Déclaration de Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, en réponse à trois questions sur la répression en Iran, à l'Assemblée nationale le 4 octobre 2022.

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Circonstance : Questions au Gouvernement à l'Assemblée nationale

Texte intégral

Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les députés,
Monsieur le député,

Madame la Présidente, tout d'abord merci d'avoir commencé cette séance par une minute de silence à la mémoire des victimes de la répression en Iran.

Les manifestations qui ont suivi la mort de Mahsa Amini ont été et sont toujours la cible d'une répression violente, qui a déjà fait des dizaines et des dizaines de morts. Alors la France a condamné, dès le 19 septembre, avec la plus grande fermeté les violences qui ont entrainé la mort choquante de cette jeune femme, et la violence qui est utilisée et qui continue de l'être contre les manifestants. Nous avons appelé les autorités iraniennes au respect du droit à manifester pacifiquement, au respect du droit au rassemblement, et aussi au respect de l'exercice de leur métier par les journalistes.

J'ai moi-même rappelé ces principes fondamentaux à plusieurs reprises à New York aussitôt, à Paris, à Marseille. L'Iran a considéré qu'il s'agissait là d'une ingérence, que de rappeler les principes fondamentaux des droits de l'Homme. Il a cru bon de le faire savoir à notre ambassade sur place. J'ai donc décidé de faire convoquer le chargé d'affaires iranien à Paris - il n'y a pas en ce moment d'ambassadeur - pour exiger la fin de la répression aveugle, et dire clairement ce que nous pensons des méthodes iraniennes. Il a été reçu vendredi 30 septembre, au Quai d'Orsay.

Au fond, qu'est-ce qui se joue dans les rues de Téhéran et les villes d'Iran ? La liberté. La répression est brutale. Nous condamnons dans les termes les plus forts cette répression aveugle, menée contre des femmes et des hommes qui respectent leur dignité telle qu'ils la conçoivent, la liberté à laquelle ils aspirent. Et cette aspiration à la liberté elle est désormais visible : elle est dans les rues, elle est dans les universités, elle est dans les cœurs. Les femmes d'Iran demandent à être libres ; nous les soutenons et nous continuerons à les soutenir.

Nous avons engagé, Monsieur le député, au-delà des sanctions qui déjà frappent ce pays depuis de longues années, un travail au sein de l'Union européenne, pour poursuivre un certain nombre d'options envers les tenants du régime qui envoient les manifestants à la mort, et qui envoient souvent leurs ressortissants et leurs enfants dans nos pays. Cela ne peut pas durer. Nous devons les sanctionner et nous le ferons, en concertation [...].

J'ai rappelé, Madame la députée, la gravité des faits qui se déroulent en Iran et nous appelle tous à la dignité.

(...)

Madame la députée, j'ai rappelé donc la gravité des faits, j'ai dit notre condamnation, j'ai dit le travail que nous avons engagé pour des sanctions s'ajoutant aux actuelles sanctions, j'ai dit notre soutien aux femmes iraniennes et à celles et ceux qui les appuient. Parce que, oui, enlever son voile, couper ses cheveux, sortir dans la rue manifester, alors que des dizaines et des dizaines de personnes ont déjà été victimes de la répression, défier la police des mœurs, ce sont autant d'actes de courage ; autant d'actes de courage accomplis individuellement, un à un, puis par centaines, par milliers.

Alors, nous ne pouvons pas nous taire et nous devons saluer le courage des femmes et des hommes qui aujourd'hui manifestent en Iran. C'est ce que je fais devant la représentation nationale, à laquelle je dis notre admiration, notre respect et notre soutien.

Et Madame la députée, si je puis : ne comparez que ce qui est comparable ; les violences en Iran et la protection d'une emprise diplomatique n'ont rien à voir. Ne faites pas de comparaison absurde, indigne, à nouveau, ridicule, et qui n'a pas lieu d'être.

Merci.

Madame la députée,

Le nom de Mahsa Amini est connu désormais dans le monde entier, en effet. Et depuis son décès, le mot de liberté est également sur toutes les lèvres en Iran. Nous avons condamné sa mort, condamné les violences, condamné la répression. Je l'ai dit, je le redis, et votre question, Madame la députée, m'offre aussi l'occasion de revenir sur l'action de la France au sein de l'Union européenne, depuis ces événements, action, je le disais d'un mot, tout à l'heure, qui vise à répondre à la répression en ciblant les responsables de celle-ci, en les tenant pour responsables de leurs actes.

Ne vous y trompez pas, de telles mesures peuvent avoir un impact sur les décideurs du régime en Iran. Alors qu'ils s'appliquent à réprimer d'un côté, ils envoient, de l'autre, nombre d'entre eux en tout cas, leurs enfants vivre en Occident. Il s'agira de geler leurs avoirs et geler leur droit à voyager. Voici ce qui est en cours.

Vous m'interrogez par ailleurs sur les contacts que la France entretient avec ce pays qu'est l'Iran, y compris au niveau du Président de la République et du président iranien. Permettez-moi de rappeler que cet entretien, qui a eu lieu en marge de l'Assemblée générale des Nations unies, à New York, a permis d'évoquer des sujets importants et graves. Il s'agit d'une part de faire revenir l'Iran au respect des garanties qu'elle doit à l'Agence internationale de l'énergie atomique, au titre du traité qu'elle a signé, et qui ne sont pas respectées.

Il s'est agi d'autre part, lors de cet entretien, d'appeler l'Iran à réfléchir une dernière fois, avant de ne pas accepter l'accord sur le JCPOA, c'est-à-dire permettre le retour à un accord visant à éviter que l'Iran atteigne le seuil nucléaire. C'est de l'intérêt de tous. Enfin, Madame la députée, le Président n'a pas manqué de rappeler ce que nous pensons du régime iranien, des privations de libertés qui y sont, y compris celles qui sont faites à nombre de nos ressortissants, dont il a demandé la libération immédiate. Nous avons quatre ressortissants sur place.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 5 octobre 2022