Texte intégral
MARIE BERNARDEAU
Bonjour Bruno LE MAIRE.
BRUNO LE MAIRE
Bonjour Marie BERNARDEAU.
MARIE BERNARDEAU
Vous avez présenté hier en Conseil des ministres cette série de mesures, très attendues, sur le pouvoir d'achat, elles seront débattues à partir du 18 juillet à l'Assemblée, il y a eu la pandémie, Bruno LE MAIRE, maintenant il y a l'inflation, on est toujours dans le " quoi qu'il en coûte " ?
BRUNO LE MAIRE
Non, on n'est plus dans le " quoi qu'il en coûte ", ça fait plusieurs mois que nous sommes passés à autre chose, nous protégeons les Français contre l'inflation, notamment avec le bouclier énergétique, qui est en place depuis l'automne dernier, gel des prix du gaz, plafonnement des prix de l'électricité, soutien aux carburants, et nous ajoutons des mesures, mais qui sont des mesures ciblées. Elles sont ciblées sur les retraités, on va augmenter les retraites, indexer les retraites sur l'inflation, c'est une question de justice, elles sont ciblées sur tous ceux qui travaillent, notamment avec la prime d'activité, elles sont ciblées sur ceux qui sont obligés de prendre leur voiture pour aller travailler, c'est l'indemnité carburant travailleurs, mais ce n'est pas le " quoi qu'il en coûte " au sens où on n'arrose pas tout le monde, nous ciblons sur les personnes qui en ont le plus besoin et nous ciblons en particulier ceux qui travaillent.
MARIE BERNARDEAU
Vous avez dit, hier, à l'issue du Conseil des ministres, l'importance que vous accordiez à une réduction du déficit, comment on finance toutes ces dépenses, 20 milliards d'euros ?
BRUNO LE MAIRE
C'est 20 milliards d'euros de dépenses, et une grande partie de ces dépenses sont financées par des recettes fiscales exceptionnelles. Pourquoi est-ce qu'il y a de bonnes recettes fiscales ? Eh bien parce qu'il y a eu de la croissance et que nous avons créé des emplois, la croissance ça fait de l'impôt sur les sociétés, les emplois ça fait des cotisations sociales, 55 milliards d'euros de recettes fiscales supplémentaires, qui nous permettent de financer de paquet pouvoir d'achat sans creuser la dette et sans alourdir le déficit qui doit être, en 2022, de 5%. Je vous donne un exemple qui est très concret. Nous avions prévu d'émettre 260 milliards d'euros de dette en 2022, nous émettrons 260 milliards d'euros de dette en 2022, même avec ce paquet pouvoir d'achat, ce qui veut dire que nous ne creusons pas la dette. Et je vous le dis avec beaucoup de fermeté…
MARIE BERNARDEAU
Mais la Cour des comptes s'inquiète, s'inquiète énormément, Bruno LE MAIRE.
BRUNO LE MAIRE
Mais elle est totalement dans son rôle, et mon rôle de ministre des Finances c'est de dire que je veillerai, avec beaucoup de sérieux, avec beaucoup de vigilance, avec beaucoup de gravité, à ce que, à l'occasion de ces débats, on écoute évidemment toutes les propositions d'améliorations, mais que ces améliorations ne se soldent pas par des milliards d'euros supplémentaires. Nous n'achèterons pas le compromis à coups de milliards d'euros…
MARIE BERNARDEAU
Est-ce que la France vit au-dessus de ses moyens ?
BRUNO LE MAIRE
Nous devons rester dans l'épure de ce paquet pouvoir d'achat.
MARIE BERNARDEAU
Est-ce que la France vit au-dessus de ses moyens aujourd'hui ?
JEAN-JEROME BERTOLUS
Bruno LE MAIRE, est-ce que…
BRUNO LE MAIRE
Non elle ne vit pas, je réponds juste, elle ne vit pas au-dessus de ses moyens, elle aide ceux qui en ont besoin. Un pic d'inflation à 5%, et je l'ai toujours dit, nous sommes aujourd'hui au coeur du pic d'inflation, j'avais déjà annoncé que le plus dur était devant nous, nous y sommes, nous sommes au coeur du pic d'inflation, il est juste, il est nécessaire, d'aider deux qui aujourd'hui ne peuvent même pas prendre leur voiture pour aller travailler, et c'est notre intérêt collectif. Enfin, des salariés qui disent " je reste chez moi parce que ça me coûte trop cher d'aller travailler ", des ouvriers qui disent " moi je ne me rends pas à mon usine parce que ça nous coûte trop cher d'aller travailler ", un gamin de 18 ans qui dit " je ne peux pas faire mon alternance parce que faire le plein je ne peux plus ", ce n'est pas acceptable, donc il est nécessaire d'aider tous ces Français, nous le faisons, mais en restant, je le redis, sur un chemin qui est un chemin de responsabilités.
JEAN-JEROME BERTOLUS
On parle des 20 milliards effectivement, de ces mesures nouvelles, mais il y a aussi la montée au capital d'EDF, il y a 6 milliards, on évoque 6 milliards, il y a aussi la suppression des impôts de production, et donc est-ce que vous pouvez assurer aux Français qu'il n'y aura pas d'augmentation d'impôts, que tout passe finalement par cette croissance, qui aujourd'hui est de plus en plus incertaine ?
BRUNO LE MAIRE
Alors, je garantis aux Français que non seulement il n'y aura pas d'augmentation d'impôts, mais que nous continuerons à baisser les impôts, et je pense qu'ils peuvent nous faire confiance, au président de la République, à la Première ministre et à moi-même. Nous avons baissé les impôts de plus de 50 milliards d'euros durant le précédent quinquennat, nous avons baissé l'impôt sur le revenu, nous avons supprimé la taxe d'habitation, nous avons baissé l'impôt sur les sociétés, nous avons commencé à baisser les impôts de production pour accélérer les relocalisations de nos industries sur le territoire français, donc je sais bien que l'heure est au scepticisme généralisé, mais enfin les faits sont là, et les faits sont têtus. Nous avons baissé les impôts, et nous continuons à les baisser, nous supprimons la contribution à l'audiovisuel public, nous avons annoncé une nouvelle baisse d'impôts de production, dès le projet de loi de finances 2023, près de 8 milliards d'euros, pourquoi ? Mais, ça coûte, c'est vrai, mais c'est un investissement. Moi je veux faire revenir des usines, des entreprises, de l'activité industrielle.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Et concernant l'inflation, vous avez dit que c'était une situation exceptionnelle, vous venez de dire à l'instant, à une question de Marie BERNARDEAU, que oui, effectivement, on était arrivé au pic de l'inflation, pourtant, pour l'INSEE, l'inflation va continuer à augmenter, l'INSEE prévoit 7% à la fin de l'année. Vous le savez, Jean-Luc MELENCHON appelle à une marche contre la vie chère à la rentrée. Est-ce que, là encore, vous pouvez vous engager auprès des Français et leur dire " eh bien oui, si l'inflation continue à augmenter, on revalorisera de nouveaux les prestations sociales, on va les indexer vraiment sur l'inflation " ?
BRUNO LE MAIRE
Je ne suis pas sûr qu'une marche contre la vie chère apporte beaucoup de réponses à nos compatriotes sur leur alimentation, leur carburant, leur loyer, je pense que ce que nous faisons est un tout petit peu plus efficace que les marches et déclarations péremptoires de Monsieur MELENCHON. Je pense que plafonner l'indice des loyers, comme nous le faisons, c'est plus efficace, que mettre en place une indemnisation pour les travailleurs qui utilisent leur voiture c'est plus efficace, qu'un chèque alimentaire c'est plus efficace, je le dis en passant. Quand je dis pic d'inflation, ce n'est pas aujourd'hui et demain, le pic d'inflation c'est entre maintenant et la fin de l'année 2022, je rejoins totalement les appréciations de l'INSEE sur ce sujet, ensuite, j'ai bon espoir que nous aurons une décrue de l'inflation dans le courant de l'année 2023, pour revenir à la fin de l'année 2023 à niveau d'inflation plutôt autour de 2, 3%, que ce que nous avons aujourd'hui.
MARIE BERNARDEAU
Mais ça dépend de beaucoup de choses.
BRUNO LE MAIRE
Oui, oui, ça dépend de beaucoup de choses, je le dis avec beaucoup de prudence, c'est notre scénario central, il peut y avoir d'autres scénarios. Ensuite, l'ensemble des prestations que vous indiquez, il y a une revalorisation de 4%, elle suit une revalorisation qui a déjà eu lieu en avril automatiquement, de 1,8. Prenez le SMIC, le SMIC c'est fondamental.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Oui, donc ma question ce n'est pas ce que vous proposez dans le paquet de mesures pour le pouvoir d'achat, c'est à l'avenir, à l'avenir, si cette inflation continue à augmenter est-ce que vous allez continuer à augmenter les prestations sociales ?
BRUNO LE MAIRE
Nous avons, Jean-Jérôme BERTOLUS, et tant mieux, un système social qui est particulièrement protecteur, toutes les difficultés c'est justement de le financer, de pouvoir se le payer, c'est bien pour ça que nous pensons qu'il faut produire les richesses avant de les redistribuer, mais prenez le SMIC, le SMIC il est automatiquement revalorisé en France, nous sommes le seul pays développé qui a un salaire minimum qui est automatiquement revalorisé en fonction de l'inflation, tant mieux, les prestations sociales même chose, simplement lorsque l'inflation est forte, eh bien il faut donner à une accélération à cette revalorisation, c'est exactement ce que nous faisons au moment où nous présentons ce projet de loi. C'est la même chose pour la rémunération du Livret A, c'est la même chose pour la rémunération du Livret d'Epargne Populaire, moi j'attends les propositions du Gouverneur de la BANQUE DE FRANCE…
MARIE BERNARDEAU
Mais les autres salaires non.
BRUNO LE MAIRE
Mais nous avons un système social, dont nous pouvons être fiers, qui protège massivement nos compatriotes, la preuve en est c'est que nous avons le taux d'inflation le plus faible, le plus faible, de tous les pays de la zone euro…
JEAN-JEROME BERTOLUS
Hors Malte.
BRUNO LE MAIRE
Le seul sujet c'est qu'il coûte cher, et donc ma responsabilité de ministre des Finances c'est de m'assurer que le financement de ce système social reste solide et garanti.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Toujours avec nous Bruno LE MAIRE, le ministre de l'Economie, des Finances, de la Souveraineté industrielle et numérique. Alors, nous allons rentrer dans le détail des mesures que vous avez présentées hier en Conseil des ministres et, on l'a dit, qui seront débattues à l'Assemblée le 18 juillet, mais d'abord une question, pourquoi un certain nombre de mesures, que vous avez annoncées, comme la hausse des bourses des étudiants, ou encore une mesure très attendue, y compris par les oppositions et par les principaux intéressés, comme la déconjugalisation de l'allocation adulte handicapé, ne figurent pas dans ces mesures ?
BRUNO LE MAIRE
Les revalorisations de bourses figurent dans les mesures…
JEAN-JEROME BERTOLUS
Les 4 % figurent dans ces mesures.
BRUNO LE MAIRE
La déconjugalisation ça va faire partie du débat qui a été annoncé par Elisabeth BORNE, c'est un sujet qui est très sensible, sur lequel il y a des attentes qui sont effectivement très fortes, de la part des oppositions, et de la part de notre propre majorité, il faut que le débat ait lieu à l'Assemblée nationale. Moi je trouve que c'est très bien, très fort, de la part de la Première ministre, d'avoir dit " il y a eu un débat, nous avons fermé la porte il y a quelques mois, nous voyons bien que ça crée des inquiétudes, des incompréhensions, nous remettons le débat à l'Assemblée nationale, et nous nous en remettons à la sagesse du débat parlementaire. "
MARIE BERNARDEAU
Le syndicat UNEF, représentant des étudiants, dit " il n'y a rien de concret pour nous sortir d'une pauvreté structurelle ", que leur répondez-vous ?
BRUNO LE MAIRE
Il y a des mesures qui sont très efficaces, que ce soit le ticket Resto U à 1 euro, la revalorisation des bourses, tout ce qui est fait aussi pour les apprentis, je rappelle que nous maintenons toutes les aides à l'apprentissage. Qu'est-ce qui permet à une PME aujourd'hui d'embaucher des apprentis ? C'est que vous avez une aide de 8000 euros pour un apprenti de plus de 18 ans, de 5000 pour un apprenti de moins de 18 ans. Je peux vous dire que dès que vous allez dans une PME en France, dans le bâtiment, dans les travaux publics, dans l'agroalimentaire, dans l'automobile, ils vous disent tous " grâce à cette aide nous embauchons des apprentis ", donc ça ce sont des mesures structurelles qui permettent aux jeunes de rentrer sur le marché du travail sans avoir d'inquiétude à se faire pour trouver une place, donc ça ce sont des mesures qui ne sont pas simplement ponctuelles, mais structurelles, et qui figurent dans ce paquet.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Concernant les salariés, vous prévoyez donc le triplement de la prime Macron, jusqu'à 3000 euros, voire 6000 euros si l'entreprise a conclu un accord d'intéressement, cette prime Macron, je le dis, c'est un triplement, parce qu'elle existe déjà, et en 2021 on s'est aperçu que finalement les entreprises n'en n'ont peut-être pas assez distribué aux salariés, et surtout pas d'une manière assez ample. Vous dites ce matin aux entreprises, " oui, saisissez-vous-en ", il faut accompagner, soutenir les salariés ?
BRUNO LE MAIRE
D'abord il y a entre 4 et 6 millions de salariés qui ont bénéficié de cette prime…
JEAN-JEROME BERTOLUS
A hauteur de 500 euros en moyenne.
BRUNO LE MAIRE
Exactement, autour de 500 euros en moyenne…
JEAN-JEROME BERTOLUS
Alors que la prime était de 1000 euros.
BRUNO LE MAIRE
Oui mais, certaines fois on nous dit nos compatriotes, et c'est vrai, sont à 1 ou 2 euros près à la fin mois, et c'est vrai, et puis ensuite, lorsqu'on fait une proposition d'avoir 500 euros en plus grâce à une prime défiscalisée, on nous dit ce n'est pas assez, donc je pense qu'il faut savoir garder le sens de la mesure. Cette prime elle est efficace, et j'invite effectivement toutes les entreprises à s'en saisir. Qu'est-ce que je veux dire par là ? C'est que la situation des entreprises elle est très différente d'une entreprise à l'autre, il y a des entreprises qui, finalement la crise ne les affecte pas trop, et elles continuent à dégager des bénéfices importants, eh bien toutes ces entreprises qui le peuvent, je dis qu'elles doivent augmenter leurs salaires, celles qui le peuvent, et je remercie…
JEAN-JEROME BERTOLUS
Rentrer dans des négociations salariales.
BRUNO LE MAIRE
Et je remercie au passage celles qui le font, enfin quand je vois dans l'hôtellerie, café, restauration, nous ont beaucoup travaillé avec ce secteur-là, il y a eu des augmentations de salaires très importantes, tant mieux, je pense que c'est un exemple à suivre. Il y a d'autres entreprises qui nous disent…
MARIE BERNARDEAU
Et celles qui ne le font pas ?
BRUNO LE MAIRE
Il y a d'autres entreprises qui nous disent – mais la plupart ne le font pas parce qu'elles ne le peuvent pas – il y a beaucoup d'entreprises qui nous disent " moi une augmentation salariale, comme je ne sais pas où j'en serai dans 2 ans ou dans 3 ans, c'est trop rigide ", moi je leur dis utilisez la prime défiscalisée parce que c'est pour cette année 2022, si en 2023 en 2024 ça va moins bien pour vous, vous ne menacez pas l'avenir de votre entreprise, et en même temps vous récompensez ceux qui font la force de votre entreprise, la première force d'une entreprise ce sont les salariés, et je dis également utilisez…
MARIE BERNARDEAU
Mais c'est du ponctuel, encore une fois Bruno LE MAIRE.
BRUNO LE MAIRE
L'intéressement, la participation, ça ce n'est pas du ponctuelles, ça permet de mieux associer les salariés aux résultats de l'entreprise, nous avons encore
simplifié les accords d'intéressement, donc je demande à toutes les entreprises de se saisir de ces instruments qui sont variés, efficaces, et qui permettent, au bout du compte, de mieux protéger aussi les salariés contre l'inflation grâce à une meilleure rémunération.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Vous êtes inquiète, d'ailleurs, du climat social, de la multiplication des conflits sociaux, précisément pour obtenir une revalorisation salariale ?
BRUNO LE MAIRE
Je suis attentif, j'entends parfaitement les salariés qui disent " voilà, on n'arrive plus à joindre les deux bouts », « on n'arrive plus à se rendre sur notre lieu de travail. " Vous savez, l'indemnité carburant travailleurs, je ne l'ai pas sortie de mon chapeau, je l'ai sortie de la campagne des législatives, de la rencontre avec des dizaines et des dizaines d'ouvriers, de salariés, d'ingénieurs, d'alternants, qui m'ont dit " ah ben non, nous on ne peut plus aller travailler, ça me coûte 180, 200 euros, 250 euros de plus par mois, désolé, je n'ai pas les moyens d'aller travailler ", en France des salariés que vous disent " je n'ai pas les moyens d'aller travailler ", c'est pour ça que nous avons voulu mettre en place cette indemnisation, qui pourra aller jusqu'à 300 euros, donc c'est une vraie couverture contre ce risque-là.
MARIE BERNARDEAU
Pourquoi uniquement pour les travailleurs, Bruno LE MAIRE, d'ailleurs ?
BRUNO LE MAIRE
Donc je suis attentif aux tensions, aux inquiétudes, et je dis aussi que tout ne peut pas reposer sur l'action de l'Etat, que chacun a sa part à prendre, et que les entreprises elles aussi, et je le redis, et je les remercie, beaucoup le font, les entreprises qui ont un rôle social majeur doivent aussi participer à l'apaisement de ces tensions.
MARIE BERNARDEAU
J'en profite parce que vous l'avez évoqué, pourquoi la donner uniquement aux travailleurs cette indemnité carburant, aux travailleurs les plus modestes, parce qu'en milieu rural on sait bien qu'on a besoin de sa voiture pour aller faire ne serait-ce que ses courses, aller chercher son pain, les retraités notamment ?
BRUNO LE MAIRE
C'est un choix politique, au sens le plus juste du terme…
MARIE BERNARDEAU
C'est le ciblage.
BRUNO LE MAIRE
C'est-à-dire que, pour que la France sorte de ce pic inflationniste il faut que nous continuions à avoir une croissance qui soit forte, il faut que nous continuions à créer du travail pour tous, c'est une garantie aussi de cohésion sociale, donc nous faisons effectivement ce choix de privilégier les salariés, les travailleurs, les indépendants, les aides-soignantes, les alternants, parce qu'ils n'ont pas le choix, d'autres peuvent avoir le choix de prendre peut-être un peu plus de temps pour faire un déplacement, ou de s'organiser autrement, mais les salariés, quand il faut être à 7h ou à 8h au boulot, ils doivent être à 7h ou à 8h au boulot, l'alternant, quand on va lui demander d'être à la chaîne à 7h30, s'il est là à 7h40 ça va mal se passer, donc c'est pour eux que c'est le plus difficile, et donc notre choix, qui me paraît un choix juste, c'est d'aider ceux pour lesquels c'est réellement le plus difficile.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Vous dites chacun doit prendre sa part, et vous pointez du doigt, en quelque sorte, la responsabilité également des entreprises, alors on a une interrogation c'est,
pourquoi, finalement vous, le ministre de l'Economie et des Finances, vous ne vous attaquez pas aux superprofits, « les profits de guerre » dénoncés même par le président de la République lors du G7 ? L'opposition vous le demande, c'est réalisé dans des pays voisins, comme l'Italie ou la Grande-Bretagne, pourquoi ne pas vous attaquer aux superprofits des grandes entreprises d'énergie ou des grandes entreprises de transport ?
BRUNO LE MAIRE
Voyez que toute la logique de ce que je vous présente ce matin, ce sur quoi nous échangeons, ce sur quoi j'ai échangé de manière d'ailleurs très sereine et très constructive hier à la Commission des finances…
JEAN-JEROME BERTOLUS
Avec Eric COQUEREL, le nouveau patron de la Commission des finances.
BRUNO LE MAIRE
Oui, nous avons eu un débat très serein, très constructif, qui permet de poser les choix et de présenter des alternatives de manière démocratique et responsable, tant mieux, j'espère que ça se poursuivra, y compris en séance publique, mais toute la logique de ce que je vous présente c'est celle de compromis collectifs et d'un engagement collectif contre l'inflation, et je crois plus à cet engagement collectif qu'à des taxes, des obligations, des contraintes, et je reste dans cet état d'esprit qui est de demander collectivement, à tous ceux qui le peuvent, les chefs d'entreprise, les patrons, l'Etat, la puissance publique, les collectivités locales, de se serrer les coudes pour lutter contre l'inflation. Alors après nous ferons les comptes, je ne suis pas naïf. J'ai demandé des efforts…
JEAN-JEROME BERTOLUS
Les 12 centimes de TOTAL, ça suffit, sur les autoroutes ?
BRUNO LE MAIRE
J'ai demandé des efforts à un certain nombre d'entreprises, ça peut être les entreprises énergétiques, un effort sur les carburants, j'ai demandé à CMA-CGM un effort sur les containers, notamment ceux qui vont vers les départements d'Outre-mer, ils font cet effort, j'ai demandé aux banques de faire des efforts sur les frais bancaires, j'ai demandé aux assureurs de faire des efforts également, pour le moment ils ne m'ont pas répondu, je leur dis très simplement nous ferons les comptes à la fin de l'année. Je ne fais pas simplement des déclarations, je suis aussi comptable des actions des uns et des autres, nous ferons les comptes à la fin de l'année pour voir si effectivement les entreprises qui ont profité de la situation actuelle, parce qu'elle peut profiter à certaines entreprises, ont bien répondu présent à l'appel, qui n'est pas l'appel du ministre de l'Economie et des Finances, c'est l'appel des Français qui demandent que tout le monde fasse un effort et que cet effort soit équitablement réparti.
MARIE BERNARDEAU
Avec Bruno LE MAIRE, le ministre de l'Economie. Bruno LE MAIRE vous supprimez la redevance qui finance l'audiovisuel public, comment va être financé l'audiovisuel public à l'avenir ?
BRUNO LE MAIRE
Alors, nous la supprimons parce que c'est un impôt, et que nous voulons baisser les impôts, c'est 3,2 milliards d'euros qui sont rendus aux Français, nous la supprimons aussi parce que la redevance a un côté assez daté, elle est fondée sur l'utilisation et la possession d'un téléviseur, vous voyez bien que ce n'est plus forcément le média central, qu'il y en a d'autres, et donc que ça a un côté injuste et daté cette contribution à l'audiovisuel public. Est-ce que pour autant nous allons renoncer au financement de l'audiovisuel public ? Certainement pas, c'est une
question d'indépendance, c'est une question de liberté, donc nous garantirons, à
l'audiovisuel public, son financement.
MARIE BERNARDEAU
Comment ?
BRUNO LE MAIRE
Ça va être le débat à l'Assemblée nationale, il y a beaucoup de propositions
qui sont faites…
MARIE BERNARDEAU
Par un budget annuel par exemple ?
BRUNO LE MAIRE
Donc la ministre de la Culture négociera ces conditions, le ministre des
Comptes publics, Gabriel ATTAL, également, mais nous garantiront à l'audiovisuel
public les ressources dont ils ont besoin pour fonctionner de manière libre et
indépendante.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Et pérenne.
BRUNO LE MAIRE
Et pérenne, bien entendu.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Alors, effectivement toutes ces mesures du pouvoir d'achat vous allez en
débattre à l'Assemblée, est-ce qu'elles sont à prendre ou à laisser, est-ce que vous
allez tenter, vous Bruno LE MAIRE, en fait de suivre le mantra du gouvernement,
c'est-à-dire de trouver un compromis ? Ecoutez ce que disait Olivier VERAN, votre
collègue porte-parole du gouvernement, à l'issue du Conseil des ministres hier.
OLIVIER VERAN, PORTE-PAROLE DU GOUVERNEMENT
Nous ouvrons aussi le champ, notre démarche elle se résume en trois mots :
dialogue, compromis, ouverture. Les propositions des groupes politiques sont les
bienvenues, nous les recevrons, nous les entendrons, et si nous partageons les
mêmes objectifs, et les mêmes principes républicains au service du bien de tous,
alors nous pourrons construire ensemble pour la France et les Français.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Vous saluez déjà, par exemple, le fait que Marine LE PEN ait dit " oui, ce
texte est imparfait, mais les 89 députés du Rassemblement national le voteront " ?
BRUNO LE MAIRE
Vous savez, je suis un peu comme Saint-Thomas, donc je juge sur les actes,
donc nous verrons ce que décidera…
MARIE BERNARDEAU
Fabien ROUSSEL, qui était à votre place hier, a dit pareil, vous êtes d'accord
sur ce point.
BRUNO LE MAIRE
On verra ce que décidera… le grand lien entre les gaullistes et les
communistes qui est un lien historique, donc nous verrons ce qui se produira. Moi je
constate simplement que nous avons eu, hier, une réunion de la Commission des
finances qui a été constructive et que je souhaite que ce climat constructif, apaisé,
responsable, où on recherche de bonne foi un compromis, puisse se poursuivre en
séance publique. Ensuite notre responsabilité c'est effectivement d'être ouvert, de
montrer que des compromis sont possibles, de bâtir ces compromis, mais de fixer
aussi certaines limites, il est important de dire quelles sont nos limites en début des
négociations. Moi j'en vois trois. La première c'est les impôts, aucune augmentation
d'impôts pour les Français, ça c'est une limite qui pour moi me paraît indispensable dans un pays où le taux de prélèvements obligatoires reste un des plus élevés des pays développés. La deuxième limite c'est les finances publiques, tout n'est pas possible financièrement, j'aimerais pouvoir vous dire « oui, on peut ouvrir tout grand les vannes de la dépense publique », non, ce serait irresponsable pour nous, irresponsable pour la nation, irresponsable pour nos enfants, irresponsable pour l'indépendance de la France, donc il n'est pas possible d'ouvrir tout grand les vannes de la dépense publique, il y a des limites financières, tout n'est pas possible financièrement, c'est une limite qui est très claire et que, je pense, je vais réaffirmer beaucoup, beaucoup, beaucoup, dans les jours et les semaines à venir. Enfin, troisième limite, très importante, le climat, moi je ne vais pas accepter de dépenser des dizaines de milliards d'euros pour subventionner les énergies fossiles, quand je vois certains qui nous disent il faut plafonner le prix du carburant à 1,50 euro…
JEAN-JEROME BERTOLUS
LR.
BRUNO LE MAIRE
Ça coûte entre 40 et 50 milliards d'euros, donc non seulement c'est irresponsable du point de vue financier, mais c'est irresponsable du point de vue climatique. Vous avez vraiment envie que l'argent du contribuable aille au financement du pétrole du Golfe ou de la Russie ? Certainement pas.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Bruno LE MAIRE, on a entendu ces trois conditions, et finalement ces trois conditions, si on regarde rapidement les propositions de l'opposition, par exemple un SMIC à 1500 euros net pour la NUPES, vous avez évoqué le blocage du prix de l'essence, ou la baisse de TVA pour le Rassemblement national, est-ce que ce matin vous pourriez nous dire simplement une mesure de l'opposition, quelle qu'elle soit, sur laquelle, oui, il serait possible de trouver un compromis, est-ce que vous avez déjà ça en tête ?
BRUNO LE MAIRE
Bien sûr.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Par exemple ?
BRUNO LE MAIRE
Je regarde les propositions qui sont faites, je critique durement parce que je pense que c'est une proposition qui n'est pas responsable, la proposition de plafonnement à 1,50 euro des carburants, d'ailleurs je vais tout à l'heure au Sénat, je sais que beaucoup de sénateurs les Républicains ont eux-mêmes torpillé cette proposition, donc ils le font à ma place, en revanche quand on regarde les questions d'heures supplémentaires, de défiscalisation, est-ce qu'il y a encore des marges de manoeuvre, là on est exactement dans la cohérence de notre projet qui est de valoriser ceux qui travaillent et de mieux rémunérer ceux qui travaillent, pourquoi pas. J'ai proposé une indemnité carburant travailleurs, qui aujourd'hui est limitée à toutes les personnes qui ont un niveau de revenu de l'ordre de 1260 euros net par mois pour une personne seule, revenu fiscal de référence de 14.000 euros pour être tout à fait précis, c'est ce qu'on appelle le 5e décile en termes techniques, j'ai déjà entendu des parlementaires qui me disent « 5e décile c'est un peu bas, est-ce qu'il ne faut pas remonter pour toucher encore un peu plus les classes moyennes ? », je trouve que ce sont les dispositions qui se regardent. Donc moi, une fois encore, j'arrive avec un état d'esprit très ouvert, à la recherche du compromis, mais dans un cadre qui est celui qui me paraît responsable pour le pays et surtout conforme au choix qu'on fait les Français au moment de l'élection présidentielle en soutenant le projet du président de la République.
MARIE BERNARDEAU
Y compris à l'égard du Rassemblement national, Bruno LE MAIRE ?
BRUNO LE MAIRE
Je regarderai toutes les propositions qui seront faites, j'ai répondu à tous les députés de la même manière, tous les députés qui sont à la Commission des finances et qui sont à l'Assemblée nationale sont des élus de la République, je souhaite qu'ils se comportent tous comme des républicains, c'est-à-dire ouverts au débat, ouverts au dialogue, mais je parle à tous les élus de la République.
JEAN-JEROME BERTOLUS
Très vite, une dernière question, Boris JOHNSON vient de démissionner en Grande Bretagne, vous poussez un ouf de soulagement là ce matin ?
BRUNO LE MAIRE
Ça prouve en tout cas que le Brexit mêlé au populisme ça ne fait pas un bon cocktail pour une nation, car lorsqu'on verra ce que laisse Boris JOHNSON derrière lui je ne suis pas sûr que ce soit très brillant.
MARIE BERNARDEAU
Il ne va pas vraiment vous manquer, ni à Emmanuel MACRON visiblement.
BRUNO LE MAIRE
Non, mais personnellement, non il ne manquera pas.
MARIE BERNARDEAU
Bruno LE MAIRE, ministre de l'Economie
source : Service d'information du Gouvernement, le 18 juillet 2022