Interview de M. Alain Griset, ministre chargé des petites et moyennes entreprises, à Public Sénat le 2 février 2021, sur les stations de sport d'hiver et la restauration confrontées à l'épidémie de Covid-19.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Alain Griset - Ministre chargé des petites et moyennes entreprises

Média : Public Sénat

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Notre invité politique ce matin, c'est Alain GRISET. Bonjour.

ALAIN GRISET
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'être avec nous, ministre délégué chargé des Petites et Moyennes Entreprises. On est ensemble pendant 20 minutes, pour une interview en partenariat avec la Presse quotidienne régionale, représentée par Stéphane VERNAY. Bonjour Stéphane.

STEPHANE VERNAY
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Qui dirige le bureau parisien du journal Ouest France. On commence par la montagne et le couperet qui est donc tombé hier soir : les remontées mécaniques ne rouvriront pas pour le mois de février, pas de date de réouverture annoncée par le gouvernement. Est-ce que vous dites ce matin, clairement : c'est une saison blanche pour les professionnels de la montagne ?

ALAIN GRISET
Je pense qu'il faut se rendre à la réalité, aujourd'hui, telle qu'elle est. Nous avons eu hier, avec le Premier ministre, une réunion avec les différents acteurs de la montagne, pour regarder avec ces acteurs de quelle manière nous allons les accompagner, parce que je pense que l'on n'a pas la possibilité aujourd'hui de donner une visibilité suffisante pour leur permettre d'essayer de rouvrir, en tout cas pour les vacances de février.

ORIANE MANCINI
Et ni pour après ?

ALAIN GRISET
On ne peut pas aujourd'hui donner vraiment d'informations, mais pour l'instant la tendance est plutôt négative.

ORIANE MANCINI
Plutôt une saison blanche.

STEPHANE VERNAY
Qu'est ce qui s'est dégagé au cours de cette réunion ? Quels seront les accompagnements exceptionnels que vous pouvez mettre ou que vous pouvez mettre en plus pour les soutenir ?

ALAIN GRISET
Tout d'abord, vous avez raison de dire que ça va être exceptionnel, parce que, que ça soit pour les remontées mécaniques, pour lesquelles on a négocié avec l'Europe une disposition tout à fait particulière, que ça soit pour les moniteurs de ski, que ça soit pour l'ensemble des commerces, y compris dans la vallée, qui vont être concernés par les fermetures, que ça soit de même pour les industriels du secteur du ski…

STEPHANE VERNAY
En fait c'est l'ensemble de l'écosystème qui est impacté.

ALAIN GRISET
Voilà, l'ensemble de l'écosystème qui est concerné. D'ailleurs hier il y a eu des demandes, nombreuses, justifiées des acteurs de la montagne, et le Premier ministre nous a demandé de continuer d'affiner les dispositifs pour qu'au bout du compte, même si j'ai bien conscience que c'est toujours un arrache-coeur pour tout le monde de ne pas ouvrir, pas travailler, on essaie au maximum de compenser les difficultés financières.

STEPHANE VERNAY
Est-ce qu'il y a des angles morts, des trous dans la raquette, comment on fait pour penser à tout ? Parce que finalement vous avez aussi les communes qui elles-mêmes, enfin en cascade, tout le monde est impacté.

ALAIN GRISET
Oui, il y a eu par exemple le syndicat des moniteurs de ski, enfin, il est possible encore…

STEPHANE VERNAY
Mais vous avez des solutions pour tous ?

ALAIN GRISET
On va trouver des solutions pour tous, comme on le fait avec Bruno LE MAIRE à Bercy dans les autres secteurs économiques.

STEPHANE VERNAY
Et qu'est-ce qui vous pousse de plus de problèmes par rapport aux acteurs de la filière ?

ALAIN GRISET
Non, on ne peut pas dire qu'il y ait des problèmes, on dit qu'il y a des spécificités…

STEPHANE VERNAY
Tout est géré.

ALAIN GRISET
On essaie, naturellement, c'est la fonction qui est la mienne et sur laquelle le Premier ministre me demande de travailler. Au fur et à mesure qu'un acteur nous dit : eh bien voilà, vous avez oublié telle ou telle mesure, tel ou tel acteur, nous regardons comment dans les dispositifs existants ou si il faut les étendre, on peut trouver des solutions.

ORIANE MANCINI
Mais comment on fait par exemple, parce que la montagne c'est beaucoup de saisonniers, comment on fait pour indemniser ces saisonniers qui ont un statut très particulier finalement ?

ALAIN GRISET
Eh bien Elisabeth BORNE a déjà indiqué depuis plusieurs semaines, que pour les saisonniers il y aurait une prise en charge qui va être prise en compte. Alors après, naturellement, il y a de la durée qui leur permet, après la saison, de pouvoir bénéficier de droits, donc nous avons regardé ça, Elisabeth BORNE est mobilisée là-dessus, et les saisonniers ont fait partie des priorités depuis le début. On a aussi les résidences hôtelières qui sont concernées, enfin voilà. La montagne c'est un écosystème qui est très riche, en diversité.

ORIANE MANCINI
Et qui est très vaste.

ALAIN GRISET
On a la chance d'avoir des acteurs qui sont très mobilisés, qui soient même des, qui font des propositions, et donc on a un travail que je considère comme très constructif.

STEPHANE VERNAY
Est-ce que vous irez jusqu'à indemniser par exemple des propriétaires d'appartements qui ont l'habitude de louer pendant la saison et qui ne pourront pas cette année, parce qu'il n'y a pas de saison ?

ALAIN GRISET
Oui, ce que j'évoquais, les résidences hôtelières, les résidences services…

STEPHANE VERNAY
Non non, mais même les particuliers, qui sont propriétaires ?

ALAIN GRISET
Les particuliers vont toucher les loyers. En réalité…

STEPHANE VERNAY
Mais s'il n'y a pas de locations saisonnières ?

ALAIN GRISET
Le dispositif, les propriétaires ont des appartements, qu'ils ont une garantie de location par des structures, je ne veux pas citer les noms, enfin il y a 4 ou 5 grands opérateurs qui assurent les loyers des propriétaires, et donc nous on est en relation avec ces opérateurs pour compenser le manque de recettes.

ORIANE MANCINI
Qu'on soit clair Alain GRISET, le gouvernement hier a annoncé notamment une prise en charge des coûts fixes des entreprises des secteurs de la montagne. Concrètement, qu'est-ce que sont ces coûts fixes et est-ce que toutes les entreprises sont concernées ?

ALAIN GRISET
Une réponse, les entreprises concernées oui, ensuite il y a des…

ORIANE MANCINI
Quelle que soit la taille, quel que soit le chiffre d'affaires, tout le monde et concerné.

ALAIN GRISET
Oui. Il n'y a pas de critère qui exclut qui que ce soit. Naturellement ce n'est pas les mêmes, les coûts fixes des remontées mécaniques sont bien plus importants que les coûts fixes du commerçant de la vallée. Mais en tout cas, quelle que soit l'activité, l'objectif du gouvernement c'est de trouver un dispositif qui permet de compenser ces coûts fixes.

ORIANE MANCINI
Alors qu'est-ce qu'il y a dans le terme de coûts fixes, précisément ?

ALAIN GRISET
Alors après il y a une définition. Il y a encore, avec la Commission européenne une discussion d'ailleurs pas seulement pour la montagne, pour regarder bon par exemple on exclut les coûts fixes, les amortissements, les emprunts. Après, tout le reste, d'abord il faut savoir qu'il y a une prise en charge à 100% de l'activité partielle, il y a exonérations de cotisations sociales et puis après les coûts fixes, c'est tout ce qui concerne le fonctionnement classique d'une entreprise…

ORIANE MANCINI
Donc un loyer par exemple, ça, ça sera pris en charge par l'Etat ?

ALAIN GRISET
Alors, les loyers, naturellement, sans aucun doute. Il y a également les coûts d'électricité, enfin bon voilà, les coûts d'une entreprise, et on fait la liste à chaque fois, et les remontées mécaniques et des coûts fixes plus importants. Bon. Donc on prend en disposition et on a obtenu de la Commission européenne la possibilité d'avoir des dispositifs particuliers. On a encore une discussion qui n'est pas tout à fait finalisée, mais j'ai bon espoir que dans les quelques jours ça sera fait.

ORIANE MANCINI
Qu'est-ce qui bloque de la part de la Commission européenne ?

ALAIN GRISET
Non, ce sont souvent les montants, puisque là, vous savez le Fonds de solidarité qui est un des outils majeurs des quatre dispositifs qu'on met en place à côté des prêts garantis par l'Etat, activité partielle et cotisations sociales. Nous avons commencé au mois de mars dernier à 1 500 € par entreprise, avec des critères d'exclusion. Il ne fallait pas faire plus d'un million d'euros de chiffre d'affaires, il ne fallait pas avoir plus de 11 salariés. Là on est sur des dispositifs, il y a un dispositif à 10 000 € de compensation de chiffre d'affaires ou 20% jusqu'à un million d'euros. Au-dessus d'un million d'euros on arrive jusqu'à 3 millions de compensation possible, et là on a un dispositif de discussion qui permet d'aller jusqu'à 10 millions. Donc on a vraiment adapté, en fonction des situations, en fonction des besoins aussi, parce qu'on comprend bien. Vous savez, l'objectif du président de la République qui a été édicté au mois de mars dernier, c'est le dire : priorité au sanitaire, c'est ce qu'on continue à faire, mais on essaie de maintenir le tissu économique. Pourquoi ? Parce qu'on n'est pas dans une crise économique classique, on est d'abord sur une crise sanitaire, et l'objectif, au moment où on tourne la clé de la reprise, c'est qu'on puisse très vite reprendre, ce qui s'est passé d'ailleurs au mois de mai dernier, pour au bout du compte, que notre pays, à côté de la reprise, aussi en profite pour se transformer et que la petite lumière étant au bout du tunnel, la France soit plus forte sur le plan économique qu'elle ne l'était avant.

ORIANE MANCINI
Juste, pour finir, sur la montagne, est-ce que tout a été annoncé hier ou est-ce que vous réfléchissez à de nouvelles aides encore pour ce secteur ?

ALAIN GRISET
Non, hier on a bien identifié les demandes. Je vais avec Bruno LE MAIRE, regarder encore avec les acteurs comment on doit finaliser les quelques aspects qui restent encore à finaliser, mais nous serons prêts le moment venu, de façon à les accompagner.

ORIANE MANCINI
C'est quand le moment venu ?

ALAIN GRISET
Oh, je vais dire, c'est une question de 15 jours, 3 semaines, mais enfin finir la discussion avec la Commission européenne, mais enfin il n'y a aucun doute qu'on indemnisera, et d'ailleurs même j'ai indiqué hier qu'on pouvait commencer à avoir des demandes pour payer une partie pour que la liquidité soit disponible assez vite, parce qu'il y a aussi une question de liquidité immédiate.

ORIANE MANCINI
Oui, c'est ça, parce que les aides elles ont été annoncées, mais elles vont arriver quand, concrètement, à ces professionnels de la montagne ?

ALAIN GRISET
Pour le mois de janvier, les demandes peuvent être faites très vite au mois de février, et même si dans un premier temps on n'a pas le dispositif finalisé, on donnera déjà les dispositions existantes, leur permettant de commencer à avoir des aides. Par exemple si on n'a pas totalement terminé les négociations sur les 10 millions, la négociation sur les 200 000 et 3 millions sera terminée, pourra aller jusque-là.

STEPHANE VERNAY
Bon, si on vous suit bien, il n'y aura pas de mouvement de contestation ou de fronde autour des problématiques de la montagne, tout est géré.

ALAIN GRISET
Je ne sais pas, je n'espère pas…

ORIANE MANCINI
Qu'est-ce qu'ils vous ont dit hier les élus, quand vous leur avez annoncé ces mesures ?

ALAIN GRISET
Non mais les élus, eux, sont là pour nous demander clairement un accompagnement maximum, au regard de la situation qu'ils vivent, mais je n'ai pas entendu, je n'ai pas senti de volonté de contestation. Il y a une réalité qui est là, sanitaire, on a à faire à des élus qui sont responsables et qui comprennent la situation qui nous amène. Vous savez, ce n'est pas de gaieté de coeur que le président, le Premier ministre dit qu'on doit fermer la montagne, on la ferme pour des raisons claires et nettes sanitaires, et donc à partir du moment où nous fermons, il est normal que nous essayons de compenser et d'accompagner.

STEPHANE VERNAY
Alors, à propos de contestation, c'est chez les restaurateurs que ça ne se passe pas très bien, il y avait un mot d'ordre national hier, est-ce qu'il a été suivi des restaurateurs qui disaient qu'ils allaient rouvrir leur établissement pour la journée ?

ALAIN GRISET
Tout d'abord…

STEPHANE VERNAY
Vous avez eu des retours là-dessus ?

ALAIN GRISET
Je ne crois pas qu'il m'arrive de passer 2 jours sans avoir de réunions avec les restaurateurs. C'est un secteur que nous accompagnons beaucoup, avec lequel nous avons une discussion régulière, sur tous les sujets…

STEPHANE VERNAY
Du coup, le mouvement d'hier n'était pas fondé pou vous ?

ALAIN GRISET
Très clairement, bon, avant tout je pense, il faut que je rappelle que je comprends très bien la difficulté intellectuelle, psychique, morale, de ceux qui considèrent qu'il y en a marre de ne pas travailler. Pour les restaurateurs, l'important c'est d'être derrière son fourneau, de voir ses clients, et que c'est très difficile, quel que soit ce qu'on fait sur le plan financier, de ne pas ouvrir. Ça je comprends très bien, par mon parcours, par le fait que je connais tous ces gens très bien, je comprends et j'accepte ce qu'ils nous disent, parce que je sens moi-même, et donc il n'y a pas des difficultés. Mais par ailleurs les dispositifs qui ont été mis en place, sont sans commune mesure avec ce qui était imaginé, et donc très hautement je vous dis : il est inacceptable et nous n'acceptons pas que certains bravent la règle, vont à l'encontre de la loi. Et les mesures seront prises, Bruno LE MAIRE l'a dit hier, très fermes, de fermeture administrative, alors ils sont fermés mais ça peut aller beaucoup plus loin, et puis surtout après derrière, dès qu'il y a quelqu'un qui ne respecte pas cette fermeture, ça sera Stop au Fonds de solidarité, un mois la première fois, et si jamais il y a récidive, ça sera stop au Fonds de solidarité d'une façon globale. Je rappelle quand même…

ORIANE MANCINI
Est-ce qu'il y a eu des sanctions ? Est-ce qu'il y a déjà eu des sanctions ? Parce que Bruno LE MAIRE a annoncé ça hier matin, est-ce qu'il y en a eu sur les restaurateurs qui ont ouvert hier ?

ALAIN GRISET
Eh bien d'abord hier il n'y en a quasiment pas qui ont ouvert…

STEPHANE VERNAY
Est-ce que vous avez quelques chiffres ou un ordre…

ALAIN GRISET
Non non. Non mais c'est, je vais dire, vraiment des cas très très…

STEPHANE VERNAY
C'est marginal ?

ALAIN GRISET
Oui, très très marginal. Bon, et hier j'étais encore avec leurs représentants, donc de toute façon la profession elle-même dit stop.

ORIANE MANCINI
Elle en fait assez, la profession, justement pour dire à ces restaurateurs : n'ouvrez pas ? Pour vous le message est clair ?

ALAIN GRISET
Ah oui oui, ça a été très clair, il n'y a pas d'ambiguïté là-dessus, il n'y a pas d'ambiguïté, parce qu'on travaille avec eux tous les jours, je pense qu'au répond vraiment à leur demande. Je rappelle quand même, c'est, pour les restaurateurs les plus petits en taille, c'est 10 000 € de compensation de chiffre d'affaires, jusqu'à un million d'euros c'est 20 % du chiffre d'affaires. Je rappelle qu'eux-mêmes demandaient 15% de compensation de suite d'affaires en disant : à 15 % on arrive à couvrir les frais, nous sommes à 20%, et qu'au-delà de 1 million d'euros par mois de chiffre d'affaires, on peut aller jusqu'à 3 millions de compensation.

STEPHANE VERNAY
Beaucoup plus qu'au premier confinement ?

ALAIN GRISET
Oui, c'est sans commune mesure parce que c'était 1 500 €. Qu'à côté de ça il y a 100% de l'activité partielle, exonérations de cotisations sociales, donc sur le plan financier, très très honnêtement, je pense que nous sommes à une situation qui permet de compenser.

STEPHANE VERNAY
Par contre vous êtes obligé de tenir le même discours que pour la montagne, en réalité vous naviguez à vue, il n'y a aucune perspective à donner aux restaurateurs aujourd'hui, vous ne savez pas quand est-ce que les restaurants, les bars, pourront rouvrir, personne ne le sait.

ALAIN GRISET
Très clairement non, mais qui est capable, y compris dans le milieu médical, de nous dire à quel moment la situation sanitaire sera telle qu'on pourra dire : ouvrez ?

STEPHANE VERNAY
Mais qu'est-ce que vous pouvez donner comme perspectives du coup aux restaurateurs qui n'attendent, qui ne demandent qu'à pouvoir travailler en fait ?

ORIANE MANCINI
Et quel sera le critère pour la réouverture des restaurants ?

ALAIN GRISET
Non mais la perspective, d'abord un, il y a une perspective, c'est : on a le virus et puis on a le vaccin qui permet de dire, dès que nous serons livrés suffisamment, on va vacciner et il arrivera un moment, que j'espère le plus rapide possible, où avec le vaccin, et puis avec le comportement des Français, le pari que le président a fait, en responsabilité, c'est de dire : nous allons réussir à maintenir et à diminuer le nombre de virus par jour, le nombre de cas de personnes infectées par jour, et on va réussir à ne pas confiner, avec l'objectif qu'au fur et à mesure ce nombre descend, et combiné avec les vaccins on va avoir un croisement des courbes qui nous permettra de dire : eh bien voilà, le jour venu, bon le président avait fixé à 5 000 cas par jour, au mois de décembre, on est autour de 20 000, si on arrive à descendre en dessous de 10 000, en direction de 5 000, je pense que là on aura des perspectives plus intéressantes.

ORIANE MANCINI
Une réouverture.

STEPHANE VERNAY
Vous pensez que c'est encore faisable, c'est encore jouable ?

ALAIN GRISET
Naturellement que je pense que c'est tout à fait faisable

ORIANE MANCINI
En-dessous de 10 000, vous commencez à envisager la réouverture des…

ALAIN GRISET
Non, je ne dis pas ça, mais le président avait dit 5 000, bon, donc moi, je reste sur ce que le président a dit, mais je pense sincèrement que, entre le couvre-feu, respecté vraiment au maximum, et le fait que le variant anglais ne prenne pas le dessus, on a, là, un petit trou de souris, un passage, qui nous permet d'espérer de rester dans cette situation.

ORIANE MANCINI
Ce matin, dans le journal Le Parisien, Guillaume PELTIER, qui est le numéro. 2 des Républicains, propose de créer une TVA à 0 % pour les restaurateurs et les hôteliers et de transformer les prêts garantis par l'Etat en fonds propres. Est-ce que vous y seriez favorable ?

ALAIN GRISET
La TVA, je veux dire, à plusieurs reprises, il y a eu des demandes, la réponse a toujours été très claire, nous n'avons pas pour objectif de toucher à la TVA, pour une raison très simple, c'est que, à un moment donné, les représentants qui proposent ça nous diront : mais attendez, le déficit de l'Etat, comment vous remboursez, bon, la TVA, c'est une des rares recettes aujourd'hui que l'Etat peut bénéficier, donc il n'a pas envisagé d'y toucher. Sur les prêts garantis par l'Etat, il y a sans aucun doute un sujet sur lequel nous travaillons déjà, puisqu'il y a eu un an de différé, nous avons renégocié, et maintenant, il y a deux ans de différé, beaucoup de représentants, à juste titre, nous disent : mais, ça veut dire qu'on va devoir rembourser 25% de notre chiffre en 4 ans, ce qui peut paraître pour des cas, certains cas, difficile. Donc, avec Bruno LE MAIRE, nous allons regarder, là aussi, avec la Commission européenne, pour voir de quelle manière il est possible ou pas, peut-être d'étaler, et de trouver des solutions…

ORIANE MANCINI
D'étaler ou d'annuler ?

ALAIN GRISET
Non, on n'envisage pas d'annuler, c'est un emprunt, vous savez, à un moment donné…

ORIANE MANCINI
C'est-à-dire que vous ne direz pas à ces entrepreneurs, à ces chefs d'entreprise : eh bien, ce que vous avez emprunté, l'Etat vous l'annule ?

ALAIN GRISET
Non, je rappelle que c'est 130 milliards, bon, ce n'est pas tout à fait anecdotique, et le principe du prêt, c'est qu'on rembourse, il y a d'autres éléments comme le fonds de solidarité, c'est une subvention qui est donnée, exonération de cotisations, c'est donné, activité partielle, c'est donné, ça a toujours dit comme tel, le prêt, c'est un prêt ; que ça soit l'Etat d'ailleurs ou que ça soit les entreprises, lorsqu'on emprunte, on paye, par contre, on peut toujours regarder les étalement, ça, c'est tout à fait possible, de façon à soulager la trésorerie les entreprises. Permettez-moi aussi de préciser qu'à côté des prêts garantis par l'Etat, il va y avoir les prêts participatifs qui vont d'ailleurs être hors bilan, il y a possibilité pour ceux qui ont besoin de fonds propres d'avoir des avances remboursables, donc en termes de liquidités, on a un certain nombre d'outils pour accompagner les entreprises.

STEPHANE VERNAY
Il n'y a pas un risque qu'un certain nombre de ces prêts ne soient pas remboursés simplement parce que les entreprises font faillite, où est-ce qu'on en est à ce niveau-là, notamment sur les petites et les moyennes entreprises ?

ALAIN GRISET
Pour l'instant, la BANQUE DE FRANCE nous a dit qu'il y a à peu près 65% des prêts qui n'ont pas été utilisés, qui n'ont pas été utilisés…

STEPHANE VERNAY
Mais sur les faillites, les entreprises qui ferment ?

ALAIN GRISET
Bon, eh bien, écoutez, pour l'instant, sur les faillites, on a 30% de faillites en moins en 2020 qu'on en a eu en 2019…

STEPHANE VERNAY
Comment vous expliquez ça, c'est la force du dispositif mis en place ?

ALAIN GRISET
Oui, c'est l'accompagnement de l'Etat, bon. Ce que nous essayons…

STEPHANE VERNAY
Est-ce que ça va tenir en 2021 ?

ALAIN GRISET
C'est notre objectif, l'objectif, c'est d'avoir des dispositifs qui permettent d'accompagner les entreprises les plus en difficulté…

STEPHANE VERNAY
Il y a bien un moment où ça s'arrêtera, ça ne peut pas…

ORIANE MANCINI
Oui, qu'est-ce qui va se passer après le quoi qu'il en coûte, parce que là, pour le moment, l'Etat est derrière ces entreprises, Bercy a été très clair…

STEPHANE VERNAY
Ça ne peut pas durer éternellement…

ORIANE MANCINI
Une fois que la crise sanitaire sera passée, le quoi qu'il en coûte, ça sera terminé. Qu'est-ce qui va se passer pour ces entreprises après ?

ALAIN GRISET
Eh bien, là, on est dans une logique normale de l'économie, l'Etat accompagne parce qu'il y a la crise sanitaire et qu'il faut accompagner les entreprises, à partir du moment où on sera dans une économie qui reprendra un fonctionnement normal, l'Etat n'a pas vocation à financer sans arrêt, parce que c'est l'argent public…

ORIANE MANCINI
Ça veut dire que le plus dur est venir pour les petites et moyennes entreprises ?

ALAIN GRISET
Non, ça veut dire qu'il faudra… on va regarder ça naturellement au quotidien, on a un modèle qui a été ponctuel mais qui peut peut-être nous servir d'élément de comparaison, c'est ce qui s'est passé entre le 11 mai dernier et le mois de septembre, au moment où il y a eu la reprise, la reprise a été assez dynamique, et globalement, on n'a pas vu entre mai et septembre une accélération des défaillances, on ne l'a pas vue, on ne l'a pas mesurée, c'est du concret, c'est du vécu. Donc la question, est-ce qu'il y aura en 2021 plus de défaillances qu'en 2020 ? Peut-être, parce que, admettons qu'on reprenne la vie économique classique, on devrait être à peu près à 50.000 défaillances, nous étions 35 000, ça, c'est l'étiage classique.

STEPHANE VERNAY
C'est l'étiage habituel.

ALAIN GRISET
Donc qu'on reprenne 50 000, à la limite, même si c'est toujours une défaillance, mais, d'ailleurs, les défaillances, c'est quelquefois des gens qui arrêtent, parce que c'est la retraite, enfin, bon, ce n'est pas toujours…

STEPHANE VERNAY
Vous espérez qu'on sera dans l'épure…

ALAIN GRISET
Donc si on est dans l'épure, on sera à peu près dans une année normale. Est-ce qu'on en aura un peu plus pour rééquilibrer ce qu'il y a eu en moins en 2020, c'est possible, mais la moyenne, la question, c'est : est-ce que la moyenne 2020-2021…

STEPHANE VERNAY
Sur les deux années…

ALAIN GRISET
Sera à peu près, sur les deux années, comme une année habituelle d'une économie normale, c'est un des enjeux, en tout cas, nous regardons, les dispositifs sont très puissants, nous allons aussi regarder dans certains secteurs qui vont reprendre peut-être plus doucement, par exemple, l'événementiel, quand on va avoir re-décider la mise en place des congrès, quelquefois, des foires, des salons, il est possible qu'il y ait une durée pendant 3 mois, 4 mois, pendant laquelle l'activité n'aura pas tout à fait repris, peut-être qu'on regardera à accompagner ces secteurs pendant cette période-là. Donc il n'est pas question naturellement de continuer à appuyer aussi fort tout le monde longtemps…

STEPHANE VERNAY
Mais vous pouvez élaborer des pistes d'accompagnement en sortie de crise…

ALAIN GRISET
Mais on peut par secteur, en sortie de crise, d'accompagner, un peu à la fois en diminuant pour qu'au bout du compte, chacun puisse reprendre une activité normale.

ORIANE MANCINI
Un mot sur le télétravail sur lequel le gouvernement compte pour faire baisser cette fameuse courbe de contamination, est-ce que les petites et moyennes entreprises jouent suffisamment le jeu, est-ce que les contrôles vont être accrus ?

ALAIN GRISET
Tout d'abord, vous voyez bien que toutes les activités ne permettent pas d'avoir un taux de télétravail identique, quand on est dans le bâtiment…

ORIANE MANCINI
C'est dans les entreprises qui le peuvent…

ALAIN GRISET
Dans celles qui le peuvent, je pense que les petites entreprises jouent le jeu aussi bien que les grandes, avec, peut-être, une petite différence, c'est la question de la relation humaine de l'entreprise, y compris les salariés d'ailleurs, maintenant, tiennent beaucoup à pouvoir garder cette relation avec leurs collègues, avec leur employeur, parce que dans une entreprise, le contact aussi, le lien personnel, dans le l'ambiance de l'équipe, dans les projets, dans l'élaboration de la stratégie, ça compte, donc quand c'est possible, je pense que, comme les grandes entreprises, les petites entreprises le font, mais aujourd'hui, on voit bien qu'il y a, y compris même chez les salariés, une volonté de mixer, plutôt que d'avoir uniquement du télétravail, d'ailleurs, c'est ce qu'a dit Elisabeth BORNE, je pense qu'il faut qu'on trouve le juste milieu…

ORIANE MANCINI
Donc pas de contrôles renforcés pour les entreprises ?

ALAIN GRISET
Il y a eu avec les partenaires sociaux là-dessus un travail qui s'est fait, y compris avec les salariés, les choses se sont passées correctement, donc il y aura des contrôles, comme toujours, il y a les contrôles, mais pas particulièrement sur ce sujet-là.

STEPHANE VERNAY
Une question sur la fermeture des grands centres commerciaux qui a été annoncée vendredi, donc pour application, mise en application dès le samedi soir, dès le lendemain soir suivant, est-ce que ça a été bien perçu par les commerçants le fait de changer de stratégie, notamment le fait d'autoriser les grandes surfaces à ouvrir tous leurs rayons contrairement à ce qui s'est fait un temps ?

ALAIN GRISET
Tout d'abord, lorsqu'il y a eu fermeture dans la grande distribution de certains rayons, c'était pour mettre à égalité économique, le commerce de centre-ville qui était fermé.

STEPHANE VERNAY
Mais ça n'a pas été très bien compris, et surtout, pas très bien vécu par les clients ou les commerçants concernés.

ALAIN GRISET
Vous savez, des décisions comme celle-là ont toujours des effets quelquefois d'incompréhension ou de mécontentement…

STEPHANE VERNAY
Il y avait un côté un peu ubuesque quand même dans la chose…

ALAIN GRISET
Non, il y avait une volonté d'équité de traitement entre ceux qui étaient fermés, pour avoir une équité de traitement avec la grande distribution qui était ouverte, mais avec des rayons fermés…

STEPHANE VERNAY
Maintenant, si vous êtes revenu dessus, c'est qu'il y avait des raisons aussi.

ALAIN GRISET
Eh bien, parce que dans un premier temps, y avait une fermeture en centre ville, et pas de fermeture dans la grande distribution. Donc il y a eu des demandes d'équité de traitement qui ont été très rapidement prises. Là, ce que nous avons constaté, parce que ça part d'un constat, c'est qu'il y avait dans les galeries marchandes, on a vu des images, on l'a constaté, à un moment donné, je veux dire, des situations, je veux dire, un peu, le métro en heures de pointe, alors qu'on demande aux théâtres, aux musées, aux Français des conditions de distanciation, et on voyait dans les galeries marchandes les gens serrés les uns contre les autres, c'était inacceptable, bon. Donc à un moment donné, notre volonté, c'est d'éviter le brassage, d'éviter d'avoir la possibilité de regroupement, pour arrêter la diffusion du virus. Donc nous avons considéré que les galeries marchandes, les centres commerciaux étaient aujourd'hui un des endroits dans lesquels il y avait un sujet, et donc la décision a été de fermer.

ORIANE MANCINI
Merci, merci beaucoup…

ALAIN GRISET
Merci à vous.

ORIANE MANCINI
Merci Alain GRISET d'avoir été avec nous ce matin.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 8 février 2021