Entretien de Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des affaires étrangères, avec France 24 le 8 novembre 2022, concernant la Conférence de Charm el-Cheikh de 2022 sur les changements climatiques.

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Média : France 24

Texte intégral

Q - Madame Colonna, bonjour, merci de nous accorder cette interview exclusive pour France 24. Cette COP à Sharm el-Sheikh se déroule dans une conjoncture politique particulière, voire très compliquée. Cette conjoncture freine-t-elle les négociations climat ?

R - Non, au contraire, je crois qu'il est important de resserrer les rangs parce que tout le monde voit que la solidarité est indispensable pour arriver à préserver les ambitions de l'accord de Paris. Cela veut dire qu'il faut continuer à demander aux pays à prendre des engagements de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Il faut aussi trouver les moyens d'aider les pays qui sont moins développés, et qui ne sont pas autant responsables que les pays développés des émissions existantes, à faire leur transition écologique, et surtout à la réussir.

Q - Justement, vous avez dit que cette COP devait être "solidaire". Restons sur le mot "solidaire". Est-ce que, justement, la France est prête à faire de nouveaux engagements financiers et à s'ouvrir sur cette question des pertes et des préjudices, qui sont les réparations financières dont ont besoin les pays les plus vulnérables ?

R - C'est une des questions qui sera traitée dans la négociation qui s'ouvre, puisque la COP s'est ouverte hier et dure 15 jours. D'abord, je dois dire que la France tient ses engagements, aussi bien ses engagements de réduction des gaz à effet de serre que ses engagements financiers. Tout le monde ne le fait pas. Je n'entre pas dans les détails. Mais la France et l'Union européenne - qui tiennent leurs engagements - appellent les pays qui ne le feraient pas à le faire vite, et surtout à faire plus, puisque nous sommes encore au-delà des objectifs souhaitables.

En effet, dans les discussions, il y a aussi la question de l'aide que nous devons apporter pour que les pays qui sont en développement et n'ont pas les mêmes ressources que les pays développés trouvent les moyens de ne pas faire ce que nous avons fait, c'est-à-dire de se développer en respectant les critères écologiques. Et puis, ils ont parfois subi des dommages. Cette question des mécanismes que nous pourrions mettre en place pour les aider à avoir accès aux financements internationaux - aussi bien les financements des grandes institutions financières internationales, les bailleurs internationaux, que ceux du secteur privé - fait l'objet de débats. Nous avons progressé hier. Il y a un certain nombre d'idées - dont le Président de la République a parlé à ses collègues - qui vont permettre de créer des mécanismes de solidarité, je reviens sur le mot, et d'aider ces pays à obtenir des financements plus aisément qu'auparavant.

Q - Je voudrais parler de la question des droits de l'Homme. Vous savez que l'âme de ces COP, c'est les manifestations des ONG, les sit-in, les grèves, etc. Les ONG disent tout simplement, ici, en Egypte, rien n'est possible, le système est trop répressif.

R - L'âme de ces COP, c'est aussi les ONG et la société civile. Et il le faut. Il faut que tout le monde se mobilise. Cela n'est pas que ça, c'est aussi les gouvernements qui font leur travail et que l'on appelle à travailler encore plus. C'est l'objet des négociations ici. Nous parlons de tout, également des droits de l'Homme. Le Président de la République a rencontré hier le Président Sissi. J'ai assisté à son entretien. Et il a évoqué - comme il le fait à chaque fois - la question des libertés publiques, qui doit être abordée régulièrement et amicalement avec notre partenaire égyptien. Je l'ai fait moi-même, pas plus tard qu'hier, avec le ministre égyptien des Affaires étrangères. Je le fais à chaque fois, nous avons un dialogue et nous espérons qu'il progressera. Merci beaucoup.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 novembre 2022