Texte intégral
ORIANE MANCINI
Elle est notre invitée politique ce matin, c'est Jacqueline GOURAULT. Bonjour.
JACQUELINE GOURAULT
Bonjour.
ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'être avec nous, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les Collectivités territoriales. On est ensemble pendant 20 minutes. Et à mes côtés pour cette interview, Romain GASPAR de la Gazette des communes.
ROMAIN GASPAR
Bonjour.
ORIANE MANCINI
Bonjour Romain. On va évidemment parler longuement de la loi 4D que vous présentez ce matin en Conseil des ministres, Jacqueline GOURAULT, mais d'abord l'actualité, et l'actualité c'est ce qui s'est passé hier à l'Assemblée nationale, hier soir et cette nuit. L'Assemblée nationale qui a donc finalement adopté le Pass sanitaire, après avoir voté contre une première fois, et la République En Marche a été lâchée par le MoDem qui a voté contre ce Pass sanitaire, comme les oppositions. Est-ce qu'aujourd'hui le MoDem est encore un allié de la majorité présidentielle Jacqueline GOURAULT ?
JACQUELINE GOURAULT
Oui, il n'y a aucun doute Oriane MANCINI, aucun doute, c'est une discussion parlementaire comme il y en a eu beaucoup d'autres, où chacun exprime ses convictions et ses positions, et ça s'est arrangé comme vous le savez dans le dialogue, puisque ça a été voté à 01h00 du matin.
ORIANE MANCINI
Alors, ça s'est arrangé mais il y a eu quand même des mots assez forts de la part des députés du Modem. Il n'y a pas eu de dialogue, d'écoute sur les lignes rouges du texte au sein de la majorité. Est-ce que vous vous sentez encore considérés aujourd'hui ?
JACQUELINE GOURAULT
Pardon ?
ORIANE MANCINI
Est-ce que vous vous sentez encore considérés comme membre du MoDem aujourd'hui, par la majorité, par Emmanuel MACRON ?
JACQUELINE GOURAULT
Oui, complètement considérés. Il peut y avoir ici ou là des maladresses des uns et des autres, et vous savez, même à l'intérieur de la majorité ou même à l'intérieur d'En Marche, il y a parfois aussi des discussions à l'intérieur même du parti. Ne faisons pas, je ne veux pas dire d'une montagne, quelque chose qui n'est qu'un incident parlementaire qui s'est finalement arrangé.
ORIANE MANCINI
Mais pour vous, ça n'est pas au-delà de l'incident parlementaire ? On a l'impression que ça vient après d'autres épisodes. Il y a notamment eu l'épisode de la proportionnelle. On sait qu'au MoDem vous tenez beaucoup à la proportionnelle, Emmanuel. MACRON l'a refusée cette proportionnelle, est-ce que ça n'a pas laissé des traces ?
JACQUELINE GOURAULT
Quand vous dites « Emmanuel MACRON l'a refusée »…
ORIANE MANCINI
En tout cas il ne la mettra pas en oeuvre d'ici la fin du quinquennat.
JACQUELINE GOURAULT
On verra dans le temps. Oui. Mais vous savez qu'effectivement le MoDem est très attaché, et ça depuis longtemps, à la proportionnelle.
ORIANE MANCINI
Est-ce que ça a laissé des traces quand même, entre le MoDem et la République En Marche ?
JACQUELINE GOURAULT
Non, ça n'a pas laissé des traces, nous défendons des positions auxquelles nous croyons. Dans une majorité, ça n'est pas être béni oui-oui et dire tout, et dire oui à tout. Il y a des discussions, on construit des majorités, on discute, et puis après les décisions sont prises, et voilà, et on continue, et on continue à faire des listes dans un scrutin régional qui arrive bientôt, où nous sommes clairement alliés, ensemble, la majorité, en faisant des listes En Marche, MoDem, Agir et toutes les composantes de la majorité.
ORIANE MANCINI
D'accord, parce que le MoDem est allié selon les régions…
JACQUELINE GOURAULT
Non. Non, le MoDem n'est pas allié selon les régions…
ORIANE MANCINI
Et selon les départements.
JACQUELINE GOURAULT
Non, mais ce n'est pas ça. S'il y a peut-être des individualités qui n'ont pas respecté les consignes du MoDem, ça, ça arrive dans toutes les élections.
ORIANE MANCINI
Notamment en Ile-de-France, où beaucoup de MoDem sont avec Valérie PECRESSE.
JACQUELINE GOURAULT
Oui, ça arrive régulièrement à toutes les élections régionales, mais il n'y a pas de décision différente du MoDem selon les régions.
ORIANE MANCINI
Donc vous nous dites aujourd'hui que ce qui s'est passé hier, ce n'est pas un moyen pour le MoDem de montrer que la République En Marche n'a pas la majorité sans vous ? Il ne faut pas y voir un signe comme ça aussi ?
JACQUELINE GOURAULT
Le MoDem est une famille politique, le MoDem a un héritage politique, le MoDem défend ses convictions dans la majorité, et c'est bien normal, et il y a encore une fois, à l'intérieur d'En Marche aussi des gens qui ont des convictions et qui défendent leurs convictions. Chacun débat, il y a des votes effectivement, il y a eu un premier vote qui a été repris si je puis dire par une deuxième délibération et qui a fait que tout le monde s'est mis d'accord.
ORIANE MANCINI
Et vous avez fait céder le gouvernement sur plusieurs points. Les députés du MoDem ont fait céder le gouvernement sur plusieurs points.
JACQUELINE GOURAULT
Si vous voulez me dire qu'il y a, ou poser ça en conflit, ça n'est pas un conflit, c'est une démarche normale de la vie démocratique et de parlementaire.
ORIANE MANCINI
L'autre sujet d'actualité, c'est cet hommage national qui a été rendu hier au policier Eric MASSON et Jean CASTEX qui a annoncé un renforcement des peines pour les agresseurs de policiers et de gendarmes. Les élus aussi sont victimes d'agressions de plus en plus fréquentes, de plus en plus violentes, est-ce que vous souhaitez un renforcement des peines pour les agresseurs d'élus ?
JACQUELINE GOURAULT
Oui, et c'est d'ailleurs prévu, dans un projet de loi que nous a présenté le garde des Sceaux, et par ailleurs je vous rappelle que le garde des Sceaux a déjà fait une lettre à l'ensemble du corps de la magistrature, pour expliquer combien les attaques contre les élus étaient gravissimes et qu'il fallait une réponse pénale qui soit adaptée. Je vous rappelle d'ailleurs que nous avons dans la loi de décembre 2019 la loi engagement et proximité, voté aussi la protection juridique et fonctionnelle des maires pour évidemment les conséquences que peuvent avoir des agressions, et que l'Etat prend en charge cette protection pour les communes de moins de 3 500 habitants, c'est-à-dire la majorité des communes en France. Alors, il faut agir aussi sur l'accompagnement, le ministre de l'Intérieur a prévu aussi un accompagnement des forces de police, du GIGN par exemple, pour aider les maires à régler des situations conflictuelles. Il y a je crois plusieurs leviers sur lesquels il faut agir et en tout cas politique pénale également.
ORIANE MANCINI
Mais qu'est-ce qui est prévu en plus pour les élus ?
JACQUELINE GOURAULT
Je dis : politique pénale, c'est-à-dire renforcement des peines…
ORIANE MANCINI
Mais concrètement ?
JACQUELINE GOURAULT
Renforcement des peines contre, à la fois les agressions des policiers et des élus, par exemple pour les policiers, concrètement, en ce qui concerne les peines concernant les refus d'obtempérer, vont être, ça a été annoncé, largement…
ORIANE MANCINI
Pour les policiers on a bien compris, mais pour les élus ? Qu'est-ce qu'il y aura en plus de ce qui est déjà inscrit dans la loi engagement et proximité ?
JACQUELINE GOURAULT
Eh bien des annonces vont être faites et il y a un Beauvau de la sécurité qui en ce moment permet de réfléchir, à la fois sur la protection des policiers, mais aussi des élus qui représentent la République.
ORIANE MANCINI
Et donc il y aura de nouvelles annonces pour les élus. A quelle échéance ?
JACQUELINE GOURAULT
Je n'ai pas d'échéance précise connue, mais la protection des élus est un élément fondamental de la volonté du président de la République, du ministre de l'Intérieur, et du ministre de la Justice.
ORIANE MANCINI
Romain, on va parler d'un sujet qui inquiète les élus en ce moment.
ROMAIN GASPAR
Oui, c'est le la suppression du corps préfectoral, l'annonce par Jean CASTEX. Il y a eu beaucoup d'insistance pendant la crise par le gouvernement, du groupe maires préfets, qu'est-ce que ça va changer cette suppression du corps préfectoral, et est-ce qu'il y a un risque pour les élus de faire face à des préfets moins expérimentés ?
JACQUELINE GOURAULT
Alors, il n'y a pas de… Alors, il faut être clair. Parce que, quand vous dites « suppression du corps préfectoral », je ne peux pas dire que vous ne disiez pas la vérité. Mais ça peut être compris comme suppression des préfets et de l'exercice de la mission et de la fonction de préfet. Je le dis haut et fort : les préfets sont maintenus évidemment dans leur mission, leur fonction, et au contraire on veut en faire un corps fonctionnel si je puis dire. Oui, c'est ça, un corps fonctionnel. Et donc la volonté du président de la République et du Premier ministre c'est de moderniser le corps de préfet, de l'ouvrir à des formations différentes, des parcours différents, mais le préfet qui est je dirais sur les territoires, le représentant de l'Etat, restera le représentant de l'Etat, et je dirais au contraire et y compris dans la loi 4Ds que nous allons tout à l'heure préciser, le renforcement du rôle du préfet est à l'ordre du jour.
ORIANE MANCINI
Et justement on va parler de cette loi 4D Romain.
ROMAIN GASPAR
Le texte arrive assez tard dans le quinquennat. Est-ce que vous avez la garantie de pouvoir l'amener au bout de la navette parlementaire, sachant que les parlementaires ont dit qu'ils allaient fortement l'enrichir et ont la volonté de proposer beaucoup d'amendements ?
JACQUELINE GOURAULT
Ecoutez, le débat parlementaire aura lieu ici au Sénat le 5 juillet, donc on a la session de juillet qui nous permettra de faire la première lecture. Le gouvernement va déclarer l'urgence sur ce texte, bien évidemment, pour qu'il y ait une seule lecture et éventuellement évidemment une CMP, puisque je ne pense pas qu'il y ait un vote conforme, il ne faut pas rêver et si je puis dire. Et pour l'instant la date n'est pas encore finalisée, mais il est possible que la lecture à l'Assemblée nationale se fasse dès la rentrée, et pourquoi pas éventuellement dans une session extraordinaire.
ORIANE MANCINI
Donc ça veut dire dès septembre, session extraordinaire.
JACQUELINE GOURAULT
Voilà. Mais, quand je dis cela, encore une fois ça n'est pas arrêté, mais c'est une possibilité qui a été étudiée. Nous avons donc…
ORIANE MANCINI
Que ce soit donc le…
Brouhaha
JACQUELINE GOURAULT
Evidemment tout le monde a envie que ce texte, évidemment, et le gouvernement en premier, se finalise rapidement. Et je me réjouis d'ailleurs de constater que c'est aussi la position du Sénat, j'ai bien sûr regardé hier la conférence de Presse du président du Sénat en compagnie des rapporteurs, dont Mathieu DARNAUD qui sort de ce studio, et qui ont clairement annoncé leur volonté positive de voir aboutir ce texte.
ROMAIN GASPAR
Il y a quelques semaines, vous annonciez dans la Gazette des communes que ce n'était pas, la loi 4D, pas une grande loi de décentralisation, pourtant dans le 4D il y a décentralisation. Est-ce que ça n'est pas un peu contradictoire et concrètement c'est quoi l'objectif de ce texte ?
JACQUELINE GOURAULT
Alors, vous savez je crois que dans la vie politique, et a fortiori quand on est ministre, il faut dire toujours clairement les choses. Et depuis le début de la préparation de ce texte, j'ai toujours annoncé que ce serait une forme de décentralisation un peu nouvelle, avec normalement une marque de différenciation très importante, de déconcentration et même de simplification. Donc, depuis le début je le dis, parce que réduire ce texte au fait de transfert de l'Etat vers les collectivités, ça serait inexact. Prenons un exemple concret, si vous le voulez bien, par exemple il va y avoir des transferts effectivement, qui vont se faire, on va finaliser par exemple, on propose de finaliser le transfert des routes aux départements et aux métropoles, puisque c'est dans un souci aussi d'efficacité. Mais on le propose pour les départements volontaires. Voyez, l'idée c'est à la fois de la décentralisation, mais qui n'est pas imposée et qui se fait en fonction des territoires.
ROMAIN GASPAR
Sur les routes, enfin, les sondages qu'ont fait les associations d'élus, il y a peu de collectivités qui sont favorables à ce transfert, comment vous l'expliquez et est-ce que ça n'est pas une déception ?
JACQUELINE GOURAULT
Alors, moi je ne fais pas des sondages, je discute avec les départements. Il y a à peu près la moitié des départements qui sont intéressés par le transfert des routes. Alors, bien évidemment, qui dit transfert dit transfert de moyens, je le dis tout de suite, parce qu'on dit toujours : mais comment, il faut qu'il y ait aussi… C'est inscrit dans la Constitution que tout transfert, comme ça a été le cas dans les décentralisations précédentes, s'accompagne de transferts de moyens. Et puis, la différenciation, elle peut se concrétiser de manière différente aussi. Elle peut se faire par l'expérimentation. Par exemple, vous savez que les départements qui sont particulièrement concernés par cette loi 4D, les départements, en tout cas certains départements sont en attente d'une modification du fonctionnement du RSA. Et je prends l'exemple de la Seine-Saint-Denis, qui est très active sur le sujet, eh bien on va faire une expérimentation pour, « recentralisation » du RSA, puisque la partie accompagnement et insertion restera au niveau départemental. Donc là on fait de la différenciation, je dirais, par l'expérimentation. Deuxième exemple, on fera en droit, comme on dit dans le dur, on fera aussi de la différenciation, par exemple il y a dans ce texte aussi des choses qui concernent les territoires frontaliers. Et nous avons besoin de mesures pour répondre, nous en avons beaucoup parlé dimanche à Strasbourg avec le président de la République et les élus, on a besoin d'outils juridiques pour pouvoir mener des politiques transfrontalières, par exemple construire un hôpital transfrontalier, une école transfrontalière etc.
ORIANE MANCINI
On revient sur ce que vous dites, parce que c'est quand même important, sur la question des moyens, vous dites c'est inscrit dans la Constitution que tout transfert de compétences doit s'accompagner de moyens. Vous avez bien sûr entendu les critiques, les inquiétudes surtout des élus, inquiétudes relayées aussi par le Sénat, puisque Mathieu DARNAUD nous disait que ça allait être l'une des priorités et du Sénat de mettre la question du financement au coeur de ce texte. Est-ce qu'il ne manque pas clairement un volet financement dans ce…
JACQUELINE GOURAULT
Non mais ça n'est pas un volet… ça n'est pas un texte de financement et si vous reprenez des lois de décentralisation, ce ne sont pas des textes de financement. Le financement est…
ORIANE MANCINI
Vous comprenez l'inquiétude des élus sur ces questions de financement…
JACQUELINE GOURAULT
Bien sûr qu'on le comprend.
ORIANE MANCINI
…comment vous allez y répondre ?
JACQUELINE GOURAULT
Eh bien c'est comme tout, ça se discute, c'est simple, il y a des dépenses qui sont faites, les années qui précèdent les transferts on regarde combien il y a eu de fonctionnements, combien il y a eu d'investissements, et c'est des négociations qui se font avec les associations d'élus et avec ceux qui, et notamment les présidents de départements qui demanderont un transfert. Je veux dire, il n'y a pas de miracle, il n'y a pas de…
ORIANE MANCINI
Donc, ça ne figurera pas dans la loi, qu'on soit bien clair.
JACQUELINE GOURAULT
Mais non, mais puisque c'est inscrit dans la Constitution. Alors évidemment ça fait toujours, je le comprends, et Mathieu DARNAUD est à sa place en disant « on sera très attentif aux moyens transférés aux collectivités territoriales », très bien, j'ai été sénateur, je sais de quoi il est question, mais évidemment que c'est un sujet qui est important, évidemment que tout cela sera discuté.
ROMAIN GASPAR
Quand l'Association des Maires de France, en particulier François BAROIN, dit que le texte est à des années-lumière de ce qu'il faudrait, les départements hier dans une tribune dans Le Monde, parlent de texte sans relief, est-ce que c'est une déception, un coup dur pour vous de devoir ce tir de barrage des associations d'élus contre ce texte, en tout cas d'une partie importante des associations d'élus ?
JACQUELINE GOURAULT
Ecoutez, je suis habituée aux prises de position des associations d'élus. Moi tout ce que je peux vous dire c'est que j'ai fait un texte en concertation avec les élus ; alors certes avec les concertations, avec les collectivités territoriales, mais sur le terrain. Il y a bien sûr eu les négociations avec les associations, mais j'ai fait plein de réunions dans l'ensemble du territoire, soit en physique, soit en visio puisque la crise de la Covid est arrivée. J'ai vu…
ORIANE MANCINI
Qu'est-ce que vous voulez nous dire ? Que sur le terrain, on ne vous dit pas la même chose que ce que disent les associations ?
JACQUELINE GOURAULT
J'ai vu à peu près 2 000 élus. Je sais ce que j'ai entendu, je connais les attentes des élus et je réponds par ce texte à beaucoup de demandes des élus. D'ailleurs, c'est assez intéressant parce qu'en même temps il y a les critiques, qu'on ne va pas assez loin, enfin etc., mais en même temps il y a le travail que je continue à faire, toutes les semaines, avec les associations d'élus, pour préciser un certain nombre, jusqu'au dernier moment, de choses qui sont dans le texte. Donc il y a, allons, disons les postures, et puis il y a le travail réel qui se fait derrière, et je peux vous assurer que tout niveau de collectivité territoriale est concerné, mais en particulier les départements, et je dois dire que dans le protocole que nous avons signé avec l'ADF et en Charente-Maritime chez leur président Dominique BUSSEREAU, il y avait dans le texte du protocole d'accord, il y avait l'accord sur le principe d'un texte 4D qui était cité. Alors bien sûr…
ORIANE MANCINI
Mais, est-ce que ce ne sont que des postures ? Parce que le Sénat aussi, vous avez suivi hier la conférence de Presse, vous nous l'avez dit, le Sénat aussi a consulté les élus, qui sont des élus de terrain, qui ont fait remonter les propositions…
JACQUELINE GOURAULT
Mais tout le monde a le droit de…
ORIANE MANCINI
… eux aussi demandent plus de décentralisation, plus de proximité, une simplification des normes, comment vous allez répondre à ça ?
JACQUELINE GOURAULT
Eh bien par des tas de mesures dans le texte. Par exemple, puisque vous parlez des simplifications des normes, c'est une autre manière de faire de la décentralisation, nous allons décentrer, déconcentrer pardon, ou décentraliser, décentraliser le pouvoir normatif aux collectivités territoriales sur leurs compétences, avec une liste très précise, ça n'a jamais été fait, c'est ce gouvernement qui va le faire. Au lieu que ce soit un décret qui encadre, je ne sais pas, le nombre de personnes dans un CIAS, on va transférer la capacité selon l'importance de la commune etc., sur le nombre, par délibération de la collectivité. C'est la première fois que ça se fait. Donc on est d'accord sur les grands principes, décentralisation. Deuxième principe très fort, respect des territoires. Troisième principe, le pouvoir normatif plus adapté au terrain. Quatrième principe, une déconcentration de l'organisation de l'Etat sur les territoires. On est d'accord sur les grands principes. D'ailleurs je dois vous dire que sur les 50 propositions du Sénat, le texte en comprend à peu près, on en a repris à peu près la moitié, nous en avons parlé, j'en ai parlé moi-même avec le président du Sénat, et il y en a encore certaines qui peuvent, par amendement, être apportées. Donc, je veux dire par là, moi je suis confiante parce que je sais que je fais tous les jours avec les élus locaux, je sais comment je travaille aussi avec les associations d'élus. Alors après on est dans une période particulière, ça ne vous a pas échappé qu'il y avait des élections régionales, des élections départementales…
ORIANE MANCINI
Pour vous, elles font de la politique, c'est ça ?
JACQUELINE GOURAULT
Mais, tout le monde fait de la politique, et ce n'est pas une faute de faire de la politique, mais vous me permettrez de dire que je travaille régulièrement avec l'ensemble des élus et l'ensemble des associations d'élus, et je sais que nous avançons ensemble pour un texte qui apportera beaucoup de réponses et d'assouplissement sur les territoires.
ORIANE MANCINI
Quelques questions pour finir, on sort un peu de la loi 4D, mais c'est quand même des questions qui inquiètent les élus, les collectivités, le coût de la campagne de vaccination, qui a un coût notamment pour les communes, est-ce que ce coût sera compensé intégralement pour les communes et quand ?
JACQUELINE GOURAULT
Alors, d'abord il est déjà prévu que les coûts avancés par les communes, font l'objet dans les budgets, d'une ligne particulière, et qui permettra d'amortir sur plusieurs années, les dépenses engagées par les collectivités territoriales. Ça c'est déjà fait. Deuxièmement, il va y avoir, avec les directeurs d'agences régionales de santé, des conventions qui sont signées par les villes qui ont des centres de vaccination, et le ministère de la Santé lui-même va compenser le surcoût des dépenses qui est fait pour les centres de vaccination.
ORIANE MANCINI
Mais concrètement, elles vont le voir quand dans leur budget, les communes, ce remboursement. ?
JACQUELINE GOURAULT
Eh bien c'est des conventions qui sont signées actuellement, et ça va être remboursé, comme on a remboursé les masques, parce que peut-être on oublie ça, mais on a remboursé aussi des masques aux communes, et ça a été un chèque très important.
ORIANE MANCINI
Parce que Joël GIRAUD qui était sur ce plateau il y a quelques semaines, il nous disait : ça sera dans le PLF de l'année prochaine. Pour vous, ça sera avant ?
JACQUELINE GOURAULT
Ecoutez, le ministère de la Santé signe des conventions, lui-même avec les municipalités.
ORIANE MANCINI
Et un mot sur, cette dernière question sur un autre sujet, la question de la taxe foncière Romain.
ROMAIN GASPAR
La taxe foncière, l'AMF dans une étude dit qu'il y a un tiers des communes qui se préparent à augmenter leur taxe foncière ou qui l'ont augmentée, pour faire face aux pertes de recettes de la crise tarifaires. Est-ce que c'est aux contribuables de payer le manque de compensation du gouvernement ? Est-ce que vous comprenez que ces élus augmentent leur taxe foncière ?
JACQUELINE GOURAULT
Alors, un, ça n'est pas une étude, c'est un sondage. Il faut dire les choses…
ROMAIN GASPAR
C'est une enquête avec la Banque des territoires.
JACQUELINE GOURAULT
Voilà. Deuxièmement, si vous reprenez et vous le savez très bien, puisque vous êtes un spécialiste, les premières années qui suivent le renouvellement des équipes municipales, il y a toujours augmentation des taxes. J'ai regardé la précédente période, c'est 25 % des communes qui ont augmenté les taxes foncières. Troisièmement, vous dites quelque chose de faux, la compensation de la taxe d'habitation est totale.
ROMAIN GASPAR
Non, je pensais, sur le coût de la crise sanitaire, parce que c'est souvent ça qui est mis en avant par les élus, sur l'explication de la hausse.
JACQUELINE GOURAULT
Ah oui, d'accord, parce qu'il y a aussi la taxe d'habitation qui est mise en avant, elle est compensée intégralement. Donc on ne peut pas…
ORIANE MANCINI
Oui, mais eux ils disent que c'est les pertes de recettes liées à la crise sanitaire.
JACQUELINE GOURAULT
Alors, sur la crise sanitaire, je rappelle tout de même qu'un filet de sécurité a été voté et appliqué en 2020, et que ce filet de sécurité compensait les pertes fiscales et les pertes domaniales des communes, et donc ces communes si elles avaient moins de ressources en 2020 que la moyenne des trois années précédentes, elles étaient compensées. Reste des ajustements encore, je travaille avec Olivier DUSSOPT sur un dossier qui, pour certaines communes qui cumulent un certain nombre d'inconvénients, si je puis dire, les problèmes des régies. Vous voyez, quand certaines communes… C'est très inégal selon les territoires, c'est très inégal, quand certaines communes sont une station de ski, en plus ont une station thermale, et que tout ça est fait en régie, ils ont des pertes qui sont considérables. Nous sommes en train de réfléchir pour voir si nous pouvons, sur ces communes très touchées, trouver un moyen de les aider. Je voudrais terminer en disant que contrairement à ce qui a été craint, et je le partageais, finalement la situation des collectivités territoriales est beaucoup moins, comment dire, grave, qu'on ne l'imaginait, puisque la moyenne c'est une augmentation des dépenses de fonctionnement de + 0,2 et une baisse des recettes de - 1,4, et grâce d'ailleurs au filet de sécurité. Et je rappelle que ce filet de sécurité va s'appliquer en ce qui concerne les ressources fiscales également en 2021.
ORIANE MANCINI
Et merci beaucoup.
JACQUELINE GOURAULT
Merci à vous.
ORIANE MANCINI
Merci Jacqueline GOURAULT d'avoir été notre invité ce matin.
ROMAIN GASPAR
Merci.
ORIANE MANCINI
Merci Romain. On va continuer à parler de votre loi, évidemment Jacqueline GOURAULT, dans « Le Club des territoires ».
source : Service d'information du Gouvernement, le 25 mai 2021