Déclarations de MM. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance, et Olivier Dussopt, ministre des comptes publics, sur les mesures du plan de relance de l'économie, à l'Assemblée nationale le 16 juin 2021.

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Circonstance : Débat à l'Assemblée nationale sur les mesures de relance

Texte intégral

M. le président.
L'ordre du jour appelle le débat sur les mesures de relance.
La conférence des présidents a décidé d'organiser ce débat en deux parties. Dans un premier temps, nous entendrons les orateurs des groupes, puis le Gouvernement. Nous procéderons ensuite à une série de questions-réponses.

(…)

M. le président.
Nous en venons à la seconde partie consacrée aux questions.
Je vous rappelle que la conférence des présidents a fixé à deux minutes la durée maximale de chaque question et de chaque réponse, sans droit de réplique.
Le président Ferrand souhaite que nous respections ces règles : chacun veillera à ce qu'il en soit ainsi.
La parole est à Mme Sylvie Charrière.

Mme Sylvie Charrière (LaREM).
Le plan de relance est une opportunité pour nos territoires. Il est massif et inédit. Les nombreux domaines et secteurs concernés témoignent de la volonté, de l'ambition et de la vision du futur de notre pays : numérique, écologie, jeunesse, emploi, formation, agriculture, industrie. Les nombreuses candidatures reçues par les différents ministères aux appels à projets témoignent de sa réussite. Des opportunités sont proposées tant aux particuliers qu'aux associations, aux entreprises, aux administrations et aux collectivités.

Pour mettre en oeuvre ce plan de relance, des sous-préfets ont été nommés dans certains territoires. C'est le cas dans mon département, la Seine-Saint-Denis. Le tableau de bord territorial témoigne des investissements déjà engagés dans mon département : 50 millions d'euros ont été distribués dans le cadre de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL), soixante-dix entreprises bénéficieront de 7,5 millions d'euros au titre du guichet " industrie du futur ", 900 000 euros ont été attribués à sept associations de lutte contre la pauvreté.

Ces financements reposent majoritairement sur des appels à projets auxquels doivent répondre les acteurs concernés. Cependant, y répondre nécessite non seulement la mobilisation de nombreuses ressources, en ingénierie, en compétences humaines ou en infrastructures, mais aussi que le tissu économique soit riche. Or l'histoire, l'évolution de nos modes de vie et les politiques locales menées ont contribué à créer de grandes disparités entre territoires. Jusqu'en 2014 existait la délégation interministérielle à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale, la DATAR, administration chargée de préparer les orientations et de mettre en oeuvre la politique nationale d'aménagement et de développement du territoire national.

Le plan de relance pourrait constituer une chance unique de donner une nouvelle impulsion pour rééquilibrer l'attractivité de nos territoires et de nouveaux horizons aux habitants, s'appuyant notamment sur les relocalisations. Comment faire en sorte que les mesures du plan de relance, qui fonctionne essentiellement par appel à projets, puissent avoir un impact sur des territoires non attractifs où les ressources humaines et économiques nécessaires à l'élaboration de projets sont insuffisantes ? Comment les sous-préfets à la relance nommés sur ces territoires peuvent-ils être force de proposition et avoir les marges de manoeuvre nécessaires à une action plus volontariste de l'État ?

M. le président.
La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Le Maire, ministre.
Le choix qui a été fait, je veux vous rassurer, est celui d'un engagement déconcentré des crédits : deux tiers des crédits sont traités au niveau déconcentré, parce que nous estimons qu'un préfet de département ou de région est beaucoup mieux à même de savoir quels sont les investissements les plus judicieux. Je vous donne un exemple caractéristique. Sur l'hydrogène, nous investissons plus de 7 milliards d'euros. Le territoire de Belfort s'est positionné pour accueillir une entreprise qui produira des électrolyseurs, l'entreprise McPhy. Ce projet a été instruit au niveau du préfet avec des acteurs locaux et des entreprises locales : nous avons finalement accédé à la demande des élus locaux et du préfet de soutenir l'implantation de l'usine McPhy à Belfort, ce qui représente près de 400 emplois à terme dans la production d'hydrogène vert.

Nous continuerons avec cette méthode : garantir que les demandes locales soient traitées en collant au plus près du terrain. C'est la meilleure méthode : c'est celle qui répond le mieux à vos préoccupations.

M. le président.
La parole est à M. Sylvain Templier, à qui je rappelle que la règle des deux minutes s'applique même à ceux qui ont un lien personnel avec Lucq-de-Béarn. (Sourires.)

M. Sylvain Templier (LaREM).
Je vais tâcher de la respecter, monsieur le président.
Les territoires ruraux, comme Lucq-de-Béarn, sont des acteurs touchés par toutes les transitions, qu'elles soient technologiques, agricoles, démographiques ou économiques. À l'issue des confinements, ils attirent et séduisent de nombreux Français, peut-être de manière idéalisée, certes, mais l'intérêt et la promesse d'un cadre de vie plus agréable, plus calme et plus vert sont bien réels. Les espaces ruraux apportent un grand nombre de bénéfices au reste du pays. Ils doivent être dynamisés, accompagnés et valorisés.

Le plan de relance offre ainsi de belles opportunités. En Haute-Marne, où je suis élu, 430 communes sont en zones dites de revitalisation rurale (ZRR) : c'est l'un des départements les plus concernés. L'objectif des ZRR est d'accompagner le développement de ces territoires grâce à des mesures fiscales et sociales. Les aides appuient des structures créatrices d'emplois dans ces zones moins peuplées, touchées par le déclin démographique et économique. Les premiers chiffres montent que les ZRR ont bénéficié de 22% de l'enveloppe communale de dotation exceptionnelle de France relance ; 5 milliards du plan de relance ont été attribués aux territoires ruraux et ont permis de donner un coup de pouce à l'agenda rural ainsi qu'à la transition écologique des territoires. Les leviers touchés sont nombreux : couverture numérique, projets alimentaires territoriaux, relance des trains de nuit ou de petites lignes ferroviaires, soutien à la transition agricole.

Nous pouvons ajouter la question de l'emploi et je tiens à saluer le plan " 1 jeune, 1 solution ". Plus de 1 300 jeunes Haut-Marnais en ont bénéficié en 2020, dont 542 contrats d'apprentissage et 222 primes à l'embauche.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dresser un premier bilan de l'ensemble des mesures de relance qui irriguent les ZRR ? Le Gouvernement a-t-il l'intention de prolonger certaines d'entre elles afin d'accompagner les projets développés au plan local ? Envisage-t-il de répondre également aux aspirations de nombre de nos concitoyens à s'installer dans ces territoires et à contribuer ainsi à leur renouveau ?

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics.
Votre question dresse un premier bilan : 5 milliards d'euros ont été consacrés à la ruralité, conformément aux engagements pris par le Premier ministre lors du comité interministériel aux ruralités (CIR) de novembre dernier. Nous avons veillé, à la fois dans nos attributions de DSIL exceptionnelle et de dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) et dans l'attribution des différents projets, à accompagner les territoires les plus vulnérables, les ZRR pour les zones rurales, mais aussi les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), et à ce que les projets dont ils puissent bénéficier représentent plus que leur part de population, de territoire ou de richesse produite.

Nous avons également mis en oeuvre des moyens d'ingénierie. Je pense notamment à l'intervention de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) pour accompagner des départements et d'autres collectivités pour l'animation des contrats territoriaux de relance et de transition énergétique (CRTE).

Nous menons des actions par le biais des préfets et sous-préfets chargés de la relance. Lorsqu'il n'y en a pas dans un département, les préfets doivent désigner un membre du corps préfectoral pour piloter le plan de relance à l'échelle départementale. Nous avons mis en oeuvre un dispositif de volontaires territoriaux pour l'administration, avec un accompagnement financier de l'État sur des périodes de douze à dix-huit mois, ce qui permet aux collectivités locales de s'appuyer sur des compétences d'ingénierie, généralement de jeunes diplômés, financées par l'État : cinquante postes ont déjà été attribués et 250 fiches de mission sont connues et répertoriées.

Nous veillons évidemment à ce que les territoires ruraux, en particulier les plus vulnérables, soient concernés par le plan de relance. Cela nous a conduits à donner et à demander que soient donnés des délais supplémentaires pour le dépôt de certains dossiers sur les appels à projets en matière de rénovation thermique et énergétique, ainsi qu'à veiller à ce que la DSIL exceptionnelle accordée soit l'été dernier soit dans le cadre de la rénovation thermique soit élargie aux mêmes critères que la DETR, pour n'écarter aucune collectivité du bénéfice de ces aides.

M. le président.
La parole est à Mme Anne-Laure Blin, pour poser sa première question.

Mme Anne-Laure Blin (LR).
La confiance des entrepreneurs est essentielle pour réussir la relance économique de notre pays. Je crois notamment qu'il est très important de rassurer les entreprises qui ont eu recours aux prêts garantis par l'État (PGE) pour tenter de surmonter la crise. Nous parlons ici de 680 000 entreprises françaises et d'un montant de 140 milliards d'euros de PGE, dont 1 milliard pour 6 000 entreprises dans le département du Maine-et-Loire.

Ce dispositif est nécessaire pour la sauvegarde des acteurs économiques mais il faudra tôt ou tard payer la facture. Initialement, vous aviez prévu que le remboursement des PGE débute, en tout ou partie, au bout d'une année. Vous avez ensuite autorisé le report d'une année. Non seulement ce report risque de ne pas suffire mais les chefs d'entreprise ont également besoin de visibilité.

Nombre d'entreprises peinent à retrouver une activité normale. Pour certaines, cela ne fait que retarder l'échéance. Elles sont maintenues en vie par la dette. L'encours des crédits des entreprises dépasse les 1 100 milliards d'euros. Les surendettements et les défaillances sont et seront malheureusement inéluctables. Nous avons là une véritable bombe à retardement : nous devons tous ensemble la désamorcer. Les PGE ne sauraient être une variable d'ajustement ou un moyen d'étaler les faillites dans le temps. L'objectif doit être de sauver nos entreprises. Il faut que l'État prenne des engagements forts sur la durée pour continuer à soutenir et à accompagner les TPE et PME françaises.

Monsieur le ministre, quelles mesures sont envisagées pour donner plus de souplesse à nos entreprises dans l'étalement du remboursement de leurs dettes ? Comment les accompagnerez-vous très concrètement pour faire face à cette lourde menace du surendettement ?

M. le président.
La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Le Maire, ministre.
Je souhaite tout d'abord vous rassurer sur le surendettement des entreprises. Quand on regarde la dette nette et non la dette brute, ce sont de 5 à 7 milliards d'euros de dette nette supplémentaire. En réalité, beaucoup d'entreprises ont souscrit des emprunts, notamment des PGE, mais ne les ont pas utilisés : elles ont constitué des réserves de trésorerie. Nous pouvons donc faire face à cette difficulté.

S'agissant des PGE, je ne crois pas que ce soit rendre service aux entreprises d'étendre sans cesse les délais de remboursement des dettes. À un moment, il faut rembourser. Simplement, nous avons, comme vous l'avez rappelé, accepté de reporter d'un an le début du remboursement, parce que, pour des restaurants, des bars, des hôtels qui ont souscrit des PGE, la saison ne fait que redémarrer : il vaut donc mieux attendre qu'ils aient eu une saison qui, je l'espère, sera exceptionnelle, cet été, pour qu'ils commencent le remboursement en avril, mai ou juin 2022, plutôt qu'en avril, mai ou juin 2021.

Nous avons également autorisé les entreprises qui le souhaitent à souscrire de nouveaux PGE jusqu'à la fin de l'année 2021. Certaines ont encore besoin de trésorerie et préfèrent emprunter : elles ont encore la possibilité de le faire. Enfin, une entreprise qui se trouverait dans le cadre d'une procédure collective de redressement pourrait obtenir un étalement supplémentaire du remboursement du PGE, mais à titre exceptionnel.

Éric Dupond-Moretti et moi-même avons présenté un dispositif d'accompagnement des entreprises en difficulté pour éviter des faillites. Je n'y reviens pas, mais je crois que nous avons anticipé ce risque aussi bien pour les PME que pour les ETI.

M. le président.
La parole est à Mme Anne-Laure Blin.

Mme Anne-Laure Blin (LR).
Je voudrais également vous interroger sur les difficultés rencontrées par les entreprises du secteur du tourisme. Dans le cadre du projet de loi de finances rectificative en cours d'examen au Parlement, le Gouvernement a prévu 15 milliards d'euros pour de nouvelles mesures d'accompagnement dans le secteur. C'est effectivement nécessaire parce que nous voyons bien que les entreprises du tourisme peinent à redémarrer.

L'activité mettra du temps à retrouver son niveau d'avant, et la sortie progressive des dispositifs d'aides inquiète fortement. D'après leurs représentants, jusqu'à 30% des cafés, des hôtels et des restaurants pourraient faire faillite. Ce serait dramatique pour notre pays. Nous le savons, la reprise de l'activité reste malheureusement contrainte, la pandémie impose toujours des limitations sanitaires, mais les professionnels évoquent aussi d'importants problèmes d'approvisionnement et nous entendons tous les jours parler de difficultés de recrutement dans l'hôtellerie et la restauration.

Si nous voulons passer d'une logique d'urgence à une véritable logique de relance, il faut des mesures particulièrement fortes et volontaires.

Monsieur le ministre, en dehors du plan " 1 jeune, 1 solution ", quelles mesures envisagez-vous de prendre pour relancer l'emploi des jeunes dans ce secteur ? Quelle est votre feuille de route pour remédier aux difficultés que je viens d'évoquer ? Quels dispositifs comptez-vous mettre en oeuvre pour répondre aux problèmes d'approvisionnement des professionnels ? Enfin, prendrez-vous, pour les zones touristiques et littorales – je pense au territoire de ma collègue, Michèle Tabarot, les Alpes-Maritimes, et au mien, la vallée de la Loire et le Saumurois –, une mesure de soutien similaire à celle que vous avez prise pour les stations de montagne, à savoir la compensation des charges fixes des exploitations ? Ces zones attendent beaucoup du soutien et de l'accompagnement de l'État.

M. le président.
La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Le Maire, ministre.
Je tenterai de répondre à ces questions précises en deux minutes en insistant sur deux points. Je partage votre analyse des deux principales difficultés du secteur touristique : l'approvisionnement en matières premières et le recrutement.

Sur le premier point, j'ai tenu hier, avec Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement, et Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises, une réunion avec tous les acteurs du bâtiment et des travaux publics. Nous avons proposé une médiation et décidé de ne pas imposer de pénalité de retard pour les contrats publics. Je signerai et je ferai diffuser, dans les prochaines heures, une circulaire afin de préciser que les appels d'offres relevant de l'État ne seront pas soumis à une pénalité de retard si les entrepreneurs n'ont pas pu terminer leur chantier dans les délais faute d'avoir pu s'approvisionner en bois de construction ou en ferraille. J'insiste pour que tous ceux qui le peuvent, notamment les collectivités locales et les grandes entreprises donneuses d'ordre, suivent l'exemple de l'État. Je leur demande de ne pas appliquer de pénalité de retard lorsqu'un entrepreneur du bâtiment et des travaux publics est confronté à un problème d'approvisionnement en matière première. Si un conflit éclatait, si des difficultés apparaissaient ou si des abus étaient constatés, le médiateur des entreprises aurait pour rôle de trouver une solution.

S'agissant du recrutement, je confirme ce que vous dites : qu'il s'agisse des couvreurs ou de l'hôtellerie et de la restauration, il existe des difficultés à recruter. L'objectif des dispositifs annoncés aujourd'hui par Élisabeth Borne, ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, est précisément d'accélérer la formation des jeunes et de leur permettre de trouver un emploi dans ces métiers, pour lesquels des postes sont à pourvoir très rapidement.

Les acteurs du secteur HCR – hôtellerie, cafés et restauration – ont été, vous l'avez dit, particulièrement touchés par la crise sanitaire. L'État les a fortement soutenus et son accompagnement cessera de manière progressive pour les trois dispositifs principaux. L'activité partielle est maintenue jusqu'à la fin du mois d'août, mais une dégressivité est appliquée. Le fonds de solidarité est soumis au même régime : l'aide sera fixée à 40% de la perte de chiffre d'affaires en juin 2021 par rapport à juin 2020, puis à 30% en juillet 2021 par rapport à juillet 2020, et à 20% au mois d'août 2021 par rapport à août 2020, avec une clause de revoyure à la fin du mois d'août pour vérifier que des difficultés particulières ne se posent pas pour certains professionnels. Enfin, nous maintenons le cofinancement de la masse salariale à hauteur de 15% en juin, juillet et août.

M. le président.
La parole est à Mme Pascale Fontenel-Personne.

Mme Pascale Fontenel-Personne (Dem).
Ma question concerne également l'économie touristique et plus particulièrement les CHRD – cafés, hôtels, restaurants, discothèques. Les touristes commencent à revenir en France pour admirer notre patrimoine et savourer notre art de vivre. Le temps est superbe et le couvre-feu sera bientôt levé, ce qui nous permettra de jouir d'une convivialité retrouvée jusqu'au bout de la nuit – petit clin d'oeil à la réouverture des discothèques ! En un mot, tous les voyants sont au vert pour que l'été soit chaleureux et que la France redevienne la destination incontournable, enviée dans le monde entier parce qu'il y fait bon vivre.

L'économie touristique a été particulièrement touchée par la crise sanitaire, et en particulier les CHRD, qui ont toutefois bénéficié d'une aide massive. Je ne pense pas que nous nous dirigions vers 30 % de dépôts de bilan, monsieur le ministre, sauf si nous ne réussissons pas à régler les problèmes de recrutement que connaît ce secteur d'activité. La Banque des territoires et Bpifrance prévoyaient plus de 3 milliards d'euros de financements entre 2020 et 2023 sous forme de prêts et d'investissements en fonds propres. Ne pourrait-on pas consacrer une grande partie de ces crédits à soutenir les professionnels des CHRD dans la formation de leurs salariés ?

M. le président.
La parole est à M. le ministre.

M. Bruno Le Maire, ministre.
Je partage vos propos, madame la députée. Nous aurons en effet une saison touristique exceptionnelle en France cet été. Les dernières données relatives aux achats par carte bleue montrent que l'activité a redémarré très fort, notamment dans le secteur des CHRD. Le montant des frais engagés est élevé, ainsi que le niveau des réservations dans l'hôtellerie. Ces différents indicateurs sont à la hausse.

En réalité, la question que vous soulevez est plus structurelle que conjoncturelle. Nous devons inciter les jeunes générations à se diriger vers le secteur des CHRD, qui embauche massivement et qui aura des problèmes de recrutement dans les jours et les semaines à venir. Les organismes de formation devront relever le défi de former rapidement un nombre croissant de jeunes aux métiers du tourisme. Ce sont de beaux métiers, qui offrent la possibilité d'une carrière riche et pleine d'expériences. À nous de valoriser les métiers des CHRD pour qu'ils ne rencontrent plus de problèmes de recrutement dans les mois et les années à venir.

M. le président.
La parole est à Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune (SOC).
La crise sanitaire a eu des répercussions importantes sur la construction de logements, mais elle n'a fait qu'aggraver la baisse enregistrée ces dernières années. Le nombre de chantiers et de permis délivrés a fortement diminué depuis 2018, à tel point que le Premier ministre lui-même, le 17 mai dernier, a évoqué " un ralentissement structurel de la production de logements neufs ". Ce ralentissement est notamment dû à la baisse du fonds de roulement des bailleurs sociaux, liée à la réduction de loyer de solidarité, ainsi qu'aux incertitudes liées à la réorganisation des bailleurs prévue par la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, la loi ELAN.

La crise sanitaire n'a malheureusement fait qu'ajouter des difficultés et le nombre de permis de construire est encore très inférieur au niveau qui était le sien avant le premier confinement. Les logements autorisés, quant à eux, se sont stabilisés à un niveau inférieur à la moyenne des douze mois précédant le premier confinement. Sur une année, entre mars 2020 et février 2021, 377 000 logements ont été autorisés à la construction, soit 17% de moins qu'au cours des douze mois précédents. Hélas, les mises en chantier suivent le même mouvement, bien que moins fortement, puisqu'ils ont connu une baisse de 4,1%. Cette crise touche désormais le logement social, qui stimule d'habitude la production quand les autres secteurs subissent un ralentissement. La raréfaction du foncier entraîne, par ailleurs, une concurrence entre les logements privés et les logements sociaux au détriment de ces derniers.

C'est dans ce contexte que le Gouvernement a lancé le plan de relance " Habiter la France de demain ". L'aide aux maires bâtisseurs a été améliorée par un bonus de 50% – bonus que vous aviez supprimé trois ans plus tôt ! Monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué, pensez-vous que le choc de construction annoncé par Emmanuel Macron en 2017 verra le jour avant la fin du quinquennat ?

Vous avez mentionné le chômage partiel, monsieur le ministre : il constitue en effet une aide majeure pour les salariés, mais on oublie souvent qu'il constitue aussi une aide aux entreprises, car les salariés sont la richesse des entreprises.

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Permettez-moi de répondre d'abord à votre dernière remarque. L'activité partielle constitue une aide majeure pour les salariés, car elle permet de maintenir les salaires, le pouvoir d'achat et l'emploi, mais, comme je le disais il y a quelques minutes, elle constitue également une aide majeure pour les entreprises, car elle permet de maintenir les compétences. Or celles-ci sont la richesse des entreprises et leur permettent de rebondir. Sur ce point, nous avons tiré les enseignements de la crise de 2009, puisque nous avons appliqué un taux d'indemnisation de l'activité partielle beaucoup plus important pendant cette crise sanitaire. Chacun se souvient que l'Allemagne avait fait, dans ce domaine, un choix plus ambitieux que la France après la crise de 2009, au bénéfice de sa capacité de rebond et du redémarrage de son économie.

J'en viens à présent au logement. Rappelons, tout d'abord, que le plan de relance prévoit 500 millions d'euros de crédits pour accompagner la rénovation des logements sociaux. Par ailleurs, nous avons fait le choix, pour tous les logements, d'accompagner fortement la rénovation thermique par l'élargissement du dispositif MaPrimeRénov', qu'il s'agisse des crédits disponibles ou du nombre de bénéficiaires. Ce dispositif rencontre un grand succès, ce dont témoigne la consommation plus rapide que prévu des crédits qui lui sont alloués. Ajoutons, au-delà des éléments que vous avez rappelés, que le plan de relance prévoit une aide aux maires densificateurs afin de soutenir la construction et de mieux accompagner les élus qui font le choix de construire sans consommer de terrains disponibles et donc en préservant la nature et l'environnement autour des bâtiments et des communes. Telle est précisément la philosophie de l'aide aux maires densificateurs.

Nous rencontrons des difficultés en matière de construction de logements neufs. Vous l'avez rappelé, elles sont liées à certaines réorganisations, mais aussi au cycle électoral classique, celui-ci ayant cependant été particulièrement long ces derniers mois, ce qui a retardé les mises en chantier. Mme la ministre déléguée chargée du logement, qui a rencontré récemment les constructeurs avec Bruno Le Maire pour s'entretenir avec eux du prix des matières premières et de leur approvisionnement, est attentive à la situation. Le Gouvernement souhaite bien évidemment que les objectifs de construction soient atteints et que la courbe s'inverse. Notons une particularité du plan de relance : le Gouvernement a fait le choix de privilégier le domaine de la rénovation car elle contribue à l'amélioration des conditions de vie, à des économies d'énergie dans le cadre de la transition énergétique et au soutien du pouvoir d'achat des ménages.

M. le président.
La parole est à M. Benoit Potterie.

M. Benoit Potterie (Agir ens).
En mars 2020, notre pays s'est trouvé confronté à une crise sanitaire sans précédent, qui a obligé les décideurs publics que nous sommes à relever un double défi. D'une part, il fallait éviter à tout prix que la situation sanitaire ne crée un désastre économique à court terme. Sur ce plan, nous pouvons tous nous accorder sur le fait que le soutien public de l'État a été au rendez-vous et qu'il a permis d'assurer une protection indispensable à nos entreprises. D'autre part, il fallait préparer l'avenir et saisir l'opportunité de la crise pour réinventer notre modèle. C'est de ce dernier aspect que nous débattons aujourd'hui.

Vous le savez, les Hauts-de-France ont une histoire industrielle forte. Plus que d'autres, ce territoire a subi les conséquences de la désindustrialisation. Il était donc indispensable d'en faire un territoire prioritaire pour la relance. C'est chose faite et nous pouvons nous en féliciter. Le plan de relance dans les Hauts-de-France est très dynamique puisque déjà 130 projets sont soutenus, qui représentent 750 millions d'euros d'investissements industriels, financés à hauteur de 126 millions par l'État.

Pour la reconquête industrielle, vous avez mis en place, avec Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l'industrie, dans le cadre du programme Territoires d'industrie , un soutien à l'ingénierie qui manquait cruellement à certaines collectivités afin de monter des projets industriels et de les accompagner dans leur développement. Le dispositif se traduit aujourd'hui par des résultats concrets. Je pense à la cristallerie Arc, dans ma circonscription, à Béthune-Bruay, ou encore à Amiens, chez notre collègue François Ruffin. Le dispositif lancé par le Gouvernement est un véritable succès. L'État prend toute sa place dans le dynamisme économique des territoires et j'espère qu'il sera rapidement rejoint par les régions. La politique de reconquête industrielle que nous avons engagée doit désormais être amplifiée pour faire de la France une grande nation productive.

Ces soutiens indispensables à nos territoires, seront-ils pérennisés ? Plus globalement, pouvez-vous nous garantir que les crédits du programme Territoires d'industrie seront prolongés pour accompagner le rebond ?

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Nous partageons votre bilan, monsieur Potterie, et la fierté d'avoir accompagné l'industrie dans les Hauts-de-France, ainsi que le rebond économique de cette région. Nous prévoyons plusieurs dispositions pour compléter le dispositif actuel. Il s'agit notamment des prêts participatifs pour renforcer les fonds propres, ou quasi-fonds propres, des entreprises, mais aussi du plan anti-faillites et de la possibilité de mobiliser les fonds privés avec le label " Relance ", lequel représente aujourd'hui plus de 15 milliards d'euros à travers les 170 fonds mobilisables.

Nous avons accompagné les collectivités et les territoires avec les moyens d'ingénierie nécessaires à la mise en oeuvre des dispositifs pendant la durée du plan de relance. Nous veillerons à ce que ces moyens soient disponibles de manière limitée dans le temps. En effet, nous avons la volonté de soutenir l'économie sans créer de nouvelles dépenses publiques structurelles qui se sédimenteraient dans le temps.

Enfin, nous souhaitons faire aboutir les projets et les demandes relatifs aux dispositifs de soutien à l'industrie – " Territoires d'industrie » et « Industrie du futur " – prévus par le plan de relance. Les dispositifs liés à la numérisation de l'économie ont connu un grand succès et nous avons pris la décision, il y a quelques semaines, de les réabonder pour un montant total d'un peu plus d'1 milliard d'euros dans le cadre des premiers redéploiements au sein du plan France relance. Nous pourrons ainsi accompagner un plus grand nombre de projets et d'entreprises, comme nous l'avons fait, pour le dispositif " Territoires d'industrie ", en lien avec les régions, celles-ci assumant leur part du financement.

Tous ces dispositifs d'aide à l'ingénierie et de soutien à l'industrie doivent-ils être pérennisés ? Je suis tenté de vous répondre non pour des raisons comptables. Nous avons toujours dit que le plan d'urgence devait être circonscrit dans le temps. Quant à la nécessité de dispositifs nouveaux, si le besoin en était avéré, en matière de soutien à l'investissement, les travaux de réflexion annoncés par M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance il y a quelques instants permettront d'en juger. Nous serons heureux d'y associer les parlementaires au cours des prochains mois.

M. le président.
La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit (UDI-I).
Je veux revenir sur un des éléments phares du dispositif de relance, qui est lié à la transition énergétique : MaPrimeRénov', qui est presque victime de son succès parce qu'il fait l'objet de nombreuses demandes.

Vous y consacrez plus d'1,5 milliard d'euros, ce qui constitue un investissement important, comme vient de le rappeler le ministre Bruno Le Maire. Mais les bénéficiaires qui essaient d'accéder à la plateforme numérique MaPrimeRénov' rencontrent de vraies difficultés, qui vont croissant. Ils se rendent dans les maisons France service – à Fougères, par exemple elle se trouve dans la sous-préfecture –, ils contactent les plateformes locales de rénovation énergétique, les intercommunalités et les bureaux parlementaires, mais nous ne parvenons plus à répondre à la demande. Il y a un vrai blocage !

Ensuite, lorsque les usagers réussissent à renseigner les champs sur le logiciel de la plateforme numérique, ils observent une forte disparité entre les aides qui leur sont annoncées et les subventions concrètes qu'ils reçoivent en euros.
Ainsi, monsieur le ministre délégué, comment serait-il possible de simplifier les choses, sachant que les financements et les dispositifs s'enchevêtrent de manière très complexe : je pense à l'ANAH – Agence nationale de l'habitat – et à l'ADEME – Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie – qui interviennent toutes les deux, et à MaPrimeRénov' qui coexiste avec les certificats d'économie d'énergie ?

Il faudrait créer une porte d'entrée territoriale : les plateformes locales de rénovation énergétique pourraient jouer ce rôle, notamment par l'intermédiaire du réseau FAIRE – Faciliter, accompagner et informer pour la rénovation énergétique. Je viens encore de m'entretenir avec le sous-préfet de l'arrondissement de Fougères-Vitré en début d'après-midi : nous faisons face à un encombrement qui empêche de répondre aux sollicitations des usagers, et il y a urgence à résoudre ce blocage. Après avoir créé une espérance, on finit par nourrir une suspicion et une défiance.

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Je partage au moins le début de vos propos : MaPrimeRénov' est un dispositif ambitieux et qui fonctionne ; notre objectif, en y consacrant plus de 2 milliards d'euros du plan de relance, en plus des crédits habituellement dédiés à la rénovation thermique des logements, est d'accompagner la rénovation de 3,8 millions de logements considérés comme des passoires énergétiques. Comme je l'indiquais à Mme Pires Beaune, c'est non seulement un acte de transition énergétique et écologique mais aussi une façon de rendre du pouvoir d'achat à nombre de nos concitoyens et d'améliorer leurs conditions de vie.

Plusieurs éléments intéressants peuvent permettre d'apporter des réponses à votre question. Plus de deux tiers des demandes déposées le sont par des ménages considérés comme modestes ou très modestes, et le déplafonnement des critères d'éligibilité que nous avons établi ne concerne que 5 % d'entre elles. En outre, leur volume est important, ce qui contribue à la relance de l'activité. Sur l'année 2020, nous avions enregistré 192 000 demandes ; sur les six premiers mois de 2021, nous en sommes à presque 330 000 demandes.

L'augmentation du nombre de dossiers déposés est donc exponentielle, ce qui peut occasionner ici ou là – vous l'avez noté – des difficultés sur le réseau informatique et parfois des retards en matière de versement des aides aux ménages bénéficiaires. Pour y répondre, nous avons pris plusieurs décisions, notamment le renforcement des moyens de l'ANAH, qui devrait lui permettre d'instruire les dossiers et de débloquer les fonds plus rapidement. Nous avons aussi veillé à ce que les moyens de l'agence des services de paiement soient également renforcés, afin d'accélérer les délais et de faire en sorte que les ménages – ou les entreprises, lorsqu'il y a délégation – soient accompagnés au mieux et le plus vite possible.

Je ne saurais me prononcer sur tel ou tel dysfonctionnement du réseau que vous auriez noté, mais je suis convaincu que l'ensemble de nos équipes, à Bercy – celles que nous dirigeons, Bruno Le Maire et moi-même –, les étudieront avec attention, si vous voulez bien nous transmettre des informations plus précises.

Pour le reste, nous en sommes persuadés : il est essentiel que le dispositif soit piloté au plan national. Il s'agit d'une mesure d'égalité pour les territoires ; partout où nous avons développé des partenariats, nous les mettons en oeuvre, mais nous essayons de répondre à la demande principalement par une augmentation des crédits consacrés à MaPrimeRénov' et des moyens consacrés à son instruction. Je souhaite que cela permette de résoudre les difficultés que vous évoquez.

M. le président.
La parole est à Mme Sabine Rubin.

Mme Sabine Rubin (FI).
Il est un adage bien connu en politique : le rôle de ceux qui l'exercent n'est plus tant de " savoir faire " que de " faire savoir ", au risque de verser parfois dans une communication fallacieuse. C'est à peu près ce qui s'est passé lorsque vous avez annoncé votre plan de relance, en septembre dernier : 100 milliards d'euros, voilà un chiffre rond et ronflant, susceptible d'impressionner nos concitoyens ! Mais près de 40% de cette somme sont en réalité imputables au plan de relance européen, 30% ne constituent pas des dépenses nouvelles et les diverses mesures qu'elle recouvre ont toutes des échéances différentes.

Un drôle de jeu de bonneteau, donc, que vous déclinez en trois volets : écologie, compétitivité et cohésion des territoires. Ce sont de jolis mots à la mode, mais notons tout de même quelques originalités : dans le volet écologie, on trouve par exemple 250 millions d'euros consacrés aux infrastructures routières. Drôle de conception de l'écologie ! Et s'il est des points positifs comme les 4 milliards consentis pour la rénovation des bâtiments publics, cela reste insuffisant – c'est à peu près ce qu'il faudrait dépenser au minimum chaque année jusqu'en 2040 pour les seules passoires thermiques. Quant aux 30 milliards dédiés à la compétitivité, les deux tiers correspondent à des cadeaux fiscaux aux entreprises les plus polluantes et leur effet multiplicateur est de 0,3 contre 0,8 pour le reste des mesures, ce qui n'est déjà pas glorieux.

Alors, est-ce un plan de relance ou un plan de complaisance ? À l'aune de ces observations, je me demande d'ailleurs ce que vous espérez relancer. " La réponse budgétaire française ressemble plus à un plan de sauvegarde qu'à un plan de relance ", a même déclaré Nicolas Goetzmann dans une interview au Figaro . J'ajouterai : un plan de sauvegarde des bénéfices des profiteurs de crise.

Ma question est la suivante : comment pensez-vous produire une relance durable alors que vous taillez les branches saines pour sauver les fruits pourris ? Ne pensez-vous pas que ce plan, que vous appelez " de relance ", correspond à des investissements qui auraient dû être consentis par la puissance publique bien avant qu'ils soient rendus nécessaires par le contexte actuel, pour remettre à niveau toutes les infrastructures ? Il est normal que les collectivités territoriales se saisissent de ce budget : il y avait, et il y aura encore, tant à faire !

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Madame la députée, répéter des mensonges n'en fera jamais des vérités. Puisque vous nous dites que les 100 milliards sont du recyclage, je vais à nouveau en détailler le contenu : 86 milliards d'euros proviennent de l'État, dont 20 milliards consacrés à la baisse des impôts de production, 64 milliards de nouveaux crédits budgétaires et 2 milliards de crédits que l'on qualifie d'évaluatifs ; 9 milliards sont supportés par l'UNEDIC et financent l'activité partielle de longue durée, et quelques crédits servent à financer un plan d'investissement supplémentaire dans le cadre des accords du Ségur. Bpifrance amène 2,5 milliards et la Banque des territoires mobilise 3 milliards. Cela fait 100 milliards. Il n'y a ni recyclage ni mensonge, et aucune mesure n'a été glissée dans le plan de relance alors qu'elle existait auparavant. Ce sont des mesures nouvelles, des actions nouvelles au bénéfice des Français et des entreprises.

Vous nous demandez comment nous envisageons de réussir un plan de relance qui en soit vraiment un. Je vais vous le dire en une phrase : en faisant exactement l'inverse de ce que vous répétez.

M. le président.
La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne.

M. Jean-Paul Dufrègne (GDR).
Je voudrais appeler l'attention sur les entreprises en transition, celles qui se dirigent doucement mais sûrement vers la reprise. En effet, si reprise il y a, elle doit être accompagnée : nous ne pouvons pas abandonner les entreprises à leur propre sort et espérer qu'elles puissent, du jour au lendemain, recouvrer toute la trésorerie perdue. Il s'agit bien souvent d'entreprises qui ont survécu difficilement : il est donc vital de ne pas retirer brusquement toutes les aides qui leur sont apportées, au risque de causer un effondrement des plus fragiles.

Au niveau mondial, la reprise s'amorce à un bon rythme mais nous sommes loin du rythme pré-covid annoncé. Il faut continuer à tenir une ligne à moyen terme et consolider le bilan des petites entreprises qui ont gardé le cap grâce aux mesures d'aide ou de report. L'investissement public doit se poursuivre, afin que les acteurs économiques ne se retrouvent pas le couteau sous la gorge et que l'investissement privé soit, lui aussi, à nouveau encouragé.

C'est pourquoi nous demandons que les aides, sous toutes leurs formes, ne soient pas entièrement coupées mais qu'elles soient prolongées jusqu'à ce que la reprise économique soit consolidée, même sous une forme dégressive. Nous demandons aussi de les inscrire dans le temps, pour accompagner des mutations indispensables, par exemple dans les fonderies – je pense à celle de Dompierre-sur-Besbre, dans ma circonscription de l'Allier. En général, les entreprises dont il est question sont de véritables poumons pour l'emploi sur les territoires concernés.

M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Je souscris entièrement à vos propos. En effet, nous considérons que les aides ne doivent pas être coupées brutalement : c'est la raison pour laquelle, dans le PLFR qui a été soumis à votre approbation la semaine dernière, nous avons prévu une sortie dégressive du fonds de solidarité d'ici à la fin du mois d'août et une montée progressive du reste à charge des entreprises s'agissant de l'activité partielle. L'Assemblée nationale a jugé opportun de voter une disposition permettant au Gouvernement, en cas de besoin, de prolonger les dispositifs d'aide par la voie réglementaire. Cela nous permettra de faire un point à la fin du mois d'août, comme cela a été dit tout à l'heure, et de voir si les aides doivent être maintenues ou non. Nous avons l'espoir que la reprise économique soit suffisamment forte pour que ce ne soit pas le cas, à l'exception peut-être de secteurs particuliers comme l'aéronautique.

L'activité partielle de longue durée constitue un deuxième élément de réponse. Ce dispositif a été validé par un accord majoritaire avec les partenaires sociaux il y a plusieurs mois, avant la troisième vague de covid-19 que nous avons connue : il est financé en partie par le plan de relance et permet d'accompagner dans le temps des entreprises rencontrant des difficultés.

Les financements en fonds propres ou en quasi-fonds propres sont un troisième type de réponse. Ils peuvent prendre la forme de prêts participatifs – je les ai évoqués –, d'un recours à du financement privé par les labels " France relance " ou encore d'un dispositif anti-faillite, grâce à la rénovation du fonds de développement économique et social (FDES) qui s'appellera désormais le fonds de transition ; il est doté de 3 milliards d'euros permettant à l'État d'octroyer des prêts à long terme aux entreprises qui rencontreraient des problèmes de trésorerie et auxquelles le secteur bancaire n'apporterait pas de réponse. Enfin, certaines dettes des entreprises font l'objet d'un accompagnement, notamment les dettes sociales occasionnées par le report de paiement des cotisations sociales. J'ai annoncé il y a quelques semaines des plans d'apurement très longs pour les sociétés et pour les indépendants – dans leur cas, par exemple, dès lors qu'une dette sociale sera supérieure à 1 000 euros, le plan ne pourra être plus court que 24 mois, ce qui rendra évidemment soutenable l'apurement d'une telle dette.

Nous allons donc travailler de manière très progressive : nombre de vos interrogations peuvent trouver des réponses et des solutions dans notre action.

M. le président.
Nous avons terminé le débat sur les mesures de relance.


Source http://www.assemblee-nationale.fr, le 22 juin 2021