Interview de Mme Elisabeth Moreno, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, à LCI le 10 février 2022, sur le sexisme, les déclarations d'Eric Zemmour liées au statut des femmes et la question du port du voile notamment dans le sport.

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Texte intégral

ELIZABETH MARTICHOUX
Bonjour Elisabeth MORENO.

ELISABETH MORENO
Bonjour Elizabeth MARTICHOUX. Bonjour à toutes et à tous.

ELIZABETH MARTICHOUX
Merci à vous d'être sur le plateau de LCI ce matin. On rappelle que vous êtes, en effet, ministre déléguée chargée de l'Egalité entre les femmes et les hommes, grande cause du quinquennat décrétée en novembre 2017. Quel est le bilan ? Est-ce que la société à ce titre-là est plus égalitaire qu'il y a presque cinq ans ? On va le voir mais puisque vous êtes chargée de cette cause qui est de plus en plus importante, et on le verra aussi, de plus en plus prise en compte dans la campagne électorale. On dit de vous que vous êtes directe, avec un caractère bien trempé, je voudrais votre avis sur cet échange particulièrement tendu entre votre collègue Gérald DARMANIN et la journaliste Apolline de MALHERBE au cours d'une interview en direct mardi matin sur BFM. Votre collègue du gouvernement a-t-il eu un comportement sexiste à son égard ?

ELISABETH MORENO
Vous avez raison de dire que j'ai une approche plutôt directe et parfois on me le reproche, mais en tout cas je pense que c'est important de dire ce que l'on voit des choses. Vous savez, j'ai travaillé pendant trente ans dans des environnements extrêmement masculins : le bâtiment et les nouvelles technologies. J'ai été entourée d'hommes en permanence et j'ai appris à détecter le sexisme quand il se présente. Moi ce que j'ai vu dans cet échange entre Apolline de MALHERBE et Gérald DARMANIN, c'est un échange musclé. Apolline de MALHERBE a choisi une interview musclée, Gérald DARMANIN lui a répondu de manière musclée. Est-ce que dans les termes qui ont été employés il y a eu du sexisme ? Je n'en ai pas vu. Est-ce qu'il y a eu une joute verbale sous tension ? Ça, je l'ai bien vu. Et puis vous savez, je pense que maintenant que le sujet de l'égalité entre les femmes et les hommes est sur la table, il faut qu'on s'intéresse aux compétences des personnes qui qu'elles soient. Donc non, je n'ai pas vu de sexisme.

ELIZABETH MARTICHOUX
Non, vous n'avez pas vu de sexisme. Mais quand même, quand vous l'entendez lui dire : « Ne vous vexez pas madame, calmez-vous madame, ça va bien se passer » alors qu'elle pose des questions, elle fait son boulot d'intervieweuse, vous êtes d'accord. Est-ce que vous n'entendez pas, puisque vous dites que vous cherchez, vous décryptez une condescendance du genre « madame, ne perdez pas vos nerfs » ?

ELISABETH MORENO
Mais d'abord, elle est la possibilité de répondre, ce qu'elle a fait. Ensuite, vous savez, si vous écoutez les hommes politiques et les journalistes aujourd'hui, ce genre de phrase et ce genre de réponse, vous les entendez partout, de la part des hommes, de la part des femmes. Donc il y a eu cet échange entre Apolline de MALHERBE et Gérald DARMANIN, ça aurait pu être n'importe quel autre journaliste femme ou homme. Vous n'avez jamais entendu ce genre d'expression dans les discussions et surtout pendant une campagne présidentielle extrêmement tendue ?

ELIZABETH MARTICHOUX
Dans une interview, non.

ELISABETH MORENO
Oh !

ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que ça n'est pas une attitude déplacée ? Vous dites sexisme, vous n'allez pas sur ce terrain. Est-ce que c'est une attitude néanmoins déplacée ?

ELISABETH MORENO
Vous savez, moi je crois que le respect de chacun dans toutes les discussions est absolument nécessaire et indispensable.

ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce qu'il était au rendez-vous ?

ELISABETH MORENO
Encore une fois, je n'ai pas vu de manque de respect, j'ai vu de la joute verbale.

ELIZABETH MARTICHOUX
Ce n'est pas une question de solidarité gouvernementale ? Vous n'êtes pas venue avec des éléments de langage ?

ELISABETH MORENO
Non, non, non, non. Non, non ! Pas du tout. Je vous dis exactement ce que je pense et je vous parle comme quelqu'un qui connaît ce monde masculin où on peut parfois être extrêmement violent et extrêmement sexiste. Je n'ai pas vu ça dans cet échange.

ELIZABETH MARTICHOUX
Donc ce que vous nous dites, c'est qu'en réalité ça n'est pas la femme qui a été verbalement maltraitée. Vous dites non, elle n'a pas été maltraitée selon vous. C'était un échange tendu à égalité. Il n'y a pas eu de propos déplacés de Gérald DARMANIN, tout ça vous le récusez.

ELISABETH MORENO
Je n'ai pas vu de propos déplacés. J'ai vu une femme extrêmement forte, extrêmement déterminée, qui s'est exprimé, qui a dit ce qu'elle a ressenti et c'est important de respecter ce qu'elle a ressenti, et je n'ai pas vu Gérald DARMANIN être sexiste de quelque manière que ce soit dans cet échange.

ELIZABETH MARTICHOUX
Il n'a pas perdu son sang-froid lui ? Du tout ?

ELISABETH MORENO
Vous avez vu la conversation. Je pense que et Apolline de MALHERBE et Gérald DARMANIN étaient tous les deux très tendus. Ce n'est pas l'un plus que l'autre. Ils étaient au même niveau je pense.

ELIZABETH MARTICHOUX
Mais enfin…

ELISABETH MORENO
Non, vraiment, ils étaient au même niveau.

ELIZABETH MARTICHOUX
J'insiste juste puis après on va passer à autre chose. Mais elle a posé des questions…

ELISABETH MORENO
Et c'est son rôle. Et c'est son rôle que de répondre.

ELIZABETH MARTICHOUX
Et lui a fait une remarque qui est tout à fait inhabituelle voire inédite face à une intervieweuse : « calmez vous madame, calmez-vous, ça va bien se passer. »

ELISABETH MORENO
Elizabeth MARTICHOUX, je peux vous montrer des exemples et des exemples et des exemples d'hommes politiques qui disent : « calmez-vous. » Nicolas SARKOZY avait dit la même chose. J'ai déjà entendu des politiques…

ELIZABETH MARTICHOUX
Et vous n'aviez pas perçu cela comme une attitude sexiste à l'époque.

ELISABETH MORENO
Mais j'ai perçu cela comme une tactique, comme une stratégie. Des tactiques et des stratégies qui s'utilisent quand les personnes ont besoin de se faire entendre et de créer du buzz, c'est ce que je vois en permanence aujourd'hui et c'est ce qui s'est passé. Donc ça a fonctionné mais, encore une fois, je n'ai pas vu de sexisme.

ELIZABETH MARTICHOUX
Alors Apolline de MALHERBE, ma consoeur, s'est senti blessée.

ELISABETH MORENO
Oui. Ça, je l'ai entendu. Je l'ai entendu.

ELIZABETH MARTICHOUX
Elle s'est sentie offensée, à juste titre.

ELISABETH MORENO
Alors ce qu'elle ressent, je ne peux pas le commenter. Je le respecte mais je ne peux pas le commenter. Peut-être que quelqu'un d'autre aurait réagi différemment. Moi j'ai appris, et c'est pour ça que je respecte sa position, elle s'est défendue, elle a dit ce qu'elle en avait pensé et Gérald DARMANIN lui a répondu et a défendu son bilan.

ELIZABETH MARTICHOUX
Donc est-ce qu'il doit s'excuser de l'avoir offensée ? Elle s'est sentie offensée.

ELISABETH MORENO
Alors si elle s'est sentie offensée, je pense qu'il doit s'excuser parce que je ne pense pas que c'est ce qu'il cherchait à faire. Mais si elle s'est sentie offensée…

ELIZABETH MARTICHOUX
Donc il doit s'excuser dans un registre qu'on entend parfois, c'est-à-dire…

ELISABETH MORENO
De respect et de considération.

ELIZABETH MARTICHOUX
« Si j'ai heurté Apolline de MALHERBE, je m'en excuse. »

ELISABETH MORENO
Absolument. Mais simplement parce que je pense qu'il faut apaiser les tensions.

ELIZABETH MARTICHOUX
Justement !

ELISABETH MORENO
Vous savez, la situation est déjà extrêmement compliquée. On sort de deux années de crise sanitaire extrêmement complexes. L'objectif de Gérald DARMANIN, ça n'est pas d'offenser Apolline de MALHERBE voyez-vous. Donc tout ce que nous pouvons faire pour apaiser la situation de notre pays, faisons-le.

ELIZABETH MARTICHOUX
On verra ce qu'il nous dit ce soir. Il sera l'invité de Ruth ELKRIEF, Gérald DARMANIN, à 20 heures 30. Donc on verra s'il s'excuse face à une journaliste qui s'estime offensée. Enfin, elle ne sera pas là mais Ruth le lui dira évidemment. Juste un mot. Quand vous êtes nommée en juillet 2020, Madame la ministre, Gérald DARMANIN est visé par une plainte pour viol. J'ajoute tout de suite que le parquet a requis un non-lieu. Ce sont les faits donc on ne peut pas dire aujourd'hui quoi que ce soit, reprocher quoi que ce soit à ce titre à Gérald DARMANIN. On attend la décision mais le parquet a requis un non-lieu. Mais à l'époque vous lui dites, ce n'est pas encore le cas : « Ton sujet va être un boulet pour moi. Il faut que tu m'expliques ce qui s'est passé », vous l'aviez dit à un confrère du Parisien. Aujourd'hui est-ce que son attitude est un boulet pour vous ?

ELISABETH MORENO
Non. Encore une fois, personne ne me dit ce que j'ai à dire et la manière dont j'ai à le dire. Je vous le répète, à l'époque j'avais dit combien la présomption d'innocence était importante. Il n'était pas condamné et il avait à être traité comme n'importe quel citoyen. Je savais que ça allait être difficile pour moi de gérer cette situation et vous l'avez vu. Malgré tout le travail qu'il a fait au ministère de l'Intérieur : la formation des policiers et des gendarmes, la prise de plainte hors les murs, dans les mairies, chez les particuliers pour permettre aux femmes de continuer de parler et d'être aidées. Malgré tout cela, à chaque fois on lui rétorque que, non, il a eu cette affaire. Tout le monde savait que ce serait compliqué.

ELIZABETH MARTICHOUX
Il est victime ?

ELISABETH MORENO
Gérald DARMANIN, victime ? Non, mais non.

ELIZABETH MARTICHOUX
Je vous demande.

ELISABETH MORENO
Absolument pas.

ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que le président MACRON a fait allusion à cet échange hier en Conseil des ministres ?

ELISABETH MORENO
Non, je n'étais pas au Conseil des ministres hier donc je ne peux pas vous répondre.

ELIZABETH MARTICHOUX
Donc vous ne pouvez pas nous le dire. On demandera au ministre de l'Intérieur encore une fois ce soir sur LCI.

ELISABETH MORENO
Vous aurez beaucoup de choses à lui demander mais je pense qu'il aura surtout envie de parler du fond de ses sujets.

ELIZABETH MARTICHOUX
Vous lui avez parlé d'ailleurs ?

ELISABETH MORENO
Non. Non, non. Je n'ai pas eu l'occasion.

ELIZABETH MARTICHOUX
Vous n'avez pas envie de lui passer un coup de fil pour lui dire : « Gérald, qu'est-ce qui s'est passé ? Tu as vu l'émotion que cela suscite ? »

ELISABETH MORENO
J'ai vu ce qui s'est passé.

ELIZABETH MARTICHOUX
Et vous avez vu l'émotion que ça suscite. Un ministre ne devrait pas parler comme ça. Question : est-ce qu'un ministre peut parler comme ça ?

ELISABETH MORENO
Est-ce qu'un ministre devrait parler comme ça ?

ELIZABETH MARTICHOUX
Oui. Est-ce qu'un ministre doit parler comme ça ?

ELISABETH MORENO
Est-ce qu'un ministre devrait dire à quelqu'un : « ça va bien se passer, calmez-vous madame » ?

ELIZABETH MARTICHOUX
« Mais calme-toi ! »

ELISABETH MORENO
Non, pas « calme-toi ! »

ELIZABETH MARTICHOUX
« Calmez-vous ! »

ELISABETH MORENO
« Ça va bien se passer, calmez-vous ! » Encore une fois, vous ne pensez pas qu'il y a des sujets extrêmement graves et celui-là fait partie de ceux-là ?

ELIZABETH MARTICHOUX
Oui. Oui, oui, parce que ça traduit…

ELISABETH MORENO
D'accord. Je comprends… Vous savez moi ce que j'apprécie, c'est le fait qu'aujourd'hui on soit extrêmement sensible à la manière dont les femmes peuvent être traitées et que tout le monde se saisisse de ces questions.

ELIZABETH MARTICHOUX
Eh bien voilà.

ELISABETH MORENO
Oui, mais ça ne veut pas dire qu'Apolline de MALHERBE a été maltraitée, ou alors dites-moi de quelle manière. Je serai ravie d'en parler et avec Apolline de MALHERBE et avec Gérald DARMANIN.

ELIZABETH MARTICHOUX
D'ailleurs vous ne l'avez pas appelée non plus, elle.

ELISABETH MORENO
Non, non, pas encore.

ELIZABETH MARTICHOUX
Voilà pour ce sujet. Dans cette campagne l'égalité hommes-femmes, je le disais tout à l'heure, est présente et c'est nouveau. C'est vraiment un sujet qui maintenant est d'une grande sensibilité dans l'opinion et prise en compte par le politique. Eric ZEMMOUR, candidat à la présidence de la République, avait été interpellé sur LCI justement sur ses déclarations liées au statut des femmes. Ecoutez ce qu'il avait répondu dans Mission : convaincre.

ERIC ZEMMOUR, CANDIDAT RECONQUETE A L'ELECTION PRESIDENTIELLE
Je pense aujourd'hui que c'est moi qui protège le mieux les femmes des dangers réels qu'elles encourent. Quand on me raconte que les jeunes femmes d'aujourd'hui hésitent et n'osent pas s'habiller en robe à telle soirée, dans tel quartier, parce qu'elles ont peur d'être agressées. C'est moi qui les protège le mieux alors que les prétendues féministes pactisent avec leurs agresseurs. Je tiens à le dire : les prétendues féministes pactisent avec leurs agresseurs au nom de la convergence des luttes.

ELIZABETH MARTICHOUX
Alors il y a plusieurs éléments. D'abord cette phrase : « C'est moi qui protège le mieux les femmes » dit Eric ZEMMOUR, candidat à la présidence de la République.

ELISABETH MORENO
Il faut savoir rester calme face à ce genre de propos. Si l'homme qui protège le mieux les femmes les considère comme des gibiers et que donc l'homme est un prédateur, parce que c'est qu'il a écrit même s'il le réfute par la suite ; si l'homme qui protège le mieux les femmes, c'est l'homme qui reviendra sur la parité si jamais il était élu ; si l'homme qui protège les femmes, c'est celui qui reviendra sur la PMA pour toutes, je ne sais pas ce qu'il faut attendre de ceux qui ne nous protégerons pas. Eric ZEMMOUR n'a jamais protégé les femmes, il a toujours considéré les femmes comme des faire-valoir, comme des êtres inférieurs, à quel moment il considère que c'est protéger les femmes ? À un moment où nous apprenons à nos jeunes - jeunes filles, jeunes hommes - qu'ils doivent se respecter, se considérer, entendre un homme parler des femmes comme d'un gibier qui est là pour valoriser les hommes puissants, à quel moment est-ce qu'il protège les femmes ?

ELIZABETH MARTICHOUX
Alors il y a ce que vous dites, il y a le corpus on va dire de pensée d'Eric ZEMMOUR et puis il y a la réalité qu'il décrit. Les jeunes femmes hésitent à porter telle tenue dans les rues, c'est une réalité : il suffit de les interroger pour savoir que c'est vrai. Que faire ? Comment lutter contre ce sentiment d'insécurité qui est lié à une réalité ? C'est celle des agressions dans les rues dans certains quartiers.

ELISABETH MORENO
D'abord il faut noter que la France, on est conscient de ça et c'est pour ça que la France est le premier pays au monde à avoir légiféré pour protéger les femmes dans l'espace public des violences justement sexistes ou des remarques déplacées et de ce genre de chose. Cette loi fonctionne, elle a été raillée au moment où nous l'avions discutée. Tout comme d'ailleurs Emmanuel MACRON avait été raillé quand il a décidé que l'égalité femmes-hommes serait la grande cause du quinquennat, parce qu'il y a encore des gens dans notre pays qui pensent qu'il n'y a plus de sujet. Mais on se rend bien compte que violences sexistes, violences verbales, violences physiques, violences conjugales, violences économiques sont encore bien présentes dans notre société. Moi je crois que ma bataille la plus importante, c'est justement de faire en sorte que dans notre pays les femmes aient le droit de se vêtir comme elles le souhaitent.

ELIZABETH MARTICHOUX
Mais comment ? Aujourd'hui les femmes hésitent. J'ai encore rencontrés récemment une jeune femme qui a été agressée dans les rues. Elle a porté plainte, elle m'a dit : « Ça n'a servi strictement à rien. » Elle a été agressée par deux jeunes hommes.

ELISABETH MORENO
Moi je suis curieuse de savoir, aujourd'hui, vous savez, je vous disais tout à l'heure que 90 000 policiers et gendarmes ont été formés à la prise de plaintes des femmes qui viennent s'exprimer sur les violences qu'elles subissent, c'est quelque chose qui n'avait jamais été fait auparavant. Comme jamais auparavant nous n'avions formé des magistrats sur les questions des violences faites aux femmes. C'est en 2019 que c'est arrivé. Les personnels de santé, c'est-à-dire que tous les professionnels qui sont au plus proche des femmes, et qui sont là pour entendre les souffrances, les difficultés qu'elles subissent, n'avaient jamais été formés spécifiquement à ces questions. La MIPROF, qui est la mission interministérielle qui y est rattachée à mon ministère, travaille énormément sur la formation aujourd'hui de tous les professionnels en lien avec ces personnes. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Alors il y a eu des lois. 

ELISABETH MORENO
Il y a eu des lois… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Depuis 2017 il y a eu des lois, une qui aggrave les peines des agresseurs… 

ELISABETH MORENO
Il y a eu quatre lois. Quatre lois en quatre ans. 

ELIZABETH MARTICHOUX
D'autres qui protègent mieux les victimes. Il y a un numéro d'urgence… 

ELISABETH MORENO
Le 39 19. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Il y a plus de bracelets, il y a eu des choses, mais toutes les associations regrettent qu'il n'y ait pas davantage d'argent alloué au déploiement des dispositifs, grande cause nationale, plus petit budget du gouvernement. Cherchez l'erreur ? 

ELISABETH MORENO
Alors, nous avons investi en 2021, 1,3 milliard, 1,3 milliard pour lutter contre les violences intrafamiliales et conjugales. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Sur tout … 

ELISABETH MORENO
1,3 milliard. Mais, attendez, quand vous mettez 5 millions sur la table, quand Olivier VERAN met 5 millions d'euros sur la table pour que les femmes puissent déposer plainte dans les hôpitaux, c'est bien pour lutter contre les violences faites aux femmes. Quand Eric DUPOND-MORETTI investit dans les bracelets anti-rapprochement, quand il investit dans les Téléphones grave danger, pardon mais c'est de l'argent public. Le panier global arrive à 1,3 milliard, c'est ce qui compte. 

ELIZABETH MARTICHOUX
« Le panier global », vous l'avez dit. Les candidats à la présidence de la République, tous à gauche, et Valérie PECRESSE aussi, disent : il faut un milliard pour lutter contre les violences conjugales. 

ELISABETH MORENO
D'accord…

ELIZABETH MARTICHOUX
Un milliard.

ELISABETH MORENO
Encore une fois… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Par an, évidemment. 

ELISABETH MORENO
… les bracelets anti-rapprochement et les ordonnances de protection et les Téléphones grave danger… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Non mais ma question… 

ELISABETH MORENO
… c'est bien pour lutter contre les violences conjugales ! 10 millions d'euros qu'Emmanuelle WARGON investit, pour que nous ayons 80 % d'augmentation de places d'hébergement pour accueillir les femmes qui vivent ces violences. C'est aussi pour lutter contre les violences conjugales. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Est-ce que dans le prochain quinquennat il faudrait, voilà être encore plus clair, à l'espagnole si je puis dire, puisque l'Espagne est le grand exemple, et… 

ELISABETH MORENO
D'abord, l'Espagne est le grand exemple, mais l'Espagne travaille sur ce sujet depuis 15 ans. Nous avons commencé à nous saisir des questions des violences conjugales, même si les associations féminines travaillent là-dessus d'arrache-pied depuis des années, mais dans l'espace public, dans les politiques publiques, c'est en 2017, grâce à Emmanuel MACRON, que nous nous en sommes saisis. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Beaucoup a été fait, est-ce qu'il faut frapper encore plus fort et est-ce qu'il faut qu'une des promesses de campagne du candidat MACRON, il y ait la réalité, l'engagement sur ce budget plus important, 1 milliard seulement pour les violences conjugales ? 

ELISABETH MORENO
Tant que nous aurons un seul féminicide dans notre pays… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Il y en a eu 13 depuis le début de l'année. 

ELISABETH MORENO
… il ne faudra pas relâcher les efforts. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Non mais ça c'est… 

ELISABETH MORENO
Non mais attendez. Donc, je réponds à votre question, oui il faut continuer d'investir, oui il faut aller plus loin, mais encore une fois nous l'avons fait, 1 milliard 3 ont été investis, comme c'était demandé par les associations. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Ce n'est pas tout à fait ce qu'elles disent. Les propositions des candidats pour l'égalité hommes-femmes, je voudrais vous en soumettre rapidement plusieurs. Valérie PECRESSE : faire entrer dans le droit français la notion de féminicide. 

ELISABETH MORENO
Oui. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Vous êtes d'accord ?

ELISABETH MORENO
Ecoutez, c'est nous, c'est notre gouvernement, qui avons le premier utilisé ce terme féminicide, et là encore c'était réfuté, comme quoi les choses avancent, donc elle reprend ce que nous faisons aujourd'hui. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Instaurer une amende dissuasive pour les parents de toutes les filles de moins de 15 ans qui seraient voilées. Question d'émancipation. 

ELISABETH MORENO
Mais il y a déjà une loi qui a été voté sur la question du voile, dans l'espace… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Une amende dissuasive. 

ELISABETH MORENO
Je ne sais pas ce que c'est qu'une amende… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Pour les parents de toutes les filles de moins de 15 ans. Est-ce que c'est réaliste, est-ce que c'est faisable, est-ce que vous vous y engagez ? 

ELISABETH MORENO
Dans notre droit, il y a déjà une loi qui interdit aux femmes qui travaillent dans les services publics, de porter le voile. Dans l'espace public, les femmes peuvent se vêtir comme elles le souhaitent. Ma bataille c'est de faire en sorte que celles qui ne le souhaitent pas, et qui sont forcées de se voiler, celles-ci qu'elles soient protégées, et s'il faut sanctionner les parents, pourquoi pas, mais seulement celles qui sont forcées à le faire. Pas de prosélytisme sur le voile. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Interdire le voile, ce n'est pas un outil d'émancipation des femmes ? 

ELISABETH MORENO
Je crois que l'émancipation des femmes, c'est leur donner le choix de s'habiller comme elles le souhaitent. Comme elles le souhaitent… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Le voile, ce n'est pas une injonction qui est faite aux femmes, par les hommes. 

ELISABETH MORENO
Est-ce que vous entendez ces femmes… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Plus ou moins consciemment. 

ELISABETH MORENO
Moi, je ne pense pas que le voile soit un outil d'émancipation, pas du tout, je pense que les femmes doivent pouvoir choisir de se vêtir comme elles le souhaitent. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Donc vous dites que c'est un choix. Le voile c'est un choix des femmes, ça n'est pas une façon d'intérioriser une injonction masculine. 

ELISABETH MORENO
Pour moi, ça n'est pas un outil d'émancipation. Il y a des femmes qui vous disent : « je porte le voile par choix ». 

ELIZABETH MARTICHOUX
Oui, elles le disent. 

ELISABETH MORENO
Il y a des femmes qui vous disent ça, donc ma bataille c'est de protéger celles que l'on force à porter le voile. Ça c'est ma principale bataille. Celles qui décident de le porter… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Comment vous faites la différence ? 

ELISABETH MORENO
Attendez, il y a des femmes aujourd'hui qui vous disent : « Je porte le voile par choix ». Celles-ci, elles sont… Il faut aussi laisser le choix aux femmes de dire… Donnons-leur la possibilité de choisir, et arrêtons de considérer que les femmes ne sont pas capables de choisir et que toutes celles qui portent le voile, sont forcées de le faire ! 

ELIZABETH MARTICHOUX
Encore deux, trois questions rapidement. Les Hijabeuses, elles réclament le droit de porter le voile, elles, lors des compétitions sportives. C'est un collectif qui a été créé il y a un peu plus d'un an et qui bataille contre la Fédération française de foot, de football, qui leur interdit de jouer voilées en compétition. Elles ont raison ? C'est leur combat, elles ont manifesté. 

ELISABETH MORENO
Ecoutez, je suis toujours un peu atterrée, parce que cela fait suite à un amendement que le groupe LR a déposé, que les sénateurs LR ont déposé. Je suis toujours atterrée de voir la droite ressortir les questions du voile, quand elle a besoin d'exister sur ces questions-là. Moi j'en ai marre qu'on instrumentalise les tenues vestimentaires des femmes pour en faire des objets politiques. Ces filles font du sport. Le sport c'est de l'émancipation. On parlait tout à l'heure d'émancipation, on a une loi dans notre pays, le terrain de foot n'échappe pas au droit commun, et si les filles veulent jouer au foot en étant voilée, en quoi c'est impossible ? 

ELIZABETH MARTICHOUX
Donc, au nom de l'accès au sport, vous dites : oui, il faut les autoriser à porter le voile ? 

ELISABETH MORENO
Je pense que très souvent, très souvent les filles ont l'impossibilité, cette fameuse assignation à résidence, de sortir de chez elle pour faire les choses. Si vous êtes en train de me demander si les filles peuvent jouer au foot en portant le voile, je vous dis que beaucoup de filles jouent au foot sans porter le voile… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Non, mais ce n'est pas ma question… 

ELISABETH MORENO
Les empêcher de le faire parce qu'elles portent le voile, d'abord ce n'est pas la loi, parce que si elles sont sur un terrain de foot, elles ont droit de porter le voile pour jouer au foot. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Donc, vous soutenez leur action. 

ELISABETH MORENO
Je soutiens la possibilité des filles de faire du sport, sans être discriminées. Si on interdit aux filles de faire du sport dans des clubs sportifs, parce que c'est de ça dont il s'agit, dans les associations. On a une loi aujourd'hui, la loi pour le respect des valeurs de la République, qui interdit les clubs… qui interdit certains prosélytismes dans les clubs de foot. Sur le terrain de foot aujourd'hui, il n'est pas interdit de porter le voile. Je veux qu'on respecte la loi. La loi dit que ces jeunes filles peuvent porter le voile et jouer au foot.

ELIZABETH MARTICHOUX
D'accord, c'est très clair. Dernière question. Est-ce que vous avez déconstruit votre mari, comme Sandrine ROUSSEAU ? 

ELISABETH MORENO
Non, je n'ai pas besoin de déconstruire qui que ce soit. J'ai besoin de sensibiliser toute la population et toute la société, aux inégalités et aux discriminations qui sont faites aux femmes. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Vous n'aimez pas cette formule ? 

ELISABETH MORENO
Non… 

ELIZABETH MARTICHOUX
Parce qu'après tout, déconstruire, ça veut dire un juste partage des tâches à la maison. 

ELISABETH MORENO
Vous savez, moi, ce qui m'intéresse, c'est qu'enfin en 2022, les femmes ne meurent pas parce qu'elles sont des femmes, qu'elles aient la possibilité de s'émanciper économiquement et professionnellement. 

ELIZABETH MARTICHOUX
C'est un sujet accessoire ? 

ELISABETH MORENO
Je ne suis pas dans l'idéologie, je veux juste que les femmes prennent la place qu'elles méritent dans la société, parce qu'il est grand temps. 

ELIZABETH MARTICHOUX
C'est idéologique la déconstruction des hommes. 

ELISABETH MORENO
Je ne sais même pas ce que ça veut dire. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Merci d'avoir été avec nous Elisabeth MORENO ce matin sur LCI. 

ELISABETH MORENO
Merci de votre invitation. 

ELIZABETH MARTICHOUX
Je rappelle, Gérald DARMANIN, ce soir, fera suite à l'interview que, enfin aux propos que vous avez tenus sur son attitude face à Apolline de MALHERBE.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 février 2022