Texte intégral
M. le président.
La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Je suis heureux de vous présenter la mission Plan de relance, dans un contexte économique très favorable pour la France et pour les Français.
Il y a un an, nous redoutions faillites et chômage.
M. Alain David.
Nous avions raison !
M. Bruno Le Maire, ministre.
Nous avons, au moment où je vous parle, croissance et emploi. Les derniers chiffres de croissance pour le troisième trimestre, annoncés par l'INSEE à 3%, confirment notre prévision de croissance à 6,25% pour 2021 – au moins.
Je vois bien le débat qui est en train de naître sur les recettes fiscales supplémentaires que l'État pourrait engranger si la croissance était supérieure à ces 6,25%, et je ne veux laisser aucune ambiguïté : si recettes fiscales supplémentaires il devait y avoir, elles iraient à la réduction du déficit public et de la dette. Il n'y a pas de cagnotte quand il y a 8% de déficit public et une dette supérieure à 100%.
Pourquoi enregistrons-nous ces bons résultats économiques ?
La première raison, c'est l'efficacité de la politique économique que la majorité a votée : cette fameuse politique de l'offre, tellement décriée, mais qui donne des résultats que d'autres gouvernements auraient bien aimé atteindre il y a quelques années ou quelques décennies. Ces résultats sont aussi le produit de la constance et de la lisibilité de notre politique ; depuis 2017, nous avons tenu notre cap économique. Nous avions promis de réduire les impôts : nous les avons réduits. Quand vous réduisez les impôts des ménages, ceux-ci consomment parce qu'ils se disent que demain, on n'augmentera pas les impôts. Quand vous réduisez les impôts des entreprises – principalement des PME – et les impôts de production, eh bien les entreprises embauchent, parce qu'elles dégagent des marges de manoeuvre supplémentaires pour investir et pour embaucher. La loi PACTE, la réforme du marché du travail et tout ce que vous avez adopté depuis 2017 donnent des résultats.
La deuxième raison, c'est que le Gouvernement a protégé les plus défavorisés et les plus modestes pendant la crise.
M. Alain David.
Heureusement !
M. Bruno Le Maire, ministre.
Je ne peux pas laisser dire le contraire. Ce que nous avons instauré avec l'activité partielle a protégé les plus modestes – des salariés qui risquaient de perdre leur emploi. Les prêts garantis par l'État (PGE) ont massivement profité aux plus petites entreprises et aux PME. Quant au fonds de solidarité, il était là pour protéger les indépendants, les commerçants, les artisans, et il a permis de garantir la protection de l'activité pendant la crise.
La troisième raison, c'est l'efficacité de la relance. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le rapport indépendant que nous a remis Benoît Coeuré sur l'évaluation de la relance. Si la relance est aussi efficace – l'une des plus efficaces dans la zone euro –, c'est d'abord en raison de sa simplicité.
Il n'y a pas de saupoudrage, au contraire.
Mme Valérie Rabault.
Si, il y a beaucoup de saupoudrage !
M. Bruno Le Maire, ministre.
Il y a trois grandes têtes de chapitres qui sont très claires : une première pour le climat – 30 milliards pour le climat, monsieur Coquerel, ça n'est pas ridicule, à moins de considérer que 30 milliards ça n'est absolument rien dans les finances publiques –, une autre pour la compétitivité et une troisième pour la cohésion sociale, avec notamment un soutien massif à l'emploi des plus jeunes. Nous avons réussi à réduire massivement le chômage des jeunes et à protéger ces derniers contre les conséquences de la crise grâce aux mesures de relance.
Si la relance a été efficace, c'est aussi parce que nous l'avons engagée rapidement – 55 milliards ont été engagés sur les 100 milliards votés ; c'est enfin en raison de sa souplesse, puisque dans le cadre du projet de loi de finances rectificatives (PLFR) pour 2021, nous vous proposons de redéployer 8 milliards depuis des politiques qui ont moins bien fonctionné vers des politiques qui ont très bien fonctionné, comme MaPrimeRénov', le recyclage des friches – dont vous avez tous salué l'efficacité – ou la numérisation industrielle.
Quels sont les effets sur l'économie ? Le premier, le plus important, le plus essentiel à mes yeux, celui qui était l'objectif premier de la relance économique, c'est que nous avons aujourd'hui le taux de chômage le plus bas depuis 2008. À l'heure où je vous parle, il est de 7,6%, soit un niveau inférieur à ce que nous avions avant la crise. Le niveau d'activité est revenu au niveau d'avant-crise, alors que l'objectif était d'y arriver au mieux en décembre 2021, et plutôt au début de l'année 2022. C'est dire l'efficacité de la protection, de la relance et de la politique économique.
Le taux de chômage est l'acquis le plus important de notre politique économique, c'est le résultat politique le plus essentiel. En effet, le travail, c'est ce qui fait la cohésion de la société et la force de la nation, ce qui nous encourage tous et donne à chacun un sens à son existence au sein de la nation française. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
Pour la première fois depuis 1970, soit un demi-siècle, la France peut enfin envisager de sortir du chômage de masse,…
M. Jean-Louis Bricout.
Bla-bla-bla !
M. Bruno Le Maire, ministre.
…qui a créé de tels ravages sociaux et politiques dans notre pays, pour entrer dans l'ère du plein-emploi. Et je tiens à le dire : notre objectif à tous est que l'emploi paie.
M. Alain David.
Ah !
M. Bruno Le Maire, ministre.
La prime d'activité, les heures supplémentaires défiscalisées, la défiscalisation des pourboires que nous vous proposons, la suppression des cotisations patronales au niveau du SMIC, l'intéressement, la participation et l'actionnariat salarié doivent permettre à un salarié au SMIC de toucher non pas 1 250 euros net par mois mais 1 490 euros net par mois. Alors que certains candidats à l'élection présidentielle le promettent, nous, nous avons porté le SMIC à 1 500 euros net. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
M. Alain David.
Tout le monde est content !
M. Bruno Le Maire, ministre.
Je souhaite désormais que les entreprises poursuivent les négociations dans les branches en tension pour mieux rémunérer les salariés, notamment les plus modestes. L'État a fait sa part ; il est juste et nécessaire que dans les branches les plus tendues et peinant à recruter, les entreprises accomplissent également leur part du chemin. (Exclamations sur les bancs du groupe SOC.)
Enfin, je voudrais que chacun mesure bien les défis qui sont devant nous. Oui, nous conduisons une politique économique qui a donné des résultats, notamment grâce à la relance ; oui, la protection est efficace. Mais mesurons les défis de la sortie de crise : ils sont considérables.
Le premier défi, vous le savez et en parlez tous, à juste titre, c'est l'inflation. Nous suivons son niveau avec une grande vigilance. Elle est selon nous transitoire…
M. Alain David.
Tout le monde a gagné !
M. Bruno Le Maire, ministre.
…et liée à la reprise économique. Néanmoins, ne nous le cachons pas : c'est du transitoire qui durera. Je ne vois pas d'amélioration sur ce front avant la fin de l'année 2022, lorsque nous aurons réduit les goulets d'étranglement sur les matières premières, les semi-conducteurs ou en matière d'emploi. C'est ce qui justifie les mesures prises par le Président de la République et le Premier ministre afin de protéger les Français contre la hausse des prix de l'énergie : le chèque énergie, proposé dans le PLFR pour 2021 ; le bouclier tarifaire qui protégera contre l'explosion des prix de l'électricité, proposé dans le PLF pour 2022 ; l'indemnité inflation, proposée dans le PLFR pour 2021.
Après celui de l'inflation, le deuxième grand défi de la sortie de crise est la relocalisation des chaînes de production et de valeur dans laquelle toutes les grandes puissances sont engagées. La France et l'Union européenne doivent donner l'exemple. C'est l'objectif du plan France 2030 annoncé par le Président de la République : en investissant dans la production d'hydrogène, dans les semi-conducteurs, dans les batteries électriques, dans les biotechnologies, nous pourrons garantir l'indépendance et la souveraineté politiques de la France.
Le troisième enjeu de la sortie de crise, après l'inflation et la relocalisation des chaînes de valeur, est la lutte contre les inégalités. Prenons garde au risque de grandes divergences entre les pays développés et les pays en développement. Tous ceux qui s'inquiètent de l'immigration illégale et des flux migratoires devraient avoir à coeur de contribuer au développement des pays qui n'ont pas disposé des mêmes ressources financières que nous pour soutenir leur population pendant la crise. Avec le Président de la République, nous avons pris l'engagement que 100 milliards d'euros soient alloués aux pays en développement, c'est essentiel. Nous avons mis sur la table 25% de notre richesse nationale pour protéger et relancer nos économies : ce chiffre n'est que de 2,5% dans les pays en développement ; nous ne pouvons pas et ne devons pas les laisser tomber.
Le dernier enjeu est bien entendu la réduction de la dette. Nous nous y sommes engagés, nous la résorberons grâce à la croissance, à des réformes structurelles, aux nouvelles mesures de gouvernance proposées par Éric Woerth et Laurent Saint-Martin. Nous n'oublions pas la nécessité de réduire la dette ; nous nous y employons au rythme qui nous permettra de continuer à soutenir la croissance. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.)
M. le président.
Nous en venons aux questions.
Je rappelle que la durée des questions comme des réponses est de deux minutes.
La parole est à Mme Valérie Rabault.
Mme Valérie Rabault.
Monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, je voudrais vous interroger sur la question des logements, que j'ai déjà évoquée tout à l'heure. Dans la première version du plan de relance – celle du PLF pour 2021, puisque la deuxième version, le plan France 2030, sera précisée plus tard –, vous aviez fixé l'objectif de 80 000 logements sortis du statut de passoire thermique. Or, à la lecture des annexes du PLF pour 2022, nous constatons que seuls 2 500 en sont sortis, soit trente-deux fois moins.
Pour 2022, vous avez réduit vos ambitions, et vous tablez sur 20 000 logements qui sortiront de ce statut. Honnêtement, ce n'est pas sérieux. Le logement est le grand absent de votre plan de relance, que ce soit dans sa première ou deuxième version. Je souhaiterais que vous nous apportiez des précisions sans nous reprendre la litanie des dispositifs que vous avez instaurés, notamment MaPrimeRénov'. J'évoque les logements sortis du statut de passoire thermique. Ces données sont écrites noir sur blanc dans vos documents budgétaires, je ne les invente pas.
Deuxième question : pourquoi la santé est-elle totalement absente du plan de relance ?
M. Philippe Chassaing.
Et le Ségur ?
Mme Valérie Rabault.
Au mois de septembre 2020, Mme Merkel a investi 750 millions, dont 375 millions destinés à BioNTech. Ni le Ségur de la santé ni aucune version du plan de relance ne prévoient de mesures visant à relocaliser les entreprises de la santé. Monsieur le ministre, pourriez-vous nous en dire davantage ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics.
S'agissant des logements, je suis désolé, je reviens sur MaPrimeRénov'…
M. Jean-Louis Bricout.
Il n'y a pas de rénovation globale, ça ne marche pas !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
…bien que vous m'ayez appelé à ne pas le faire : alors que nous avions prévu 400 000 rénovations dans le cadre de ce dispositif, 700 000 seront réalisées en 2021. Nous avons aussi appliqué un nouveau dispositif, le " prêt avance rénovation ", qui permet aux ménages les plus modestes d'accéder à un prêt très bonifié afin de mener des projets de rénovation globale plus intéressants et plus attractifs que ceux prévus dans la première version du plan.
Vous ne pouvez affirmer que le logement est absent du plan de relance. Nous proposons le dispositif MaPrimeRénov' qui permet de financer des travaux d'isolation énergétique ; l'aide aux maires bâtisseurs ; le doublement, à l'échelle du plan de relance, et la pérennisation du fonds de recyclage des friches, qui permet de développer des espaces fonciers sans réduire les terrains naturels, sans contribuer à l'artificialisation des sols. Toutes ces mesures concourent à la réalisation de nos ambitions en matière de logement.
En ce qui concerne la santé, je crains que vous n'ayez commis la même erreur que Mme Corneloup : vous vous arrêtez à l'examen des seuls crédits budgétaires lorsque vous étudiez le plan de relance. Or au-delà des 64 milliards d'euros de crédits budgétaires, 20 milliards sont consacrés à la baisse des impôts de production, et d'autres crédits sont gérés par la BPIFrance –comme par d'autres acteurs ; enfin d'autres crédits encore sont alloués dans le cadre du PIA 4 pour financer de nombreuses actions de soutien à des industries de santé, à la relocalisation de la production de vaccins et à la souveraineté en matière de production de médicaments – vous le savez parfaitement.
Je sors du cadre du plan de relance pour vous rappeler que le projet de loi de financement de la sécurité sociale – PLFSS – pour 2022, que nous examinons concomitamment, prévoit l'application de l'intégralité des engagements pris au début de l'été par le Président de la République lors du Conseil stratégique des industries de santé. Nous rattrapons ainsi le retard accumulé dans le secteur de l'industrie pharmaceutique.
M. le président.
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.
M. Jean-Hugues Ratenon.
Votre politique de relance laisse peu de place à la transition écologique. Vous soutenez massivement des secteurs très polluants, tels que le nucléaire, l'aéronautique et l'automobile.
Or, à proximité de la France, un pays subit actuellement tous les effets néfastes de ces pollutions à grande échelle. À Madagascar, pays qui a été colonisé par la France pendant plus de cinquante ans, sévit une famine terrible, due à la plus grande sécheresse de ces quarante dernières années. L'ONU évoque même la première famine due au réchauffement climatique : d'après le Programme alimentaire mondial, plus de 1,35 million d'êtres humains sont directement concernés. Les terres arides de Madagascar ne nourrissent plus leurs enfants ; quelle tristesse !
Nous polluons, participons au réchauffement climatique et gaspillons chaque jour sans même penser qu'à notre porte, sur un autre bout de terre pas si éloigné du nôtre puisque situé sur notre planète, des hommes et des femmes comme nous, des pères et des mères de famille comme nous, des enfants comme les vôtres et les miens se retrouvent à se nourrir de cuir bouilli, de galettes d'argile ou de cactus ; goût amer de la misère sous le regard aveugle des bien-portants. Continuons à nous gaver, à faire ripaille, à nous vautrer dans moult richesses, le regard tourné ailleurs vers le but : la finance et ses dividendes.
Ce sont des familles entières, des personnes âgées, des femmes et des enfants qui meurent. Les ONG – organisations non gouvernementales – déjà présentes sur place estiment que les trois quarts des enfants de moins de 5 ans souffriraient déjà de malnutrition. Pensez-vous une seule seconde qu'il pourrait s'agir de notre famille ou de nos enfants ?
La colonisation a laissé des traces et aujourd'hui la France laisse des traces différemment, en participant au désastre que subissent de pauvres populations à travers le monde, du fait de vos lois peu écologiques. Monsieur le ministre délégué, pourquoi le plan de relance n'a-t-il pas suffisamment pris en considération le changement climatique ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Je répondrai brièvement à l'interpellation de M. le député et reviendrai sur une partie de sa question, qui va au-delà du plan de relance. Le plan de relance consacre 35 milliards d'euros à la transition écologique.
M. Éric Coquerel.
Ce n'est pas vrai, il n'y a pas les crédits !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Lorsque vous pointez du doigt l'industrie automobile, je vous réponds au contraire que j'en suis fier, car elle mène la conversion écologique, nous permettant d'être à la pointe sur les batteries ou l'hydrogène. Je suis très fier que nous puissions la soutenir. Au lieu de la montrer du doigt, nous pourrions souligner qu'elle participe à la transition écologique.
M. Éric Coquerel.
Vous vous contentez de redire ce qui est dans votre dossier de presse !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Avant le plan de relance, nous n'avions jamais consacré autant d'argent à la transition écologique dans l'industrie, à la rénovation énergétique, à la préservation de la biodiversité, en allouant des crédits qui permettent…
M. Éric Coquerel.
Dans la réalité, les crédits n'y sont pas !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Monsieur Coquerel, vous pouvez crier tant que vous voulez, je ne vous entends jamais. Continuez, mais vous êtes d'une impolitesse crasse, je vous le dis comme je le pense ! (M. Éric Coquerel proteste vivement.) Vous êtes impoli, c'est tout ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. Éric Coquerel.
Monsieur le président, vous devez intervenir !
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Je respecte votre mandat parlementaire, respectez les réponses que j'apporte à vos collègues.
M. le président.
Monsieur Coquerel, s'il vous plaît, le ministre délégué seul a la parole.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Jamais autant d'argent n'a été consacré à la transition écologique, et…
M. Éric Coquerel.
Il y a deux poids, deux mesures ! Pour le même mot, ma présidente de groupe a été interrompue par la présidence de séance !
M. le président.
Vous ferez un rappel au règlement tout à l'heure. Je vous le dis une dernière fois : il est temps d'écouter le ministre, lui seul a la parole.
M. Éric Coquerel.
Ce sont des insultes ! (Vives exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. le président.
Monsieur Coquerel, je vous le dis une dernière fois : si vous avez un rappel au règlement à faire, vous le faites.
M. Éric Coquerel.
Je n'insulte personne, et le ministre doit respecter la représentation nationale !
M. le président.
Nous écoutons le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Moi non plus, je n'insulte personne, et la représentation nationale, j'y ai siégé pendant plus longtemps que vous.
M. le président.
Je suspends la séance pour une minute.
(La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.)
M. le président.
Nous reprenons nos travaux, avec un peu plus de sérénité.
Monsieur le ministre délégué, vous aviez la parole – à moins que vous n'ayez achevé votre réponse ?
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
J'ai fini, monsieur le président.
Rappel au règlement
M. le président.
La parole est à M. Éric Coquerel, pour un rappel au règlement.
M. Éric Coquerel.
Il a pour objet la bonne tenue des débats, et, surtout, la mise en cause personnelle. (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)
Oui , bien sûr ! J'interpelle le ministre délégué, depuis les travées, publiquement – beaucoup de collègues font de même –, sans prononcer un seul mot qui s'apparente à une injure ou à un propos inconvenant : je lui demande de ne pas répéter le dossier de presse où figure l'information selon laquelle 35 milliards d'euros de crédits seraient consacrés à l'écologie ; j'essaie – comme l'a demandé mon collègue Ratenon – d'en connaître le détail, que nous ignorons. M. le ministre délégué me répond en qualifiant mes propos de « crasses ».
Récemment, Mme Mathilde Panot a été interrompue par la présidence de séance, alors qu'elle s'exprimait à la tribune, parce qu'elle avait usé de ce même terme. Pourtant, monsieur le président, vous ne dites rien au ministre délégué qui s'adresse à un parlementaire – à la représentation nationale – de manière aussi incorrecte : il y a deux poids et deux mesures !
M. François Cormier-Bouligeon.
Oh, ça va, vous passez votre temps à faire dix fois pire !
M. le président.
S'il vous plaît, mes chers collègues ! Finissez votre rappel au règlement, monsieur Coquerel. (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)
M. Éric Coquerel.
Oh, ça suffit ! Il n'y a pas un mot d'insulte dans ce que je viens de dire ! On a quand même la liberté de s'opposer, dans cette assemblée !
M. le président.
Absolument, vous avez la liberté de vous opposer !
M. Éric Coquerel.
Je demande le respect de la part du Gouvernement, car il n'y a pas un mot qui soit une insulte dans ce que je viens de dire ! Ça suffit ! (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.)
M. le président.
Nous ne pouvons continuer dans ces conditions.
M. Éric Coquerel.
Lui peut dire ce qu'il veut, cela ne vous gêne pas, monsieur le président !
M. le président.
S'il vous plaît, monsieur Coquerel, finissez votre rappel au règlement !
M. Éric Coquerel.
Je vous fais remarquer que cela vous dérange que j'interpelle le ministre délégué quand il estime que je tiens des propos « crasses ». En revanche, cela ne dérange pas la présidence – non pas vous-même en l'occurrence, mais la présidence au sens global – d'interrompre ma présidente de groupe, en lui disant qu'elle ne peut pas utiliser ce même terme vis-à-vis d'Emmanuel Macron. Et un membre du Gouvernement peut utiliser ce mot vis-à-vis d'un parlementaire ? Il y a deux poids et deux mesures !
Vous devriez rappeler à l'ordre le ministre délégué, qui devrait se rappeler qu'il est à l'Assemblée nationale et qu'on a encore droit – même depuis les travées – de l'interpeller lorsque sa réponse n'est pas précise !
M. le président.
Soyons clairs. Tout d'abord, l'incident que vous mentionnez a été évoqué en conférence des présidents ce matin, je n'y reviens pas. Par ailleurs – et je m'adresse à M. le ministre délégué comme à tout le monde –, la règle dans cet hémicycle est que personne ne doit manquer de respect à personne. C'est une évidence.
Cessons désormais cet esclandre. Le rappel au règlement a été fait et je vous prie de vous asseoir.
(...)
M. le président.
Nous reprenons nos travaux.
La parole est à M. Michel Castellani.
M. Michel Castellani.
Je me contenterai de poser ma question calmement…
M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général.
C'est plus calme !
M. Michel Castellani.
…car vous savez que les Corses ont horreur de toute forme de violence.
M. le président.
Parfait !
M. Michel Castellani.
Nous sommes, jusqu'au bout, des pacifistes. (Rires et applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et LR.)
M. le président.
Merci, monsieur Castellani.
M. Michel Castellani.
Ma question, toute simple, porte sur la facture énergétique, notamment celle des plus modestes. La relance, si vous avez l'ambition qu'elle soit solidaire, passe par l'amélioration et l'accélération des mécanismes d'aide. Le dispositif MaPrimeRénov' est un vrai succès : plus de 550 000 demandes de subventions ont déjà été reçues. Les objectifs quantitatifs ont donc été atteints, mais cette prime est-elle pour autant pleinement satisfaisante ? Elle permet de financer une large palette de travaux, mais n'incite pas à une rénovation globale.
M. Jean-Louis Bricout.
Eh oui !
M. Michel Castellani.
Souvent, les bénéficiaires se contentent de travaux partiels.
Le comité d'évaluation du plan France relance a estimé que les travaux validés avaient permis d'atteindre un gain énergétique de 0,4% de la consommation énergétique du parc privé français : c'est tout à fait marginal.
Monsieur le ministre délégué, allez-vous conditionner le versement de cette prime à des gains de performance énergétique ? Quelles évolutions envisagez-vous pour encourager les rénovations globales ? Pour accompagner les ménages les plus modestes vers des travaux performants, êtes-vous favorable à un accompagnement de long terme, avec des rénovations par étapes ? Dernière question, MaPrimeRénov' relève de la mission Cohésion des territoires , et aussi, pour partie, de la mission Plan de relance : quelle sera son enveloppe après 2023 ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Dans le prolongement de ma réponse à Mme Valérie Rabault, je confirme que le dispositif MaPrimeRénov' est un succès, avec 400 000 demandes prévues et 700 000 dossiers enregistrés. Nous veillons, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2022, à ce que les crédits disponibles soient au moins identiques, en montant, à ceux de 2021, malgré une consommation plus rapide, car nous souhaitons accompagner ce mouvement.
Au-delà de ce dispositif, se pose la question des rénovations globales – au nombre de 2 500 –, dont nous pouvons considérer qu'elles ne sont pas à la hauteur de nos ambitions et qu'il nous faut développer d'autres outils. Il en existe deux.
Le premier, c'est le prêt rénovation énergétique et thermique pour les particuliers, qui vise à permettre à des ménages modestes d'avoir accès à des prêts à des taux extrêmement intéressants, pour pouvoir mener des travaux importants de rénovation globale et pour améliorer fortement la performance énergétique de leurs bâtiments.
Le second est le dispositif " Habiter mieux sérénité ", qui préexistait au plan de relance : porté par l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), il permet d'aller plus loin en matière de rénovation globale et il a prouvé son efficacité : hors plan de relance, son taux de consommation est meilleur que les années précédentes.
À cet égard, dans le cadre du PLFR, qui sera présenté demain en Conseil des ministres, je vous proposerai d'augmenter le budget de l'ANAH de 100 millions d'euros, afin de financer la montée en puissance d' " Habiter mieux sérénité ", qui répond précisément à votre question sur la rénovation globale sur le plan thermique.
M. le président.
La parole est à Mme Anne-Laurence Petel.
Mme Anne-Laurence Petel.
La semaine dernière, le comité d'évaluation de France relance vous a remis son premier rapport, dressant un tableau positif de la situation macroéconomique du pays, notamment en comparaison avec nos voisins et partenaires européens. France relance est un succès incontestable : la semaine dernière, j'étais avec le dirigeant d'une entreprise de l'électronique lauréate dans ma circonscription, qui prévoit la création d'une centaine d'emplois ; sans le soutien massif du plan de relance, cette start-up n'aurait sans doute jamais pu passer en production, ni envisager l'installation des bâtiments qui lui permettront d'employer 100 personnes.
Des incertitudes demeurent toutefois sur la sortie de crise. Lors de la mission d'information relative aux entreprises en difficulté du fait de la crise sanitaire, dont j'étais corapporteure, nous avions constaté l'existence de fortes divergences d'opinion entre les acteurs du monde économique sur la crainte d'un mur de faillites. Pour l'instant, ce tsunami de faillites ne s'est toujours pas abattu sur notre pays, mais deux facteurs pèsent sur les perspectives de développement de nos entreprises – pour certaines d'entre elles, c'est même leur survie qui est en jeu : le remboursement des PGE et les difficultés conjoncturelles d'approvisionnement et de recrutement.
Si France relance est un succès, il nous faut transformer l'essai pour pérenniser cet acquis. L'État a déjà prévu un investissement massif dans les filières d'avenir : les entreprises doivent maintenant prendre le relais et investir. Or, elles font face – en sus des difficultés conjoncturelles internationales – à un endettement structurel plus élevé que celui de leurs concurrents européens, ce qui pourrait conduire à une spirale de sous-investissement, en raison des difficultés de financement.
Monsieur le ministre délégué, dans cette situation économique à la fois favorable et incertaine, quelles actions seront entreprises pour pérenniser les acquis du plan de relance et pour favoriser l'investissement, étant entendu que la stabilité et la visibilité sont des conditions nécessaires pour investir ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Je souhaite tout d'abord rassurer la représentation nationale sur ce que l'on qualifie parfois de risque de mur des faillites. Observons l'évolution de la situation des entreprises : leur niveau d'endettement net a augmenté, l'année dernière, de 9 milliards d'euros seulement, malgré une période où les PGE ont atteint 140 milliards d'euros, ce qui signifie que d'autres emprunts n'ont pas été pris et que la capacité des entreprises à rembourser est préservée.
Deuxième élément plutôt rassurant, la Banque de France nous a récemment indiqué que l'hypothèse de sinistralité de 6% que nous avions retenue pour construire le budget était surévaluée et que le taux de sinistralité se situerait autour de 3,8%. Cela démontre l'efficacité des dispositifs en place et nous permet de réduire, dans d'autres documents budgétaires, les crédits consacrés aux appels en garantie.
Comment pouvons-nous accompagner les entreprises qui rencontreraient des difficultés quant à leur endettement propre ou leurs fonds propres ? Dans le cadre du PLFR de juillet dernier, vous avez adopté un dispositif – le fonds de transition, doté de 3 milliards d'euros – qui a pour objectif de permettre à l'État de prêter à très long terme – ce qui équivaut à des fonds propres –, directement à des entreprises viables qui rencontrent des problèmes d'accès aux fonds propres. Une autre disposition concerne les PGE, que la Commission européenne nous a autorisé, sous réserve que ce soit sous l'autorité du juge, tout en conservant la garantie d'État, à intégrer dans les plans d'apurement réalisés par les tribunaux de commerce pour les entreprises qui se placent sous leur protection.
Enfin, nous avons mis en oeuvre un plan d'apurement de la dette sociale pour les entreprises : 800 000 plans ont été adressés aux entreprises concernées, avec un taux de rupture dans les discussions qui n'est pas supérieur à 2 %, ce qui démontre également la capacité de l'économie à faire face aux difficultés d'endettement que vous avez soulignées.
M. le président.
La parole est à M. Fabien Di Filippo.
M. Fabien Di Filippo.
Nous avons eu le droit, de la part des ministres, à une lecture plus politique qu'économique du plan de relance. Un certain nombre de difficultés sont tout de même en germe. M. Le Maire a évoqué une baisse de la dette, alors que celle-ci n'a fait qu'augmenter, avant la crise – où des niveaux records de dépenses publiques ont été atteints –, pendant la crise, et aussi après la crise. Ce plan représente tout de même quatre points de dette supplémentaires : quand on prétend baisser les impôts, si l'on veut être crédible, il faut baisser certaines dépenses en parallèle, dire lesquelles, et ne pas se fonder uniquement sur des recettes hypothétiques ; faute de quoi ce sont les impôts de demain ou ceux sur les générations futures.
Deuxièmement, vous évoquez une croissance jamais vue ou un taux de chômage record : n'oublions pas que si la reprise a été plus importante en France, c'est aussi parce que la récession y a été beaucoup plus forte que chez nos voisins. De plus, tous les pays connaissent un cycle en V. Au final, la perte de PIB est plus importante chez nous. Le vrai record, c'est celui d'un déficit commercial jamais atteint en France !
Le plan présenté s'apparente donc davantage à un plan de dépenses qu'à un plan de relance. Je poserai deux questions. En premier lieu, une reprise de l'inflation se fait sentir, sous l'effet des centaines de milliards d'euros déversés dans l'économie française : comment comptez-vous la juguler, alors que vous répandez encore davantage d'argent dans l'année à venir ?
Deuxièmement, ce plan recycle ou camoufle, pour plus des deux tiers, des augmentations de dépenses courantes. Je n'ai pas le temps d'évoquer ce point en détail, et je citerai simplement deux exemples. Premièrement, si la reprise des dettes des hôpitaux est souhaitable pour remédier à l'étranglement du système de santé, elle ne relève pas du plan de relance économique. Deuxièmement, vous justifiez le retour des emplois aidés par leur utilité pour certaines collectivités ou pour certains individus, alors que vous vouliez absolument supprimer en début de quinquennat ; vous-même, monsieur le ministre délégué, siégeant alors sur d'autres bancs, étiez de cet avis !
Plus des deux tiers de ce plan de relance posent donc problème !
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Je vous invite à l'optimisme, car la France est le seul pays de la zone euro à avoir retrouvé un niveau de production de richesses identique à celui de fin 2019, plus rapidement que nous ne le pensions. Nous pouvons nous réjouir de cette bonne nouvelle.
Par ailleurs, si le poids de la dette a baissé entre 2017 et 2019, il a nécessairement augmenté ensuite à cause de la crise. Les bonnes nouvelles qui nous parviennent du front de l'économie, la révision des hypothèses macroéconomiques que nous avons proposées au Haut Conseil des finances publiques, lequel rendra son avis demain, parallèlement à la présentation du projet de loi de finances rectificative en conseil des ministres, montrent que les ratios de dette par rapport au PIB seront moins élevés que ce que nous craignions. En effet, ce taux atteindra, en 2021, 116% environ et non 120%, et 113,5% en 2022 plutôt que 166%. Ces ratios restent importants mais leur évolution est meilleure que celle que nous prévoyions. Les choses se passent donc bien.
La crise a-t-elle coûté de l'argent public ? Oui et c'est le choix que nous avons fait pour accompagner les entreprises et les Français. Resserrons-nous violemment les dépenses ? Non, car nous ne voulons pas répéter l'erreur de 2010 où l'on avait voulu une consolidation trop rapide, ce qui avait étouffé la croissance.
Enfin – je tiens à vous répondre de la façon la plus précise possible –, vous évoquez la reprise de dette des hôpitaux, mais il s'agit d'un des éléments du Ségur de la santé ; cela ne concerne pas le présent plan de relance. Je suis convaincu, et vous l'êtes sans doute aussi, que la reprise de dette des hôpitaux publics est aussi censée leur donner des marges de manoeuvre en matière d'investissement – elle est du reste liée à des plans d'investissements. Il s'agit de faire en sorte que les hôpitaux aillent tout simplement mieux, comme le reste de l'économie.
M. le président.
La parole est à M. Patrick Loiseau.
M. Patrick Loiseau.
L'Union européenne a, en réaction à la crise de la covid-19, fait un pas décisif vers une Union toujours plus intégrée, plus solide et plus juste. Nous avons appris des erreurs de 2008-2014, et je crois que nous parviendrons à empêcher qu'une trop forte divergence dans la reprise des économies n'apparaisse entre le coeur de la zone euro, dont les économies sont moins sensibles aux chocs sanitaires, et les États membres périphériques, plus dépendants du tourisme.
Plus encore, par le soutien budgétaire direct qu'offre NextGenerationEU – le plan de relance pour l'Europe –, le spectre d'une nouvelle crise des dettes souveraines semble s'évanouir. En la matière, l'action de la France et du Président de la République a été tout à fait déterminante, ce que je ne peux m'empêcher de souligner.
Monsieur le ministre délégué, 40 % du plan France relance doivent être financés, à terme, par ce mécanisme européen – en particulier le volet climatique. Nous avons reçu en 2021 un premier préfinancement de 5,1 milliards d'euros, qui doit être suivi de 7,4 milliards d'euros en 2022, de 12,7 milliards d'euros en 2023, de 6,9 milliards d'euros en 2024, de 3,3 milliards d'euros en 2025 et, pour finir, de 4 milliards d'euros en 2026.
Ma première question est assez simple : la France se démarque par un engagement très rapide de son plan de relance. Nous visons ainsi 70% d'engagement à la fin 2021. Le décaissement suivra assez rapidement. Quelles sont les conséquences de ce décalage entre cet engagement rapide et le financement par l'Union européenne, qui s'étale jusqu'en 2026 ? Quelles en seront les modalités budgétaires ?
Ensuite, le déboursement du plan national pour la reprise et la résilience de la France (PNRR) par l'Union est de plus conditionné à l'atteinte d'objectifs. La Commission européenne a retenu un total de 175 cibles et jalons à atteindre de 2021 à 2025. Pouvez-vous nous éclairer sur l'atteinte de nos objectifs pour 2021 et sur la stratégie que nous entendons poursuivre dans les années à venir ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Je confirme qu'après l'approbation du PNRR par le conseil pour les affaires économiques et financières, le conseil ECOFIN, du 13 juillet dernier, la France a reçu, le 19 août 2021, un premier versement de 5,1 milliards d'euros, dans le cadre du plan de relance européen, au titre des préfinancements : cela représente 13% du montant total de 39,4 milliards d'euros – c'est la somme exacte dont nous allons bénéficier.
Jusqu'en 2026, les fonds du plan de relance seront versés en fonction de la réalisation des investissements et des réformes prévues par le plan. Je tiens à vous rassurer : quelle que soit la rapidité avec laquelle nous décaisserons le plan de relance et quel que soit le rythme auquel nous appliquerons le PNRR et les réformes l'accompagnant, cela n'aura aucune influence sur la capacité de la France à bénéficier des décaissements, y compris suivant des modalités de préfinancement par le biais de l'Agence française de développement (AFD). Ainsi pourrons-nous poursuivre notre politique à notre rythme sans que le calendrier de décaissement européen soit de nature à nous freiner.
Pour la suite, nous allons soumettre à la Commission européenne une seconde demande de décaissement, au-delà du préfinancement, pour un montant de 7,4 milliards d'euros. Et nous espérons recevoir de manière effective ces fonds au cours du premier semestre 2022, après une procédure d'adoption de la demande de décaissement par la Commission et par les États membres. Nous n'avons pas d'inquiétude sur notre capacité à réussir les réformes prévues par le PNRR – nous en suivons la progression presque quotidiennement, en lien avec les autorités et les services de la Commission.
Notre stratégie pour les années à venir est simple : assurer en priorité la relance et le soutien à la croissance ; tenir nos engagements avec le même rythme et avec le même sérieux, tant pour bénéficier des décaissements que pour pouvoir en répondre à la Commission.
M. le président.
La parole est à M. Nicolas Meizonnet.
M. Nicolas Meizonnet.
Ma question porte sur un sujet qui me tient à coeur, du fait notamment de la situation géographique de ma circonscription : la pêche. L'action 06 de la mission Plan de relance concerne en effet l'économie de la mer, sujet plus que d'actualité, me direz-vous. Il n'échappe à personne que le conflit portant sur les licences de pêche entre la France et le Royaume-Uni n'est à ce jour pas résolu. En attendant, les pêcheurs français souffrent.
Il va sans dire que la crise du covid-19 n'a pas amélioré la situation. À cause des confinements et de la fermeture des restaurants, la filière pêche a accusé une baisse globale de sa production de 10 % en 2020. À ce jour, les pêcheurs du Grau-du-Roi, que je connais, rencontre, me disent qu'ils n'ont toujours pas retrouvé une activité similaire aux années antérieures.
Viennent s'y ajouter les désastreuses réglementations européennes que vous connaissez, monsieur le ministre délégué, comme celles du plan West Med – plan de gestion pluriannuel pour les pêcheries démersales en Méditerranée occidentale – qui réduit le nombre de jours en mer et affaiblit le chiffre d'affaires des petites entreprises, celles qui pratiquent la pêche artisanale, qui se retrouvent pour certaines en deçà du seuil de rentabilité, alors que ces mêmes normes sont moins contraignantes pour les entreprises qui pratiquent la pêche industrielle.
Pour être clair, les petits pêcheurs – ceux des petits chaluts – sont en train de crever.
Par le biais de ce plan de relance, vous allouez des crédits à la promotion des métiers de la pêche et de l'aquaculture, une initiative qu'on ne peut qu'approuver. En revanche, est-il urgent d'investir 55 millions d'euros pour le verdissement des ports et de la flotte des affaires maritimes ? Non, monsieur le ministre délégué, la véritable urgence, c'est de sauver nos pêcheurs, et je déplore que ce plan de relance ne leur offre pas suffisamment d'aides directes.
Quelles mesures allez-vous prendre pour soutenir les professionnels de la pêche ? Êtes-vous prêt à réorienter des crédits en ce sens ?
M. le président.
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué.
Pour ce qui est du litige qui nous oppose au Royaume-Uni, dans le cadre du Brexit, nous avons obtenu plus de 700 millions d'euros au titre de la réserve d'ajustement pour accompagner les régions les plus touchées par les conséquences du Brexit et qui sont évidemment des régions de pêche – plus dans le Nord de la France que dans le Sud, j'en conviens bien volontiers. Nous continuons à agir et à discuter avec nos voisins britanniques pour faire en sorte que les termes de l'accord soient parfaitement respectés, que les licences soient délivrées.
Nous avons ainsi, par la voix du Premier ministre, demandé à la Commission européenne d'examiner la manière d'activer l'article 506 de l'accord de commerce et de coopération entre l'Union européenne et le Royaume-Uni, lequel prévoit des mesures de compensation et de règlement des différends. C'est fondamental car l'accès de nos pêcheurs aux eaux britanniques est indispensable à la survie de la pêche à l'échelle nationale.
En ce qui concerne la pêche en général, au-delà du Brexit, 250 millions d'euros sont prévus pour les ports, dont 50 millions d'euros pour la pêche. Nous assumons et même revendiquons la partie consacrée au verdissement des ports comme de la flotte car il contribue à la transition écologique. Et nous ne pouvons ni ne devons affirmer aux pêcheurs que le mouvement de transition écologique, qui touche tout le monde, ne devrait pas les concerner, car ils seraient de toute façon rattrapés par lui dans les temps qui viennent.
À propos des 50 millions d'euros spécifiquement consacrés à la pêche, vous aurez certainement noté que le Président de la République a annoncé le doublement de cette enveloppe. Voilà qui fait partie des redéploiements que nous allons réaliser dans le cadre du plan de relance et dont nous débattrons à nouveau à l'occasion de l'examen du projet de loi de finances rectificative.
M. le président.
Nous en avons terminé avec les questions.
Source https://www.assemblee-nationale.fr, le 5 novembre 2021