Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Nous remercions la présidence chinoise d'avoir organisé cette réunion et remercions le président de l'Assemblée générale pour sa présentation.
Le multilatéralisme que la France défend est un multilatéralisme fort, fondé sur la règle de droit, au service notamment du maintien de la paix et de la sécurité internationales. C'est aussi un multilatéralisme efficace, qui produit des résultats pour surmonter les défis de notre temps. C'est tout le sens d'ailleurs de l'Alliance pour le multilatéralisme que la France a initié depuis 2019 avec l'Allemagne. Et je le dis, il n'y a pas de plan caché, parce que, pour nous, tout est clair, tout est sur la table, il s'agit justement de promouvoir un multilatéralisme qui s'appuie sur un socle solide ; celui du droit international. Et ce droit international, ce n'est pas à la carte. La Charte des Nations unies, la Déclaration universelle des droits de l'Homme, les Pactes de New York de 1966 ou les conventions de Genève consacrent des principes et des valeurs qui sont universelles. C'est leur plein respect qui constitue la seule et unique alternative à la loi du plus fort.
Ce droit international offre ainsi un cadre d'action au sein duquel l'esprit de coopération est indispensable pour obtenir des résultats. C'est d'ailleurs cet esprit de coopération qui a permis à la diplomatie multilatérale d'engranger des succès. Je pense à l'accord sur le nucléaire iranien, je pense à l'accord de Paris sur le climat lors de la COP21.
Force est de constater que cet esprit de coopération a parfois manqué au Conseil de sécurité ces dernières années. Trop souvent, l'usage du veto a paralysé notre action. On peut se dire les choses. Comment justifier notre impuissance collective à agir face au conflit épouvantable que connaît la Syrie ?
C'est pour cette raison que la France porte avec le Mexique une initiative prévoyant un encadrement volontaire et collectif du veto par les membres permanents du Conseil de sécurité en cas d'atrocités de masse. Je me réjouis que cent-cinq Etats membres aient déjà apporté leur soutien cette initiative. Nous appelons tous les membres du Conseil, et en particulier les quatre autres membres permanents de ce Conseil, à la rejoindre.
Ce socle qui structure le multilatéralisme, c'est aussi la bonne gouvernance des organisations internationales. On le sait, les organisations sont confrontées à des enjeux organisationnels, logistiques, financiers, qui sont exacerbés par la crise de la Covid-19. Elles sont, ces organisations, trop souvent critiquées ou instrumentalisées pour la promotion d'intérêts nationaux. Ce n'est pas dans cet esprit que nous souhaitons travailler pour notre part.
Ces organisations internationales doivent être reconnues à leur juste valeur et doivent pouvoir accomplir leur travail de manière transparente, rigoureuse et ouverte. Là encore, le droit et le respect des bonnes pratiques au sein du système des Nations unies sont indispensables.
Deuxièmement, ce multilatéralisme efficace, c'est aussi un multilatéralisme qui doit être inclusif.
Ce n'est pas un impératif moral le fait d'être inclusif, mais juste le gage de solutions durables. Lorsque les femmes participent pleinement et activement aux processus politiques, les accords obtenus sont plus durables. Lorsque la jeunesse et la société civile sont entendues, les droits de chacun sont mieux défendus.
Lorsque nous travaillons main dans la main avec les organisations régionales dans les conditions prévues par le chapitre VIII de la Charte, nous pouvons proposer des solutions plus adaptées. Je pense à l'action de la communauté internationale au Sahel. Je pense aussi à l'opération IRINI de l'Union européenne qui contribue à la mise en oeuvre de l'embargo sur les armes en Libye.
Un multilatéralisme efficace, Monsieur le Président, c'est également un multilatéralisme qui s'attache à dégager des solutions concrètes aux défis collectifs.
La COVID-19 est une tragédie pour de trop nombreuses personnes. Elle est également un test pour notre communauté internationale, pour les Nations unies. La France promeut des solutions coopératives pour vaincre cette pandémie car ce sont les seules qui fonctionnent.
Je pense à l'initiative ACT-A dont la France a été à l'initiative : nous avons été parmi les premiers à faire don à COVAX des doses de vaccins acquises pour notre propre usage. Je pense aussi aux efforts de ce Conseil pour appeler à un cessez-le-feu dans tous les conflits afin de permettre l'accès humanitaire et la délivrance de vaccins. Je salue la partie tunisienne qui était à l'oeuvre avec nous.
Face aux conséquences du changement climatique aussi, le Conseil de sécurité ne doit pas non plus rester immobile. C'est la raison pour laquelle nous avons proposé que le Secrétaire général fasse régulièrement rapport au Conseil sur ce sujet précis, afin que nous puissions mettre en place les mesures préventives nécessaires. J'invite les membres de ce Conseil à donner suite à cette proposition.
Enfin, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Ministres, chers amis, le multilatéralisme ne pourra être efficace que s'il sait se réformer.
La France soutient les réformes mises en oeuvre par le Secrétaire général dont nous saluons les efforts en la matière. Nous soutenons avec force l'initiative "action pour le maintien de la paix" qui accroît la performance et la sécurité des opérations de maintien de la paix.
Le Conseil de sécurité, cela a été dit précédemment, doit aussi se réformer pour être plus représentatif du monde d'aujourd'hui. Notre position est connue: la France est favorable à un élargissement du Conseil de sécurité dans les deux catégories de membres, les permanents et les non-permanents. La France soutient les membres du G4 pour l'obtention d'un siège de permanent et une présence accrue de l'Afrique, y compris parmi les permanents.
La France s'est enfin particulièrement engagée, aux côtés de ses partenaires européens, pour promouvoir une réforme de l'architecture multilatérale de santé, avec l'OMS en son centre, qui permette de mieux réagir aux crises sanitaires présentes et à venir. La résolution portée par l'Union européenne à la prochaine Assemblée Mondiale de la Santé dans quelques jours, sur la préparation et la réponse aux urgences sanitaires, constituera à ce titre une étape essentielle de cette réforme.
Pour terminer, Monsieur le Président, face à ces nombreux défis, la France souhaite être une force de proposition constructive au service d'un multilatéralisme des résultats. Nos succès face aux changements de notre temps, nous le savons, ne viendront pas du repli sur nous-mêmes, mais d'une coopération renforcée.
Je vous remercie.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 19 mai 2021