ou à raison, comme de mauvais payeurs ? Plus généralement, avez-vous des données à nous communiquer sur les retards de paiement dans les marchés publics ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Nous l'avons évoqué il y a quelques minutes, contrairement à la perception que l'on pourrait parfois avoir, les délais de paiement de la sphère publique sont globalement bons – du moins sont-ils en très nette amélioration depuis plusieurs années ; c'est ce que nous disent les indicateurs. Je rappelle les chiffres : s'agissant de la commande publique, le délai global de paiement des services de l'État – je parle bien de l'État, et non des collectivités territoriales – est passé, entre 2011 et 2019, de quarante-cinq à dix-neuf jours. Avant que la crise ne surgisse, ce délai avait même baissé de deux jours en deux ans.
Je le disais, depuis le début de la crise, les délais de paiement des acheteurs publics ne semblent globalement pas avoir été allongés. En effet, le nombre de cas remontés au médiateur des entreprises pour des problèmes de paiement d'organismes publics reste stable. Le rapport de l'Observatoire des délais de paiement, qui sera publié en mars prochain, permettra de confirmer cette estimation avec des chiffres clairs et détaillés.
Je l'ai également dit, cette amélioration est le fruit d'une prise d'une conscience de l'État de l'importance d'être exemplaire dans ce domaine, compte tenu de l'importance des délais de paiement dans l'économie. Plus concrètement, ce progrès est dû à l'amélioration du processus de paiement menée à bien par l'État, avec notamment la dématérialisation de la facturation et une réorganisation de la chaîne de paiement.
Toutefois, derrière ces chiffres se cachent encore de fortes disparités et des délais importants sont encore observés dans certaines collectivités, notamment celles de très grande taille, et chez certains acteurs du secteur hospitalier. Il convient que les organismes publics dans leur ensemble progressent encore, car ils doivent être irréprochables. Cela passera notamment par une meilleure transparence sur leurs délais de paiement.
À cet égard, vous aviez voté, monsieur le député, dans le cadre de la loi PACTE – plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises –, en faveur d'une publication en open data des délais de paiement des collectivités. Compte tenu de la crise du coronavirus, un retard a été pris dans l'application de cette disposition, mais je vous confirme que, dans les mois à venir, le Gouvernement compte bien faire la transparence sur les délais de paiement des différents organismes publics. C'est indispensable pour que nous progressions tous ensemble.
Certaines enquêtes d'opinion, qui ont été évoquées, indiquent que certaines entreprises hésitent à répondre à des appels d'offres publics par crainte de subir des délais de paiement trop longs. Cela démontre que nous avons encore à la fois des progrès et de la pédagogie à faire. De toute évidence, fournir cet effort est encore plus indispensable dans le cadre du plan de relance.
M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.
M. André Chassaigne. Depuis l'instauration du second confinement, des dispositifs d'aide ont été annoncés pour soutenir la trésorerie des entreprises, notamment l'extension du fonds de solidarité, qui compense désormais 20 % de leurs pertes de chiffre d'affaires.
La montée en puissance du fonds de solidarité a tardé, alors même que nos petites entreprises ne disposaient que d'une trésorerie limitée pour tenir. Une fois officialisées, il convenait d'appliquer ces mesures rapidement et de faire en sorte que ces aides parviennent aux entreprises dans des délais très courts. En effet, une aide décidée en novembre 2020 mais versée en janvier 2021 n'aurait qu'une utilité limitée, puisque beaucoup d'entreprises ne pourraient tenir jusque-là.
C'est pourtant ce qui arrive à de nombreuses TPE – très petites entreprises. J'ai le cas d'un restaurateur de ma circonscription qui vient juste d'obtenir, il y a quelques jours, le versement de l'aide du mois de novembre du fonds de solidarité. Devant de tels délais, il avait écrit à la DGFIP – direction générale des finances publiques – de Clermont-Ferrand, et voici la réponse lacunaire de celle-ci : "Le traitement de certaines demandes est actuellement affecté par un dysfonctionnement identifié au plan national. Cela concerne malheureusement de très nombreuses demandes comme la vôtre. Je conçois très bien votre impatience légitime, mais le service n'a aucun moyen de débloquer votre situation dans l'immédiat et vous invite à patienter."
M. Pierre Cordier. Voilà !
M. André Chassaigne. Vous comprendrez, monsieur le secrétaire d'État, que ce n'est pas d'une impatience ou d'un caprice qu'il s'agit, mais bien de la survie de ce restaurant, ainsi que de tous ses fournisseurs, qu'il doit payer. Il s'agit d'éviter des faillites en cascade.
Il semblerait donc que, passé les grandes annonces, le Gouvernement ait tendance à faire les choses lentement, ce qui vaut d'ailleurs pour un certain nombre de sujets. Ma question est donc simple : quelles mesures envisagez-vous pour réduire les délais de paiement des nombreuses aides essentielles qui ont été promises, mais qui peinent tant à être effectives ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Pour vous répondre le plus clairement possible, je crois que nous nous rejoignons sur un point : la réponse de la DGFIP de Clermont-Ferrand à ce restaurateur n'est pas acceptable. Elle ne l'est pas, parce que l'efficacité des dispositifs décidés par l'État ne repose pas sur leur annonce, mais, vous l'avez dit, sur leur application effective, sur le décaissement des sommes et le fait qu'elles arrivent sur le compte des entreprises qui en ont besoin.
C'est ce qui a guidé l'ensemble de la politique conduite par le Gouvernement au cours de la crise et, hormis quelques exceptions, je crois pouvoir dire qu'en règle générale, il y a eu une grande rapidité dans le versement des aides, aussi bien par les services de Bercy que par les URSSAF – unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales. Mon impression, et c'est ce qui nous remonte du terrain de manière quantitative, est que nous avons été très rapides pour verser les allocations du chômage partiel ou encore pour décaisser le fonds de solidarité. L'administration française dans son ensemble a fait preuve d'une grande rapidité pour réagir à la crise.
Il n'empêche qu'il peut y avoir quelques problèmes locaux. Je prends bonne note de ce que vous nous signalez. Je le communiquerai à Olivier Dussopt et Bruno Le Maire. Je vous invite d'ailleurs à nous transmettre ces éléments pour que nous puissions corriger les choses si elles peuvent l'être.
J'estime néanmoins que dans la gestion de la crise, l'administration française s'est montrée très efficace pour décaisser les aides – je dispose d'ailleurs d'exemples d'autres pays européens pour en attester.
Des problèmes peuvent exister dans d'autres secteurs, mais je crois que nous nous rejoignons sur le fait que si l'on veut que la parole publique garde sa crédibilité, il convient de concrétiser ce qui a été décidé et donc, en l'espèce, que les décaissements soient réalisés le plus rapidement possible.
M. le président. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.
M. Jean-Hugues Ratenon. La situation des petites et moyennes entreprises est très fragile en outre-mer. À La Réunion, elles représentent plus de 95 % du tissu économique. Cette fragilité ne date pas d'hier, mais s'est aggravée avec la crise sanitaire. Tout le monde le sait, les chefs d'entreprise ultramarins ne dorment pas sur des matelas de billets. Les situations financières sont tendues et après avoir payé les salaires des employés et procédé au remboursement de dettes, il ne leur reste bien souvent qu'une misère.
La gestion des comptes doit être rigoureuse. Il faut anticiper et prévoir les retards de paiement. Les délais ne sont pas toujours respectés, que ce soit dans le privé ou dans le public. Ajoutez à cela la rigidité des banques et des établissements financiers et vous obtenez le cocktail du dépôt de bilan et des faillites, avec leur lot de chômage.
Non, les banques ne jouent pas le jeu, car même en présentant les bons de commande des marchés publics obtenus, ces établissements ne tolèrent aucun retard et appliquent des mesures sévères : blocage de comptes, agios, saisies de matériel, etc.
Le savoir-faire et l'engagement de ces chefs d'entreprise ne sont plus à démontrer. Il faut donc les accompagner. C'est une question de vie ou de mort pour eux !
Dans ce contexte sanitaire où les finances sont au plus bas, ne faudrait-il pas une intervention ferme de l'État auprès des banques ? Un modèle spécifique d'affacturage inversé dans les DROM – départements et régions d'outre-mer – ne serait-il pas une piste de réflexion ? Pourquoi ne pas installer une cellule de suivi des collectivités locales afin d'accélérer le processus de paiement ? Pourquoi ne pas débloquer des fonds spécifiques auprès de la CDC – Caisse des dépôts et consignations – afin de financer des projets d'investissement, mais aussi des fonds qui pourraient être alloués aux entreprises bénéficiaires de marchés, avec un remboursement à taux zéro, sachant que je regrette que vous refusiez d'annuler la dette privée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Il est évident que la question de l'amortissement de la crise et des délais de paiement est importante, aussi bien dans l'Hexagone qu'en outre-mer, compte tenu de la situation spécifique de certaines entreprises ultramarines dont les niveaux de trésorerie peuvent être beaucoup plus tendus.
Il me semble que pour l'instant, les chiffres montrent que l'intervention de l'État, au travers des prêts garantis ou du fonds de solidarité, a permis d'amortir la crise. Je ne dis pas qu'il n'y a pas quelques problèmes ici ou là, que certains territoires d'outre-mer ne rencontrent pas des difficultés qui nécessitent un traitement particulier, mais, pour l'avoir entendu à plusieurs reprises en conseil des ministres, sachez que le ministre des outre-mer, Sébastien Lecornu, est mobilisé sur les enjeux spécifiques aux territoires d'outre-mer.
Pour autant, je ne crois pas, et j'ai eu l'occasion de le dire à votre collègue Ugo Bernalicis, que l'annulation de la dette soit une bonne chose,…
M. Ugo Bernalicis. Pourquoi ?
M. Cédric O, secrétaire d'État. …ne serait-ce que parce qu'une annulation unilatérale de la dette privée, avant même de parler de la dette publique contractée auprès de la BCE – Banque centrale européenne –, aurait un impact massif sur les relations interentreprises et le crédit bancaire, ce qui ne me paraît pas judicieux dans la période actuelle.
S'agissant des différentes options que vous proposez, dont je vous avoue ne pas être véritablement spécialiste, je vous suggère de vous entretenir avec le ministre délégué Olivier Dussopt ou avec le ministre Sébastien Lecornu, de telle manière qu'en cas de problème de délais de paiement spécifique à certains territoires d'outre-mer, nous puissions trouver les solutions correspondantes.
M. le président. La parole est à M. Paul Molac.
M. Paul Molac. 16 euros : telle est, selon plusieurs journaux, l'augmentation de la facture d'électricité des Français envisagée par la Commission de régulation de l'énergie. Cette somme équivaut à une hausse de 1,73 % par an, tandis que les professionnels pourraient, eux, voir leur facture augmenter de 3,02 %.
Cette augmentation s'ajoute à deux autres déjà annoncées : celle de la taxe transport à compter de cet été et celle des prix du marché de capacité de production électrique. Au total, ce sont donc près de 50 euros supplémentaires en moyenne qui vont venir gonfler les factures d'électricité des Français en 2021.
Plusieurs facteurs expliquent cette augmentation prévue pour le 1er février prochain, notamment l'évolution des coûts de commercialisation due aux effets de la crise sanitaire liée au covid-19. Ainsi, nombreuses sont les entreprises qui ont vu leur trésorerie s'assécher ces derniers mois jusqu'à la cessation de paiement et la fermeture définitive.
Dès lors, les retards de paiement se sont nettement accrus depuis quelques mois, touchant particulièrement les PME, plus fragiles que les grands groupes. Aussi, nous constatons une explosion des factures d'électricité impayées l'année dernière à cause de la crise, qui concernent près de 17 % des clients professionnels. C'est la preuve que l'allongement des délais de paiement touche d'abord les professionnels, mais se répercute aussi, dans certains cas, directement sur les Français.
Notre groupe rappelle que souvent, les retards de paiement ne sont pas le fait d'une volonté délibérée de l'entreprise. Des mesures incitatives doivent donc être mises en place. Quels dispositifs le Gouvernement entend-il prendre pour aller dans ce sens ?
Par ailleurs, plusieurs outils de financement ont été créés pour permettre aux entreprises de renflouer leur trésorerie via un recours au crédit au lieu d'imposer des retards de paiement à leurs fournisseurs ou sous-traitants. Au regard de la crise actuelle, cette méthode ne peut s'inscrire dans une démarche de long terme : on risquerait de voir exploser le nombre des "entreprises zombies". Comment le Gouvernement compte-t-il pallier cette situation ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Votre question comporte plusieurs éléments. Pour être honnête – mais peut-être faut-il creuser le problème –, je ne suis pas certain de percevoir le rapport entre les délais de paiement interentreprises et le défaut de règlement des factures d'électricité à EDF ou aux autres fournisseurs. L'augmentation de ces impayés me semble le symptôme d'une crise économique plus générale, des difficultés qu'ont rencontrées nos entreprises et éventuellement de fermetures administratives. Les imputer au seul allongement des délais de paiement interentreprises me semble à tout le moins réducteur.
Vous évoquez un sujet important : les entreprises zombies. Ce joli nom désigne les entreprises qui, ayant contracté une dette, en acquittent les intérêts sans pouvoir rembourser le capital et, ne pouvant se développer, entrent dans une longue situation de surendettement, ce qui arrive assez régulièrement lors des sorties de crise. Nous surveillerons très précisément ce phénomène lors du paiement des premières échéances des prêts garantis par l'État – c'est alors que le problème risque de se poser – ou lorsque les URSSAF ou les organismes sociaux recommenceront à collecter certaines cotisations, qui ne l'ont pas été pendant la crise. Je tiens à vous assurer que les services d'Olivier Dussopt, d'Agnès Pannier-Runacher et d'Alain Griset – en plus de ceux de Bruno Le Maire – sont mobilisés sur ce problème, qui est encore devant nous.
M. le président. La parole est à M. Christophe Naegelen.
M. Christophe Naegelen. Alors qu'en France, une entreprise sur quatre fait faillite faute d'être payée à temps, le ministre de l'économie s'est dit favorable à la création d'une notation afin d'identifier les mauvais payeurs. Selon le Gouvernement, un tel système permettrait d'informer les PME, sous-traitants et fournisseurs, sur les entreprises qui pratiquent volontairement ou non des retards de paiement.
La réalité, c'est qu'encore une fois, on a voulu faire une loi générale qui s'applique à tous sans distinction. La loi de modernisation de l'économie de 2008 a raccourci à trente jours les délais de paiement. C'est très bien pour les petits producteurs qui se heurtaient aux pratiques déloyales et abusives des grandes surfaces et des géants de la distribution. Néanmoins, cela ne permet pas de faire la différence entre les grandes entreprises et les TPE-PME qui font face à des difficultés de trésorerie.
La LME a également prévu la possibilité de fixer des délais plus longs par accord interprofessionnel. C'est ainsi que plusieurs secteurs professionnels ont conclu des accords dérogatoires successifs. Cela ne suffit pas, cependant, pour les petits commerçants et les artisans, qui ont besoin de plus de temps. Il conviendrait donc d'ajuster la réglementation, en prenant mieux en compte, par exemple, le chiffre d'affaires ou la masse salariale. Comptez-vous laisser plus de marges de manoeuvre aux petits commerçants pour payer leurs fournisseurs ? Allez-vous affiner la réglementation en matière de délais de paiement ?
Je l'ai dit tout à l'heure, si vous vouliez vraiment protéger les entreprises, il aurait fallu accepter d'accorder aux fournisseurs un statut privilégié dans la hiérarchie des créanciers à rembourser en cas de liquidation judiciaire. Les entreprises auraient pu remonter dans l'ordre de paiement et devenir moins vulnérables en cas de défaillance de leurs clients. Quelles sont vos intentions en la matière ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Sur les deux questions que vous posez, nous partageons vos priorités : lorsqu'on réduit les délais de paiement, on rend d'abord du crédit ou de la trésorerie aux TPE et aux PME. Mais, en l'espèce, je ne suis pas certain que les deux solutions que vous proposez soient les bonnes. Imaginons que l'on déclare les délais de paiement plus longs pour les petites entreprises que pour les grosses : on amènerait les petites entreprises à ne plus se faire confiance mutuellement. Une petite entreprise aurait en effet intérêt à se fournir auprès d'une grosse entreprise dont elle sait qu'elle sera payée à l'heure. La mesure induirait donc des effets de bord.
J'ajoute qu'à mon sens, votre proposition ne peut pas fonctionner, car, légalement, elle ne pourrait pas s'appliquer seulement de petite entreprise à grande entreprise. Je n'en suis pas certain, mais il me semble que, si l'on peut éventuellement établir une différence en termes de délais de paiement selon la taille des entreprises, on ne peut pas prévoir de distinctions en fonction du client.
Quant à modifier l'ordre des créanciers, la mesure ne saurait s'appliquer de manière rétroactive. Lorsqu'on contracte une créance,…
M. Christophe Naegelen. Les défauts de paiement s'accentuent !
M. Cédric O, secrétaire d'État. …on le fait en fonction d'une situation, qui ne peut être modifiée a posteriori. En outre, si l'on commence à rétrograder les banques dans la liste des créanciers, on touche au crédit. Dans une autre vie, j'ai eu l'occasion de travailler sur les entreprises en difficulté. C'est un sujet extrêmement sensible, dont les effets collatéraux sont importants sur le financement de l'économie et les relations entre les entreprises. Les périodes de crise sont le moins bon moment pour le traiter : ce n'est pas dans un tel contexte qu'on peut modifier des éléments en créant de l'incertitude, ce qui priverait certains acteurs d'intervenir dans l'économie. Cela n'empêche pas que la question puisse être posée de manière plus globale.
M. le président. La parole est à Mme Mireille Clapot.
Mme Mireille Clapot. Moi aussi, je vais vous parler du pire scénario, des factures qui mettent de plus en plus de temps à être réglées, de la trésorerie qui s'assèche petit à petit jusqu'à la cessation de paiement, voire la fermeture définitive. Ce scénario noir, beaucoup d'entreprises le redoutent à juste titre en ce moment, du fait de la crise de la covid-19, mais la vague de faillites annoncée cet automne reste pour l'heure contenue. Selon les greffiers des tribunaux de commerce de France, on a enregistré entre septembre et novembre 2020 l'ouverture d'environ 7 500 procédures collectives, soit une baisse de 37% par rapport à la même période en 2019. Pendant les douze derniers mois, le nombre de défaillances a chuté d'un tiers dans notre pays. La catastrophe est donc évitée pour l'instant.
Les entreprises ont été soutenues par l'État. Elles en sont très reconnaissantes et nous le disent. Les URSSAF n'assignent plus aucune entreprise au tribunal. Reste que les aides publiques auront une fin. Il faudra rembourser les prêts garantis par l'État. Les entreprises craignent donc une explosion des défaillances en 2022.
Pour les économistes d'Euler Hermes, le moment décisif pourrait intervenir au deuxième trimestre de 2021, lorsque les entreprises françaises paieront les impôts de production et les acomptes trimestriels d'autres taxes. L'allongement des délais de paiement interentreprises dont il est ici question peut constituer un signal faible, annonciateur d'une vague de défaillances. Les chambres de commerce et d'industrie – CCI – sont très sollicitées en ce moment pour des problèmes de paiement de factures. Ce motif, qui représentait 25% des saisines avant la crise, s'établit désormais autour de 50%.
Vous avez répondu en partie, en soulignant l'attention particulière que porte le Gouvernement aux délais de paiement, tant en surveillance qu'en action. Pouvez-vous aller plus loin en nous donnant des informations sur vos indicateurs par filières et par secteurs géographiques, et sur vos actions plus spécifiques ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Vous l'avez dit : si, pour l'instant, la crise n'a pas eu d'impact massif sur les délais de paiement, nous avons déjà perdu le gain des dernières années, à savoir deux jours de délais de paiement en matière générale. L'Observatoire des délais de paiement fournit des données de manière régionalisée et par secteurs. Cet indice nous permet de suivre la réalité des délais de paiement dans notre pays et dans notre économie. Nous attendons par conséquent avec impatience la publication de son rapport, qui doit intervenir en mars, pour ajuster ce qui doit l'être.
Dans le cadre des négociations qu'elle mène avec différentes filières, Mme la ministre déléguée Agnès Pannier-Runacher a prévu pour chaque filière des cénacles de discussion particuliers entre les entreprises pour qu'avant même qu'on sollicite le médiateur des entreprises, qui traite les cas très problématiques, on puisse ouvrir une discussion sur les délais de paiement. Soyez assurée que dès lors que nous disposerons d'indicateurs, notamment régionalisés, nous les rendrons publics – ce qui répond à votre souci de territorialiser les données. Compte tenu de l'importance des délais de paiement dans notre économie, nous surveillons les risques de défaillance des entreprises comme le lait sur le feu, ainsi que les délais de paiement réels, notamment des grandes entreprises aux plus petites. Si nécessaire, nous n'hésiterons pas à modifier les choses.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Trisse.
Mme Nicole Trisse. Le cabinet ARC a publié mardi 20 octobre 2020 la dixième édition de son baromètre, réalisé par l'IFOP – Institut français d'opinion publique –, sur la gestion de la crise de la covid-19, la trésorerie et le financement des entreprises, ainsi que les attentes des dirigeants en matière de diminution des retards de paiement.
Selon ce baromètre, l'année 2020 marque une adhésion de la majorité des entreprises au plan de soutien du Gouvernement, mais on a observé une très forte augmentation des délais de paiement pour et par les petites et moyennes entreprises. Le problème n'est pas nouveau. En mars 2020, le ministère avait déjà été alerté sur ce type d'agissements de la part de certaines grandes entreprises. Malheureusement, la crise du coronavirus a provoqué une très forte augmentation, si ce n'est une explosion, des délais de paiement.
Les PME sont davantage concernées par le phénomène. Si de nombreuses entreprises ont pu bénéficier de prêts garantis par l'État, les délais d'obtention de ces prêts ont allongé les délais de paiement. De plus, la crise sanitaire a renforcé la peur de la faillite et poussé davantage les entreprises, notamment les PME, à repousser les paiements afin de conserver de la trésorerie.
Pour contrer cette tendance, des solutions ont été évoquées, dont la notation des délais de paiement, qui permettrait plus de transparence ainsi qu'une identification des mauvais payeurs. Ce système de notation fait écho à la politique du name and shame, déjà développée par l'État, qui consiste à afficher sur le site de la DGCCR les entreprises ayant écopé d'amendes pour ne pas avoir payé leurs factures à temps. La solution ne paraît pas adaptée au contexte de crise actuel, ni à celui de l'après-crise auquel nous serons confrontés dans les mois et les années à venir.
Pouvez-vous nous faire part des mesures concrètes que vous envisagez pour lutter contre l'allongement des délais de paiement dans le cadre de la crise économique que nous traversons, sans pour autant stigmatiser durablement les entreprises ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Vous évoquez certaines solutions qui sont sur la table. Nonobstant ce que vous avez déclaré, je pense qu'en matière de délais de paiement, la transparence peut être très utile : elle crée une pression sur le mauvais payeur et permet de distinguer bons et mauvais payeurs parmi les entreprises et les collectivités. C'est pourquoi la DGCCRF s'attache à publier les sanctions et le nom des entreprises sanctionnées.
Plusieurs d'entre vous ont mentionné le recours à une agence de notation. La piste, loin d'être triviale, est intéressante. Je rappelle que la DGCCRF met beaucoup de temps avant d'établir le fait qu'une entreprise paie mal.
M. Pierre Cordier. Il faudrait une agence privée !
M. Cédric O, secrétaire d'État. La procédure est compliquée, notamment quand il s'agit d'une grande entreprise, car il faut prendre en compte un grand nombre de factures et pénétrer dans divers systèmes d'information. Bruno Le Maire est prêt à travailler sur le sujet, qui appelle une instruction plus poussée.
Nous pensons toutefois qu'il existe un problème de transparence sur le paiement des grandes collectivités territoriales – s'agissant de l'État, il est déjà connu. C'est pour cela que vous avez voté dans la loi PACTE la transparence des délais de paiement des collectivités territoriales, qui sera effective dans les prochains mois.
S'agissant des délais de paiement en général, j'ai indiqué, dans ma réponse à Mme Clapot, que les chiffres dont nous disposons – le nombre de saisines du médiateur des entreprises, notamment – n'indiquent pas de dérapages trop importants à ce stade. La solution retenue est donc celle du prêt garanti par l'État, afin de soulager la trésorerie des entreprises ; toutefois, nous n'excluons pas de prendre d'autres mesures si jamais nous constations, lors de la publication du rapport de l'Observatoire des délais de paiement, un nombre de dérapages significatif.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Corneloup.
Mme Josiane Corneloup. Après avoir consulté de nombreuses entreprises de ma circonscription, il s'avère que celles-ci ne connaissent pas nécessairement un allongement des délais de paiement. Au contraire, le PGE a contribué à l'amélioration de la trésorerie et les délais de paiement sont respectés. En revanche, elles me signalent des inquiétudes concernant, d'une part, le remboursement du PGE, qu'il semble indispensable de différer dans la mesure où les effets de la crise se feront davantage sentir en 2021-2022, et, d'autre part, le remboursement des assurances-crédit garanties par l'État, dont les primes ont considérablement augmenté alors que les montants garantis, eux, ont stagné. Les banques et les assurances devraient être des partenaires dans cette crise, me semble-t-il.
La situation est différente pour les commerces, et notamment pour les nombreux commerces alimentaires restés ouverts dont le chiffre d'affaires a connu une baisse importante – de l'ordre d'un tiers, voire de 40 % – et qui ne peuvent prétendre à aucune aide, ces dernières étant conditionnées à une perte minimum de 50 % du chiffre d'affaires. Ces commerçants qui doivent continuer d'assumer le règlement de leurs dépenses courantes, de leurs prêts et de leur loyer sont, eux, en grande difficulté. Il est indispensable de procéder à des exonérations ou à des baisses de charges susceptibles de soulager la trésorerie très tendue de commerces qui doivent en outre, dans certains départements comme le mien, la Saône-et-Loire, composer avec un couvre-feu fixé à dix-huit heures.
La commande publique est régulièrement évoquée. Plusieurs dirigeants de groupes de travaux publics de ma circonscription font état de carnets de commandes vides en raison d'une dégradation marquée de la commande publique, et le volume des appels d'offres reste très en-deçà de ce qu'il était en 2019. Les entreprises de travaux publics mettent d'ores et déjà un terme aux contrats d'intérim, et le nombre d'heures travaillées effectuées par leurs salariés est en net recul ; pour l'instant, les effectifs permanents restent stables mais, si les donneurs d'ordres publics, en l'occurrence les collectivités territoriales, ne se mobilisent pas pour enclencher le redémarrage de l'activité, l'année qui vient risque d'être particulièrement difficile et destructrice d'emplois dans le secteur.
Or les communes, les intercommunalités et les départements ont subi des baisses de recettes importantes – notamment une baisse de la DGF, la dotation globale de fonctionnement – en même temps que leurs dépenses étaient majorées par la crise sanitaire. Leur budget sévèrement réduit les accule à un attentisme forcé. Quelles mesures comptez-vous prendre pour rassurer les collectivités territoriales et les encourager à jouer leur rôle essentiel d'agent économique ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Madame Corneloup, les situations que vous avez évoquées au début de votre intervention confirment ce que nous disions, à savoir qu'il n'y a pas eu, à ce stade, de dérapage majeur et global concernant les délais de paiement. Nous verrons ce qu'il en est dans les statistiques qui seront publiées en mars prochain.
Vous évoquez le cas de certains commerces d'alimentation restés ouverts qui ont connu une baisse de fréquentation. Sauf erreur de ma part, ceux-ci peuvent bénéficier du dispositif du chômage partiel en cas de baisse significative de leur chiffre d'affaires, ce qui est une forme d'aide de l'État, ou du moins des organismes de sécurité sociale. Quoi qu'il en soit, je vous assure que Bruno Le Maire et l'ensemble des ministres de Bercy veillent à ajuster les dispositifs au plus près des besoins de chacune des filières. Le nombre de bénéficiaires du fonds de solidarité a ainsi été étendu à plusieurs reprises, et les conditions d'éligibilité à ce fonds ont été revues au fur et à mesure de l'évolution de la situation sanitaire. S'il s'avérait qu'il existe un problème dans certaines filières, notamment pour le commerce alimentaire, nous n'hésiterions pas à intervenir.
Il est vrai que les travaux publics ont connu une forte baisse au premier semestre de l'année 2020 ; celle-ci est liée à la crise sanitaire, mais également – il faut le dire, puisque vous connaissez la réalité du terrain – au décalage des élections municipales et à la prise en compte de l'impératif environnemental. En effet, l'exacerbation de la sensibilité environnementale a conduit certains des maires que je connais à décaler leurs projets. La dynamique a repris au second semestre 2020, comme l'indiquent les statistiques présentées ce matin en conseil des ministres, et soyez assurée que nous restons attentifs à la situation du BTP, aux côtés des collectivités territoriales,…
M. Pierre Cordier. On se demande où !
M. Cédric O, secrétaire d'État. …car, comme on dit en économie : "Quand le BTP va, tout va."
M. le président. La parole est à M. Rémi Delatte.
M. Rémi Delatte. Nous sommes tous convaincus que les retards de paiement ont des effets délétères sur la trésorerie, sur les comptes de résultat, voire sur la survie des entreprises. Cette réalité n'est pas nouvelle ; elle est simplement amplifiée par la crise actuelle. En temps ordinaire, 25% des défaillances d'entreprises sont dues à des retards ou à des défauts de paiement : les montants passés en perte pour l'année 2019 représentaient ainsi 56 milliards d'euros. Ces défauts se produisent souvent entre professionnels, c'est-à-dire entre entreprises, et sont davantage le fruit de négligences que d'un manque de solvabilité.
En octobre 2019, avec trente-deux de mes collègues, j'ai donc déposé une proposition de loi prévoyant qu'en l'absence de contestation d'une facture entre deux professionnels, le greffier pourra conférer force exécutoire à la créance afin d'en permettre le recouvrement immédiat par les officiers ministériels. Cela réduira de facto les délais de paiement, qui sont actuellement de l'ordre de quatre à cinq mois, entre l'intervention du juge, la notification par le greffier et le recouvrement final. Monsieur le secrétaire d'État, vous m'accorderez que cette mesure de simplification est plutôt dans l'air du temps. C'est une mesure de soutien à la performance économique et, au fond, une mesure de bon sens. Ma question est donc simple : êtes-vous prêt à étudier la proposition de loi que je tiens à votre disposition ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Je partage votre avis concernant l'importance des retards de paiement dans l'économie en général. Même si mes chiffres sont différents des vôtres – 19 milliards d'euros, à ma connaissance –, il est vrai que la somme totale est considérable. Vous souhaitez modifier la procédure de recouvrement des créances entre professionnels afin de la rendre plus simple et plus rapide pour les entreprises en difficulté, et j'ai déjà répondu à plusieurs questions sur le sujet, notamment s'agissant de l'ordre des créanciers : il ne m'appartient pas, pour des raisons de périmètre ministériel, de modifier au banc cette procédure, mais je vous propose d'organiser un échange avec Éric Dupond-Moretti et Bruno Le Maire pour étudier vos propositions.
M. le président. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.
Mme Emmanuelle Ménard. Après les vagues successives de covid-19, c'est à un véritable tsunami de dépôts de bilan d'entreprises que nous devons nous préparer. Une question se pose : comment aider les entreprises à surmonter le mur de dettes accumulées, pour certaines d'entre elles, depuis des mois ? On a beaucoup parlé de l'affacturage, inversé ou non : avez-vous envisagé des mesures fiscales en vue d'encourager les entreprises à y recourir ? Par ailleurs, serait-il possible de prévoir des mesures fiscales incitatives – un allégement de l'impôt sur les sociétés, par exemple – pour les tiers qui, au lieu de racheter des créances, rachèteraient des dettes via les factures ? Elles permettraient aux entreprises débitrices qui n'ont pas les reins assez solides de se libérer d'une dette fournisseur au profit d'une dette financière qu'elles pourront lisser dans le temps sans dégrader la relation à leur fournisseur ni menacer leur activité opérationnelle.
J'ajoute deux autres suggestions. Premièrement, il serait intéressant que les banques acceptent systématiquement les financements sous forme de Dailly pour les commandes et pour les subventions publiques, et tout particulièrement pour les subventions régionales ou européennes qui tardent souvent à arriver – rappelons les trois ans d'attente pour le versement de certaines aides du FEDER, le fonds européen de développement régional.
Ma deuxième suggestion concerne le PGE. Les entreprises commencent à recevoir des courriers de remboursement pour les PGE qu'elles ont souscrits : est-il envisageable de suggérer aux établissements bancaires de prévoir douze mois de carence supplémentaires qui ne généreraient pas d'intérêts bancaires en sus de la garantie de l'État ? En effet, comment les entreprises peuvent-elles se positionner sur la durée amortissable du PGE au vu de l'incertitude économique actuelle ? Les entreprises craignent également que l'amortissement du PGE sur quatre ans maximum soit insuffisant : serait-il envisageable d'allonger sa durée à dix ans ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Cédric O, secrétaire d'État. Le Gouvernement a montré, lors de l'examen de la loi PACTE, à quel point il était favorable au développement de l'affacturage, inversé ou non, dans le but de financiariser la dette fournisseur ou client des entreprises. Si je comprends bien, le processus que vous suggérez reviendrait à baisser l'impôt sur les sociétés des banques qui prendraient en charge cet affacturage. Je ne suis pas certain que ce dispositif soit adapté dans la situation actuelle. Je rappelle qu'à ce stade, même si nous suivons la situation de près, nous ne constatons pas de dérapage global sur les délais de paiement ; pour cette raison, nous n'avons pas adopté de mesures relatives aux délais de paiement dans le cadre du traitement de la crise sanitaire. Cette position est valable jusqu'à la publication des chiffres par l'Observatoire des délais de paiement.
Concernant la deuxième partie de votre question, qui vient de m'échapper…
Mme Emmanuelle Ménard. Les PGE !
M. Cédric O, secrétaire d'État. Exactement ! Vous évoquez une adaptation des prêts garantis par l'État. La discussion sur le remboursement des PGE a évolué au fur et à mesure du développement de la crise sanitaire ; c'est un sujet que tout le monde a en tête. De toute évidence, faire passer la durée d'amortissement de quatre à dix ans aurait des conséquences importantes sur le coût du crédit pour les entreprises. À ce stade, nous estimons que les PGE sont proportionnés aux besoins et qu'ils ont été paramétrés avec justesse, mais nous pourrions envisager une adaptation si le prolongement de la crise la rendait nécessaire.
M. le président. Le débat est clos.
Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 15 janvier 2021