Interview de Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports, à RTL le 24 septembre 2021, suite aux violences observées dans les stades entre supporters et la prévention de ces dérives.

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Texte intégral

YVES CALVI
Bonjour Roxana MARACINEANU.

ROXANA MARACINEANU
Bonjour.

YVES CALVI
Vous êtes notre ministre déléguée chargée des Sports, on est ravi de pouvoir vous donner la parole ce matin, je vais être très simple, en quatre questions, faut-il interdire les déplacements de supporters aujourd'hui dans notre pays, au moment où nous parlons ?

ROXANA MARACINEANU
C'est vrai que personne n'a vu cette violence arriver, aujourd'hui, qu'on constate, 5 % des matchs où il y a de telles violences ce n'est pas acceptable, en tout cas c'est suffisant pour qu'on se mette tous autour de la table et qu'on réagisse. Alors, est-ce que réagir ça veut dire interdire le déplacement des supporters ? Si c'est une mesure d'urgence qu'il faudra prendre, on la prendra, mais moi ce que j'ai envie de faire c'est que tout le monde se mette autour de la table et qu'on travaille ce sujet, nous avions commencé à le faire avant la crise, il faut qu'on continue, parce que la solution ce n'est pas de pénaliser tous les supporters à cause de personnes violentes et qui s'en prennent aux autres, y compris parfois aux joueurs.

YVES CALVI
Alors, les clubs sont-ils complices de ce qui est en train de se passer, est-ce qu'ils ne font pas suffisamment le ménage parmi les supporters ?

ROXANA MARACINEANU
En tout cas les clubs ont un rôle important à jouer, les associations de supporters également, et les autres supporters, qui ne sont pas violents, doivent aussi joue un rôle, évidemment nous, les instances publiques, avec des déplacements, des interdictions de déplacement quand c'est nécessaire, mais je pense qu'il faut qu'on soit tous responsabilisés dans cette affaire, que ce soit les instances du football, la Fédération, la Ligue, mais aussi les clubs, et cette relation qui s'instaure au moment de la vente des billets, entre les clubs et leurs abonnés.

YVES CALVI
Vous leur lancez un appel ce matin pour qu'ils prennent en charge notamment ce qui relève de la vente de billets, c'est-à-dire qu'ils soient plus attentifs aux gens à qui ils vendent des billets, c'est aussi simple que ça ?

ROXANA MARACINEANU
Ils ont un arsenal, y compris législatif, qui leur permet aujourd'hui de pouvoir recenser les personnes à qui ils vendent les billets, ils les connaissent nominativement, les billets ça se vend nominativement, il y a des conditions générales de vente quand on les vend, et puis derrière qui impliquent qu'on peut arrêter de les vendre à des personnes qui mettent le trouble et qui font de telles fautes dans les gradins, ensuite, évidemment, tout ça, ça se conjugue avec d'autres mesures, qui doivent être plus importantes, quand il s'agit d'incivilités, oui, il faut prévenir, on peut aussi travailler sur le dialogue, mais en amont, de telles violences au moment des matchs, mais évidemment il faut avoir une action coordonnée entre tout le monde, tous ceux qui peuvent agir doivent agir en même temps et d'une seule voix.

YVES CALVI
On a quand même une étrange, je dirais sensation de complicité, c'est-à-dire de double langage des clubs, alors il ne faut pas leur tomber dessus, je dirai brutalement, c'est difficile à gérer, mais enfin ça fait quand même très longtemps que ça dure et ça ne bouge pas, c'est-à-dire que, on vend ses billets, on veut des supporters qui soutiennent, et dès que ça dérape un peu, « oh là là ce n'est pas de notre faute », etc., enfin qui est responsable au final, les supporters, les clubs, la Ligue, les pouvoirs publics, est-ce que vous faites un choix là-dedans ?

ROXANA MARACINEANU
C'est pour ça que moi je ne suis pas d'avis de mettre la poussière sous le tapis et de recommencer, comme au bon vieux temps, en interdisant les déplacements des supporters et que tout ça, finalement, n'échoit qu'à l'Etat, j'ai envie que tous, en responsabilité, on en discute, et qu'on voit ce qu'on peut améliorer, et que ce soit dans les statuts, les règlements disciplinaires de la Fédération et de la Ligue, que ce soit dans cette relation entre les clubs et leurs supporters, et enfin dans cette relation entre les associations de supporters, qui doivent aussi être responsabilisées par rapport à ça, et les éléments, les individus, de ces associations, ou des gradins, qui viennent là pour autre chose que pour regarder un match de football.

YVES CALVI
Madame la ministre, les textes existent, les sanctions possibles existent, et pour tout vous dire on a l'impression que vous êtes bien seule, c'est-à-dire qu'il n'y a que vous à dire il va falloir faire des choses, il va falloir que ça bouge, et avoir envie que ça le soit, pourtant on a des textes qui existent, on peut agir dès aujourd'hui.

ROXANA MARACINEANU
Dès la semaine prochaine on va parler à trois voix, avec Gérald DARMANIN, avec Eric DUPOND-MORETTI et moi-même, puisque la division nationale de lutte contre l'hooliganisme va se réunir, va nous réunir, les trois ministères, avec la Ligue et la Fédération, et nous prendrons, suite à cette réunion, des décisions, j'espère importantes et qui vont changer les choses.

YVES CALVI
Vous avez l'impression que tout le monde joue le jeu et qu'on est de bonne foi dans ces affaires ?

ROXANA MARACINEANU
Il va bien falloir, parce que le témoignage qu'on a entendu sur votre antenne, moi je n'ai pas envie que ça se reproduise, je suis maman de quatre enfants et j'ai envie que mes enfants ils puissent aller au foot tranquillement, regarder un match de football en toute sécurité.

YVES CALVI
Zéro violence dans les prochains mois, c'est possible, vous vous engagez ?

ROXANA MARACINEANU
Il faut qu'on s'engage tous, je ne m'engage pas toute seule, on a des corps intermédiaires en France, on a des délégations de service public, données aux fédérations, qui les donnent aux Ligues, on est tous en responsabilité, je sais que les clubs ont vécu des périodes difficiles, c'est pour ça qu'on est à leurs côtés aujourd'hui, on les a aidés financièrement, on les a aidés moralement, c'est pour ça aussi sans doute qu'ils font appel à nous de manière très facile et très rapide, mais il faut que tous on soit en responsabilité parce qu'il en va derrière aussi du modèle économique des clubs et de la relation que les présidents de club, que les joueurs de ce club, pourront continuer à avoir avec leurs abonnés, avec les amoureux du football, je dis toujours les supporters c'est le 12e homme du match, et il faut le considérer comme tel, et tout ça, ça passe par des droits, supplémentaires pour les supporters peut-être, mais surtout des devoirs aussi, et il n'y a que comme ça que ça peut marcher, en responsabilisant les gens, ce n'est pas des enfants, on est des adultes et il faut qu'on agisse comme tel, et qu'on mette au banc ceux qui ceux qui méritent de l'être.

YVES CALVI
En tout cas je retiens votre première réponse à cette interview, merci Roxana MARACINEANU, si c'est une mesure d'urgence on la prendra, en l'occurrence interdire éventuellement les déplacements des supporters, merci Madame la ministre.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 29 septembre 2021