Texte intégral
MARC FAUVELLE
Bonjour Agnès PANNIER-RUNACHER.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Bonjour Marc FAUVELLE.
MARC FAUVELLE
C'est vous qui avez négocié pendant des mois, au nom de la France, les contrats entre l'Europe et les laboratoires qui nous fournissent des vaccins. Avant-hier encore, Jean CASTEX assurait que le vaccin ASTRAZENECA ne posait aucun problème, pourquoi l'avez-vous suspendu ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Parce que depuis le début de cette crise, notre ligne directrice, c'est la sécurité et l'efficacité et la transparence, sécurité et transparence. Il y a des questions qui se posent, on ne peut pas se permettre qu'il y ait un doute sur l'efficacité des vaccins, donc on suspend le crayon quelques jours, on laisse l'Autorité de l'Agence sanitaire européenne prendre l'ensemble des dossiers qui sont remontés et les analyser, et nous dire très simplement ce qu'il en est. Est-ce que, effectivement, il y a un lien de cause à effet ou pas. Et vous avez raison de souligner, vous l'avez fait depuis le début de cette édition, qu'il y a très peu de cas de thromboses qui sont advenus au moment où les personnes qui les ont eus ont été vaccinées, très peu, mais est-ce que statistiquement, c'est un problème ou pas…
MARC FAUVELLE
On va rentrer dans le détail…
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est ce que doit nous dire l'Agence du médicament.
MARC FAUVELLE
On va rentrer dans le détail des soupçons qui entourent ce vaccin. Si l'Allemagne n'avait pas pris cette décision hier après-midi, honnêtement, il ne serait pas suspendu non plus en France ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Vous imaginez bien qu'on s'est parlé…
MARC FAUVELLE
Il y a eu concertation ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
On s'est parlé avec l'Italie, on s'est parlé avec l'Espagne, on s'est parlé avec l'Allemagne, et ce n'est pas un hasard si ces quatre pays, la même journée, annoncent la même décision, qui, encore une fois, est une décision de suspension de la vaccination…
MARC FAUVELLE
Il y a eu plusieurs heures d'écart entre les annonces, tout ça était un plan concerté ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Tout ça était une décision sur laquelle on s'est parlé.
SALHIA BRAKHLIA
Alors, vous dites qu'il y a eu concertation, aujourd'hui, la moitié des pays européens suspendent le vaccin ASTRAZENECA, l'autre moitié continuent de l'injecter, elle est où la coordination européenne ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais je crois que l'essentiel, c'est de savoir comment nous, nous approchons notre campagne de vaccination, et encore une fois, transparence et sécurité…
SALHIA BRAKHLIA
Eh non, parce que depuis le début, on nous vend que l'Europe agit ensemble, tous les pays européens agissent ensemble, dans ce cas précis, ce n'est pas le cas.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Dans ce cas précis, ce sont les pays qui aujourd'hui mènent la coordination sur l'approvisionnement des vaccins, vous savez qu'il y a six pays qui mènent l'approvisionnement, la coordination sur l'approvisionnement des vaccins…
SALHIA BRAKHLIA
Dont la France…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Avec la Commission européenne dont la France, dont l'Allemagne, dont l'Italie, dont l'Espagne, tout ça n'est pas complètement un hasard, et il nous paraît important, parce qu'il ne faut pas qu'il y ait de la défiance dans la population, si vous voyez des décisions qui sont prises dans d'autres pays, le risque, c'est qu'il y ait de la défiance par rapport aux vaccins, nous, notre intention, c'est d'être parfaitement transparents, c'est de prendre tous les signaux faibles, et c'est de montrer que notre dispositif de suivi des signaux faibles, des effets secondaires est parfaitement en place, et qu'à chaque fois qu'il y a une alerte, on la traite la plus professionnellement possible, et on la traite rapidement. L'Agence du médicament européenne donnera ses recommandations jeudi prochain.
MARC FAUVELLE
Alors, l'Agence européenne du médicament que vous avez citée, Agnès PANNIER-RUNACHER, rappelle depuis vendredi que dans le cas de ce vaccin ASTRAZENECA, les avantages l'emportent sur les risques, 30 cas de thromboses, c'est-à-dire des caillots dans le sang, signalés sur cinq millions de vaccinés, ça, ce sont des chiffres européens. Est-ce que vous disposez, vous, d'autres chiffres ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, nous ne disposons pas d'autres chiffres que ceux qui ont été communiqués, on a les chiffres du Royaume-Uni aussi, à peu près plus de dix millions de personnes vaccinées, un nombre de cas relativement limité, 24, de mémoire, de thromboses, et nous analysons tous ces chiffres, mais encore une fois, on ne peut pas se permettre d'avoir un doute sur le vaccin, parce que la vaccination que nous menons, c'est une vaccination sur des millions de personnes, donc c'est normal qu'on suspende le crayon…
MARC FAUVELLE
Je vous pose cette question, Agnès PANNIER-RUNACHER, parce que la proportion de thromboses, je n'y connaissais rien, il y a quelques jours, je suis comme tout le monde, il y a 67 millions maintenant de vaccinologues en France…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je vous rassure, moi, non plus…
MARC FAUVELLE
Le taux, le nombre de thromboses dans la population non vaccinée est exactement le même qu'au sein de ces cinq millions de personnes qui ont reçu le vaccin ASTRAZENECA. Si demain matin, on découvre qu'il y a eu 50 crises cardiaques dans les mois qui ont suivi l'injection de ce vaccin, et que la proportion est la même dans le reste de la population, on fera la même chose, on arrêtera à chaque fois ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, parce que là, l'enjeu, c'est de voir s'il y a une relation de cause à effet, et donc, c'est d'établir l'absence de lien de causalité ou la réalité d'un lien de causalité entre la vaccination et la survenue de l'événement…
SALHIA BRAKHLIA
Pour le moment, ce n'est pas avéré…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Donc, c'est des dossiers qu'on analyse, effectivement, vous avez raison de dire…
MARC FAUVELLE
Et trois jours, ça suffit pour le faire ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Vous avez raison de dire que, statistiquement, il n'y a pas d'éléments qui laissent à penser qu'il y a un problème avec ce vaccin. Mais, faisons l'analyse puisque, que pour certains Etats, dans certaines situations, ils ont fait remonter leurs doutes, et c'est normal d'analyser ces doutes, et c'est tout le principe de la pharmacovigilance, la pharmacovigilance, c'est de s'assurer qu'on analyse bien tous les signaux faibles et qu'on ne passe pas à côté d'une difficulté, et là, on ne passera pas à côté d'une difficulté…
SALHIA BRAKHLIA
Vous le dites, Madame la Ministre…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Mais si l'Agence du médicament européenne dit : c'est bon, on peut y aller, on repartira encore plus fort, si l'Agence du médicament européenne nous dit : il y a une précaution à prendre dans les 24 heures qui suivent, suivez bien comment vous vous sentez sur tel élément de votre santé, on appliquera la recommandation de l'Agence du médicament européenne.
SALHIA BRAKHLIA
Madame la Ministre, vous le dites, il y a très peu de cas de thromboses par rapport au nombre de vaccinés, est-ce que le principe de précaution, là, que la France prend, en fait, ce n'est pas la recherche du risque zéro, et on sait que pour un vaccin, ça n'existe pas en fait ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, mais la sécurité que nous devons aux Français ne souffre, je dirais, pas d'absence de rigueur. Et donc nous devons cette sécurité aux Français…
SALHIA BRAKHLIA
Alors, qu'est-ce que vous dites à ce 1,4 million, à peu près, de Français qui ont reçu cette première dose d'ASTRAZENECA, vous leur dites quoi aujourd'hui ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Vous savez, mes parents ont reçu cette dose d'ASTRAZENECA, et je leur dis d'être confortables, je veux dire, on a cinq millions de personnes vaccinées aujourd'hui qui sont a priori en parfaite santé suite à la vaccination. Donc, le sujet…
SALHIA BRAKHLIA
Vos parents, ils vous ont appelée pour vous dire, on est inquiet, on ne sait pas…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, ils ne sont pas inquiets, ils ne sont pas inquiets…
MARC FAUVELLE
Vous ne les avez pas appelés après la suspension ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ils ne sont pas inquiets, je vous rassure. Simplement, c'est notre travail de vérifier qu'il n'y a pas une relation de cause à effet sur des personnes qui peut-être sont sensibles à la thrombose, je ne suis pas médecin, moi, ce que je sais, c'est qu'il faut travailler avec des faits et des données, vous avez des faits, des thromboses, vous avez des données, statistiquement, elles sont peu nombreuses, mais c'est normal de vérifier qu'il n'y ait pas une relation de cause à effet et de pouvoir tout de suite rassurer les gens ou de dire : attention, il y a quelques précautions à prendre et on va les prendre…
MARC FAUVELLE
On va parler de ces contrats négociés avec les laboratoires dans un instant, du nombre de doses également qui vont arriver ou pas arriver en France et en Europe, dans les semaines et les mois qui viennent. D'abord « Le fil info » à 8h40 avec Olivia CHANDIOUX.
/// Le fil info ///
Toujours avec Agnès PANNIER-RUNACHER, la ministre chargée de l'industrie. Que prévoyaient les contrats que vous avez signés avec ASTRAZENECA en cas d'effets secondaires ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, les effets secondaires, c'est des effets qui sont courants dans les vaccins, le fait d'avoir mal au point de piquage, d'avoir…
MARC FAUVELLE
Alors, je vais préciser ma question, en cas d'effets secondaires imprévus, c'est-à-dire au-delà du mal de crâne ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, si vous parlez de faits dommageables sur la santé, ce qui n'est pas de la même nature, ce qui est prévu dans les contrats va dans le sens de la loi, vous savez qu'il y a une directive européenne qui dit que dans tous les cas où on peut faire un lien entre la négligence ou une faute du laboratoire, le laboratoire responsable, dans les cas où, en revanche, le laboratoire, au moment où il met sur le marché le médicament ou le vaccin, mais c'est valable pour d'autres produits de santé, il n'a pas les éléments scientifiques lui permettant d'anticiper un effet secondaire, il peut y avoir partage responsabilités, et c'est pour ça que depuis 2002, en France, existe un organisme, qui s'appelle l'ONIAM, et qui permet dans ces situations-là…
MARC FAUVELLE
D'indemniser les victimes…
AGNES PANNIER-RUNACHER
D'indemniser les victimes…
MARC FAUVELLE
Donc si on ne pouvait pas prévoir certains effets secondaires, les Etats devront participer à l'indemnisation des victimes. Est-ce que c'est le même contrat avec les deux autres laboratoires ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, c'est la même application…
MARC FAUVELLE
Mot pour mot ? Il n'y a pas eu de différences entre le contrat ASTRAZENECA et les deux autres, comme on a pu le lire ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, le principe, pour être très claire, le principe de base, il est liée à la directive européenne, donc, vous ne pouvez pas écrire un contrat qui dise le contraire de la loi, car la clause ne serait pas applicable, ensuite, dans la manière de rédiger la clause de responsabilité, comment on détecte le problème, au bout de combien de temps il y a une concertation, etc., chaque contrat a des clauses rédigées de manière un peu différente…
MARC FAUVELLE
Les contrats ne sont pas les mêmes en fonction des laboratoires…
AGNES PANNIER-RUNACHER
De manière un peu différente, chaque contrat ne sont pas des copiés-collés, puisqu'ils ont été négociés individuellement, et que notre responsabilité a consisté à pousser au maximum les curseurs pour protéger les Etats européens, et pour avoir le maximum de solidité dans nos contrats.
SALHIA BRAKHLIA
Ce qui vaut la suspension de l'ASTRAZENECA, ce sont ces cas de thromboses dont on a parlé avant « Le Fil info », est-ce que ça fait partie des cas imprévus, est-ce que ça veut dire qu'une personne qui est victime de thrombose après s'être vaccinée peut se retourner contre la France, contre l'Union européenne, contre ASTRAZENECA ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Encore faudrait-il que ce soit des dommages qui aient des conséquences, dans le cas d'une thrombose, en règle générale, elle est prise en charge médicalement…
MARC FAUVELLE
Si le lien était avéré ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et il faut évidemment faire un lien de cause à effet, donc là, on est encore très, très loin de la situation que vous indiquez. Aujourd'hui, on n'a statistiquement aucun problème, on n'a pas de sur-représentation des thromboses, et par acquis de conscience, parce que nous devons la sécurité et la transparence aux Français et aux Européens, on investigue pendant 72 heures.
MARC FAUVELLE
Vous les avez chez vous ou au ministère, ces contrats ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Bien sûr.
MARC FAUVELLE
Il n'est pas temps de les publier ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, nous avons des clauses de confidentialité dans les contrats…
MARC FAUVELLE
On ne peut pas imaginer qu'on les lève désormais en accord avec les laboratoires…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Juste, jusqu'au bout, la France est le pays qui a demandé à la Commission européenne de permettre de publier les contrats, ou à tout le moins, les éléments importants du contrat, parce que c'est des contrats qui sont très longs et dont la lecture n'est pas passionnante, mais par contre le prix…
MARC FAUVELLE
Je suis sûr qu'il y a des millions de personnes qui se passionneraient en ce moment…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, le prix, les quantités, les clauses de livraison, les clauses d'audit, tous ces éléments-là qui sont des éléments qui sont les éléments charnières du contrat, nous, nous avons demandé, avec Olivier VERAN et avec Clément BEAUNE, qu'on puisse les publier le plus rapidement possible, à la fin de la négociation de l'ensemble des contrats, et on est vers le point d'y arriver, puisque NOVAVAX, le contrat est en cours de rédaction, parce que nous pensons qu'il faut de la transparence vis-à-vis de la population européenne et vis-à-vis des députés européens et de chaque nationalité…
MARC FAUVELLE
Les laboratoires sont prêts à le faire à votre connaissance ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Les laboratoires ne souhaitent pas qu'il y ait de publication des contrats avant la fin des négociations pour des raisons évidentes, c'est qu'ils négocient avec d'autres pays et ils estiment…
MARC FAUVELLE
Mais dès que les négociations sont terminées, on peut y aller ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et ils estiment que cette information peut poser problème, ceci dit, moi, j'ai donné ma position avec Olivier VERAN, le gouvernement français a donné sa position…
SALHIA BRAKHLIA
Et la Commission européenne dit quoi, oui ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
La Commission européenne indique qu'elle va examiner cette demande, mais je crois que c'est essentiel d'avoir cette transparence, c'est essentiel, et si nous la demandons fortement, et de toute façon, c'est une règle du jeu, je veux dire, de rendre compte de ce que nous faisons au niveau public, c'est une règle du jeu, nous devons des comptes aux citoyens européens, nous devons des comptes aux citoyens français. Donc pour moi, la question de savoir si à un moment, les labos sont contents ou pas contents, ne se pose pas dans ces termes.
SALHIA BRAKHLIA
Agnès PANNIER-RUNACHER, ASTRAZENECA devait fournir six millions de doses à la fin du mois, 9,2 millions en avril, mais des retards de livraison ont été annoncés, finalement, combien il y en aura-t-il ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, ASTRAZENECA a livré 2,7 millions de doses, il prévoit de nous livrer à peu près 150.000 doses cette semaine et la semaine prochaine, et 1,5 million la semaine suivante…
MARC FAUVELLE
Alors, pardon, là, on est un tout petit peu perdu…
AGNES PANNIER-RUNACHER
1,8 million au total…
MARC FAUVELLE
Sur les six millions de doses qui devaient être fournies au mois de mars, on en aura combien ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Sur les six millions de doses qui devaient être fournies au mois de mars, moi, je vais vous faire le total depuis le début des livraisons…
MARC FAUVELLE
Oui, mais alors là, on n'y comprend plus rien.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Pardon.
MARC FAUVELLE
Mars, avril, 15 millions de doses prévues, combien arrivent ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, je vais le refaire. Ils vont nous livrer 25 % des doses qui étaient prévues, c'est tout simple.
MARC FAUVELLE
D'accord. Les autres, elles sont où ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Les autres, c'est justement le point sur lequel nous voulons avoir une plus grande transparence de la part d'ASTRAZENECA, il y a plusieurs sites de production, ils ont un site qui est en Belgique qui peine à produire, c'est très bien, mais ce n'est pas le seul site, et le contrat, certes, indique qu'une partie des livraisons doivent être livrées depuis le site belge, mais n'empêche absolument pas de livrer des doses depuis d'autres sites.
SALHIA BRAKHLIA
Alors justement, est-ce que certaines doses qui étaient censées arriver en France ou en Europe d'ailleurs, ont été envoyées ailleurs ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Eh bien, c'est la question que nous posons à ASTRAZENECA, et sur laquelle nous souhaitons avoir…
SALHIA BRAKHLIA
Et vous n'avez pas de réponse, ça fait plusieurs jours que vous posez la question…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Un plus grand niveau de détails que celui que nous avons aujourd'hui, parce que nous avons relevé des contradictions dans les indications que nous ont données ASTRAZENECA, comme vous le savez, nous avons envoyé un contrôle, une inspection sur l'usine belge et sur les sites qui faisaient le flaconnage après l'usine belge. Sur ces usines-là, il n'y a pas eu, à notre connaissance, et d'après les inspections de nous avons faites, d'envoi vers des pays tiers. En revanche, et nous avons bloqué avec l'Italie, comme vous le savez…
MARC FAUVELLE
Une cargaison qui devait partir vers l'Australie…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Une cargaison qui devait partir vers l'Australie. En revanche, nous avons bloqué certaines cargaisons, et en revanche, nous savons qu'il y a d'autres usines qui produisent pour des pays étrangers et qui pourraient parfaitement fournir le marché de l'Union européenne…
SALHIA BRAKHLIA
Lesquelles ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Pour résumer, l'enjeu, on peut très bien comprendre qu'il y ait une difficulté de monter en capacité industrielle, je le rappelle, c'est une prouesse industrielle, une prouesse technologique que sont en train de faire ces trois premiers laboratoires qui produisent, ça, c'est acceptable, en revanche, 25% d'un contrat 25% d'un contrat sur une clause qui est écrite mot pour mot exactement comme celle du Royaume-Uni…
MARC FAUVELLE
Ça, on n'en sait rien, puisqu'ils ne sont pas publiés…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Si, si, ça, on le sait. Et vous pouvez vous reporter, puisque le contrat ASTRAZENECA, on sait le voir sur Internet, il est accessible au Royaume-Uni et en Europe, c'est mot pour mot la même clause de " Best efforts ", ce n'est pas tout à fait la même réussite, et vous voyez bien que là, il y a une question de responsabilité des dirigeants du laboratoire et des membres de son conseil d'administration.
MARC FAUVELLE
Est-ce que des doses de ce vaccin ASTRAZENECA fabriquées au Royaume-Uni qui étaient censées arriver en Europe sont finalement restées là-bas ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est un point sur lequel on doit avoir une plus grande clarté, moi, je ne peux pas vous répondre aujourd'hui nettement oui ou non, parce que ce n'est pas très clair.
MARC FAUVELLE
Que vous dit Boris JOHNSON quand vous l'interrogez aujourd'hui, il doit être au courant…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Boris JOHNSON, il nous dit que, en aucune façon, il y a des doses qui ont été échappées, et qui auraient bénéficié au Royaume-Uni, alors qu'elles devaient bénéficier à l'Union européenne, il est net sur ça…
MARC FAUVELLE
Et ASTRAZENECA vous dit la même chose ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
ASTRAZENECA est plus évanescent dans ses explications.
MARC FAUVELLE
A part faire les gros yeux au laboratoire ASTRAZENECA, qu'est-ce que vous pouvez faire ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Une entreprise a une responsabilité contractuelle, ses dirigeants, et c'est un contrat, nous sommes dans un dialogue contractuel, donc, oui, nous avons des leviers de discussions et de négociations avec ASTRAZENECA, le commissaire BRETON est d'ailleurs à la manoeuvre aujourd'hui pour faire évoluer et obtenir un plan d'action très clair de la part d'ASTRAZENECA pour obtenir plus de doses, plus de doses qui peuvent venir de différents sites de production d'ASTRAZENECA. Ils produisent en Chine, ils produisent en Inde, ils produisent aux Etats-Unis, ils produisent au Royaume-Uni et ils produisent dans plusieurs usines en France.
MARC FAUVELLE
Y avait-il des sanctions prévues dans les contrats que nous n'avons pas pu lire ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, ça ne se formule pas comme ça, c'est-à-dire que vous pouvez…
MARC FAUVELLE
On n'a pas prévu de mécanisme de sanctions si les entreprises trichaient par exemple sur l'envoi des doses ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Eh bien, quand vous trichez, vous ne respectez pas le contrat, donc naturellement, vous pouvez être devant le juge et avoir des sanctions pour non-application du contrat.
SALHIA BRAKHLIA
Non, mais il parle de pénalités, Marc, j'ai l'impression…
AGNES PANNIER-RUNACHER
En revanche, vous n'avez pas de pénalités automatiques, puisque la question de la livraison, c'est pour ça que vous avez une clause de " Best efforts ", vous êtes sur une prouesse industrielle. Au moment où on signe les contrats, et je rappelle que c'était, on fige le contrat, c'est cet été, cet été, personne n'imagine que l'on va avoir trois producteurs de vaccins qui seront en place au mois de janvier, personne…
SALHIA BRAKHLIA
Donc on a dit aux laboratoires : faites du mieux que vous pouvez en fait, c'est ça ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Donc on dit aux laboratoires, " Best efforts ", c'est ça, c'est une clause juridique, ce n'est pas : faites du mieux que vous pouvez, et puis, si vous cachez des doses sur les côtés, il ne se passera rien, c'est : dans la mesure de ce que vous avez réussi à faire, vous nous devez le nombre de doses prévues. Et il faut quand même avoir en tête…
MARC FAUVELLE
Si jamais ce n'était pas le cas, Agnès PANNIER-RUNACHER…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Pardon. Il faut quand même avoir en tête que vous ne pouvez pas exiger d'une entreprise, alors que ça n'a jamais été fait dans le monde, je le rappelle, cette rapidité pour produire des vaccins, cette rapidité pour produire des vaccins dans ces quantités astronomiques n'a jamais été réalisée auparavant dans le monde.
MARC FAUVELLE
S'il était avéré qu'ASTRAZENECA n'a pas fourni sciemment toutes les doses qu'elle devait fournir à l'Union européenne, que se passerait-il ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, là, nous pouvons engager la responsabilité des dirigeants.
MARC FAUVELLE
Et donc ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Et donc, nous pouvons effectivement obtenir…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Les attaquer ?
SALHIA BRAKHLIA
Les mettre en justice…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Alors, encore une fois, on peut les attaquer…
MARC FAUVELLE
Que disent les contrats sur ce point ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, non, mais très simplement, un contrat non respecté, vous l'attaquez devant le juge, mais, moi, je suis pragmatique, mon sujet n'est pas que ASTRAZENECA soit cloué au pilori dans quelques mois devant un juge, mon sujet est d'avoir des doses, mon sujet est de vacciner les Européens et de vacciner les Français…
MARC FAUVELLE
Donc on ne peut pas se fâcher avec eux ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Donc c'est d'utiliser, si, on peut se fâcher avec eux, mais c'est d'utiliser la pression du non-respect du contrat pour qu'ils sentent, comme on dit, le souffle, le souffle chaud sur leur…
MARC FAUVELLE
Vous pensez que le patron d'ASTRAZENECA tremble en ce moment, là, devant l'Europe, en ce moment, devant l'Europe ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je pense qu'il est sur la sellette et qu'il le sait parfaitement.
MARC FAUVELLE
Il est sur la sellette et il le sait parfaitement.
AGNES PANNIER-RUNACHER
Tout à fait.
MARC FAUVELLE
C'est-à-dire ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est-à-dire qu'il a une responsabilité, vous avez une responsabilité fiduciaire dans une entreprise, vous devez rendre des comptes aussi, lorsque vous ne respectez pas un contrat, vous devez rendre compte de cette responsabilité, elle peut effectivement vous poser des problèmes, des problèmes individuels, de responsabilité.
MARC FAUVELLE
Vous restez avec nous, Agnès PANNIER-RUNACHER, il est 08h52, « Le Fil info », Olivia CHANDIOUX.
/// Le Fil info ///
SALHIA BRAKHLIA
Toujours avec Agnès PANNIER-RUNACHER, ministre chargée de l'industrie. Les Etats-Unis, eux, disposent d'un stock de 30 millions de doses de vaccins ASTRAZENECA, mais qu'ils ne peuvent pas utiliser, car le vaccin n'est pas homologué là-bas, est-ce qu'on leur demande aux Etats-Unis nous envoyer toutes ces doses ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
On est en discussion avec les Etats-Unis, non seulement sur la possibilité d'avoir accès à ces doses d'ASTRAZENECA que, effectivement, ils n'utilisent pas aujourd'hui, qu'ils pourraient utiliser demain lorsqu'ils valideront l'autorisation de mise sur le marché dans leur propre pays, mais nous discutons aussi sur tous les éléments qui peuvent aujourd'hui constituer des goulets d'étranglement pour la production de vaccins…
SALHIA BRAKHLIA
L'exportation ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Exportation, et vous savez qu'il faut avoir en tête que nous sommes interdépendants, les Etats-Unis ont besoin de l'Europe pour produire des vaccins, l'Europe a besoin des Etats-Unis pour produire des vaccins…
SALHIA BRAKHLIA
Alors que disent les Etats-Unis, on nous envoie vaccins ASTRAZENECA prochainement ou pas du tout ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Aujourd'hui, les Etats-Unis sont ouverts à avoir un dialogue constructif, c'est le terme utilisé…
SALHIA BRAKHLIA
Entre guillemets, c'est ce que vous avez dit…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Entre l'Europe et les Etats-Unis pour tout ce qui est flacons, capsules, bouchons, filtres, qui sont autant d'éléments absolument indispensables pour produire un vaccin, et qui vont nous permettre de monter en capacité. Ils sont plus réticents à livrer des doses de vaccins parce que, eux-mêmes souhaitent accélérer la vaccination. Et nous sommes effectivement dans une discussion pour avoir, je dirais, un accord gagnant/gagnant de part et d'autre de l'Atlantique.
MARC FAUVELLE
Tous les Français qui le souhaitent pourront se faire vacciner avant la fin de l'été avait promis Emmanuel MACRON, ce qui nous amène donc…
AGNES PANNIER-RUNACHER
D'ici la fin de l'été…
MARC FAUVELLE
D'ici la fin de l'été, ce qui nous amène, si le calendrier est bon, cette année, au 21 septembre, c'est-à-dire dans six mois exactement. Est-ce que cette promesse est encore tenable aujourd'hui ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, elle est tenable, parce que le vaccin BIONTECH, PFIZER est en train de monter fortement en capacité, aujourd'hui, leurs prévisions de livraisons sont supérieures à celles qui avaient été initialement prévues au mois de janvier, et donc nous allons rééquilibrer notre portefeuille de vaccins disponibles, notamment avec l'apport de ces doses de BIONTECH, PFIZER.
MARC FAUVELLE
Sachant que c'est le principal vaccin délivré aujourd'hui en France, PFIZER…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Sachant que c'est le principal vaccin délivré…
MARC FAUVELLE
Combien de doses supplémentaires vont pouvoir arriver en France d'ici cet été, vous le savez ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, je le sais, je regarde mes chiffres, si vous permettez, pour ne pas vous dire de bêtises, nous aurons livré à la fin du mois de juin au total 40 millions de doses de vaccins PFIZER…
MARC FAUVELLE
En France ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
En France.
MARC FAUVELLE
Au lieu de combien prévues jusqu'ici ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
C'est-à-dire que, initialement, nous avions prévu d'avoir 300 millions de doses de vaccins PFIZER, et nous avons doublé à 600 millions de doses. Et une partie…
MARC FAUVELLE
15 % des doses sont réservées à la France aujourd'hui…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Voilà, et 15 % des doses sont réservées à la France, et donc nous avons grosso modo accéléré de 25 à 30 % les livraisons de PFIZER prévues au premier semestre.
MARC FAUVELLE
Donc vous pouvez réitérer, pardon d'insister sur cette question, mais il y a des millions de français qui trépignent de pouvoir se faire vacciner…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Je réitère, nous pouvons, alors, très clairement, nous avons la capacité avec le vaccin PFIZER, avec le vaccin MODERNA, qui va également continuer à monter en puissance, et avec l'apport, probablement en plus petite quantité, des vaccins JANSSEN et des vaccins NOVAVAX et CUREVAC, 30 millions de personnes à la fin du mois de juin, et tous les Français volontaires adultes à la fin de l'été.
SALHIA BRAKHLIA
Ça veut dire que la suspension d'ASTRAZENECA, si elle est maintenue, n'aura aucune incidence sur la stratégie vaccinale en France ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Ça veut dire que la suspension du vaccin ASTRAZENECA aura une incidence à très court terme, puisque nous étions en passe de vacciner, mais qu'elle n'aura pas d'impact au mois de juin ou au mois de septembre.
MARC FAUVELLE
Est-ce qu'on sait quand SANOFI va pouvoir commencer à produire les vaccins de ses concurrents ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Oui, nous le savons, SANOFI est en ordre de marche pour produire du vaccin BIONTECH à partir de cet été. Donc ça dépendra en fait de la date de livraison du principe actif par JANSSEN et par BIONTECH, pour le moment, on a des indications, juin, juillet, pour les livraisons, et donc démarrage des chaînes immédiatement après. Et nous sommes sur des niveaux de livraison de l'ordre de 27 millions de doses, 27 millions de doses par mois…
MARC FAUVELLE
Cette année ? 27 millions de doses par mois, à partir de quand ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Par mois, à partir du mois de…
MARC FAUVELLE
Pardon, on est sous un déluge de chiffres ce matin, mais derrière, il y a quelques vies sauvées…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Eh bien oui, non, mais c'est… on va se perdre peut-être dans tous ces chiffres, mais 27 millions de doses à partir du mois de septembre, parce que vous savez qu'il faut valider les lots cliniques, et donc être parfaitement sûr qu'ils peuvent être mis sur le marché.
SALHIA BRAKHLIA
Dernière question rapide, Agnès PANNIER-RUNACHER, si l'ASTRAZENECA est actée, est-ce que les ministres doivent donner l'exemple et se faire vacciner devant les caméras pour rassurer les Français ?
MARC FAUVELLE
Si la suspension est annulée, oui…
AGNES PANNIER-RUNACHER
Non, mais je vous rassure, Olivier VERAN s'est déjà fait vacciner avec de l'ASTRAZENECA, donc, si la question…
SALHIA BRAKHLIA
Vous, vous pouvez le faire aussi… ?
AGNES PANNIER-RUNACHER
Moi, je n'ai pas 50 ans, malheureusement, je les aurai dans trois ans, donc je ne compte pas attendre trois ans pour me faire vacciner, mais dès que la vaccination sera disponible, je n'ai aucune difficulté, et encore une fois, j'ai trois personnes dans ma famille qui sont vaccinées, les trois sont vaccinées à l'ASTRAZENECA, mes deux parents, qui auraient pu prétendre au BIONTECH, et ma fille qui est soignante.
MARC FAUVELLE
Merci Agnès PANNIER-RUNACHER.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 mars 2021