Interview de Mme Marlène Schiappa, ministre de la citoyenneté, à RMC le 3 janvier 2022, sur les mesures sanitaires à l'école, le passe vaccinal et le séparatisme islamique.

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Média : Emission Forum RMC FR3 - RMC

Texte intégral

APOLLINE DE MALHERBE
Il est 7h41 sur RMC et tout de suite mon invitée, Marlène SCHIAPPA. Bonjour Marlène SCHIAPPA.

MARLENE SCHIAPPA
Bonjour.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes ministre déléguée en charge de la Citoyenneté, on va évidemment revenir aussi sur ce climat de campagne, mais bien sûr le Covid. Circulation record d’un côté, allégement des règles de l’autre, c’est quoi la logique ?

MARLENE SCHIAPPA
D’abord je veux souhaiter une très bonne année à toutes les personnes qui vous écoutent, et une bonne santé. La logique c’est qu’on essaye d’avoir des mesures qui soient le plus proportionnées possibles, et justement en faisant en sorte que maintenant que la vaccination est très forte en France, on a un des meilleurs taux de vaccination d’Europe, je tiens à le dire, il y a beaucoup de pays dans lesquels les gens ne sont pas aussi vaccinés qu’en France, donc il y a beaucoup de gens qui sont mieux protégés par rapport aux formes graves du virus et donc l’idée c’est d’avoir des mesures proportionnées, qui permettent de faire en sorte que la vie continue tout en nous protégeant du virus et notamment de ses formes graves.

APOLLINE DE MALHERBE
Mais ce que j’ai du mal quand même à comprendre c’est que d’un côté, Ok, on comprend que finalement ce n’est pas si grave, en tout cas vous considérez, d’ailleurs Olivier VERAN le disait hier, il dit « on se rend bien compte qu’il y a trois fois moins de risques de forme grave et d’hospitalisation qu’avec le variant Delta par exemple », donc ce n’est pas si grave, donc, par exemple si vous êtes cas contact et vacciné, eh bien vous allez continuer à vous promener et à faire potentiellement circuler le virus, et dans le même temps, à partir de l’âge de 6 ans il va falloir porter le masque en extérieur, c’est assez contradictoire.

MARLENE SCHIAPPA
C’est vrai que dans cette crise, dans cette pandémie qu’on traverse maintenant depuis plusieurs années, on essaye de s’adapter à la réalité des connaissances scientifiques, mais aussi aux véritables risques, et par exemple pour aller dans votre sens, le nouveau protocole qui a été sorti par le ministre de l’Education nationale permet de réduire le délai d’isolement pour les cas contact. Par exemple, désormais, quand il y aura un test négatif pour les cas contact, il n’y aura plus d’isolement en ce qui concerne les élèves, donc ça va dans le sens de ce que vous dites, et plutôt d’un allégement d’une certaine forme de mesures, on essaye vraiment de faire du sur-mesure justement par rapport à…

APOLLINE DE MALHERBE
Du sur-mesure y compris à la dernière minute, parce que ce que vous évoquez là à l’instant, c’est-à-dire ce protocole quand même dans les écoles, il a été dévoilé hier à 17h par le ministre de l’Education nationale, est-ce que ce n’est quand même pas un peu tard, et puis on nous annonce hier soir que, s’il y a des professeurs qui manquent on embauchera des vacataires, ça on sait très bien que ça ne marche pas.

MARLENE SCHIAPPA
Le protocole, en fait, change assez peu, mis à part les éléments que je viens de partager avec vous entre autres, et l’idée, oui, c’est qu’il y ait le moins de brassage possible à l’école, aussi pour que ça rassure les enfants et que quand il y a par exemple un professeur absent on ne dispatche plus les élèves dans les autres classes, c’est le sens de la volonté de dire qu’il faudrait qu’il y ait des vacataires qui puissent faire les remplacements.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous l’abordez comment vous cette rentrée, y compris en tant que mère, vous parlez souvent du fait d’être une femme, de travailler, d’avoir des enfants, vous pensez à tous ceux et celles qui nous écoutent ?

MARLENE SCHIAPPA
Bien sûr, je pense qu’en tant que parents, de toute façon tous les dimanches soir de veille de reprise on est tous en train de vérifier les devoirs, les signatures des cahiers, les goûter dans les sacs et compagnie…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais on n’est même pas sûr que notre enfant va aller à l’école le lendemain.

MARLENE SCHIAPPA
Ecoutez, chacun s’adapte dans cette période. Moi j’ai vu pas mal de parents qui étaient angoissés, et je pense que c’est normal d’être angoissé, parce qu’on fait face à des situations difficiles, parfois imprévues, on ne sait pas toujours quoi dire à nos enfants, mais moi je veux dire que les enfants ils ont une capacité de résilience et d’adaptation qui est absolument admirable parce que les contraintes elles ont beaucoup pesé sur les enfants, sur les jeunes, je pense aux adolescents, vous faisiez référence au fait que je suis maman, j’ai une fille qui a bientôt 15 ans, je pense à tous ces adolescentes qui ont passé un long confinement et qui ont passé en fait leurs années de début d’adolescence, où normalement on sort, on voit des amis, on participe à des fêtes, on se socialise, qui les ont passées beaucoup en isolement ou avec des contraintes fortes, et je pense à tous ces adolescents que je trouve très résilients.

APOLLINE DE MALHERBE
Marlène SCHIAPPA, cet après-midi il y aura ce débat à l’Assemblée nationale pour mettre en place le pass vaccinal, il y aura un certain nombre de points qui seront évoqués et notamment la question des jauges dans tous les grands rassemblements publics. Il y a d’un côté Emmanuel MACRON, le Premier ministre, le ministre de la Santé, qui nous disent il va falloir 5000 places pour tout le monde, et puis il y a d’autres, des députés, y compris chez vous, dans les rangs de la majorité, qui disent « non mais attendez, on va faire des jauges proportionnées en fonction des lieux », et visiblement le ministre de la santé s’y oppose, je ne comprends pas, je ne comprends pas. Pourquoi pas proportionnées, c’est beaucoup plus logique ?

MARLENE SCHIAPPA
Alors, il y aura un vote au final et ce sont les parlementaires qui ont le dernier mot aux termes de la Constitution de la Ve République, donc les parlementaires voteront, en commission, vous avez raison de le rappeler, les parlementaires ont déjà voté cet amendement en disant qu’ils souhaitaient que ce soit proportionnel. Ce que dit le ministre de la Santé c’est qu’il ne souhaite pas qu’on crée des usines à gaz dans lesquelles ce soit extrêmement compliqué et différent d’un lieu à l’autre pour ompter les proportionnalités.

APOLLINE DE MALHERBE
Donc ça c’est une usine à gaz, le fait de faire une mesure proportionnée, alors que les trois tests, un autotest, un antigénique, tout ça, ce n’est pas une usine à gaz ?

MARLENE SCHIAPPA
Non, non, mais je vous partage – moi, vous savez, je ne suis pas ministre de la Santé – je vous partage les arguments des uns et des autres, voici ce que dit le ministre de la Santé, les parlementaires nous disent que des jauges proportionnelles, les parlementaires, y compris Sacha HOULIE par exemple, qui est assez spécialiste du monde sportif, nous dit que dans les stades ça lui semble plus approprié de pouvoir avoir des doses avec des pourcentages, le débat aura lieu au Parlement et…

APOLLINE DE MALHERBE
On sent bien qu’entre les deux vous trouvez que c’est plus logique la jauge proportionnée !

MARLENE SCHIAPPA
Non, je pense qu’honnêtement ce sont des sujets qui sont extrêmement délicats et que, effectivement, le débat parlementaire sera intéressant justement pour que chacun puisse amener ses arguments.

APOLLINE DE MALHERBE
Mais si les parlementaires décident d’une jauge proportionnée, le Gouvernement respectera.

MARLENE SCHIAPPA
Le Gouvernement respecte toujours le vote des parlementaires, bien évidemment.

APOLLINE DE MALHERBE
Le tout dans un contexte de grande violence, violence notamment contre les élus, il y a un certain nombre d’élus de la majorité qui se retrouvent soit menacés, soit carrément violentés, des menaces y compris dans leur propre domicile, ou les permanences des élus, c’est notamment le fait des antipass, est-ce que le Covid devient politique, c’est-à-dire est-ce qu’au fond dans ce climat de campagne, les antipass sont finalement votre première opposition politique ?

MARLENE SCHIAPPA
Moi j’observe, en tant que ministre, en tant que ministre chargée de la Citoyenneté, qu’il y a une montée de la violence dans le débat public, avec des menaces d’abord sur les réseaux sociaux, qui ensuite sont devenues des menaces physiques, je rappelle qu’à la période des Gilets jaunes il y a eu déjà des parlementaires, et même des ministres, j’en ai fait partie, qui ont vu leur domicile envahi, ou des menaces reçues, on a eu des véhicules qui ont été brûlés, et c’est vrai que là on a une recrudescence. Moi je veux dire que chaque menace vis-à-vis d’un élu c’est une menace vis-à-vis de la démocratie, quel que soit le camp de cet élu, qu’il appartienne à la majorité ou à l’opposition, on ne peut pas menacer des parlementaires avant un vote pour faire en sorte qu’ils tremblent, et qu’ils aient peur, et qu’ils votent différemment. Et d’ailleurs je veux saluer le courage de ces parlementaires, qui parfois sont menacés, et qui tiennent bon dans leurs opinions. Le débat d’idées doit avoir lieu, c’est normal et c’est sain en démocratie qu’il y ait de la controverse, et que le Gouvernement se justifie, et que la majorité explique pourquoi elle décide de voter ou de ne pas voter telle ou telle disposition, ça ne peut jamais passer par des menaces ou par des agressions physiques. D’ailleurs nous avons invité, avec Gérald DARMANIN, tous les élus qui sont menacés à déposer plainte, le ministre de l’Intérieur a adressé un télégramme aux préfets, dès le 29 décembre, pour leur demander, y compris le cas échéant, de mettre en place des mesures de protection des personnes ou des domiciles.

APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce que la députée de la majorité, Agnès FIRMIN-LE BODO par exemple, va être protégée ? Je rappelle qu’elle s’est retrouvée avec des mails dans lesquels, par exemple, son auteur affirme penser sérieusement à la décapiter.

MARLENE SCHIAPPA
Moi je ne veux pas, depuis le ministère de l’Intérieur, communiquer au cas par cas sur les dispositifs de protection de chaque élu, mais bien évidemment les préfets seront très mobilisés. Il y a une réunion qui aura lieu entre le président de l’Assemblée nationale, le garde des Sceaux et le ministre de l’Intérieur, pour partager y compris de nouvelles solutions pour mieux protéger les…

APOLLINE DE MALHERBE
Est-ce que les autres partis politiques, est-ce que la classe politique dans son ensemble, est suffisamment solidaire sur ce point d’après vous, ou est-ce que ce climat de violences il est encouragé par certains ?

MARLENE SCHIAPPA
Non, d’abord je veux dire qu’il y a des menaces partout, moi j’ai échangé avec Raquel GARRIDO, de la France Insoumise, pendant les fêtes, qui était elle-même la cible de menaces d’une personne qui mimait des tirs, qui faisait des tirs de fusil dans des vidéos en la menaçant de mort ainsi que son compagnon qui est député, Alexis CORBIERE, donc je crois qu’il y a des menaces vis-à-vis de l’ensemble de la classe politique. Maintenant, effectivement, il y a des pratiques qui existent aux extrêmes, qui sont des pratiques de violence, effectivement il y a une responsabilité de tous les partis politiques, y compris aux extrêmes, et de tous les candidats à la présidentielle, de rappeler qu’ils condamnent toutes ces formes de violence.

APOLLINE DE MALHERBE
Marlène SCHIAPPA, je ne sais pas si vous avez commencé en disant bonne année, mais je ne sais pas si on va pouvoir vraiment continuer ou si ça fait plaisir à tout le monde, je voudrais que vous écoutiez ce que dit le chanteur, très écouté évidemment, beaucoup de disques vendus, Gims, il le disait ce week-end sur ses réseaux sociaux.

MAITRE GIMS
S’il vous plaît, avec les bonnes années, Nouvel An, laissez-moi avec ça, pardon, vous savez bien que je n’ai jamais répondu à ça, mais vous continuez à m’envoyer des bonnes années tout le mois de janvier, février, etc., en plus les Muslims là, on a les mêmes convictions, arrêtez avec ça, c’est les Muslims la plupart qui m’envoient ça. Les frères on ne fête pas ça, donc ça ne fait pas partie de nos convictions les Muslims, venez on se concentre un petit peu sur nos trucs à nous. Ce n’est pas méchant, mais restons quand même forts sur nos valeurs, nos trucs à nous. Noël etc., on respecte, mais ce ne sont pas nos fêtes.

APOLLINE DE MALHERBE
" On ne se dit pas bonne année, venez les Muslims, venez les frères, ça ce n’est pas pour nous, concentrons-nous sur nos trucs à nous. "

MARLENE SCHIAPPA
Oui, j’ai vu qu’après il disait aussi qu’il ne fallait pas se souhaiter joyeux anniversaire, eh bien moi je souhaite bonne année à tout le monde, y compris à Maître Gims, et je pense que quand on est… je suis ministre chargée de la Citoyenneté, je lutte notamment…

APOLLINE DE MALHERBE
C’est précisément pour ça que je vous pose la question.

MARLENE SCHIAPPA
Contre la radicalisation, contre le séparatisme, contre une forme de communautarisme, on parle beaucoup de vivre ensemble, sans savoir trop ce qu’on met derrière cette expression, je pense que ça peut commencer par des formules de politesse somme toute relativement…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais ça ne demande pas plus de condamnation ça quand même ?

MARLENE SCHIAPPA
Ça demande plus de condamnation, et moi j’ai appris dans une émission de télévision récemment que Maître Gims était financé par la région Ile-de-France et qu’il avait apporté son soutien à Valérie PECRESSE, et donc je demande aujourd’hui à Valérie PECRESSE ce qu’elle pense de ces propos. Moi, chacun sait ce que je pense de ce type de pratique, je demande à Valérie PECRESSE, qui est soutenue par Maître Gims, de se prononcer.

APOLLINE DE MALHERBE
Là vous faites de la politique politicienne, est-ce que franchement, est-ce que c’est à la hauteur ? Il y a quand même des millions de jeunes qui entendent ça, à qui on dit " eh bien non les frères, on ne se dit pas bonne année ", et vous vous répondez Valérie PECRESSE.

MARLENE SCHIAPPA
Non, non, pardon, ce n’est pas de la politique politicienne, ce n’est pas moi qui ait décidé de mettre Maître Gims dans le débat politique. Maître Gims c’est un artiste, il est effectivement écouté, c’est un leader d’opinion comme on dit, il a donc une responsabilité sur ce qu’il dit et sur le fait qu’en tant que citoyen, quelle que soit sa religion, quelle que soit son origine, on puisse partager un même espace de vie, ce n’est pas moi qui ai décidé de mettre Maître Gims dans le débat politique, c’est Valérie PECRESSE qui s’est targuée de son soutien et qui a dit qu’elle le finançait via la région Ile-de-France, et la même Valérie PECRESSE se vante d’avoir mis en place une charte de la laïcité pour…

APOLLINE DE MALHERBE
Par exemple vous lui demanderiez de retirer ses financements ?

MARLENE SCHIAPPA
Moi je lui demande de s’expliquer, de s’expliquer sur le soutien, je ne sais pas ce que ce financement finance exactement, est-ce que c’est du mécénat, est-ce que c’est un soutien…

APOLLINE DE MALHERBE
Enfin, vous prenez plus de temps pour critiquer Valérie PECRESSE que pour critiquer les propos de Maître Gims !

MARLENE SCHIAPPA
Non, je suis très claire, chacun connaît ma position, pardon, mais j’ai co-porté avec Gérald DARMANIN la loi pour conforter les principes de la République, j’ai mis en place le contrat d’engagement républicain qui dit qu’il n’y a pas un euro d’argent public pour les ennemis de la République, chacun connaît mon engagement contre le séparatisme et contre l’islamisme et je suis même critiquée et menacée moi-même pour cela, donc je crois que mes propos sont très clairs sur ce sujet.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous faites de la télé aussi, Charles.

CHARLES MAGNIEN
On vous a vu la semaine dernière faire la cuisine sur M6…

MARLENE SCHIAPPA
Tout à fait.

CHARLES MAGNIEN
Est-ce que pour 2022 vous avez déjà d’autres projets de télé surprenants comme ça, est-ce qu’on vous verra dans " Koh-Lanta ", dans " The Voice ", dans " Fort Boyard ", est-ce qu’il y a déjà un agenda médiatique ?

MARLENE SCHIAPPA
Mais vous savez que j’ai refusé l’année dernière de faire " Fort Boyard ", je refuse beaucoup d’émissions de télévision…

CHARLES MAGNIEN
Pourquoi ?

MARLENE SCHIAPPA
…Le vertige, tout ça, mais dès lors que je peux passer un message politique je le fais. Dans « Tous en cuisine » nous avons lancé un appel aux dons pour les trois associations d’orphelins des forces de sécurité intérieure, de pompiers, de policiers, de gendarmes, je veux d’ailleurs les saluer parce que le 31 décembre, et pour les fêtes, ils étaient mobilisés pleinement pour assurer notre sécurité, avec succès d’ailleurs vu les résultats, et donc je salue toutes les forces de sécurité intérieure…

APOLLINE DE MALHERBE
Donc il y a plein de moyens de faire campagne. Marlène SCHIAPPA, restez avec nous, parce que justement on va parler de la politique européenne, Nicolas POINCARE dans un instant, à quoi sert la présidence de l’Union européenne.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 4 janvier 2022