Interview de Mme Olivia Grégoire, secrétaire d'Etat à l'économie sociale, solidaire et responsable, à Public Sénat le 23 mars 2021, sur la lutte contre l'épidémie de Covid-9 et l'économie sociale et solidaire.

Prononcé le

Intervenant(s) : 
  • Olivia Grégoire - Secrétaire d'Etat à l'économie sociale, solidaire et responsable

Média : Public Sénat

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Et notre invitée politique ce matin, c'est Olivia GREGOIRE. Bonjour !

OLIVIA GREGOIRE
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'être avec nous. Secrétaire d'Etat chargée de l'Economie sociale, solidaire et responsable. On est ensemble pendant 20 minutes pour une interview en partenariat avec la presse quotidienne régionale. Bonjour Stéphane VERNAY.

STEPHANE VERNAY
Bonjour Oriane.

ORIANE MANCINI
Stéphane qui dirige le bureau parisien du journal Ouest France. On commence évidemment par la crise sanitaire, et d'abord une question, Olivia GREGOIRE, comment vont Roselyne BACHELOT et Elisabeth BORNE, toutes deux positives au Covid ?

OLIVIA GREGOIRE
Ecoutez, sans déflorer de secret spécifique, j'ai envoyé un petit mot à Elisabeth BORNE, je n'avais pas le " 06 " de Roselyne BACHELOT pour tout vous dire, mais je lui ai aussi fait passer un petit mot, elles sont courageuses, comme tous les Français qui ont été contaminés, elles sont fatiguées par ce virus qui est très épuisant, et les Français, pour beaucoup, le savent aussi, et elles sont courageuses, comme beaucoup des Français aussi, elles se reposent un peu, tout en suivant leurs dossiers, et avec leurs équipes, elles sont…

ORIANE MANCINI
Mais ça veut dire qu'elles sont assez fortement touchées par ce virus ?

OLIVIA GREGOIRE
C'est un virus qui ne nous laisse pas tranquilles, globalement, moi, je n'ai pas eu encore à le confronter, mais j'ai eu beaucoup d'amis autour de moi qui ont été touchés, et beaucoup d'amis parlementaires notamment qui, des mois et des mois d'ailleurs après la primo-infection, sont toujours épuisés, et donc c'est Bruno LE MAIRE qui avait été touché, Bruno LE MAIRE est un sportif, il a une très bonne hygiène de vie, je peux vous dire, on vit ensemble dans Bercy, à plusieurs ministres, et quand vous voyez comment un gaillard aussi costaud que Bruno a pu être aussi touché, il s'en est certes remis, mais ce n'est pas rien, cette pandémie, et je comprends l'énervement, je comprends l'agacement, je vais vous dire, je comprends tout ce que j'ai lu depuis quelques jours dans la presse, ce que j'ai entendu sur les plateaux, je comprends que c'est compliqué, je comprends parfois même la colère, je comprends la lassitude, mais je crois aussi qu'il faut qu'on tienne encore, je veux dire, 92.000 morts, 35.000 contaminations/jour en ce moment, ce n'est pas fini, on a le droit d'être en colère, on a le droit d'être fatigué, mais il faut qu'on tienne, je comprends…

ORIANE MANCINI
Mais quand vous dites que vous comprenez la colère, vous comprenez l'agacement, est-ce qu'il y a aussi une part de responsabilité du gouvernement dans cette colère et dans cet agacement ?

OLIVIA GREGOIRE
Il y a toujours, je vais vous dire, une des raisons pour lesquelles je suis fière d'appartenir au gouvernement de Jean CASTEX, c'est qu'il y a toujours une raison d'être responsable quand on est au gouvernement, et cette colère, on est là pour l'entendre et pour l'assumer aussi et la comprendre. Je ne veux pas vous dire que c'est simple, il y a une chose que je voulais dire simplement, oui, c'est compliqué, mais c'est aussi compliqué parce qu'on a décidé de laisser beaucoup de choses ouvertes, de laisser la vie continuer à avancer et de ne pas nous remettre sous cloche comme ça avait été le cas l'an passé, et parfois, je suis assez frappée de voir notamment de la part de certaines oppositions des attaques qui ne sont pas à la hauteur du débat et de l'enjeu, je veux dire, quand j'entends : il a loupé son pari, le président de la République, je veux dire, ça me met en colère, ce n'est pas un jeu, ce n'est pas un pari, c'est la vie des gens dont on parle ici, vous dire que ce serait confortable, ce serait mentir, vous dire qu'on fait tout pour essayer de vivre quand même et que c'est complexe, oui, je l'assume volontiers, et qu'on s'adapte en permanence, je l'assume aussi volontiers.

STEPHANE VERNAY
Bon, vous dites que vous comprenez, ça tombe bien, parce que nous, on ne comprend pas tout, on a besoin d'explications, dedans avec les miens, dehors en citoyen, c'est la nouvelle expression utilisée par le gouvernement pour nous expliquer ce qui se passe, est-ce que vous pourriez nous préciser un petit peu…

OLIVIA GREGOIRE
Oui, même si…

STEPHANE VERNAY
Pourquoi est-ce qu'on en vient à des espèces de slogans comme ça dans un truc qui est quand même très…?

OLIVIA GREGOIRE
Ce n'est pas des slogans, alors, je vais vous dire, quand on dit les choses sans faire d'efforts d'explications avec des mots simples, on nous le reproche, et je suis la première à le faire, quand on fait un travail assez simple de rester avec les siens, chez soi, et rester citoyen quand on est dehors, en gardant les gestes barrière, en faisant attention à ne pas être trop nombreux, en faisant attention à ne pas aller voir des personnes fragiles, en faisant… je ne crois pas que ce soit si compliqué, après, je…

STEPHANE VERNAY
Ça ne pouvait pas être fait dès jeudi dernier en fait ?

OLIVIA GREGOIRE
Ecoutez, je vois la critique depuis jeudi, depuis vendredi, j'ai écu les attestations…

STEPHANE VERNAY
Eh bien, depuis samedi surtout avec cette fameuse attestation…

OLIVIA GREGOIRE
Bien sûr, mais il y a aussi un jeu…

STEPHANE VERNAY
C'est trop compliqué…

OLIVIA GREGOIRE
Mais je n'ai jamais dit, et je vous le redis, que ça va être simple, il y a l'autre truc, qui est très simple, qui est de dire : écoutez, on laisse tout ouvert, on laisse tout fermé, ce sont deux risques entre lesquels le gouvernement est obligé de tracer un chemin d'équilibre, on aurait pu par facilité, et d'autres pays européens autour de nous le font, regardez nos voisins Italiens, regardez ce qu'a dit hier encore la chancelière MERKEL, est-ce que c'est facile en Allemagne, entre l'Etat et les landers…

STEPHANE VERNAY
Et c'est parce que vous avez choisi cette voie médiane, d'entre deux, que c'est aussi difficile à faire comprendre ?

OLIVIA GREGOIRE
Nous, on essaie vraiment de trouver cette troisième voie entre le tout ou rien, on essaie de vivre quand même malgré des restrictions, et j'assume volontiers que c'est compliqué, et j'assume volontiers, je crois que Bruno LE MAIRE l'a fait hier aussi, qu'il y a sûrement des choses qu'il va falloir adapter. Le petit jeu consistant à nous dire : les cordonniers, mais pas les vendeurs de chaussures, les... bien sûr, mais beaucoup ont beau jeu, et je voudrais bien les y voir, je vais vous dire, je n'ai pas dit que c'était facile. Et à Bercy, je peux vous dire qu'avec les secteurs économiques, S1, S1 bis, quel secteur doit rester ouvert, quel secteur doit rester fermé, c'est un crève-coeur de tous les jours ces arbitrages. Bon, on les prend, on les tient. L'option facile, et vous êtes des gens ancrés dans les territoires, moi, j'étais encore toute la journée dans le Gers, on me l'a dit : l'option facile, c'était quand même de tout refermer et de dire : allez hop, on circule, rien à voir, et, ce n'est pas l'option qu'on a prise, et on a pris une option plus complexe, une option qui fait rire certains, mal attentionnés, en attendant, on fait en sorte que les gens puissent continuer à travailler, on fait en sorte que nos enfants continuent à aller à l'école, le Premier ministre a raison de le rappeler, combien dans nos voisins européens ont gardé ces écoles ouvertes, combien d'enfants en Allemagne, en Italie, pendant des mois, n'ont pas eu accès à l'école, il y a ce qu'on fait avec difficulté, il y a ce qu'on fait aussi envers et contre tous, avec une certaine forme de courage, et je n'ai encore une fois jamais dit que c'était simple, ça va s'éclaircir, et les Français sont malins…

ORIANE MANCINI
Mais on entend les élus locaux, vous les entendez, vous aussi, vous avez notamment peut-être entendu Edouard PHILIPPE, le maire du Havre qui dit, lui, qui a évoqué une mauvaise surprise, que les mesures prises dans sa ville du Havre ne sont pas justifiées en fonction de l'état de la crise sanitaire dans sa ville. Qu'est-ce que vous avez pensé de cette déclaration d'Edouard PHILIPPE ?

OLIVIA GREGOIRE
Je pense que ce n'est peut-être pas, il le sait mieux que moi, aujourd'hui, le cas au Havre, j'en pense que la réalité de ce variant est qu'il va beaucoup plus vite, qu'il tape beaucoup plus fort en matière d'infection et de contamination, et que, en 24, 48, 72, la physionomie d'une situation sanitaire peut bouger, freiner sans enfermer, oui, l'objectif, c'est de faire en sorte que ce variant n'explose pas dans certains départements, dans certains endroits où il semblerait qu'il soit encore sous contrôle, l'objectif, c'est justement de faire en sorte qu'il n'explose pas, les Italiens par exemple, qui ont reconfiné très largement les trois quarts du pays sont devant une situation où, en quelques jours, en 48, 72 heures, les contaminations ont explosé pour des raisons assez complexes à comprendre, avec des jeunes qui arrivent aux urgences sans aucune co-morbidité, avec des réalités sanitaires qu'on n'avait pas vues sur la première pandémie, donc, on anticipe aussi, on ne le ferait pas, je ne doute pas que ça nous serait reproché.

ORIANE MANCINI
Sur la liste des commerces, puisque vous dites le chemin est compliqué à trouver, est-ce que cette liste, elle est amenée à évoluer, est-ce qu'il y a des commerces fermés aujourd'hui qui vont rouvrir demain ?

OLIVIA GREGOIRE
Oui, mais c'est amené à évoluer, et je vais vous dire que sincèrement, autour de Bruno LE MAIRE et Alain GRISET, tous les jours, on y travaille et on s'adapte, parce que tous les jours, notamment dans nos déplacements, hier encore, on nous parle de certaines situations, et comme je garde ma franchise, il y a des sujets…

ORIANE MANCINI
Alors, lesquels par exemple, quels commerces pourraient rouvrir ?

OLIVIA GREGOIRE
Alors, c'est plus des sujets que des commerces, parmi les enjeux que nous n'avons pas résolus et sur lesquels nous travaillons en permanence, il y a le sujet des fonds de commerce, c'est-à-dire des fonds de commerce qui auraient été rachetés l'an passé et qui n'ont pas de chiffre d'affaires référant sur la période précédente, il y a le problème aussi de la poly-activités, ce n'est pas facile, notamment dans certaines villes, dans certains villages de montagne, dans certains espaces ruraux, vous avez des commerces qui ont plusieurs activités, quelle partie de l'activité on prend pour la baisse de chiffre d'affaires, voilà à quoi on s'attelle tous les jours, donc on y était, je dirais, avant ces mesures annoncées jeudi, j'étais encore en QAG la semaine dernière, et je le disais, on est encore en train de travailler sur des mesures d'adaptation, qui datent du précédent confinement ; donc si vous voulez, on est en adaptation permanente. Ce qu'on ne dit pas…

ORIANE MANCINI
Mais c'est Alain GRISET lui-même qui parle d'aberration, dimanche, il a parlé d'aberration sur la liste de ces commerces…

OLIVIA GREGOIRE
Mais chacun ses mots, moi, je suis mardi à " Bonjour chez vous ", je ne parle pas d'aberration, je parle de choses qui sont compliquées, je parle de Français qui peuvent aussi entendre un langage de vérité, qui n'est absolument pas infantilisant, qui est d'arrêter de faire prendre des choses pour ce qu'elles ne sont pas, oui, c'est compliqué, oui, c'est galère, oui, on s'adapte, et comme dans toutes les mesures politiques un peu courageuses, il y aura certainement des adaptations et des choses qu'on aura mal fait…

ORIANE MANCINI
Annoncées par Jean CASTEX ?

OLIVIA GREGOIRE
Mais voyez, on ne dit jamais ce qu'on a bien fait, on ne dit jamais qu'en PLFR4, l'an dernier, projet de loi de Finances rectificative numéro 4, on a mis assez de milliards d'euros en anticipation pour permettre de reconfiner dans les conditions économiques qu'on vit aujourd'hui, le 1,2 milliard, là, que ça va coûter ces mesures nouvelles, dont 600 millions d'euros pour le fonds de solidarité et l'accompagnement des entreprises, par exemple, ou les 400 millions d'euros de chômage partiel, c'est de l'argent qui avait été anticipé, le fonds de solidarité, on n'en a pas manqué en novembre, pourquoi, parce que grâce aux parlementaires, on avait voté une enveloppe beaucoup plus large, qui parle d'anticipation de ce gouvernement, à quel moment, jamais personne, moi, je voudrais qu'on parle aussi de ce qu'on fait plutôt pas mal, les écoles sont ouvertes, économiquement, on n'a pas à rougir, on a anticipé, on est là, on accompagne, on ne lâche rien, il y a aussi des choses qui marchent dans notre pays…

STEPHANE VERNAY
Sur les communes, sur les commerces, il y aura des aides territorialisées, adaptées aux territoires plus confinés que les autres, on va dire ?

OLIVIA GREGOIRE
Oui, en toute logique, et puis, il y a aussi un énorme sujet sur les coûts fixes depuis d'ailleurs le confinement de novembre aussi, c'était un problème, je pense aux structures qui font un chiffre d'affaires supérieur à un millions d'euros, qui sont des grosses PME ou des entreprises citadines avec beaucoup de charges fixes, avec des loyers très importants, qui connaissent des fermetures depuis des mois, on est en train à Bercy de bâtir un dispositif de prise en charge des coûts fixes, qui pourrait aller jusqu'à 10 millions d'euros pour les entreprises de plus d'un million d'euros de chiffre d'affaires, c'est un engagement de Bruno LE MAIRE, et je peux vous dire que jour et nuit, on y travaille à Bercy, et j'en profite, parce que c'est assez rare, pour saluer aussi les administrations qui travaillent jour et nuit, la DGFIP, la DGE notamment, on les critique souvent, on les salue rarement.

ORIANE MANCINI
Et il sera prêt quand ce nouveau plan, il sera annoncé quand ?

OLIVIA GREGOIRE
On est dessus, dès que c'est possible, je pense que déjà, ce sera plus clair en fin de semaine, on est dessus jour et nuit, donc les arbitrages tombent…

ORIANE MANCINI
Ça veut dire que sur ces questions d'aides, sur ces questions de liste des commerces ouverts, il y aura de nouvelles annonces, a priori jeudi, au point presse de jeudi ?

OLIVIA GREGOIRE
Possiblement. Possiblement. Et ce sera Bruno LE MAIRE, aux côtés d'Alain GRISET, qui s'exprimera bien sûr.

ORIANE MANCINI
On va parler de vos dossiers, particulièrement, de l'économie sociale et solidaire…

STEPHANE VERNAY
Economie sociale et solidaire, est-ce que, juste pour démarrer, est-ce que vous pouvez nous dire quelles sont les activités de l'économie sociale et solidaire qui souffrent le plus en ce moment et celles qui se portent bien, parce qu'il y a des différences assez notables entre les différents secteurs ?

OLIVIA GREGOIRE
Très juste, alors c'est, je dirais, un peu comme dans le reste de l'économie, en même temps, c'est une économie à part entière, donc vous avez des écosystèmes comme les ressourcerie, les recycleries, qui sont en plein foisonnement dans notre pays, j'en profite pour leur dire qu'il y a un appel à projets…

STEPHANE VERNAY
Dans le plan France Relance…

OLIVIA GREGOIRE
Alors, ça, c'est ouvert, il y a une appétence, il y a une envie, mais il y a des conditions sanitaires qui rendent les choses quand même difficiles, j'étais encore hier près de Auch, à Valoris, dans une ressourcerie dans le Gers, c'est compliqué quand on vous amène des objets, qu'il faut mettant en sas de décontamination, qu'il faut nettoyer, ensuite, qu'il faut mettre au réemploi ensuite, donc je dirais que la chaîne de production, elle est hyper complexe, et donc, là, typiquement, il y a des difficultés parce que dans les conditions sanitaires, ce n'est pas évident, je pense à l'inverse par exemple à des structures, on a beaucoup ça dans nos territoires, des structures de maraîchage bio, local, le fait qu'on soit souvent chez soi et ramené chez soi, et à rester chez soi, fait qu'on essaie de se faire des petits plaisirs aussi, de manger mieux, peut-être d'aller découvrir la ferme de la collectivité d'à côté qu'on n'avait jamais le temps d'aller voir quand on bossait, et d'aller acheter des paniers bio locaux, et là, je dois dire que cette vente, qu'elle soit en ligne d'ailleurs ou physique, de produits sains, bios, locaux, souvent déployés par des acteurs Coopérative de l'ESS, ça marche plutôt bien, et ça se développe super bien. Donc il y a vraiment des activités qui souffrent, et évidemment, parmi celles qui souffrent, évidemment, il y a les petites associations, petites associations qui depuis un an vivent un enfer.

STEPHANE VERNAY
Alors, vous disiez en janvier que les petites associations employeurs, donc celles qui ont moins de 10 salariés, vous estimiez qu'il y en avait 30.000 qui étaient en très grande difficulté du fait de cette crise, le fonds d'urgence de 30 millions d'euros que vous avez mobilisé, est-ce qu'il a suffi à soutenir ces structures ou est-ce qu'il y a beaucoup de pertes en ligne ?

OLIVIA GREGOIRE
On est en plein dedans ; il y a peu, pas de pertes en ligne, en réalité, je vous donne deux chiffres, 19 milliards d'euros du fonds de solidarité au global décaissés depuis mars 2020, sur 19 milliards d'euros, c'est 200, 250 millions d'euros pour les associations, c'est-à-dire des associations qui ont demandé de l'aide et qui ont demandé le fonds de solidarité, c'est dire si c'est petit par rapport à la masse qui a été mobilisée par l'Etat, et donc on s'est rendu compte dès l'été dernier de ces chiffres, et j'ai mis en place effectivement….

STEPHANE VERNAY
Ces 30 millions supplémentaires…

OLIVIA GREGOIRE
Ces 30 millions supplémentaires qui viennent très simplement à partir d'un site « urgence-ess.fr », qui permettent aux structures de l'ESS de moins de 10 salariés et notamment aux associations, de bénéficier en 15 jours d'un diagnostic par France Active, et de pouvoir bénéficier d'une aide allant jusqu'à 5.000 euros pour les structures jusqu'à 3 salariés, jusqu'à 8.000 euros pour les structures allant jusqu'à 10 salariés, c'est une aide qui est très simple et qui se déploie très vite, c'est très important compte tenu des difficultés rencontrées, je prends souvent cet exemple d'une petite association culturelle qui n'a pas pu faire les spectacles qu'elle souhaitait au printemps dernier, qui n'a pas forcément refait sa trésorerie à la rentrée, parce que les parents, parce que les adultes se sont dit : est-ce que je re-cotise sur l'année vu les conditions sanitaires, et qui s'est retrouvée janvier, février, dans des situations très difficiles, donc on est aujourd'hui, pour tout vous dire, à 10 millions d'euros déjà décaissés, 1.600 structures déjà aidées, et on continue, plus de 7.000 demandes, plus de 7.700 demandes sur le site qu'on a mis en place ; on espère sauver très concrètement 5 à 10.000 associations avec ce fonds d'urgence, et je vous remercie de m'avoir posé la question, ça me permet de redire aux assos notamment : allez-y, connectez-vous, demandez cette aide, 100 % des gagnants ont tenté leur chance, en demandant rien, vous ne pourrez pas l'avoir, prenez 10 minutes de votre temps pour le faire.

ORIANE MANCINI
Et on reprécise bien que l'ESS, c'est l'économie sociale et solidaire, pour tous ceux qui nous écoutent. Stéphane.

STEPHANE VERNAY
J'observe aussi que dans le plan de relance, il y a 1,3 milliard d'euros qui sont prévus pour développer l'économie sociale et solidaire, c'est un montant énorme, c'est du jamais vu pour ce secteur-là, en même temps, l'économie sociale et solidaire, aujourd'hui, c'est 10% du PIB, 14% des emplois, il n'y a pas un décalage entre le poids que pèse cette économie par rapport aux moyens qui lui sont alloués, même si c'est beaucoup, 1,3 milliard sur 100 milliards, ça fait que 1%…

OLIVIA GREGOIRE
Alors, oui, la règle…

STEPHANE VERNAY
10 % du PIB…

OLIVIA GREGOIRE
La règle de 3, elle est logique, et ça n'est pas la première fois qu'on m'interroge dessus. Je pense que ce qui est important dans votre question, d'abord, c'est de caractère inédit, jamais, cette économie, qui représente effectivement 10% du PIB et 14% de nos emplois salariés, jamais cette économie n'a eu plus d'un milliard d'euros d'investissement déployable en 12, 24 mois, donc déjà…

STEPHANE VERNAY
Mais c'est quand même une petite partie du plan…

OLIVIA GREGOIRE
Oui, mais je dirais, d'abord, ce n'est pas la seule partie, si vous m'y autorisez, parce que j'ai eu l'honnêteté de préciser ce qui était directement rattaché à l'économie sociale et solidaire, mais il y a aussi ce qui est indirectement rattaché, mais qui est, quelque part, de l'économie sociale et solidaire…

ORIANE MANCINI
Et qui représente combien ?

STEPHANE VERNAY
Donc tout ce qui concerne toute l'économie, dont…

OLIVIA GREGOIRE
Je vous parlais des 2,9 milliards, donc ça veut dire qu'il y a quasiment 3 milliards en plus en indirect, je prends deux exemples, encore une fois, issus du terrain, parce que c'est là qu'on voit les résultats de notre politique ou pas, hier, j'avais cette ressourcerie à Valoris qui va pouvoir candidater à l'appel à projets sur l'économie circulaire, 350 millions d'euros que je ne compte pas dans le milliard trois. Et sur l'agro-écologie, qui est extrêmement en pointe dans ces départements ruraux, il y a des sommes importantes avec Julien DENORMANDIE qu'on déploie pour faire bouger les chaînes de production, notamment dans la ruralité, en faveur du bio, et de produits plus durables ; donc il y a aussi une enveloppe de quasiment 3 milliards en plus de ce milliards trois. Et tout ce qui compte aujourd'hui, au-delà de la bataille de chiffres, et on l'a vu sur les assos avec le non-recours, c'est que les acteurs de l'ESS aillent se saisir de ces appels à projets, ils répondent, et je peux vous dire, si le milliard trois est débloqué, décaissé dans les mois qui viennent, d'ici l'été, j'aurai assez d'énergie pour en demander plus et augmenter le budget.

STEPHANE VERNAY
Vous aviez lancé un dispositif de contrat à impact à l'automne aussi, notamment pour amener l'investissement privé à s'intéresser à l'ESS, est-ce que ça marche ce genre de choses ?

OLIVIA GREGOIRE
Ça marche, voilà aussi un sujet sur lequel on m'avait dit, avec enthousiasme à la rentrée : mais ça ne marchera jamais, c'est mal calibré, c'est trop compliqué…

STEPHANE VERNAY
Et puis, ce n‘est pas dans la culture de ces secteurs-là…

OLIVIA GREGOIRE
Tout, j'ai eu mille et une explications sur le fait que nous n'allions pas y arriver, et notamment que les acteurs de l'ESS étaient trop petits, trop dispersés, trop fragmentés, qu'ils manquaient parfois d'ambition pour aller demander des projets à un million, deux millions, trois millions, pour le faire passer à l'échelle. Tout ça est faux, voilà, donc premier contrat à impact économie circulaire, on avait mis 10 millions d'euros avec l'ADEME, que je remercie, Arnaud LEROY, qui est très engagé sur ce sujet, en faveur de l'économie circulaire, on a eu plus d'une quarantaine de candidature, et on a décidé, devant la qualité des dossiers transmis par les porteurs de projets, notamment associatifs, de tripler l'enveloppe pour l'amener à un peu plus de 27 millions d'euros, pour un dispositif qui ne marche pas, c'est une bonne nouvelle. Le deuxième, égalité des chances économiques, on est en plein dans la sélection. Et le troisième a été ouvert il y a une dizaine de jours, le 3 mars dernier, avec Elisabeth BORNE, sur l'insertion et sur la mobilité dans l'insertion, qui est un vrai sujet, les contrats à impact, ça commence à fonctionner, beaucoup d'acteurs s'y intéressent, et notamment les acteurs financiers et des acteurs très traditionnels. Donc on ouvre les fenêtres de l'économie sociale.

ORIANE MANCINI
Un dernier mot là-dessus, les Français ont beaucoup épargné pendant cette crise, en tout cas, ceux qui ont pu le faire, est-ce que vous souhaitez qu'une partie de cette épargne bénéficie à l'économie sociale et solidaire, et comment vous allez faire si oui ?

OLIVIA GREGOIRE
C'est déjà le cas au sein d'une très belle loi qui s'appelait la loi Pacte, il y a un chapitre 2…

ORIANE MANCINI
Que vous avez portée…

OLIVIA GREGOIRE
Que j'affectionne tout particulièrement sur l'orientation de l'épargne, vous ne le savez peut-être pas, mais ici, autour de cette table, vous avez déjà, depuis le 1er janvier 2020, une unité de compte en faveur de la finance durable, de la finance solidaire ou de l'investissement socialement responsable, ce sera trois unités de compte à compter de janvier 2022, ce qui veut dire que dans chaque contrat d'assurance-vie des Français, il y aura de l'épargne fléchée en faveur d'actifs durables et solidaires, il y a aussi les fonds 90-10 sur lesquels nous travaillons, qui permettent d'orienter une partie de l'épargne au service de projets sociaux solidaires. Nous regardons actuellement avec la BANQUE DE FRANCE, et je proposerai peut-être des pistes d'ici l'été pour augmenter cette part d'épargne, mais il y a une chose que je trouve encourageante, et comme vous l'avez remarqué, je cherche des signaux d'optimisme dans un univers un peu tristounet, ils ne m'ont pas attendu les Français pour orienter leur épargne, et c'est une très bonne nouvelle, quand vous regardez l'investissement socialement responsable, il a fait fois cinq ces dernières années, quand vous regardez les Greenfin, finances vertes, elle a fait fois sept dans les actifs des Français. Donc la tendance est là, le mouvement de fond est là, à nous de l'accompagner justement.

STEPHANE VERNAY
Alors, la tendance est là, juste peut-être, juste une précision, et un sujet, c'est : on n'est pas dans l'économie sociale et solidaire, mais pas loin, les entreprises à mission, la semaine dernière, Emmanuel FABER, le patron de DANONE, a été débarqué par son conseil d'administration, est-ce que ça, ce n'est pas un très mauvais signe, parce qu'il y a une tendance qui se développe sur le capitalisme à visage humain, une façon de faire les choses différemment, le monde d'après, etc, et en même temps, là, on voit que vous avez un grand patron, la première entreprise du CAC 40 dite entreprise à mission, le grand patron qui se faire rattraper par la patrouille, entre guillemets, et ramener dans les clous par des actionnaires qui exigent d'avoir un profit très old school, très à l'ancienne…

OLIVIA GREGOIRE
Alors, plusieurs choses, la première, par précaution, il y a quand même des règles, et je m'y astreint en tant que ministre, membre du gouvernement, je ne rentre pas en termes de commentaires dans la gouvernance à proprement parler que ce soit d'ailleurs de DANONE ou de toute autre entreprise, en revanche, comme je suis une femme qui prend ses responsabilités, je vous dirais qu'il y a plusieurs lectures différentes, et qu'il faut avoir le livre bien ouvert, qu'il y a… c'est plus qu'une tendance, sur le capitalisme responsable, il y a aujourd'hui un alignement des planètes, et la finance n'est pas en reste, on en parlera sûrement, qui pousse en faveur de ce capitalisme plus responsable, il y a aussi une réalité, c'est que jamais ni Bruno LE MAIRE ni moi-même n'avons exprimé le fait que devenir une entreprise à mission, faire bouger une raison d'être, devenir une fondation d'actionnaires, on en parle assez peu, mais c'est le troisième niveau après la société à mission, n'engage à rien à ne pas être performant, n'engage à rien, n'engagent en rien à ne pas avoir une bonne performance économique, et être une société à mission n'est pas être une société moins rentable ou moins performante, c'est une société qui demeure rentable et performante, tout en faisant des choix en faveur de sa mission.

STEPHANE VERNAY
Donc vous ne le voyez pas comme un mauvais signe ?

OLIVIA GREGOIRE
Alors, pour être encore plus précise, parlons aussi de ces entreprises à mission qui sont en train de se créer, moi, j'entends que c'est haro sur DANONE parce que c'est la seule boîte du CAC aujourd'hui cotée, bon, bon, d'abord, jusqu'à preuve du contraire, il n'est pas question qu'elle ne soit plus entreprise à mission, enfin, ou alors, je n'ai pas eu l'info. Et deuxièmement, on ne parle jamais de ces entreprises qui le deviennent, quasiment 150 en quelques mois, et notamment au sein du CAC 40, donc c'est une tendance…

STEPHANE VERNAY
Il y en avait 88 à la fin de l'année, et il y en a 150 aujourd'hui…

OLIVIA GREGOIRE
Voilà. Donc ça avance. Et la crise accélère le mouvement. Il y en a plus post-crise.

ORIANE MANCINI
Et deux questions d'actualité pour terminer, Olivia GREGOIRE, et d‘abord, cette polémique concernant l'UNEF, qui prend de l'ampleur, sa présidente de l'UNEF a évoqué l'organisation de réunions interdites aux blancs pour permettre aux personnes touchées par le racisme d'exprimer ce qu'elles subissent, Jean-Michel BLANQUER, le ministre de l'Education nationale, il parle de choses qui s'apparentent au fascisme, est-ce qu'il faut couper les subventions publiques à l'UNEF, est-ce qu'il faut aller jusqu'à dissoudre l'UNEF pour vous ?

OLIVIA GREGOIRE
Alors, ce n'est pas moi qui suis en charge de ces sujets, et ça n'est pas moi qui m'exprime sur des dissolutions possibles, c'est Jean-Michel BLANQUER, en priorité, et le Premier ministre. Je crois que, en revanche, continuer à soutenir avec des deniers publics une association qui promeut ce type de discours extrêmement dangereux, enfin, je veux dire, ça veut dire quoi, ça veut dire que moi, si j'avais été étudiante il y a quelques années, ce que j'étais, je n'aurais pas eu le droit de m'exprimer parce que je n'avais pas la bonne couleur de peau par rapport à un enjeu, enfin, je ne sais pas si on mesure réellement le caractère grave de ses propos et de cette vision plus largement de la société, une vision quasiment… enfin une vision séparatiste, une vision raciste, le racisme étant des deux côtés, je suis très frappée, et en même temps, pas vraiment étonnée de par ses propositions, ça fait quelque temps que l'UNEF a des positions plus qu'étonnantes, et je pense que ce soit la dissolution, que ce soit les subventions publiques, il faut trouver une solution, ce n'est pas à moi de dire laquelle, mais il faut en trouver une, oui.

ORIANE MANCINI
Et Stéphane, une dernière question sur les régionales.

STEPHANE VERNAY
Une question politique, est-ce que le report des régionales est toujours d'actualité, enfin, est-ce que ça fait partie des choses qui sont encore sur la table, à nouveau sur la table, et question subsidiaire, quel sera votre rôle à vous, personnellement dans les régionales à venir ?

OLIVIA GREGOIRE
Alors, première question, dans l'ordre, et comme tout nous est reproché, notamment l'ordre des choses, j'aimerais le rappeler, on attend de voir comment la situation sanitaire évolue dans les prochaines semaines, on attend aussi autour du 1er avril un autre avis du Conseil scientifique…

STEPHANE VERNAY
Avant le 1er avril…

OLIVIA GREGOIRE
Voilà, sur ce sujet. C'est à l'aune de ces éléments, notamment sanitaires et de la position du Conseil scientifique, que des décisions pourraient être prises, elles ne sont absolument pas à l'ordre du jour au moment où je vous parle, aujourd'hui, ça n'est pas à l'ordre du jour. Deuxièmement, sur mon rôle, mon rôle sera, comme je le suis toujours, entière, engagée et loyale, je ne serai pas physiquement sur une liste…

STEPHANE VERNAY
Vous ne serez pas candidate ?

OLIVIA GREGOIRE
Je ne serai pas candidate, mais je serai…

STEPHANE VERNAY
Mais vous participez à une campagne ?

OLIVIA GREGOIRE
Mais je participe activement, amicalement, et avec beaucoup d'espoir à la campagne de l'excellent Laurent SAINT-MARTIN…

STEPHANE VERNAY
Donc en Ile-de-France.

OLIVIA GREGOIRE
En Ile-de-France, avec beaucoup de personnes et de personnalités et de marcheurs à ses côtés, un état d'esprit, un projet, une façon de faire de la politique qui me parlent, donc il sait qu'il pourra compter sur moi tout au long de cette campagne régionale, qui s'annonce difficile, mais c'est un homme courageux. Donc on verra, et on n'est pas à l'abri de résultats chouettes et de voir émerger aussi ceux qui le méritent…

ORIANE MANCINI
Résultats chouettes, ça veut dire que ça serait une surprise s'il gagnait ?

OLIVIA GREGOIRE
Non, SAINT-MARTIN est un vrai rugbyman, et quand il rentre sur un terrain, il faut attendre la fin du match.

ORIANE MANCINI
Et vous viendrez nous en reparler. Merci beaucoup, merci Olivia GREGOIRE d'avoir été notre invitée ce matin.

OLIVIA GREGOIRE
Merci à vous.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 24 mars 2021