Texte intégral
JULES DE KISS
Bonjour Olivia GRÉGOIRE !
OLIVIA GRÉGOIRE
Bonjour !
JULES DE KISS
Des stations-service vides, des files d'attente aussi là où il reste du carburant, l'État qui a débloqué une partie de ses stocks stratégiques mais pas de pénurie, dit le gouvernement. Les carburants vont arriver, c'est ce que disait hier sur France Info le porte-parole des pétroliers, ça va arriver quand ? Combien de stations sont aujourd'hui sans carburant ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Question très précise, réponse précise : à peu près 15 % des stations ont des problèmes d'approvisionnement au moment où on se parle. Pourquoi ? Deux raisons. On a eu plusieurs points de raffineries où il y a des grèves, pourquoi ces grèves ? Parce qu'ils demandent une augmentation de salaire, j'y reviendrai mais aussi parce que à cause de ces grèves, il nous faut importer un peu de pétrole notamment de Belgique et aussi puiser dans nos stocks stratégiques pour couvrir ces stations qui n'ont pas de carburant aujourd'hui, ça prend un peu plus de temps quand vous faites venir de l'essence notamment de Belgique. Donc c'est une question de quelques jours, la ministre de la Transition énergétique l'a rappelé hier soir, c'est une histoire de quelques jours et j'ai à cœur quand même de rappeler que certes c'est embêtant pour ceux qui y sont mais c'est 15 % en réalité d'une station qui ont cette problématique, c'est une histoire de jours et je pense que dès la semaine prochaine, ça ira mieux le temps que le carburant arrive notamment du Benelux.
JULES DE KISS
Mais si c'est 15 % aujourd'hui vous ne craignez pas que ça arrive à 20, 30, 40, 50 % dans les jours qui viennent, le temps que l'essence arrive ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Non, nous ne le craignons pas parce que ce n'est pas une question de semaines ou de mois, c'est une question de jours et deuxièmement, comme vous l'avez bien dit, nous puisons aussi parallèlement sur nos stocks stratégiques pour approvisionner ces stations le plus vite possible. Donc c'est une question de jours, je pense à ceux qui notamment dans le Nord ont des difficultés, je ne dis pas qu'il n'y a pas de sujet.
JULES DE KISS
Près des frontières, il y a plus de pénuries …
OLIVIA GRÉGOIRE
Notamment dans le nord, il y a un certain nombre de politiques se sont exprimés. L'essence arrive dans les jours qui viennent.
JULES DE KISS
Xavier BERTRAND justement, le président de la région Hauts-de-de France qui lui hier à votre place disait : peut-être la manière forte, peut-être réquisitionner, aller dans ces raffineries bloquées, vous le disiez vous-même, salaires, pour des embauches ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Alors, réquisition, je ne crois pas que ce soit l'option. Moi, j'ai deux réponses à apporter à Xavier BERTRAND, premièrement, j'appelle les entreprises concernées qui, pour la plupart, ont quand même de bons résultats au moment où on se parle à considérer aussi les demandes d'augmentation de salaire.
JULES DE KISS
Vous dites à TOTAL "augmentez vos salariés" ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Je ne le dis pas comme ça. Je dis à ceux qui sont effectivement sous le feu des projecteurs et qui subissent des grèves ; nous avons été très clairs au niveau du gouvernement, nous attendons des entreprises, et j'en suis la ministre, des efforts à l'endroit des salariés, et notamment celles qui font des bénéfices. Donc effectivement, ça peut se regarder et nous souhaitons et nous l'avons dit et nous continuerons à le dire durant le projet de loi de finances que les entreprises accompagnent les salariés aussi face à cette inflation. Deuxièmement, Xavier BERTRAND fait de la politique depuis longtemps, il y a un item qui est important en politique, c'est la cohérence, les mêmes qui aujourd'hui se plaignent des queues dans certaines stations-services, et je pense notamment à TOTAL parce qu'il y a la queue, pourquoi ? Parce qu'il y a la ristourne, les mêmes qui aujourd'hui se plaignent sur vos plateaux de la queue dans ces stations-service dans leur région sont ceux qui ont pendant dans des semaines bataillé le gouvernement pour que justement, il y ait cette ristourne dans ses stations-service et qu'elle soit prolongée.
JULES DE KISS
Il y avait d'autres solutions sur la table, la taxe notamment ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Nous souhaitions des approches beaucoup plus ciblées, vous le savez, Bruno LE MAIRE l'avait dit pour accompagner les ménages les plus modestes et pas nécessairement une ristourne pour tous. Les LR, à commencer par Xavier BERTRAND, se sont engagés dans la voie de la ristourne pour tous et aujourd'hui, il faut aussi assumer ses bons.
JULES DE KISS
Et d'ailleurs, d'un mot puisqu'on parle des ristournes à la fin du mois, on sait qu'elles doivent diminuer pour disparaître progressivement, il n'est pas question de prolonger justement le dispositif ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Au moment où on se parle, non, au moment où on se parle non après comme sur tous les sujets dont nous aurons l'occasion de parler ce matin, on n'est pas dans la certitude absolue, on est extrêmement pragmatique, on regarde les difficultés sur le carburant comme sur l'ensemble des énergies mais au moment où je vous parle, non, nous avons pris des décisions lors du projet de loi de finances rectificative et du paquet pouvoir d'achat cet été mais j'ai à cœur quand même de dire que LR devrait être un peu plus cohérent, ils ont voulu cette ristourne, ça crée aussi des difficultés parce que les gens se ruent sur les stations qui font cette ristourne, ça n'était pas la position du gouvernement. C'est bien d'assumer et d'être un peu cohérent entre ce qu'on dit au mois de juillet et ce qu'on dit au mois d'octobre.
NEÏLA LATROUS
Le paradoxe, c'est que les Français se ruent dans les stations essence au moment où vous présentez un plan de sobriété, il entre en vigueur quand ce plan sobriété ? C'est dès ce matin dès ce matin ? Dès ce matin, la grande distribution doit réduire l'éclairage dans ses magasins, les magasins vont fermer les portes quand il y a du chauffage ou de la climatisation à l'intérieur ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Plusieurs points déjà. Il y a beaucoup d'entreprises et je veux les en remercier qui ne nous ont pas attendues pour mettre en place ces mesures.
NEÏLA LATROUS
Qui ont déjà commencé dès cet été notamment la grande distribution.
OLIVIA GRÉGOIRE
Oui même déjà pour d'autres plusieurs mois ou plusieurs années pourquoi ? Parce que notamment depuis plusieurs mois, on voit bien les factures d'énergie et les entrepreneurs voient bien les factures d'énergie. Un entrepreneur, ça pilote son compte de résultat, ça pilote ses coûts de production et ce n'est pas idiot. Donc quand on voit les prix multipliés par 5 ou par 10 mais on fait attention, on dit à ses collaborateurs de faire attention.
NEÏLA LATROUS
Pour les autres ?
OLIVIA GRÉGOIRE
On n'a pas non plus un top départ à partir de ce matin 8h38 "faites attention à la température" ! Ça fait des mois qu'on le dit, vous savez quoi, c'est même dans la loi cette histoire de 19 degrés sauf que ça n'est pas appliqué. Hier, il y a eu une grosse journée, on a été nombreux parmi les ministres à y participer, Élisabeth BORNE l'a conclue pour montrer toutes les mesures prises par toutes les entreprises mais aussi les administrations mais aussi les logements, le transport, comment chacun faisait des efforts. Moi, j'ai montré comment les stations de ski allaient bouger, comment les grandes surfaces allaient adapter le chauffage. Bon donc il n'y a pas vraiment de top départ. Dans la grande distribution, typiquement depuis le mois de juillet, ces mesures sont mises en œuvre ; maintenant, elles sont déployées dans l'ensemble des filières dont je viens de parler et j'ai aussi a à cœur de dire une chose, c'est que oui, c'est de l'incitation et non, ce n'est pas de l'obligation parce que c'est une question qu'on me pose aussi souvent qui est : mais pourquoi vous n'obligez pas etc. ? D'abord "la police des températures", c'est quand même un concept qui est assez difficile à mettre en œuvre et en plus .…
NEÏLA LATROUS
Ça existait cet été, il y avait des patrouilles qui étaient …
OLIVIA GRÉGOIRE
Quand vous avez 4,1 millions d'entreprises, je ne vois pas comment l'État et d'ailleurs ça n'est pas l'état d'esprit de ce que nous faisons, nous marchons dans la conscience et pas dans l'obligation, je ne vois pas comment l'État va aller vérifier dans chaque pièce de 4 ,1 million d'entreprises la température ! Il y a aussi un item de confiance qui est important et vous avez des entreprises qui pilotent avec d'ailleurs leurs compteurs qui peuvent piloter à distance aussi leur température dans leurs établissements. Donc on est dans l'incitation, pas dans l'obligation.
NEÏLA LATROUS
Mais il y a eu la police des températures cet été notamment les commerces pour aller vérifier que ceux qui climatisaient leurs commerces, leurs locaux ne gardaient pas les portes ouvertes. Ça, c'est fini ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Non, ça c'est en cours, ça a d'ailleurs été fait cet été, c'est une approche qui est aussi menée par les polices municipales, j'ai eu l'occasion de …
NEÏLA LATROUS
Les contrôles vont se poursuivre ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Les contrôles se poursuivent même si on a moins de problématiques liées à la climatisation, ça ne vous a pas échappé mais quand même prenons mesure d'une chose, je sais que certains prennent ça avec un peu de légèreté mais dans un magasin de 100 mètres carrés, quand vous fermez la porte là à partir de maintenant et que les températures commencent à baisser, quand vous fermez la porte plutôt que de la laisser ouverte, ce qui est le cas souvent dans des zones piétonnes notamment, c'est 20 % d'économie d'énergie, donc c'est dire si ça n'est pas des gestes anodins. Encore une fois, moi j'en appelle à la responsabilité des entrepreneurs ; ils le savent mieux que moi, ils voient leur facture d'énergie. L'énergie la moins chère, c'est celle qu'on ne consomme pas.
JULES DE KISS
Olivia GRÉGOIRE, ministre chargée des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme. Une mesure dans ce plan de sobriété : l'augmentation, pour les fonctionnaires, de l'indemnité pour télétravail de 15 %, elle va passer à 2,88 euros par jour. Mais les syndicats vous disent : le télétravail en ce moment, c'est un transfert de coût de l'entreprise aux salariés qui doit se chauffer chez lui et avoir l'électricité pour faire tourner l'ordinateur etc.
OLIVIA GRÉGOIRE
Écoutez…
JULES DE KISS
En détail ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Il y a peu de détails, il y a plein de problématiques différentes, et tout est important. C'est un transfert de coût si vous vous chauffez - comme nous le conseillons - à 19 degrés, si vous faites attention à aussi mettre en veille votre ordinateur, votre imprimante, votre Wifi quand vous ne l'utilisez pas. En réalité, ça n'est pas un transfert de coût. Et je rappelle qu'en matière de coût, nous protégeons intégralement la population française puisque je rappelle que nous avons un bouclier qui protège l'augmentation des prix : 4 % jusqu'à la fin de l'année, 15 % en début d'année. Donc ce sont des coûts qui sont maîtrisés. Et si les Français, comme je le crois, entendent ce que le Gouvernement conseille, c'est-à-dire ils font attention à mettre aux alentours de 19 degrés leur température, éteignent leurs appareils en veille, je ne vais pas vous faire toute la liste, je pense qu'il n'y aura pas de surcoût.
NEÏLA LATROUS
Qu'est ce qui attend les Français pour ceux qui réservent en ce moment leurs vacances d'hiver ? Des piscines plus froides ? Des stations de ski fermées ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Pas du tout. L'ensemble des acteurs du tourisme s'est mobilisé, et ce depuis des mois. J'ai travaillé une bonne partie de l'été avec les domaines skiables, avec aussi le thermalisme, les stations thermales et les hôteliers.
NEÏLA LATROUS
Tout ouvrira ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Oui, tout ouvrira. En revanche, il y a une position très responsable des acteurs. Nous aurons dans l'ensemble des stations de ski loisir d'aller skier pour ceux qui partent. Il y aura l'adaptation de la vitesse de remontées mécaniques notamment et des télécabines aux heures pleines notamment, à 9h, au démarrage de la journée.
NEÏLA LATROUS
C'est-à-dire il y en aura moins ? On étale les orientations ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Non. C'est-à-dire on ralentit un peu la vitesse des télécabines pour permettre d'éviter les pics de consommation. Et dès le milieu de la matinée, les vitesses redeviendront normales. Mais au moment où d'habitude, on consomme énormément avec énormément de monde sur les télécabines, là, ils ont décidé de ralentir un peu la vitesse. Il y a aussi un engagement de l'ensemble des stations de ski à respecter. Il y a à mettre en œuvre ces mesures de sobriété en matière de damages, en matière de neige artificielle, ils ont proposé énormément de mesures. Ils sont bien conscients qu'il faut faire ces efforts justement pour que tous les Français aillent skier. Idem pour les hôteliers : un degré dans la piscine, dans les spa, dans les stations thermales.
NEÏLA LATROUS
Ça vaut aussi pour les locations hors hôtel, les AIRBNB et locations saisonnières ? Vous demandez aussi à tous ceux qui… ?
OLIVIA GRÉGOIRE
On demande à tous ceux qui louent dans le cas d'une location comme on appelle "meublée touristique" de faire cet effort effectivement. Et un degré de moins, ça n'empêche pas - je pense - d'aller profiter d'un spa ou d'une piscine intérieure.
NEÏLA LATROUS
Et est-ce que les touristes verront des monuments fermés ? Est-ce que tous les monuments touristiques qu'ils fréquentent, le mont Saint-Michel ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Non, non, non, certainement pas. Nos acteurs sont très responsables, et les monuments, les lieux de loisirs ne seront pas fermés.
NEÏLA LATROUS
C'est une activité essentielle, pour reprendre une terminologie… ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Je ne veux pas reprendre cette terminologie. Je ne saurai, et vous êtes assez mesurée, je ne saurai établir de comparaisons entre une pandémie qui a tué 120 000 personnes et les difficultés énergétiques. J'ai aussi à cœur de rappeler quand même une chose : bien sûr, c'est compliqué de baisser d'un degré sa température ; bien sûr, c'est compliqué d'envisager que la télécabine va aller moins vite quand on va prendre sa piste noire à Noël ou rouge ; bien sûr, ça peut être compliqué pour certains de dire : "Oh, la piscine va être à un degré de moins". Tout ça est aussi les conséquences d'une guerre. Et j'ai quand même à cœur de rappeler que à 3h et demie ici, de Paris, en ce moment, il y a une guerre et les Ukrainiens sont sous le feu des armes, je pense qu'on peut faire cet effort.
JULES DE KISS
Alors, Olivier GRÉGOIRE, on va parler d'un sujet qui concerne tous les Français : le pain, les boulangers. Vous êtes ministre des PME et de l'Artisanat, donc vous êtes la ministre des boulangers. Et ils vous alertent aujourd'hui : 80 % des boulangeries ne bénéficient pas du bouclier tarifaire. C'est une histoire technique de compteurs ; en tout cas, c'est les chiffres avancés par la filière. Et ils disent aujourd'hui : "Il faut qu'on rentre dans ce bouclier tarifaire, sinon on risque d'augmenter le prix du pain, peut-être une baguette à un euro cinquante vues les factures d'énergie qui explosent". Qu'est-ce que vous leur répondez ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Je leur réponds qu'on est là, ils le savent. Et d'ailleurs, pour info, je les reçois à nouveau la semaine prochaine et on va trouver des solutions ensemble. Je leur réponds aussi et ils le savent qu'un peu plus de 70 % de nos entreprises - nos PME, nos TPE - au moment où on se parle répercutent intégralement le prix de la hausse de l'énergie sur les biens de consommation.
JULES DE KISS
Mais là, ça voudrait dire une baguette à un euro cinquante, c'est ce qu'ils disent.
OLIVIA GRÉGOIRE
Oui, dans certains endroits de France ; dans d'autres, elle a déjà monté à un euro vingt, un euro trente. Nous avons effectivement un sujet avec les boulangers qui est lié au fait qu'ils sont éligibles, comme toutes les TPE de moins de dix salariés et de moins de deux millions d'euros de chiffre d'affaires dans ce pays, à ce qu'on appelle le TRV, Tarifs réglementés de vente. Il y a 1,5 million de TPE qui aujourd'hui en bénéficient. Juste pour ceux qui nous écoutent…
JULES DE KISS
Il y a quatre millions.
OLIVIA GRÉGOIRE
Non, il n'y a pas quatre millions de TPE, désolée ; il y en a un peu moins. En France, on a moins de trois millions de TPE. Et vous avez effectivement un niveau de consommation au-delà duquel vous n'êtes pas éligible. Moi, j'ai quand même à cœur, avant de parler de ceux qui ne sont pas éligibles, de rappeler qu'il y en a beaucoup qui sont éligibles et qu'ils ne l'utilisent pas. Appelez votre fournisseur d'énergie, demandez-lui si vous êtes éligible. Les boulangers, on a un sujet spécifique qui est qu'effectivement, ils ont parfois plusieurs fours, et donc ça peut dépasser le niveau de la consommation pour le TRV. C'est pourquoi je les reçois la semaine prochaine et qu'on va trouver des solutions ensemble. J'ai aussi à cœur de dire que j'étais la semaine dernière jour pour jour à Lyon, vous voyez, au moment même où je vous parle, où j'étais dans une boulangerie qui - à l'inverse - n'avait pas vu pour le coup sa facture d'énergie tripler parce qu'elle avait déjà mis en place des mesures de sobriété accompagnée par l'ADEME, et que pour le coup, avec son four qui est un four plus éco-responsable, elle n'avait plus que 8 % d'augmentation. Donc il y a aussi des boulangers qui s'en sortent parce qu'ils ont mis en place des mesures de sobriété énergétique il y a plusieurs mois. On a des boulangers qui sont dans la crise. S'il faut augmenter de quelques centimes le prix de la baguette, jusqu'à maintenant, de nombreux boulangers l'ont fait, on va les recevoir la semaine prochaine, on va trouver des solutions. Il y a pour chaque entreprise des solutions.
NEÏLA LATROUS
Olivier GRÉGOIRE, il n'y a pas l'idée d'étendre par exemple le bouclier tarifaire à l'ensemble des entreprises ?
OLIVIA GRÉGOIRE
C'est une très bonne question et c'est une question aussi de responsabilité ; si nous étendions le TRV, tarif réglementé de vente, à l'ensemble des entreprises de France, 4,1 millions, ça se compterait en dizaines de milliards. Moi je veux partager un chiffre avec vous : au moment où on se parle, on a mis 60 milliards d'euros sur le bouclier tarifaire pour les ménages, la même somme pour 2023, ça fait 120 milliards d'euros, on a annoncé avec Bruno LE MAIRE, pas plus tard que mercredi, un engagement très fort : l'État se porte garant - je ne sais pas si vous mesurez - et contre-garantit au plan bancaire l'ensemble des contrats …
NEÏLA LATROUS
Vous prenez la prime de risque en quelque sorte que les énergéticiens …
OLIVIA GRÉGOIRE
...l'ensemble des contrats qui sont signés mais je ne sais pas si on mesure ce que ça veut dire ! Ça veut dire que c'est très, très rare dans l'histoire financière du budget de l'Etat que l'Etat prenne une position à budget découvert, c'est-à-dire que nous nous engageons au nom de l'Etat et ça va coûter des milliards possiblement à être caution des petites entreprises qui aujourd'hui n'ont pas de caution bancaire pour négocier leur contrat !
NEÏLA LATROUS
Juste pour bien comprendre, ça veut dire que si elles ne peuvent pas payer leurs factures, c'est l'État qui paye !
OLIVIA GRÉGOIRE
Tout à fait, tout à fait ! C'est dire l'ampleur de la chose et c'est important de le dire. Donc le TRV, si on l'étendait comme certains le demandent, les mêmes qui nous reprochent d'ailleurs la non-maîtrise des dépenses publiques, ça coûterait quelques dizaines de milliards et vous arroseriez en réalité des PME ou des TPE qui n'ont pas forcément besoin d'aide. Nous, on a envie d'accompagner vraiment, on vient de parler des boulangers, ceux qui ne rentrent pas dans les mailles du filet mais on ne veut pas non plus accompagner des entreprises qui aujourd'hui s'en sortent très bien. Est-ce que la problématique d'une boulangerie de 6 personnes qui a 2 fours est la même qu'un cabinet de conseil où vous avez 4 personnes ? Non, pas du tout la même. Donc on veut cibler, éviter de faire n'importe quoi et de dépenser n'importe comment et si je peux me permettre, juste une image, on est en train de le mettre ce filet de sécurité - pendant le Covid on en a mis en place aussi et vous l'avez mentionné pour pas moins de 240 milliards d'euros quand même, pendant le Covid on a mis un filet de sécurité dont les mailles étaient extrêmement larges pour embarquer toutes les entreprises compte tenu de l'ampleur de la crise et peu à peu, vous avez remarqué, on a resserré les mailles du filet, peu à peu quand la situation s'améliorait. Là, c'est un peu l'inverse, c'est-à-dire qu'on a mis en place un dispositif avec des mailles resserrées, il y a des filières comme les boulangers qui ne s'en sortent pas bien, on va élargir les mailles du filet pour qu'ils rentrent dedans. Imaginez quand même qu'au moment où je vous parle, c'est important, la charge de la dette elle est à 51, un peu plus de 51 milliards d'euros, imaginez que toutes les entrepreneurs qui nous écoutent là payent l'impôt sur les sociétés. Si vous prenez l'impôt sur les sociétés de toutes les entreprises de France au moment où on se parle, ça ne paye que les intérêts de la dette française, est-ce que vous mesurez l'ampleur de ce que je vous dis ? Donc on a une responsabilité budgétaire, les taux d'intérêt montent- je ne sais pas si vous vous mesurez aussi 2,2 % les taux d'intérêt qu'aujourd'hui, on était à 0,1 % en janvier !
NEÏLA LATROUS
Juste rapidement vous évoquiez les dispositifs mis en place pendant le Covid, il y a notamment le prêt garanti par l'État, certaines entreprises disent : aujourd'hui avec l'augmentation des prix de l'électricité, je ne suis pas sûre de pouvoir rembourser mon PGE et notamment dans les secteurs que vous pilotez c'est-à-dire hôtellerie-restauration et dans le tourisme, est-ce qu'il est question d'effacer cette dette pour les entreprises ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Pas du tout, il n'est absolument pas question d'effacer des dettes qu'on peut rééchelonner. Ceux qui ont des problèmes avec leurs prêts garantis par l'État doivent contacter la médiation du crédit qui est présent dans tous les départements de France ; il y a dans toutes les préfectures de France, c'est important, un conseiller départemental à la sortie de crise, je les ai tous reçus à Bercy la semaine dernière.
NEÏLA LATROUS
L'idée, c'est de dire quoi ? Ce ne sera pas remboursé en quatre ans ?
OLIVIA GRÉGOIRE
L'idée, c'est qu'on rééchelonne, vous n'arrivez pas à payer votre échéance de PGE là au mois de décembre et bien contactez la médiation du crédit ou la préfecture, demandez ce que je vous dis le conseiller sortie de crise, on va rééchelonner par exemple certaines échéances fiscales, certaines échéances sociales pour que vous puissiez passer vos prêts garantis par l'État. Donc l'État est très souple, il accompagne une à une beaucoup d'entreprises au moment où on se parle pour rééchelonner les dettes et notamment certaines dettes sociales ou fiscales que l'État reporte à plus tard pour que les entrepreneurs puissent payer leur PGE.
JULES DE KISS
Olivia GRÉGOIRE, les Français se demandent un peu qu'elle va devoir être leur budget l'année prochaine pour l'énergie ; a priori ce sera plus 15 % c'est le plafond.
OLIVIA GRÉGOIRE
Je confirme oui !
JULES DE KISS
Il y a la hausse des taux d'intérêt, vous l'avez dit, la hausse des prix des carburants, on verra ce qu'il en est avec les dispositifs comme la ristourne etc., et puis il y a les prix de l'alimentation, des négociations sont en cours entre toujours les industriels, les distributeurs, ça date depuis le début de la guerre en Ukraine, elles ont été rouvertes à cause de la hausse des coûts, ça patine, ça s'éternise. Est-ce que vous savez aujourd'hui vers quoi on peut aboutir ? Quelle sera l'ampleur des hausses dans quelques semaines si un accord est trouvé ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Alors, je travaille beaucoup mais je n'ai pas de don de cartomancienne ! Donc je ne m'engagerai pas sur le prix du beurre ou de la farine qui effectivement sont en hausse ou des pâtes alimentaires dans les semaines qui viennent. La farine est en hausse parce que les meuniers ont un blé beaucoup plus difficile d'accès et donc par construction, la farine augmente et la baguette augmente !
JULES DE KISS
Mais c'est une affaire de compromis entre industriels, transformateurs ? Est-ce que vous les trouvez satisfaisantes aujourd'hui ces discussions ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Non mais j'entends ce que vous me demandez, figurez-vous que toutes les semaines Roland LESCURE, le ministre de l'Industrie moi-même et le ministre de l'Agriculture, parlons toutes les semaines avec l'ensemble des acteurs de la filière agroalimentaire et ce depuis la loi Egalim2. Ça patine, ça patine, il n'y a pas de bouton magique, ce sont des négociations extrêmement difficiles et suivies, j'ai quand même à cœur de dire que depuis des mois les petites et les moyennes entreprises arrivent à passer leur augmentation des prix et elles sont prises pour la plupart par la grande distribution ; depuis des mois, ça passe. Compte tenu de l'ampleur de la hausse pour certains secteurs, là, ça a plus de mal à passer, il faut se dire les choses. Donc effectivement nous on s'est engagé la semaine dernière notamment avec le ministre de l'Agriculture en disant par exemple grande surfaces : arrêtez les pénalités de retard, vous avez des petites et moyennes entreprises qui ont du mal à être approvisionnées qui peuvent livrer un jour ou 2 plus tard que prévu, ne les matraquez pas si vous me permettez avec des pénalités de retard.
NEÏLA LATROUS
Alors pour expliquer peut-être ce que c'est les pénalités de retard, c'est dans le cadre de contrats entre la grande distribution, les producteurs …
OLIVIA GRÉGOIRE
C'est comme dans la vraie vie de tout le monde, c'est-à-dire que tu dois livrer un produit et qu'en réalité .…
NEÏLA LATROUS
S'il n'est pas livré à temps ou s'il n'est pas …
OLIVIA GRÉGOIRE
Exactement …
NEÏLA LATROUS
...ou dans le format qui a été réclamé, alors, il y a des pénalités !
OLIVIA GRÉGOIRE
Exactement !
NEÏLA LATROUS
La grande distribution abuse parfois de ces grandes .…
OLIVIA GRÉGOIRE
Non, ce n'est pas qu'elle abuse, elle les met en place, et c'est normal, c'est un droit. Maintenant, dans la situation, compte tenu des causes, qui sont très extérieures aux PME qui le subissent aussi, c'est de bon aloi de les relever. Donc aujourd'hui on a beaucoup de distributeurs qui ont arrêté ces pénalités de retard et on a une grande distribution qui a passé pendant des mois les hausses de prix des PME. Là on a sur certains produits des difficultés, j'ai d'ailleurs diligenté quelques enquêtes grâce à la Direction générale de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, notamment sur le beurre qui est en augmentation, et sur lequel je souhaite avoir des explications beaucoup plus claires, explications que me demande d'ailleurs à peu près tous les jours la Première ministre qui est très engagée et qui suit de très près l'évolution des prix alimentaires.
JULES DE KISS
Autre enquête que vous aviez demandée il y a un mois environ sur la shrinkflation, le fait qu'on diminue des quantités d'un produit mais qu'on laisse le même prix, ce qui revient à des augmentations, mais consommateur ne s'en rend pas forcément compte.
OLIVIA GRÉGOIRE
Exactement.
JULES DE KISS
Vous avez eu des résultats ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Oui, on a eu des résultats, on a mené des enquêtes dans à peu près 350 points différents pendant plusieurs semaines. Nous avons à la suite de nos enquêtes, remarqué à peu près 10 % d'établissements qui n'avaient pas fait changer le prix au kilo quand la quantité du produit avait, elle, diminué. Donc, quand il y a contrôle et qu'on observe que ces établissements n'ont pas changé les étiquettes de prix au kilo, il y a une amende, elles ont été données, nous continuons à suivre ça, c'est à peu près 10 % des établissements, pour être très précis, c'est 38 établissements sur à peu près 340 contrôlés en un mois et demi.
NEÏLA LATROUS
Mais pour bien comprendre, c'est pas interdit de diminuer les quantités et de faire payer plus cher, il faut juste l'afficher, c'est ça qui est interdit.
OLIVIA GRÉGOIRE
Il faut juste que le consommateur soit alerté de façon claire et transparente.
NEÏLA LATROUS
Olivia GRÉGOIRE, vous avez peut-être vu cette nuit ce tweet de Jean-Luc MÉLENCHON, le leader de la Nupes, ex-candidat à la présidentielle : "Le 5 et 6 octobre 1789 – écrit-il – les femmes marchent sur Versailles contre la vie chère, et elles ramènent le roi, la reine et le dauphin de force à Paris, sous contrôle populaire – je le cite – faites mieux le 16 octobre". Le 16 octobre c'est le jour où est organisée la marche justement de la Nupes contre la vie chère. Est-ce que pour vous, ce qu'écrit Jean-Luc MÉLENCHON, c'est un appel à la violence ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Déjà, pendant que certains écrivent ça la nuit, il y en a d'autres qui travaillent au Parlement, donc je remarque qu'on n'a pas tous le même engagement au service du pays. J'ai envie de vous dire, avec un peu de poésie…
NEÏLA LATROUS
Faites mieux le 16 octobre.
OLIVIA GRÉGOIRE
… je vais citer René CHAR, il le disait bien mieux que moi "ce qui est excessif est insignifiant", et je pense que Jean-Luc MÉLENCHON devient de plus en plus excessif, et de fait de plus en plus insignifiant, et je crois que les Français sont en train de s'en rendre compte. On est dans des moments qui ne sont pas forcément évidents, avec ces problématiques économiques, c'est embêtant. On a aussi un peuple qui se bat pour sa survie, encore une fois à 3 heures et demie de Paris. Je pense et je crois pour avoir vu ce matin très tôt avant de venir vous voir, qu'Olivier FAURE lui avait répondu ; ça n'est pas un moment adéquat pour appeler à la violence, je vous dirai même que je crois qu'il n'y a pas de moment pour appeler à la violence, surtout dans son intérêt personnel.
NEÏLA LATROUS
Il doit s'excuser, il doit retirer ce tweet ?
OLIVIA GRÉGOIRE
Non, je ne crois plus au Père Noël et je ne crois pas aux vieilles lunes. Que Jean-Luc MÉLENCHON s'excuse de ses outrances, serait quand même un sacré scoop.
JULES DE KISS
Olivier FAURE qui disait : "Jean-Luc, tu peux faire mieux, il n'y aura ni pic ni fourche à cette manifestation le 16 octobre".
OLIVIA GRÉGOIRE
Et la chute du tweet est intéressante puisqu'il l'appelle aussi, il rappelle qu'effectivement nous ne sommes plus…
JULES DE KISS
… désordre social.
OLIVIA GRÉGOIRE
Exactement.
JULES DE KISS
Merci à vous, Olivia GRÉGOIRE.
OLIVIA GRÉGOIRE
Merci de l'invitation.
JULES DE KISS
Ministre chargée des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 octobre 2022