Texte intégral
ADRIEN GINDRE
Bonjour Olivia GREGOIRE.
OLIVIA GREGOIRE
Bonjour Adrien GINDRE.
ADRIEN GINDRE
Merci beaucoup d’avoir accepté notre invitation, en effet, en cette journée particulière pour LCI, avec ce débat à 20h30 ce soir, le seul débat entre les trois candidats à la présidence des Républicains, on en parlera dans un instant, mais d’abord un sujet qui vous tient à coeur et qui est sur la table en ce moment, c’est celui du partage de la valeur, la question de savoir comment est-ce qu’entre actionnaires et salariés on peut avoir une plus juste répartition. Une question de calendrier, peut-être tout d’abord, est-ce qu’il y a encore une possibilité pour que ce sujet aboutisse pour 2023, dans les semaines à venir, ou en réalité c’est un sujet de moyen et de long terme qui sera discuté en 2023 ?
OLIVIA GREGOIRE
C’est un sujet structurel sur lequel, pour la part, je travaille depuis trois, quatre, cinq ans, on a fait beaucoup de choses déjà dans la loi PACTE, il y a quelques années, vous vous en souvenez, en 2019, je ne rentre pas trop dans les détails mais, on a beaucoup simplifié en fait sur la participation et l’intéressement, notamment du côté des employeurs.
ADRIEN GINDRE
Vous-même reconnaissez qu’il faut faire encore plus aujourd'hui.
OLIVIA GREGOIRE
Il faut faire encore plus, et pas que, je dirais dans la simplification, peut-être faut-il réfléchir compte tenu du décalage entre aujourd'hui la rémunération du capital et la rémunération du travail. On a, dans certains cas, et ça a fait l’objet de débats passionnants lors du projet de loi de finances, des superdividendes, d’entreprises qui principalement en raison de la conjoncture et de la crise, ont versé à leurs actionnaires des dividendes extrêmement importants.
ADRIEN GINDRE
Mais il y a encore eu des amendements, pardon je précise pour nos téléspectateurs, ce week-end, au Sénat, qui ont été repoussé…
OLIVIA GREGOIRE
Rejetés.
ADRIEN GINDRE
Ça veut dire que le sujet il est toujours à traiter ?
OLIVIA GREGOIRE
Le sujet il est à traiter, le sujet, je pense en mon nom personnel, qu’il doit être traité. J’ai trouvé intéressant la prise de parole de la Première ministre sur ce sujet il y a quelques heures, sur le dividende salarié, elle ne remettait pas en question le fondement de l’approche, mais elle disait à juste titre, et là-dessus j’adhère, qu’il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Moi je l’ai écrit en 2020 le dividende salarié, on est fin 2022, on a aujourd'hui une situation qui justifierait qu’on approfondisse, et c’est pourquoi, plutôt que de confondre vitesse et précipitation en allant, si vous me permettez l’expression, fourrer un amendement, dans le projet de loi de finances, en deuxième lecture, nuitamment, comme les députés ne l’aiment pas, et à juste titre, je pense qu’il est de bon aloi de réfléchir, et c’est ce que Stéphane SEJOURNE a annoncé, on va réfléchir au sein de Renaissance…
ADRIEN GINDRE
Le patron du parti Renaissance.
OLIVIA GREGOIRE
Pour faire des propositions très opérationnelles, qu’on discutera avec les partenaires sociaux, c’est pareil, ce n’est pas des choses…
ADRIEN GINDRE
A quel horizon ?
OLIVIA GREGOIRE
L’année prochaine je ne doute pas qu’on avance, mais ça suppose aussi qu’on avance les partenaires sociaux, et qu’on ne vienne pas interférer des négociations qui sont en cours.
ADRIEN GINDRE
Qui discutent jusqu’en janvier un sujet.
OLIVIA GREGOIRE
Exactement.
ADRIEN GINDRE
Juste une question. Vous êtes, je le disais, en charge des PME, en dessous de 50 salariés les règles ne sont pas les mêmes, est-ce que vous vous souhaitez qu’il y ait une obligation pour toutes les entreprises, y compris sous les 50 salariés ?
OLIVIA GREGOIRE
Comme je suis une femme qui aime la cohérence, je ne vous mentirais pas, je suis favorable à ce que, la participation notamment, soit plus facile à distribuer dans les PME. On a aujourd'hui des petites, des moyennes entreprises, qui ont beaucoup distribué de prime Macron, ce qui est un signal intéressant, 730.000 salariés pour une prime de plus de 700 euros, majoritairement des PME, ce qui veut bien dire que les dirigeants de PME se servent de ces outils, quand ils en ont la possibilité, pour pouvoir mieux rémunérer les salariés, je ne crois pas du tout qu'il faille la même approche, et donc le même rythme, la même cadence, sur les très grandes entreprises, dont je vous parlais il y a 2 minutes, qui ont fait des bénéfices extra, exceptionnels on va dire, et le quotidien de nos PME, dont on va parler, dont les marges sont réduites, dont les négociations commerciales sont difficiles, et qui aujourd'hui s'apprêtent à vivre en pleine figure la crise de l'inflation l'année prochaine. Donc je pense que les PME ce n’est pas le même rythme que les grandes entreprises, mais dans l'absolu oui au partage de la valeur.
ADRIEN GINDRE
Alors justement, vous y faites allusion, il y a une hausse des prix de l'énergie, depuis samedi est ouvert un guichet, par le gouvernement, pour les factures de septembre et octobre, à deux conditions, que la hausse des prix de l'énergie subie soit d'au moins 50% sur un an, et que la facture d'énergie représente au moins 3% du chiffre d'affaires. Quand on remplit ces critères on a droit à combien, est-ce que le gouvernement prend en charge toute la hausse subie par l'entreprise ?
OLIVIA GREGOIRE
Le gouvernement prend en charge une partie de la hausse, ça dépend en réalité de votre exposition. à la crise énergétique, ça ne dépend pas, contrairement aux autres crises, c'est en ça que c'est inédit, et que c'est parfois difficile à Bercy, il faut le comprendre aussi, c'est que contrairement par exemple au Covid, même si je ne compare pas ce qui n'est pas comparable, vous n'avez pas ici, en fait de raisonnement sur les entreprises de moins de 10 salariés, les entreprises de moins de 50 salariés, ce ne sont pas les mêmes cases que d'habitude, la case aujourd'hui c'est, je dirais peu importe votre nombre de salariés ou votre chiffre d'affaires, quel est votre degré d'exposition à la hausse de l'énergie.
ADRIEN GINDRE
…Vous dites si ce n’est pas 100% de la hausse, il y a quand même des entreprises qui aujourd'hui sont en danger de mort.
OLIVIA GREGOIRE
Alors, de toute façon, de tous temps, il y a des entreprises en danger, c'est l'histoire de la vie économique, les défaillances font partie de la vie économique, il ne faut pas paniquer, on a aujourd'hui 38.000 défaillances, on était à 54.000 en 2019, donc on est très en deçà encore, mais ce n'est pas anormal, et la CPME le sait bien, qu’à la suite de la période du Covid, où on a été un peu congelé, le rythme économique reprenant certaines entreprises qui ont été aidés ne passent pas le cap, ça fait partie…
ADRIEN GINDRE
Donc vous dites ils doivent accepter ces faillites.
OLIVIA GREGOIRE
Non, mais le savent aussi bien que moi, ce sont des entrepreneurs du quotidien, ils savent très bien qu'il y a des entreprises… plus d'entreprises se créent tous les jours, que d'entreprises se meurent, c'est ça qui compte. Moi j'ai envie de dire aux syndicats, et notamment la CPME, qui a été avec nous, c'est important de dire qu'en termes de méthode nous n'avons pas décidé, dans un coin d'un bureau de Bercy avec Bruno LE MAIRE, pour leur dire ensuite " voilà les aides ", on a décidé ensemble. On leur a dit, il y a trois semaines, un mois, il y a deux options à peu près qu'on peut travailler, est-ce que vous préférez la première, est-ce que vous préférez la deuxième ? C’est la deuxième qui a été choisie…
ADRIEN GINDRE
Ils ont choisi que ce soit le plus large pour tout le monde.
OLIVIA GREGOIRE
C’est l’amortisseur, et donc on a même été, j'ai à coeur de le dire ce matin, dans le détail, le diable est dans le détail, dans la politique aussi, pour vérifier que le questionnaire mis en ligne soit facile. Je vous donne un exemple très simple. Vous avez aujourd'hui besoin, en vous connectant sur le site impots.gouv.fr, de votre facture d'énergie, de votre RIB, et d'une déclaration sur l'honneur attestant la véracité des informations, ça ce n’était pas le cas avant, les déclarations sur l'honneur j'ai beaucoup poussé pour qu'il y en ait, et Bruno LE MAIRE a accepté, pour qu'on fasse confiance aux entrepreneurs, et que ce ne soit pas une usine à gaz, et donc ces simplifications ont été faites avec la CPME, avec l’U2P, avec le MEDEF.
ADRIEN GINDRE
Là, je le disais, c'est sur les factures de septembre-octobre, il y aura la même chose pour novembre-décembre, et à partir du 1er janvier qu'est-ce qui se passe, on continue pareil ?
OLIVIA GREGOIRE
Non, à partir du 1er janvier c'est l'amortisseur électricité, qui a été choisi et validé avec les syndicats, qui, pour toutes les entreprises de toute façon sera intéressant puisqu'elles n'auront rien à faire, c'est quand même le plus facile pour elles, c’est qu’elles n’aient rien à faire, il n’y aura pas de démarches à faire, contrairement à jusqu'à fin décembre, sur leur propre facture d'énergie, dans ce qu'on appelle un couloir de primes, c’est assez simple, et vos auditeurs vont comprendre, c'est-à-dire entre 325 euros le mégawatheure, et 800 euros le mégawatheure, l'Etat va prendre la moitié de la dépense d’énergie. Ça peut représenter…
ADRIEN GINDRE
Mais ça va coûter combien l’Etat ?
OLIVIA GREGOIRE
Ça va coûter à l’Etat 10 milliards d'euros, c’est une enveloppe de 10 milliards d'euros que nous mettons sur la table aujourd'hui, qui est loin de représenter tout ce que nous faisons pour les entreprises, et j'ai à coeur de partager le fait que ce qu'on fait pour les entreprises, 2021-22-23, représente 32 milliards d'euros, juste les entreprises…
ADRIEN GINDRE
Sauf qu’elles vous disent « vous faites beaucoup plus pour les ménages, on est un peu laissé de côté par rapport aux ménages, vous avez fait le choix des ménages. »
OLIVIA GREGOIRE
Alors, gouverner c'est souvent choisir, c'est aussi prévoir. On a fait des choix importants qui consistent à soutenir la demande, 100 milliards d'euros le bouclier tarifaire pour protéger les Français, 2021-22-23. Je vais vous dire quelque chose d'assez simple. Oui, on a fait un choix, on a fait le choix que les gens continuent à aller au restaurant, on a fait le choix, et on va en parler, que les gens continuent à réserver leurs vacances pour Noël, on a fait le choix que les gens continuent à faire leurs courses le week-end, c'est bien joli d'avoir des magasins remplis, mais si vous n’avez personne pour acheter on aurait eu un autre type de problème et je ne doute pas que les syndicats s'en seraient plaints aussi, donc nous avons fait 126 milliards d'euros pour les ménages, 32 milliards pour les entreprises, je pense que, je sais qu'on a vécu des périodes qui font que les milliards, on dirait presque des euros désormais, mais enfin 10 milliards d'euros ce n'est pas anodin, et je ne doute pas que les oppositions qui se plaignent, notamment de la disparition de l'ISF depuis quelques années, comme un leitmotiv, n'oublieront pas de signaler que ça représente plus de trois fois l’ISF.
ADRIEN GINDRE
Mais, on remarque, Olivia GREGOIRE, que les chiffres que vous énoncez sont certes conséquents, mais les Allemands c'est un plan de 200 milliards, les Américains un plan de 370 milliards…
OLIVIA GREGOIRE
Alors, comparons le comparable, on prend l’Allemagne…
ADRIEN GINDRE
Je précise juste un tout petit point, Olivia GREGOIRE, pour que nos téléspectateurs aient toutes les infos, soir Bruno LE MAIRE dîne avec son homologue allemand, ce soir le président de la République reçoit à dîner à l'Elysée les 49 plus grandes entreprises européennes, pour leur dire « restez chez nous, investissez chez nous », il y a quand même une crainte du gouvernement, Olivia GREGOIRE, que nos entreprises délocalisent une partie de leur production ailleurs là, où les prix de l'énergie sont plus favorables.
OLIVIA GREGOIRE
Alors, vous avez totalement raison, Adrien GINDRE, et c'est une crainte depuis 2017, et plutôt que d'avoir peur ou de craindre, la peur n'évitant toujours pas le danger, on agit. 100 milliards d'euros le plan de relance, la réindustrialisation, à nouveau des emplois industriels, des usines qui se créent, donc je dirais la crainte, non, l'appréhension, non plus, la détermination à faire en sorte que ça n'arrive pas et qu'on réindustrialise notre pays, supprimer les impôts de production à hauteur de 8 milliards d'euros ce sont des gestes majeurs pour les industriels, donc…
ADRIEN GINDRE
Mais, on a les moyens de faire autant que les Allemands et les Américains par exemple ?
OLIVIA GREGOIRE
Alors je vais vous dire, je reste sur l'Allemagne, pour comparer notre voisin. Au moment où on se parle, tout le monde me parle des 200 milliards allemands, on ne sait pas, et vous le savez très bien, comment ils vont être dispatchés, ventilés, est-ce que ça va être pour les ménages, pour les entreprises, moi je préfère… on ne lâche pas la proie pour l'ombre. Vous avez aujourd'hui 200 milliards, dont on parle, et vous avez 126 milliards, et 32 milliards pour les entreprises, qui sont déjà injectés chez nous, moi je préfère ce qui est déjà injecté chez nous, on va voir ce que font les Allemands, chacun sa stratégie, mais pendant qu'on se parle là, nous, nos ménages, à la fin du mois, c'est +4% sur la facture d'énergie, les ménages Allemands, pendant qu'on parle, c'est +120% sur leur facture d'énergie, donc chacun a sa stratégie, on n’a pas à rougir de la nôtre.
ADRIEN GINDRE
Le fait est qu’il y a déjà aujourd’hui, il y a l’exemple de l’entreprise SAFRAN, c’est un exemple parmi d'autres, qui a déjà dit " on met en pause un projet, qui était un projet pour un nouveau site, à Feyzin dans le Rhône, pour des disques de freins carbone, en pause pour 18 à 24 mois, le temps d'y voir plus clair sur les prix de l'énergie ", et ils vont probablement utiliser une partie de leurs usines aux Etats-Unis, ou en Malaisie, pendant ce temps-là. Quel levier vous avez contre ça, parce que là vous dites la peur n'évite pas le danger, mais là c'est bien la peur qui fait qu'ils se mettent en pause en France ?
OLIVIA GREGOIRE
Alors, déjà on est plusieurs, et je ne voudrais pas prendre la mission de mon ami Roland LESCURE qui se bat jour et nuit sur l'industrie, on est là sur des entreprises de plus grande taille, ça ne vous a pas échappé, donc on a deux autres dispositifs d'accompagnement, qui vont jusqu'à 50 et 100 millions d'euros, c'est pareil, on a doublé tous les montants, tout ça n'est pas anodin, pour faire en sorte qu'on puisse les accompagner, après vous me parlez de SAFRAN, moi je peux vous parler par exemple de ETEX où j'étais, dans l'Oise, il y a quelques jours encore, un investissement de 14 millions d'euros qui a été soutenu pour partie par le plan de relance, qui va permettre à cette entreprise de produire 15% de plus de plâtre, tout en consommant 20 à 30% d'énergie en moins, et donc ils vont embaucher et produire plus. Donc, il y a des entreprises qui font ces choix-là, il y en a d'autres, dont je viens de vous parler, qui aujourd'hui investissent, en attendant…
ADRIEN GINDRE
Mais vous n’êtes pas inquiète sur nos perspectives, c'est-à-dire la croissance à 1% l’année prochaine, le déficit à 5 %, tout ça ça tient ?
OLIVIA GREGOIRE
Vous savez, comme moi, pour faire beaucoup d'interviews économiques, que la conscience est un actif économique, ma mission, en tant que ministre, ce n’est pas d'avoir des états d'âme, ma mission en tant que ministre c'est de tout faire pour entendre ce que nous disent les entrepreneurs, entendre la réalité des choses, faire des cas types, mouliner ces aides pour voir ce que ça leur apporte, et avoir la lucidité de dire ça suffit, ça ne suffit pas, qu'est-ce qu'on pourrait faire de mieux, voilà, moi je ne suis pas dans l'émotion, j'essaye d'être dans l'action et je crois que c'est ma mission.
ADRIEN GINDRE
Le gouvernement travaille aussi, et votre collègue du Travail, Olivier DUSSOPT, va le présenter aujourd'hui aux organisations syndicales et patronales, les futures règles de l'indemnisation chômage, si la réforme entrait en vigueur aujourd'hui est-ce que vous diriez on est dans une bonne conjoncture, donc on va indemniser moins longtemps, on est dans une mauvaise conjoncture, donc on indemnise plus longtemps ?
OLIVIA GREGOIRE
Je vous dirais que c'est une question très intéressante et je ne doute pas qu'Olivier DUSSOPT y réponde, si je vous parle aujourd'hui de la conjoncture à l'aune des chiffres, et pas les prédications et du marc de café, je pense que nous sommes plutôt dans une conjoncture qui résiste, elle n'est pas facile, elle est préoccupante, mais les entreprises françaises, l’économie française résiste, je vous donne un exemple, +2,3% d'investissement des entreprises au troisième trimestre de l'année, la croissance qui n'est pas encore, qui n'est pas négative, qui n'est pas à zéro, donc on a aujourd'hui une économie qui résiste plutôt. On a en revanche une réalité, c'est qu'on a un risque extrêmement fort, qu’on appelle systémique, sur ces pénuries de main-d'oeuvre, moi j'ai en charge les PME, vous le disiez, le tourisme, il y a beaucoup d’hôtels, de cafés, de restaurations, aujourd'hui vous avez 200.000 personnes qui manquent sur ces métiers-là. Alors, d'aucuns sur les plateaux, ou au Parlement, font des effets de manche, des… en attendant moi je vois des entrepreneurs, des cafetiers, des restaurateurs, qui tous les jours me disent « Madame GREGOIRE, l'énergie c'est compliqué, mais le vrai problème c'est que je suis obligé de fermer le jeudi ou le vendredi parce que je n’ai pas de serveur, ou je n’ai pas de cuisinier. »
ADRIEN GINDRE
Et ces entreprises-là elles vont être concernées par le projet de loi immigration, pour des titres de séjour pour les métiers en tension ?
OLIVIA GREGOIRE
Tout à fait, on travaille en ce moment, avec les équipes de Gérald DARMANIN, avec Olivier DUSSOPT, et surtout avec les principaux concernés, dans les semaines qui viennent, pour voir, parmi tous ces métiers que je viens de vous citer, lesquels sont effectivement sous tension, ceux que je viens de citer, hôtellerie, café, restauration, sont véritablement sous tension, et donc on a…
ADRIEN GINDRE
Donc on va faire venir des personnes de l’étranger pour pourvoir les postes ?
OLIVIA GREGOIRE
Non, on va déjà voir le nombre de personnes d'origine étrangère qui travaillent sur le sol français dans des situations, on va dire plus ou moins irrégulières, et que nous devrions pouvoir embarquer, avec des titres de séjour, métiers sous tension, pour éviter qu'ils ne se retrouvent dans l'irrégularité. Mais vous savez, j'écoute beaucoup, notamment l'extrême droite au Parlement, certains poussent des cris d'orfraie à l'idée de ces mesures-là, mais encore une fois la politique c'est de la lucidité et du pragmatisme.
ADRIEN GINDRE
Mais ils vous disent « on a des Français au chômage, aujourd'hui en France c’est encore 7,3 % de chômage… »
OLIVIA GREGOIRE
Et on agit sur les deux leviers.
ADRIEN GINDRE
Ils disent " utilisons ces Français-là qui sont disponibles. " Ça ne vous interpelle pas de se dire on fait venir une main-d’oeuvre étrangère pour des postes où on a des Français au chômage ?
OLIVIA GREGOIRE
Non, parce qu’on fait les deux, et que je méfie des caricatures, qui sont très faciles. Un, on va régulariser des gens qui sont, pas des centaines de milliers de personnes, qui sont déjà en poste, dans le bâtiment, dans la restauration, dans l'hôtellerie, sur des postes qui vacants, ça dérange sûrement l'extrême droite, mais vacants ça veut dire aucun Français ne veut venir y bosser, et que donc…
ADRIEN GINDRE
Mais peut-être c’est une question de salaires ou de conditions de travail.
OLIVIA GREGOIRE
Pas que, l'hôtellerie, la restauration, a augmenté de 16% ses salaires, ça n’a pas résolu l'entièreté de la crise, donc il y a aussi des métiers, des jobs, et on peut se mettre les petits doigts comme ça pour ne pas regarder, mais que les Français n'ont pas envie de faire. Il y a aujourd'hui des personnes qui sont en situation irrégulière, qu’on va essayer de consolider sur ces métiers-là, pour éviter de fermer des entreprises, et en parallèle on va durcir, et Olivier DUSSOPT, vous l'avez dit, va annoncer, les règles relatives à l'indemnisation chômage et faire en sorte que, non pas sur les montants, ça c'est très important, d'indemnisation, mais sur la durée, on puisse encourager les gens plus vite à reprendre du boulot concevable quand ça va bien.
ADRIEN GINDRE
Vu ce qu’on vient de se dire, les métiers en tension, les établissements qui ferment, etc., vous êtes aussi en charge du Tourisme, en termes de bilan et perspective comment ça se passe, la Toussaint qui est passée, Noël qui va venir, est-ce que là la conjoncture est bonne ?
OLIVIA GREGOIRE
La conjoncture est soutenue, on a un peu plus d'un quart des Français, ce qui est la moyenne, qui est parti en vacances à la Toussaint, on a, en perspective de Noël, 55% des Français qui envisagent de partir à Noël, c'est le chiffre moyen que nous avions en 2019, avant le Covid, et pour vous donner un chiffre tout frais, au 10 novembre on a +7% de réservations, de fréquentation, annoncées sur les vacances de Noël, donc le secteur du tourisme résiste, les acteurs résistent, même si eux aussi ils manquent beaucoup de main-d'oeuvre et qu’ils attendent des politiques, non pas des gesticulations, des partis pris moralistes, mais des solutions, avec de la main-d’oeuvre étrangère, et avec des chômeurs qu'on ramène vers ces métiers en tension, ce qu'on fait déjà depuis un an et demi avec Olivier DUSSOPT.
ADRIEN GINDRE
Un petit mot justement sur la capacité à se déplacer, le gouvernement a une remise à la pompe qui a été diminuée, qui va s'étendre à la fin de l'année, la Première ministre a dit qu'on allait concentrer cette aide à partir du 1er janvier 2023 sur certaines populations, elle dit " la moitié des ménages va en bénéficier ", est-ce que vous savez déjà dans quel montant et selon quels critères ?
OLIVIA GREGOIRE
Je ne sais pas encore, je sais en revanche que ce dispositif dit " gros rouleurs ", que les équipes du ministre des Comptes publics sont en train d'affiner, là aussi c'est facile d'en parler, pas forcément facile à mettre en oeuvre, concernera à la fois ceux qui sont le plus exposés en matière de distance, j'imagine, et comme d'habitude, avec notre gouvernement, aussi les plus fragiles et les plus exposés à la hausse des prix.
ADRIEN GINDRE
C’est dans un peu plus d’un mois, les annonces c'est pour quand ?
OLIVIA GREGOIRE
Ça il faut demander, pour le coup, à la Première ministre, dont je ne déflorerai pas les annonces, ça ne vous échappera pas, mais je ne doute pas que fin décembre-1er janvier on sera, et prêt et disposé à présenter le dispositif.
ADRIEN GINDRE
Alors, je le disais tout à l’heure en introduction, ce soir il y a un débat sur LCI à 20h30 entre les candidats à la présidence des Républicains, ce sera le seul débat entre Eric CIOTTI, Aurélien PRADIE et Bruno RETAILLEAU, il y a aussi un enjeu pour vous, il y a quelques jours le chef de l'Etat parlait encore d'une alliance avec les Républicains, est-ce qu'elle est toujours d'actualité cette alliance ?
OLIVIA GREGOIRE
Moi ce que je vois c'est que sur un certain nombre de textes, de façon encore une fois très pragmatique, un certain nombre de LR, je ne mets pas tous les LR dans le même panier puisqu’il y a 50 nuances de LR, ils ne sont pas vraiment dans le même panier, à voir les LR du Sénat, les LR de l'Assemblée, il y a beaucoup de diversité pour être aimable, et donc je vois, jusqu'à la semaine dernière avec la Loi LOPMI, du ministre de l'Intérieur, que sur beaucoup de points…
ADRIEN GINDRE
Loi de programmation du ministère de l’Intérieur.
OLIVIA GREGOIRE
Les LR votent plutôt les propositions qui sont faites par le gouvernement, donc si ça permet de faire avancer une majorité de projets dans les prochains mois, moi j'y suis favorable, plus c’est à voir.
ADRIEN GINDRE
Mais quand vous dites majorité de projets, vous pensez qu'un contrat de gouvernement, dans la mandature en cours, ça reste possible, une fois que leur élection interne sera passée, est-ce que… ?
OLIVIA GREGOIRE
Voilà, le préalable vous venez de le dire, là il y a pas mal, et on va voir ce soir la qualité des débats sur votre chaîne, merci de l'organiser parce que c'est important pour la vie politique, il y a beaucoup de coups de menton, de propositions, et tout, donc je ne suis pas sûre qu'elles seront exactement les mêmes quand l'élection interne sera passée. Il faut voir en tout début d'année prochaine, une fois qu'ils auront un nouveau leader, que les sujets, et donc les orientations et les sensibilités auront été tranchées, ce qu’il est possible de faire, je ne m'avancerai pas en amont parce qu'on a des personnalités très différentes, aux programmes très différents, et donc aux impacts différents.
ADRIEN GINDRE
Ce sera plus facile de travailler avec l'un ou avec l'autre, entre Eric CIOTTI, Aurélien PRADIE, Bruno RETAILLEAU ? Par exemple, vous le disiez, les sénateurs ne se comportent pas toujours la même manière, Bruno RETAILLEAU au Sénat, ses sénateurs viennent de voter la loi sur les énergies renouvelables, là où les députés Républicains disent hors de question.
OLIVIA GREGOIRE
Je ne sais pas, parce qu’encore une fois je me méfie pas mal des apparences pendant les débats, ce qui m'importe c’est le réel, le programme, une fois que la personnalité sera détachée, peu importe le leader, il nous faudra avancer et faire avancer le pays, donc je vous dirais que c’est…peu importe l'atterrissage, ce qui nous importe à nous, dans la majorité, au sein du gouvernement, c'est de continuer à légiférer, à faire avancer le pays, donc on verra.
ADRIEN GINDRE
Vous-même vous avez travaillé avec des personnalités de droite, Jean-Pierre RAFFARIN, Xavier BERTRAND, est-ce qu'on peut dire aujourd'hui que vous êtes une femme de droite ?
OLIVIA GREGOIRE
Moi je suis plutôt une macroniste et je suis plutôt une libérale, mais après je ne le vis pas comme un défaut, je viens plutôt, vous citiez Jean-Pierre RAFFARIN, on en parle souvent avec cet ancien Premier ministre que j’aime beaucoup, je suis plutôt une libérale, sociale mais libérale, et donc le libéralisme en France est plutôt situé à droite, mais il y a aussi des libéraux de gauche.
ADRIEN GINDRE
Mais est-ce que vous considérez que votre droite, alors libérale, elle est irréconciliable avec ces droites-là ? Eric CIOTTI, par exemple, lui il dit " pour 2027 il faudrait Laurent WAUQUIEZ " candidat, on le sait, Emmanuel MACRON ne pourra pas se représenter, il a fait ses deux mandats, c’est la règle, est-ce que vous vous sentez irréconciliable avec Laurent WAUQUIEZ ?
OLIVIA GREGOIRE
C’est une question complexe un lundi matin. C’est une question, et d’ailleurs ça doit se voir à l’antenne, d’ailleurs que je ne me suis jamais posée, c’est dire l’ampleur de la difficile réconciliation. Moi je n’ai jamais été de cette droite de Laurent WAUQUIEZ, encore une fois je viens plutôt d’une droite, qui avait d’ailleurs quitté les états-majors de droite, les plus jeunes ne les connaissent pas, mais ils s’appelaient Alain MADELIN, c’était Démocratie-Libérale, ce n’est pas vraiment le RPR de l’époque, donc vous voyez, je viens plutôt d’une droite libérale qui n’est pas dans les appareils qui sont décrits aujourd'hui. On verra, je pense… je vais vous dire Adrien GINDRE, j’ai peu d’expérience politique, j’ai été élue en 2017, ministre en 2020, ça fait deux ans et demi, et je vous le disais juste avant, il s’est passé tellement de choses en deux ans et demi, entre le Covid qu’on n’avait pas pu prévoir, cette crise énergie, l’inflation, vous savez gouverner aujourd'hui c’est aussi, bien sûr donner de la perspective, mais c’est gérer au quotidien beaucoup de problèmes pour des clientèles très différentes, qui sont très exposées, ça prend 200 % de ta journée, de la mienne, nuits comprises, week-ends compris, toutes ces questions fort intéressantes, et je sais que vous continuerez à me les poser, et je vous en remercie, mais j’y répondrai le moment voulu, on n’est qu’en 2022.
ADRIEN GINDRE
Eh bien merci d’avoir été là ce matin, en ce 21 novembre 2022…
OLIVIA GREGOIRE
Merci.
ADRIEN GINDRE
On ne manquera pas effectivement d’en reparler par la suite et on en parlera ce soir bien sûr à 20h30 avec ce seul débat entre les trois candidats à la présidence des Républicains.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 22 novembre 2022