Texte intégral
Mme la présidente.
L’ordre du jour appelle le débat sur l’état de l’école de la République. La conférence des présidents a décidé d’organiser ce débat en deux parties : dans un premier temps, nous entendrons les orateurs des groupes, puis le Gouvernement ; dans un second temps, nous procéderons à une séance de questions-réponses.
(…)
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Je vous demande de bien vouloir l’écouter dans le calme.
Mme Caroline Parmentier.
J’ai aussi entendu des injures sexistes ! Vous consulterez le compte rendu, madame la présidente.
Mme la présidente.
Vous pouvez compter sur moi, madame la députée, je le ferai.
M. Pap Ndiaye, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Vous me permettez aujourd’hui de revenir sur l’action réalisée depuis sept mois et, au-delà, sur ma vision de l’école.
L’école laïque, gratuite et obligatoire est le symbole le plus vif et le pilier essentiel de notre République. C’est son histoire et son évolution, son identité et sa raison d’être. Notre école est notre bien commun. Le droit inconditionnel à l’éducation pour tous les enfants, quelle que soit leur nationalité, fait partie de cette histoire.
L’engagement de ses personnels est remarquable : au quotidien pour faire progresser les élèves, lors de la crise sanitaire en préservant la mission d’éducation contre vents et marées, face aux grands enjeux de notre monde, aux mutations de la société, à la remise en cause du principe de laïcité, aux demandes multiples de l’institution, des élèves et des parents et parfois aux pressions et aux menaces.
Il est impératif de réaffirmer les valeurs de la République à l’école. L’émancipation voulue par l’école républicaine ne se négocie ni sous la pression religieuse ou politique ni sous l’influence préoccupante des réseaux sociaux. Donner à tous les élèves accès au savoir et à la culture, c’est être vigilant vis-à-vis des dangers et des défis de notre époque.
Les atteintes à la laïcité sont sanctionnées et la loi de 2004 fermement appliquée. La laïcité est d’abord une liberté, celle de l’émancipation par le savoir et par le raisonnement. Les formations engagées sont poursuivies et amplifiées. Dans le même temps, les équipes éducatives sont soutenues et formées, les enseignants protégés, quelles que soient les menaces qu’ils peuvent subir. Dès mon entrée en fonction, j’ai pris des dispositions pour renforcer les équipes Valeurs de la République chargées d’assister les chefs d’établissement et les équipes éducatives lorsque des questions se posent et quand des signalements sont faits.
La loi de 2004 n’est pas une loi de contraintes mais de libertés. Elle permet la transmission du savoir dans un espace neutre d’un point de vue politique et religieux. Le ministre de l’éducation nationale Jean Zay, avant d’être assassiné en juin 1944 par la Milice, prononça ces mots qui résonnent encore aujourd’hui : « Les écoles doivent rester l’asile inviolable où les querelles des hommes ne pénètrent pas. »
Dès que j’ai eu connaissance des chiffres de signalement des atteintes à la laïcité, par exemple pour le mois d’octobre, j’ai mis en place un ensemble d’actions répondant au triptyque « dialogue, sanction, protection » des professeurs. Ma détermination à ce sujet est totale : je ne tolère aucune attaque ou remise en cause du principe de laïcité dans notre école pas plus que la moindre violence ou menace, d’où qu’elles viennent, à l’égard des enseignants.
Le respect du cadre que nous ont légué les bâtisseurs de la République nous enjoint de tout mettre en œuvre pour la réussite de tous les élèves. Malgré un dévouement sans faille des personnels et malgré des avancées importantes lors du précédent quinquennat, les constats relatifs au niveau scolaire sont durs et persistants. Ils concernent le niveau des élèves – les comparaisons internationales révèlent des lacunes préoccupantes – ainsi que la crise du recrutement des professeurs. Ils reflètent également l’expérience quotidienne des établissements, où les horaires annuels dans chaque discipline peinent à être couverts.
Petit à petit, ce tableau peut conduire à une défiance à l’encontre de cette institution qui nous est si chère. Un Français sur deux ne fait pas confiance à l’institution scolaire bien que les trois quarts d’entre eux fassent confiance aux professeurs. À l’heure où, pourtant, le système scolaire conduit 80 % des élèves au bac, les Français doutent de leur école. C’est un paradoxe que nous devons résoudre.
Nous devons progresser en fixant des objectifs ambitieux. Les tests en orthographe, en lecture, en calcul ou en langues vivantes indiquent qu’il faut encore insister sur les enseignements fondamentaux. Notre école doit viser l’excellence pour tous les élèves et donner toutes les chances de réussite à chacun d’eux, garantir les mêmes chances de réussite pour tous.
Cet engagement s’incarnera dans un ensemble d’actions pour l’école maternelle afin qu’elle soit à la hauteur des ambitions de réussite et d’épanouissement, première brique indispensable à la réussite scolaire – vous avez raison, madame la députée Descamps.
Il se traduira aussi dans la poursuite des plans de formation des professeurs en mathématiques et en français, y compris, madame la députée Genevard, s’agissant de l’apprentissage de la lecture, mais encore dans la poursuite et l’amplification des évaluations nationales des acquis des élèves en français et en mathématiques pour répondre immédiatement aux difficultés rencontrées par les élèves et mettre en place une pédagogie adaptée, dans de meilleures conditions d’apprentissage à l’école primaire par la poursuite des dédoublements des classes en éducation prioritaire, enfin dans le plafonnement à vingt-quatre élèves en grande section de CP et de CE1, hors éducation prioritaire.
Un travail en profondeur sur le collège vient d’être entamé. En dix ans, le nombre d’élèves en difficulté a bondi de dix points et un collégien sur quatre n’a pas le niveau attendu en fin de troisième. Trop forte, la rupture entre le CM2 et la sixième renforce les inégalités scolaires plutôt qu’elle ne les réduit. Il faut donc faciliter le passage de l’école primaire au collège en proposant des choses simples : travailler régulièrement l’orthographe, la conjugaison et la grammaire, consolider encore ou approfondir le français et les mathématiques en sixième.
J’ai en effet pour ambition de construire une nouvelle classe de sixième qui puisse assurer à chaque élève la maîtrise des savoirs fondamentaux indispensables à la suite de sa scolarité. Chaque élève bénéficiera d’une heure hebdomadaire de soutien ou d’approfondissement en mathématiques ou en français, autour des compétences clés, afin de remédier aux difficultés des plus fragiles mais aussi de cultiver l’excellence des plus à l’aise. Le dispositif « devoirs faits » sera rendu obligatoire afin de donner davantage d’autonomie aux élèves et ainsi de réduire les inégalités devant les apprentissages.
Pour penser les grands défis de demain, les mathématiques doivent plus que jamais faire partie de notre culture commune. J’ai décidé de lancer en novembre dernier une stratégie nationale pour les mathématiques avec plusieurs objectifs : réconcilier tous les élèves avec les mathématiques, élever le niveau général et faire progresser encore notre niveau d’excellence en mathématiques en suscitant davantage de vocations, notamment chez les filles. C’est pourquoi j’ai décidé de réintroduire, à la rentrée prochaine, l’heure et demie de mathématiques pour tous les élèves en classe de première générale.
Une école engagée pour l’excellence, c’est aussi une école qui relève les défis contemporains. Les actions déjà menées ne sont pas suffisantes pour répondre aux enjeux de la transition écologique, et les élèves sont pourtant très intéressés et engagés sur le sujet. C’est pourquoi le ministère déploiera de nouvelles actions dans les toutes prochaines semaines.
Ainsi, ayant acquis le niveau nécessaire, les élèves s’offrent le choix de leur orientation et peuvent accomplir une entrée réussie dans le milieu professionnel. À la rentrée 2023, la découverte des métiers sera généralisée à partir de la classe de cinquième. Et j’ai engagé avec Carole Grandjean, ministre déléguée à l’enseignement et à la formation professionnelle, une réforme en profondeur du lycée professionnel car trop d’élèves décrochent encore, souvent mal orientés, et la moitié des bacheliers professionnels est sans emploi plusieurs mois après l’obtention du baccalauréat. Nous nous devons de favoriser à la fois l’insertion dans l’emploi, la réussite dans l’enseignement supérieur et la maîtrise des savoirs fondamentaux : c’est une ardente obligation pour l’avenir des élèves et pour préserver la force économique du pays.
Mon ambition porte aussi sur l’égalité des chances et la lutte contre toutes les formes de discrimination. À cet égard, le renforcement de la mixité sociale dans les établissements scolaires par l’implantation de filières d’excellence dans les établissements de l’éducation prioritaire et le renforcement de la mixité dans tous les établissements sont une nécessité. Notre système doit continuer à faire émerger l’excellence sous toutes ses formes, tout en permettant à toutes et tous de l’atteindre. À cette fin, nous devons lutter contre toutes les formes de déterminismes sociaux et contre toutes les assignations comme l’a dit M. Corbière. Une école qui, tout en la promettant, n’accorde pas l’égalité produit non seulement des injustices mais aussi une défiance et un sentiment de colère parfois. Le ministère a récemment publié les indices de positionnement social des collèges et des lycées : ils montrent l’existence de forts écarts sociaux dans la carte scolaire alors que l’on sait que la mixité est un facteur de réussite pour tous.
Des objectifs vont donc être assignés aux recteurs d’académie qui, en lien avec les collectivités territoriales, agiront notamment sur les affectations scolaires. Je vous confirme, madame Faucillon, que l’enseignement privé sous contrat devra apporter sa contribution à cet effort. Et pour rebondir sur vos propos, monsieur Le Vigoureux, j’indique que nous allons également engager le chantier de la refonte de la carte de l’éducation prioritaire – je sais que votre assemblée s’est récemment saisie du sujet – car nous devons la rendre cohérente avec les réalités sociales d’aujourd’hui. C’est en effet une carte datée, qui n’a pas été revue depuis 2014, et basée alors sur des indicateurs de 2011. Elle ne répond plus aux réalités sociales des territoires et je souhaite que nos réflexions convergent à cet égard.
L’égalité des chances passe aussi par une politique volontariste visant à assurer une scolarisation de qualité et un enseignement accessible à tous les élèves. Aujourd’hui, plus de 430 000 élèves en situation de handicap sont accueillis dans les établissements et ce chiffre est en constante augmentation. Face à l’ampleur des besoins, nous avons agi en créant 300 unités localisées pour l’inclusion scolaire (Ulis) en 2022, ce qui porte le total à plus de 10 200 classes Ulis sur l’ensemble du territoire. En outre, 4 000 AESH ont été recrutés à la rentrée 2022, et 4 000 de plus le seront à la rentrée 2023. J’ajoute que les AESH bénéficient désormais de la prime REP et REP+ et qu’ils obtiendront 10 % de revalorisation de leur salaire en 2023. De plus, Geneviève Darrieussecq, la ministre déléguée chargée des personnes handicapées, et moi-même travaillons aux modalités d’un passage aux 35 heures pour les AESH qui le souhaiteraient. Ainsi, au-delà des moyens, nous nous engageons sur la qualité de l’enseignement à travers une professionnalisation renforcée de tous les personnels, y compris des AESH, madame Santiago.
Enfin, l’égalité des chances, c’est aussi lutter contre toutes les formes de discriminations : le racisme, l’antisémitisme, les LGBTphobies… C’est un combat malheureusement toujours d’actualité et que j’ai souhaité affirmer en le plaçant parmi les priorités de l’éducation nationale. Je rappelle qu’un climat apaisé contribue à la réussite des élèves.
Nous répondons aux ambitions que je viens d’afficher par un budget de l’éducation nationale en hausse de 6,5 % pour l’année 2023. La revalorisation salariale qui s’appliquera à la rentrée prochaine sera importante et contribuera à redonner aux enseignants la place qui doit être la leur dans le pays tout en attirant davantage de candidats, madame Bannier. De plus, un nouveau pacte sera conclu avec les professeurs qui, grâce à l’évolution de leurs missions, pourront mieux accompagner chaque élève. Il s’agira, par exemple, d’assurer du renforcement pédagogique ou des remplacements de courte durée pour limiter le nombre d’heures perdues par les élèves, ou encore de se former hors du temps d’enseignement. L’accomplissement de telles missions permettra une nouvelle augmentation salariale. Les concertations à ce sujet avec les organisations syndicales s’ouvrent la semaine prochaine. Bien sûr, rien ne se fera sans les enseignants. Nous allons en outre repenser les modalités de recrutement, mieux gérer le quotidien des professeurs, leur carrière et leurs mutations par une meilleure gestion des ressources humaines, une gestion en proximité : c’est un impératif, par exemple en outre-mer.
Il faut enfin redonner aux professeurs les marges d’initiative qui leur manquent tant et cesser de les infantiliser par un fonctionnement parfois uniquement descendant. La méthode nouvelle de concertation, dans le cadre du Conseil national de la refondation, ici le CNR éducation, permet à la communauté éducative et à ses partenaires extérieurs de déterminer leurs actions pour la réussite scolaire des élèves de leur établissement, avec la possibilité d’un financement à la clef. L’adhésion des équipes éducatives à la démarche du CNR éducation a dépassé les projections initiales s’agissant tant du nombre de concertations déjà enregistrées que de leur traduction dans le dépôt de projets, ce qui démontre bien l’envie et la capacité des équipes éducatives à s’approprier cette liberté nouvelle.
Mesdames, messieurs les députés, l’école est notre bien commun le plus précieux parce qu’il fait le lien entre le monde des élèves qui la fréquentent et celui des adultes qui y travaillent. Elle esquisse aussi le lien entre ce que sont ses élèves aujourd’hui et les citoyens qu’ils seront demain. Elle doit être le lieu qui apprend le libre arbitre, l’empathie et l’entraide. Elle doit répondre à une exigence morale qui engage notre cohésion et notre devenir en tant que démocratie. La place des élèves dans la société et l’attention que nous leur accordons leur permettra de s’exprimer et d’agir positivement plus tard en tant que citoyens. L’ensemble de la société est dépositaire de cette ambition ; la communauté enseignante et éducative doit y retrouver sa place centrale. Comme vous avez pu le comprendre, mesdames et messieurs les députés, je suis un ministre de l’éducation nationale qui regarde en face les difficultés et qui y répond sans catastrophisme. Certains d’entre vous ont parlé de je ne sais quelle déconstruction de l’école. Il n’y a rien de tel. Je suis au contraire totalement déterminé à poursuivre le principe de l’école républicaine, à faire de l’école un lieu de réussite et d’émancipation pour toutes et tous. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem, HOR et LIOT.)
(…)
Mme la présidente.
La séance est reprise.
Nous en venons aux questions. Je vous rappelle que la durée maximale de chaque question et de chaque réponse est de deux minutes, sans droit de réplique.
La parole est à Mme Christine Loir.
Mme Christine Loir (RN).
Monsieur le ministre, je vous sais préoccupé par l’avenir des enfants en situation de handicap. Malgré cela, dans un monde où l’individu prime le collectif, un problème d’inclusion persiste, alors que celle-ci fut une promesse d’Emmanuel Macron en 2017. Ces élèves ne peuvent s’intégrer sans AESH et les efforts fournis restent trop faibles. Voulez-vous réellement intégrer ces enfants ?
Aujourd’hui, contrairement à ce qui est indiqué sur le site officiel de Pôle emploi, les AESH ne reçoivent pas de formation initiale. De nombreux AESH, notamment dans ma circonscription, me signalent que les formations n’ont pas commencé six mois après le début de leur contrat. Vous laissez donc des personnes sans formation s’occuper d’enfants qui présentent des handicaps variés. Que faire pour prévenir une crise ou en cas de fausse route ? Comment changer un enfant appareillé ou simplement rassurer les parents sur la qualité de l’intervention de l’AESH ? Si les parents ont confiance, l’enfant sera serein dans sa vie d’écolier.
Lorsque l’on aborde les problèmes d’AESH, on évoque toujours la rémunération, le statut ou le manque de reconnaissance, mais on ne parle jamais de la valorisation par la formation. Si vous proposiez une véritable formation initiale plutôt que soixante heures de formation continue à distance, vous parviendriez à une meilleure reconnaissance des compétences et donc à proposer une meilleure rémunération.
Monsieur le ministre, que pensez-vous d’une réforme de la formation des AESH ? Rappelons-le, cela fait des années qu’ils accomplissent un travail formidable sur l’ensemble du territoire. Un enfant bien intégré est un enfant qui pourra commencer son apprentissage : c’est le but premier de l’école. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
Madame la députée Loir, je vous remercie pour votre question qui me donne l’occasion de souligner les progrès accomplis par l’école inclusive depuis 2005 : plus de 430 000 élèves en situation de handicap sont scolarisés en milieu ordinaire ; nous comptons plus de 130 000 AESH qui, pour une partie d’entre eux, s’occupent de ces enfants.
Je l’ai évoqué, la situation des AESH fait l’objet de toute notre attention, y compris du point de vue de la formation. Ainsi, un volant financier pour une meilleure formation des AESH est inscrit au budget pour 2023. Au-delà des soixante heures de formation prévues, nous devons faire mieux en résorbant un certain nombre de disparités dans la formation des AESH.
C’est pourquoi nous œuvrons à une « CDIsation » accélérée de ces personnels au bout de trois ans et menons une réflexion plus globale autour de l’école inclusive, qui prendra notamment forme lors de la Conférence nationale du handicap (CNH), prévue au printemps 2023. Celle-ci sera l’occasion de remettre à plat le système et de passer à l’« acte II » de l’école inclusive.
Reconnaissons-le, nous faisons face à des difficultés dans l’accueil de l’ensemble des enfants en situation de handicap. Pour être fidèle à l’esprit de la loi de 2005 et garantir l’accueil de tous les enfants en milieu ordinaire, nous devons repenser les choses, y compris la situation des AESH dont nous devons améliorer la formation.
Mme la présidente.
La parole est à Mme Lisette Pollet.
Mme Lisette Pollet (RN).
Les différentes académies partagent le même constat et tirent la sonnette d’alarme : le niveau des futurs professeurs des écoles est faible. On parle beaucoup de la baisse du niveau des élèves, ce qu’a rappelé notre collègue, mais les aspirants professeurs ne sont pas en reste. En effet, les correcteurs du concours de recrutement des professeurs des écoles s’inquiètent des lacunes de base en orthographe, en grammaire et en culture générale. Balzac, Dumas et Hugo sont bannis des copies au profit d’illustrations faisant appel aux séries contemporaines. Certains professeurs des écoles ne savent pas faire la distinction entre un pronom et un adjectif. Comment pourraient-ils apprendre à nos enfants ce qu’eux-mêmes ignorent ?
Une étude publiée le mardi 6 décembre 2022 par le ministère de l’éducation nationale révèle que le niveau en orthographe des élèves de CM2 continue de baisser. Est-ce une coïncidence ? Les correcteurs déplorent l’utilisation du mot « cool » et d’autres expressions familières. Les candidats ne sont pas capables de donner la définition du mot « chancelant », certains d’entre eux pensant qu’il désigne des personnes qui chantent bien, qui sont chanceux, qui font de la magie ou ne sont pas sages !
Un point de non-retour a malheureusement été atteint.
Et que dire du niveau en mathématiques ? Le rapport de Besançon souligne que le sujet au concours est présenté comme accessible, avec des formules de calcul données. Y a-t-il un autre mot que celui de naufrage pour décrire l’état du système éducatif ? Ce naufrage, plus personne ne peut le masquer. Remettre des cours de mathématiques en classe de sixième ne pourra pas résoudre seul le problème des élèves. Il faut d’abord que les enfants aient devant eux des professeurs des écoles qui maîtrisent les savoirs fondamentaux.
Ma question est donc simple : la qualité de l’enseignement doit-elle être mise en péril pour résorber la crise du recrutement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
Ce que vous décrivez à l’instant en des termes catastrophistes, ce sont les candidats aux concours de professeur des écoles, et non pas les lauréats – nuance ! Le recrutement se fait à niveau bac + 5 et nous avons pour projet d’améliorer la formation au métier. En France, la formation académique est plus longue que dans les autres pays européens et donc la formation au métier plus courte. C’est pourquoi nous réfléchissons à améliorer la formation initiale. Je tiens à saluer l’engagement et la qualité du recrutement des professeurs des écoles – j’en ai rencontré un grand nombre depuis quelque mois.
Le recrutement des professeurs des écoles n’est pas national, comme vous le savez, ce qui peut créer, selon les académies, des disparités en matière de volume et concernant le niveau. C’est pourquoi nous devons aussi réfléchir à des formes de recrutement spécifiques pour les académies qui sont le plus en tension.
Je tiens tout de même à saluer le niveau académique général des professeurs des écoles, que nous nous efforçons de consolider par des plans de formation en mathématiques et en français. Ces professeurs sont majoritairement issus de filières plutôt littéraires ; nous devons donc travailler la question de leur formation en mathématiques. La formation initiale revue, la formation continue par le plan français et le plan mathématiques : voilà les moyens par lesquels nous nous assurons d’un bon recrutement ! (M. Lionel Royer-Perreaut applaudit.)
Mme la présidente.
La parole est à Mme Andrée Taurinya.
Mme Andrée Taurinya (LFI-NUPES).
Il ne suffit pas d’inscrire ou de répéter le mot « inclusion » pour que celle-ci soit effective et efficace. L’école inclusive ne tient pas ses promesses. Inclure un, deux, voire trois élèves porteurs de handicap, sans revoir à la baisse l’effectif de la classe ne permet pas d’atteindre l’objectif visé, surtout si ces élèves ne sont pas ou sont trop peu accompagnés par les AESH. Si l’accompagnement des AESH est déficitaire, c’est notamment parce que les délais de notification de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) sont très longs et ne prennent pas en compte le caractère urgent de certaines demandes.
À cela s’ajoute la difficulté d’accueillir des élèves qui relèveraient des instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (Itep) ou des instituts médico-éducatifs (IME) mais qui sont en attente d’une place. Dans mon département de la Loire, ils sont cent à être dans cette situation ; ils se retrouvent scolarisés au mieux en Ulis, au pire en classe dite ordinaire. Résultat : des élèves porteurs de handicap plongés dans la difficulté et le stress de l’échec, des parents angoissés par cette situation, des enseignants épuisés qui s’efforcent d’assumer des tâches pour lesquelles ils ne sont pas formés.
Je le répète, les AESH sont en nombre très insuffisant. Dans mon département, 550 élèves ne bénéficiaient pas l’an dernier d’un accompagnement nécessaire. Il y a là un problème de recrutement : ces personnels sont payés au lance-pierre – 800 euros par mois – et sont baladés d’un établissement à un autre depuis la création des pôles inclusifs d’accompagnement localisés (Pial), ce qui ajoute au mépris de l’institution la perte du sens du métier.
Notre école, celle de la République, se doit d’offrir à tous ses enfants les mêmes armes de la connaissance, pour leur permettre de s’émanciper et de devenir des citoyens conscients des enjeux de la société. Elle ne doit laisser aucun élève sur le bord du chemin. L’école de la République doit montrer sa reconnaissance aux personnels trop longtemps méprisés, ceux-là mêmes qui, chaque jour, conduisent ces élèves vers la réussite.
Monsieur le ministre, la création d’un statut d’AESH dans la fonction publique, avec une rémunération équivalente à un temps plein, fait-elle partie de votre feuille de route ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
Il faut avant tout reconnaître l’effort considérable de l’éducation nationale pour accueillir des élèves en situation de handicap. C’est un succès à en juger par des chiffres en progression tout à fait significative depuis 2005, et particulièrement depuis 2017. Reconnaissons d’abord les efforts accomplis, notamment pour le recrutement d’AESH, en dépit des difficultés que vous avez mentionnées.
Le métier d’AESH représente aujourd’hui le deuxième métier de l’éducation nationale. Nous tâchons de faire passer leur charge de travail de vingt-quatre heures à trente-cinq heures, ce qui leur assurera une rémunération correcte. À cette fin, nous devons associer plus étroitement le scolaire et le périscolaire, en tenant compte de la décision du Conseil d’État relative au paiement des activités périscolaires par les collectivités. Nous nous efforçons par ailleurs à une « CDIsation » accélérée des AESH, votée sur l’initiative du Parlement, cela au bout de trois ans d’activité. Notre action en faveur des AESH vise par conséquent à leur assurer une meilleure rémunération, de meilleures conditions de travail et une meilleure formation.
Mais cela ne suffit pas car, comme vous l’avez dit, le système est embolisé. D’où la nécessité de remettre le système à plat. C’est que nous entendons faire dans la perspective de la Conférence nationale du handicap, qui se tiendra au printemps 2023.
Mme la présidente.
La parole est à M. Rodrigo Arenas.
M. Rodrigo Arenas (LFI-NUPES).
Pour anticiper les pénuries d’énergie, vous avez choisi de couper le courant qui permettait de communiquer avec les syndicats d’enseignants – ils sont sans doute trop énergivores. On aurait aimé que vous anticipiez les pénuries de personnel avec autant d’efficacité, mais passons…
Revenons-en aux difficultés que M. Macron et vous-même éprouvez à vous faire comprendre des enseignants, eux qui pensaient pouvoir bénéficier d’une augmentation de salaire dès ce mois de janvier, sans contrepartie. Manifestement, ils ont mal compris – il y a dû y avoir de la friture sur la ligne. (Sourires.)
Un rapport de la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) vient de nous rappeler que les salaires des enseignants français sont parmi les plus bas d’Europe. Pourriez-vous nous dire quand les personnels enseignants de notre pays percevront une rémunération pouvant être classée au minimum dans la moyenne des salaires européens ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
M. Benjamin Lucas.
Très bonne question !
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
La question du salaire des enseignants est saisie à bras-le-corps dans le budget 2023, lequel prévoit une hausse significative, en deux volets, de la rémunération des enseignants. Le premier volet comprend un socle centré sur la première moitié de carrière dont les modalités seront définies en fonction des négociations qui s’ouvriront bientôt avec les organisations syndicales – avec lesquelles nous entretenons des relations fluides, même si nous ne sommes pas d’accord sur tout – ainsi qu’une hausse de la rémunération en toute fin de carrière par un passage facilité à la hors classe, voire à la classe exceptionnelle. Le deuxième volet consiste en un pacte passé avec les enseignants volontaires qui offrira, lui aussi, une augmentation de rémunération et dont j’ai tracé les contours dans mon discours liminaire.
L’année prochaine, le budget de l’éducation nationale augmentera de 6,5 % pour tutoyer les 60 milliards d’euros. Cela représente une augmentation très significative de la masse salariale qui constitue déjà l’essentiel du budget du ministère.
Mais nous avons conscience que l’attractivité du métier ne dépend pas que du salaire et qu’elle dépend aussi d’éléments comme la carrière et les conditions de mutation, que nous négocierons avec les organisations syndicales dans les mois à venir. La question du recrutement des professeurs va se poser à nous pendant de nombreuses années ; c’est aussi vrai dans le reste de l’Europe et dans le reste du monde. Il y a en effet une pénurie mondiale de professeurs, y compris dans les pays voisins où les rémunérations des enseignants sont bien plus élevées qu’en France. Nous devons saisir cette question à bras-le-corps en même temps qu’engager une réflexion structurelle sur le métier.
Mme la présidente.
La parole est à M. Alexandre Portier.
M. Alexandre Portier (LR).
Il est beaucoup question d’énergie dans les débats d’aujourd’hui. Évidemment, nous payons l’impéritie évoquée précédemment en matière nucléaire et le refus idéologique de construire des équipements nécessaires à notre souveraineté, à notre indépendance. Mais ce que l’on oublie de dire, c’est que nous ne sommes plus en état d’entretenir le parc nucléaire. Pourquoi ? Tout simplement parce que le nucléaire français manque de bras et de cerveaux. Comme le rappelle l’actualité, nous nous trouvons malheureusement obligés de recourir à des ingénieurs, à des soudeurs et à des tuyauteurs américains et canadiens. Dans les unités de fabrication de calottes de réacteurs basées en France, on refuse aujourd’hui des commandes, faute de soudeurs – il en manque actuellement 7 000.
Voilà, monsieur le ministre, l’un des signes de l’échec de l’école. Il faut réhabiliter en urgence les filières scientifiques et techniques pour former davantage de spécialistes. Si la France a été une grande puissance nucléaire, cela tient à des esprits brillants comme ceux de la famille Curie, dont nous sommes fiers, ainsi qu’à de grands capitaines d’industrie, mais surtout aux générations d’enseignants qui ont formé, par le passé, des ingénieurs et des ouvriers d’exception. Réintroduire l’enseignement des mathématiques – qui n’aurait jamais dû disparaître –, c’est bien, mais que comptez-vous faire concrètement pour réhabiliter l’ensemble des filières qui faisaient l’excellence de la France ? (Mme Justine Gruet applaudit.)
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
C’est pour moi l’occasion de dire un mot sur la réforme du lycée professionnel, qui forme à une gamme de métiers dont nous avons besoin, y compris dans l’industrie. Nous travaillons plus particulièrement sur la carte des filières professionnelles, ce que fait en ce moment la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels, car certaines filières ne correspondent plus aux besoins de l’économie tandis que d’autres sont en tension. Nous devons créer de nouvelles filières, en particulier dans les métiers industriels, tout en nous assurant que les élèves des lycées professionnels maîtrisent les savoirs fondamentaux et puissent effectuer des stages dans les meilleures conditions possibles. C’est un travail patient mais nécessaire. En effet, si certains jeunes sont au chômage en sortie du lycée professionnel, il y a en parallèle des besoins d’emploi qui ne sont pas couverts. Il faut donc faire en sorte qu’à la sortie du lycée professionnel, les jeunes trouvent un emploi ou puissent poursuivre des études supérieures. Nous nous y employons et cela va prendre un peu de temps, bien entendu. Nous avons besoin de réflexion, mais aussi d’échanges avec les parties prenantes, y compris les collectivités territoriales. Nous sommes déterminés à transformer les lycées professionnels en véritables lieux de formation d’excellence pour tous les élèves.
Mme la présidente.
La parole est à M. Jérôme Guedj.
M. Jérôme Guedj (SOC).
Monsieur le ministre, permettez-moi de revenir sur la question de la rémunération des enseignants car il n’y a pas de reconnaissance de la nation sans juste rémunération.
M. Rodrigo Arenas.
Excellente question !
M. Jérôme Guedj.
Depuis plusieurs mois, nous vivons dans un flou ; or, comme on dit, quand il y a un flou, c’est qu’il doit y avoir un gros loup.
La question je me pose est la suivante : qui a dit vrai ? Est-ce l’Emmanuel Macron d’avril 2022, très précis lors de sa campagne électorale : « J’irai au bout de la revalorisation et elle n’est pas conditionnée à quoi que ce soit. Ça veut dire qu’il y aura une revalorisation de 10 % » ? La revalorisation sera-t-elle bien de 10 % ? J’ai noté que, depuis tout à l’heure, vous n’aviez pas prononcé une seule fois ce chiffre alors qu’il avait été communiqué avec force par le Président de la République. Pardon pour cette question un peu scolaire, mais c’est l’exercice qui nous invite à procéder ainsi. La revalorisation sera-t-elle de 10 % ? Sera-t-elle conditionnée à l’exercice de nouvelles missions, comme vous nous l’avez dit tout à l’heure ?
Par ailleurs, le Président de la République disait qu’indépendamment de la revalorisation du point d’indice qui a eu lieu en juillet dernier, une autre revalorisation était prévue dans la loi de finances, laquelle prend effet en janvier. Or nous sommes en janvier et personne n’a vu de revalorisation.
Sans vouloir être exagérément taquin, monsieur le ministre, il me semble que vous nous proposez un « travailler plus pour gagner plus » en conditionnant la revalorisation à l’exercice de nouvelles missions, lesquelles, dans un premier temps, ne seront proposées qu’aux néotitulaires. Ma question est donc la suivante : quand et à qui précisément bénéficiera la revalorisation de 10 % sur la durée du quinquennat ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
M. Benjamin Lucas.
Le loup est sorti du flou !
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
Puisque vous m’y invitez, je vais préciser la situation. Le rattrapage de la rémunération des enseignants va prendre du temps puisque son décrochage est le fruit de retards accumulés pendant des décennies. Cet effort significatif est composé de deux volets.
D’abord, un volet non conditionné de 10 %, voire plus, pour la première moitié de carrière ainsi que pour la fin de carrière, avec le passage en hors classe et en classe exceptionnelle. Ces 10 % ne seront pas seulement réservés aux néotitulaires et aux premières années de carrière ; néanmoins, nous envisageons une hausse générale pour la première moitié de carrière parce que c’est de ce côté-là que les enseignants français ont accumulé le retard le plus significatif par rapport à leurs collègues européens. C’est un effort considérable qui se traduit budgétairement dans la mission Enseignement scolaire .
Le deuxième volet, indépendant, sera lié au pacte dont j’ai parlé précédemment et à de nouvelles missions que les enseignants pourront accepter de manière facultative. Il ajoutera 10 % de rémunération aux 10 % d’augmentation que je viens d’évoquer.
Voilà comment nous envisageons les choses, ce qui correspond parfaitement aux engagements du Président de la République. Quant à moi, j’ai toujours indiqué que les hausses de rémunération interviendraient au 1er septembre : le budget de la mission Enseignement scolaire , si vous avez eu la curiosité de le regarder de près, précise bien qu’elles prendront effet pour les quatre derniers mois de l’année 2023.
M. Jérôme Guedj.
Ce n’est pas ce que disait Emmanuel Macron !
Mme la présidente.
La parole est à M. François Gernigon.
M. François Gernigon (HOR).
Eu égard à la perte de confiance en l’école, à la hausse des signalements pour atteinte à la laïcité, à la faible implication des jeunes dans la vie civique, nous partageons tous la volonté de redonner à ces derniers l’envie d’être acteurs de celle-ci. Je sais, monsieur le ministre, que vous menez ce combat.
Le cours d’enseignement moral et civique dispensé au collège et au lycée a justement pour objectif de permettre aux élèves d’acquérir et de partager les valeurs de la République et de se construire une culture civique. Pour que les jeunes citoyens deviennent des acteurs engagés et responsables de la vie de notre pays, il est important de leur donner les moyens de comprendre les enjeux de la citoyenneté, de les inciter à s’engager et de les accompagner dans cette démarche. Il est donc essentiel de réfléchir à des solutions pour renforcer l’enseignement moral et civique.
Par ailleurs, j’ajoute que le groupe Rassemblement national, qui est à l’initiative de ce débat, a déposé une proposition de loi ayant pour but d’instaurer un uniforme obligatoire à l’école et au collège dans l’objectif de créer un meilleur cadre scolaire et un sentiment d’appartenance. Néanmoins, selon les territoires concernés, je ne pense pas que l’obligation réponde au mieux à cette volonté. Le port de l’uniforme à l’école a toujours été d’actualité et laissé à l’appréciation des directeurs d’établissement. Plutôt que d’imposer le port de cette tenue, ne pensez-vous pas, monsieur le ministre, qu’il serait plus judicieux d’obliger les directeurs à soumettre cette question aux associations de parents d’élèves à la fin de l’année scolaire pour une application l’année suivante ?
M. Benjamin Lucas.
Ils n’ont pas mieux à faire ?
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
L’enseignement moral et civique (EMC) est dispensé à tous les élèves, du CP à la terminale, dans les lycées généraux, technologiques et professionnels. Cet enseignement a trois finalités : le respect de soi et des autres, l’acquisition des valeurs de la République et l’apprentissage d’un ensemble de savoirs relatifs aux institutions, y compris dans leur dimension juridique. Cet enseignement doit être un fil rouge. Or, comme l’a montré un rapport de l’Inspection générale de l’éducation nationale (IGEN), force est de constater que ce fil rouge est parfois tracé en pointillé.
En effet, il arrive que l’EMC soit une variable d’ajustement dans les emplois du temps, par exemple en cours d’histoire-géographie, ce qui induit que les programmes de cette discipline ne sont que partiellement traités. C’est pourquoi nous devons entamer une réflexion en profondeur par la révision des programmes, mais aussi par la formation des professeurs, afin que l’EMC ne soit plus le parent pauvre de l’enseignement, qu’il soit mieux adapté à l’âge des élèves à tous les niveaux et qu’il leur permette de comprendre, jusqu’à la fin du lycée, les principes et les valeurs qui fondent notre contrat social.
Quant à la question de la tenue scolaire, je suis d’accord avec vous : pas de loi, mais la liberté pour les établissements de l’adopter s’ils le souhaitent.
Mme la présidente.
La parole est à M. Benjamin Lucas.
M. Benjamin Lucas (Écolo-NUPES).
L’extrême droite n’aime pas l’école de la République.
M. Jean-Philippe Tanguy et M. Roger Chudeau.
Ah ! Ah ! Ah !
M. Benjamin Lucas.
Deux faits viennent l’illustrer. Premièrement, le 2 décembre dernier, une professeure d’hypokhâgne devait emmener sa classe visiter un camp d’exilés près de Calais. De harcèlement en menaces, l’extrême droite a obtenu du rectorat de Lille l’annulation de cette sortie. C’est la liberté pédagogique, fondement de l’école républicaine, qui a été attaquée en son cœur. Ma première question est donc simple : pourquoi le Gouvernement est-il resté silencieux ou, du moins, timide ?
Deuxième exemple : après-demain, nous examinerons une proposition de loi du groupe Rassemblement national visant à instaurer le port obligatoire d’un uniforme dans les établissements scolaires. Cette mesure paternaliste, qui véhicule une vision fantasmée de l’école d’autrefois, est le symbole de votre mépris de la jeunesse et de la communauté éducative. J’ai avec moi une carte réalisée par les élèves de l’école Jean-Jacques-Rousseau du quartier du Val Fourré à Mantes-la-Jolie ; elle parle de la République, de la laïcité, de ces belles valeurs (L’orateur exhibe ledit document)…
Mme la présidente.
Monsieur Lucas, vous n’êtes pas censé présenter de document en séance.
M. Benjamin Lucas.
Mes excuses, madame la présidente. Cette carte montre que les jeunes n’ont pas besoin d’être déguisés en soldats, pas plus que d’un service national universel gadget, car la République ne s’apprend ni dans les casernes ni sous un uniforme ; elle s’éprouve dans le quotidien de chacune et de chacun.
Ma seconde question sera donc également très simple : monsieur le ministre, pouvez-vous nous garantir ce soir que votre majorité, qui hésite et qui débat sur le sujet, ne se vautrera jamais dans les provocations du Rassemblement national et ne nous proposera pas un projet de loi sur le port de l’uniforme à l’école ? (M. Jean-Philippe Tanguy rit.)
Puisque j’ai l’honneur d’occuper la place de François Mitterrand dans cet hémicycle,…
M. Roger Chudeau.
Vous êtes loin d’être à sa hauteur !
M. Benjamin Lucas.
…j’achèverai mon intervention en le citant : « Si la jeunesse n’a pas toujours raison, la société qui la méconnaît et qui la frappe a toujours tort. »
Mme la présidente.
Veuillez conclure, monsieur Lucas.
M. Benjamin Lucas.
Collègues du groupe Rassemblement national, vous avez tort ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES et GDR-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
Je ne suis pas certain, monsieur Lucas, que vous ayez suivi attentivement l’affaire de cette enseignante menacée de manière inadmissible et scandaleuse par l’extrême droite.
J’ai déjà eu l’occasion de dire que le rectorat de Lille avait pris une mesure de protection fonctionnelle en faveur de cette enseignante et qu’une plainte avait été déposée contre les auteurs des menaces. Si la sortie scolaire a été annulée, ce n’était pas pour céder aux menaces de l’extrême droite, mais parce que les conditions de sécurité n’étaient plus assurées pour les élèves et l’enseignante. L’objet de la sortie scolaire était quant à lui parfaitement légitime. L’enseignante elle-même a reconnu qu’elle avait bénéficié d’une mesure de protection fonctionnelle et d’une procédure de dépôt de plainte. Quelle que soit sa provenance, toute menace à l’encontre d’un enseignant est intolérable et je le répète ici haut et fort. J’ai été très heurté par cette affaire, je ne peux pas le dire plus clairement.
Sur les uniformes, j’ai indiqué ma position il y a quelques instants. Nous aurons jeudi un débat sur ce sujet avec l’examen de la proposition de loi de M. Chudeau, du groupe Rassemblement national. J’aurai donc l’occasion de développer mes arguments et de vous expliquer pourquoi je suis opposé à un tel texte.
Mme la présidente.
La parole est à M. Jiovanny William.
M. Jiovanny William (GDR-NUPES).
Monsieur le ministre, vous connaissez la détresse des enseignants, des parents et des élèves des territoires insulaires et de la Guyane. Selon le dernier rapport de la délégation aux outre-mer, 35 % des jeunes Martiniquais ont des difficultés en matière de lecture et 12,5 % de faibles capacités d’apprentissage. Or un peu plus de la moitié des écoles – 115 sur 222 – et un peu plus de la moitié des collèges – 22 sur 43 – sont classés en zones d’éducation prioritaire. Aussi près de la moitié de nos écoles ne bénéficient-elles pas de ce dispositif conçu pour tenir compte des lacunes du système éducatif, de l’échec scolaire et des difficultés d’apprentissage. Il est indispensable de revoir les critères d’évaluation des réseaux d’éducation prioritaire. En réalité, l’ensemble des établissements situés dans nos territoires sont prioritaires. Au-delà des mots, nous attendons des actes.
Monsieur le ministre, vous vous êtes rendu aux Antilles et vous avez constaté l’urgence de la situation, notamment dans les établissements du primaire. Les manuels scolaires sont à la charge des parents dans la quasi-totalité des communes. Pour défendre réellement l’école de la République, vous devez vous engager à débloquer une contribution substantielle pour le financement des manuels scolaires dans le primaire. Je vous sais sensible à cette question. Nous attendons de votre part des décisions concrètes. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
En effet, je connais bien la Martinique. J’y ai fait mon premier voyage en tant que ministre et sept séjours en tant que citoyen. Vous avez raison de rappeler qu’un peu plus de la moitié des écoles primaires et la moitié des collèges sont classés en zones d’éducation prioritaire. Dans mon intervention liminaire, j’ai indiqué que la carte de l’éducation prioritaire était en partie obsolète puisqu’elle remonte à 2014 et qu’elle est fondée sur des données de 2011. Les disparités géographiques identifiées à l’époque méritent d’être revues.
Nous devons prendre le temps de revoir cette carte en échangeant avec les collectivités et les acteurs et en rassemblant des données statistiques. La révision de la carte de l’éducation prioritaire devra être menée selon des critères que nous déterminerons au ministère de l’éducation nationale en lien avec nos partenaires, au premier rang desquels les collectivités territoriales. La Martinique sera donc évidemment l’une des académies qui feront l’objet de la plus grande attention.
En ce qui concerne le second point que vous évoquez, il est pour le moins étonnant, en effet, que les élèves martiniquais ne bénéficient pas de la gratuité des manuels scolaires. Cette question relève en principe des collectivités, mais je suis prêt à l’examiner avec le conseil régional de Martinique et avec le président du conseil exécutif, Serge Letchimy. J’ai déjà abordé avec lui ce sujet, sur lequel je suis tout à fait ouvert.
Mme la présidente.
La parole est à M. Paul Molac.
M. Paul Molac (LIOT).
Ma question porte sur les postes offerts au Capes de langues régionales, en particulier de breton, un sujet source d’inquiétudes. L’an passé, le nombre de postes offerts au Capes de breton a été réduit de six à quatre et le ministère prévoit une nouvelle baisse cette année. Rappelons que les postes actuellement proposés au Capes permettent tout juste de compenser les départs à la retraite. Or, depuis dix ans, le nombre de postes de professeurs de breton dans les établissements du second degré est resté stable.
Je rappelle en outre que la législation a évolué avec la loi du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion. Dans son article 7, ce texte précise que l’éducation nationale se doit de proposer l’enseignement des langues régionales dans les territoires dans lesquels elles sont parlées. Pour respecter cet engagement, un nombre suffisant d’enseignants est évidemment nécessaire. En mars 2022, Jean Castex, alors Premier ministre, est venu en Bretagne signer la convention spécifique pour la transmission des langues de Bretagne et le développement de leur usage dans la vie quotidienne 2022-2027, visant à appliquer les mesures prévues par la loi du 21 mai 2021. Aussi, les associations de défense du breton et les parents d’élèves, lorsqu’ils ont appris la diminution du nombre de postes offerts au Capes de breton, ont-ils fait part de leur incompréhension, de leur d’inquiétude, voire de leur colère.
Il est important que nous fassions toute la lumière sur ce sujet. L’école de la République a pour mission de faire respecter nos valeurs communes, mais aussi de veiller à la préservation et au développement des cultures patrimoniales qui font la France.
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
Comme vous, monsieur Molac, je suis attaché à la richesse de notre patrimoine culturel et linguistique et j’entends soutenir l’enseignement des langues et des cultures régionales qui constituent à la fois un moyen de transmission auprès des jeunes générations et un facteur d’ouverture à d’autres langues et d’autres cultures.
Vous avez rappelé les dispositions nouvelles introduites, à votre initiative, par la loi du 21 mai 2021 sur la promotion des langues régionales. S’agissant plus précisément du nombre de postes ouverts au Capes de breton, je veux vous rassurer pleinement : aucune réduction de l’offre d’enseignement des langues régionales n’est à craindre. Nous avons veillé à ce que le nombre de postes ouverts au concours réponde aux besoins exprimés par les académies lors des opérations de calibrage. J’entends néanmoins votre inquiétude et j’ai décidé de rétablir le poste supprimé cette année. Un même nombre de postes que l’an passé seront donc ouverts prochainement au concours.
Reste, vous le savez, que la véritable difficulté ne réside pas tant dans le nombre de postes ouverts aux concours que dans le faible rendement des concours eux-mêmes. Ainsi, en 2022, aucun candidat n’a été admis au certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement privé (Cafep) de breton. La formation initiale et continue des professeurs constitue un enjeu décisif pour permettre aux langues régionales de trouver toute leur place dans le système éducatif. Vous pouvez compter sur mon engagement, comme je sais pouvoir compter sur votre soutien. (M. Paul Molac et Mme Graziella Melchior applaudissent.)
Mme la présidente.
La parole est à M. Robin Reda.
M. Robin Reda (RE).
En tant que rapporteur spécial du budget de l’enseignement scolaire, je tiens à souligner l’effort budgétaire sans précédent dont a bénéficié notre école ces dernières années, en particulier au cours du présent exercice budgétaire. Toutefois, vous l’avez reconnu, monsieur le ministre, le collège demeure un entre-deux de notre système scolaire. C’est à l’âge des collégiens que se creusent les inégalités entre élèves, que les discriminations et le harcèlement atteignent souvent un sombre apogée et que les destinées des uns et des autres se gravent trop souvent dans le marbre. Reconnaissons que le bilan du collège est assez cruel.
Selon les chiffres de la Depp, il y a plus d’élèves victimes de harcèlement au collège qu’en primaire ou au lycée. En fin de troisième, 11 % des élèves sortent du système scolaire sans diplôme, uniquement avec le brevet des collèges. On compte environ 25,6 collégiens par classe, contre 21,9 élèves en primaire, auquel la priorité a été légitimement donnée par les différentes réformes du précédent quinquennat.
Le climat scolaire au collège et le taux d’encadrement général ne facilitent ni la réussite des élèves ni l’ascension sociale par le mérite, au cœur du pacte scolaire républicain. Le collège devrait pourtant être l’endroit qui cristallise les réussites et non celui qui fige les échecs.
Pour un élève, le collège, c’est le moment fondamental de la détermination de soi, de ses goûts et de son orientation professionnelle. C’est aussi là que doivent se poser les limites, comportementales et vestimentaires. Là qu’est nécessaire une forme d’assimilation culturelle car l’école doit aussi être la fabrique de la France, le lieu où l’on apprend à vivre dans la même nation et à respecter ses fondamentaux. En ce sens, les enjeux de mixité doivent être avant tout pensés pour tirer vers le haut les établissements jugés difficiles, plutôt que de réduire l’autonomie de ceux qui ont éprouvé des méthodes qui fonctionnent.
Monsieur le ministre, je sais que le collège fait partie des priorités de votre projet pour l’éducation. Pouvez-vous nous présenter les grandes lignes de votre réflexion et de votre action pour réussir le collège du futur ? (M. Lionel Royer-Perreaut applaudit.)
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
Je partage vos constats sur le collège, monsieur Reda. Entre un primaire renforcé et un lycée rénové et tourné vers l’enseignement supérieur, le collège apparaît comme le maillon faible du système éducatif. J’ai même parlé de « l’homme malade du système », non pas pour critiquer le travail remarquable mené par les professeurs, mais pour évoquer l’organisation, les programmes et la manière dont nous concevons le collège aujourd’hui. Reste que le collège tend à aggraver les inégalités entre les élèves au lieu de les réduire. À la sortie de la classe de troisième, un collégien sur quatre ne dispose pas des compétences attendues. Dans sa forme actuelle, le collège s’avère incapable de remédier aux principales difficultés scolaires des élèves les plus fragiles. Nous devons faire en sorte que le collège ne soit plus le lieu de ce que j’appelle « la grande divergence », certains élèves poursuivant une trajectoire scolaire normale quand d’autres plongent sans qu’on puisse les rattraper.
Nous avons décidé de commencer par réformer la classe de sixième parce qu’elle marque une rupture brutale pour les élèves alors qu’elle devrait au contraire faciliter la liaison avec le collège et assurer la prise d’autonomie progressive. Nous devrons également prendre en compte l’hétérogénéité des élèves à l’entrée en sixième. Aujourd’hui, un quart d’entre eux ont un niveau insuffisant en français et un tiers en mathématiques, d’où la nouvelle sixième que nous programmons pour la rentrée 2023, avant la nouvelle cinquième pour la rentrée 2024, et ainsi de suite jusqu’au brevet. L’objectif est de transformer le collège pour en faire un lieu de réussite pour tous les élèves, mais aussi de réduction des inégalités sociales.
Mme la présidente.
La parole est à M. Lionel Royer-Perreaut.
M. Lionel Royer-Perreaut (RE).
Dans le cadre du volet « éducation » du plan Marseille en grand, des initiatives pédagogiques innovantes ont été lancées dans les enseignements du premier degré et dans les écoles dites innovantes : classes flexibles, écologie développementale, laboratoires de maths en maternelle – autant de contenus pédagogiques qui rompent avec les habitudes du moment. D’autres projets sont coconstruits avec les équipes pédagogiques, ce qui crée une émulation pour les communautés éducatives concernées, et ils peuvent être concrétisés grâce aux moyens supplémentaires mis à la disposition des enseignants.
Quel regard portez-vous sur ce dispositif pédagogique innovant créé il y a plus d’un an ? Entendez-vous le généraliser ? D’après les contacts que j’ai pu avoir avec les enseignants directement concernés, les retours sont plutôt favorables : ils décrivent une émulation créée au sein de l’équipe, une volonté de produire quelque chose de nouveau, et sont agréablement surpris de voir l’éducation nationale prête à les accompagner dans cette nouvelle manière d’enseigner. Merci, monsieur le ministre, de nous faire part de vos observations.
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
Merci, monsieur le député Royer-Perreaut, de votre question qui m’offre l’occasion de saluer la démarche entreprise à Marseille dans les cinquante-neuf écoles auxquelles vous faites allusion. L’État – le ministère de l’éducation nationale en particulier – est pleinement engagé dans le plan Marseille en grand, y compris en matière de bâti scolaire.
Dans ces cinquante-neuf établissements, dont l’école Menpenti située dans votre circonscription, nous constatons un élan remarquable qui tient à deux éléments : la démarche, que vous avez décrite, de communautés éducatives qui se retrouvent pour échanger et construire ensemble des projets pédagogiques ; la finalité, c’est-à-dire le projet de transformer les pratiques en créant par exemple un laboratoire de mathématiques dans une école maternelle. Un autre projet très intéressant consiste à rapprocher une école des services médicaux du milieu ordinaire afin d’améliorer l’accueil des enfants en situation autistique. Il existe également des projets culturels et d’autres encore qui visent à favoriser la réussite des élèves, y compris ceux en situation de handicap.
Nous avons en quelque sorte généralisé cette expérience marseillaise puisque nous nous en sommes inspirés dans le cadre du CNR éducation avec le projet « Notre école, faisons-la ensemble ». Plus de 13 000 écoles et établissements sont désormais engagés dans cette démarche, 7 500 concertations ont déjà eu lieu, environ 800 projets ont été déposés sur le site de l’éducation nationale qui lui est consacré. Par le biais des rectorats, nous sommes en train d’évaluer ces projets qui seront financés par le fonds d’innovation pédagogique annoncé par le Président de la République le 8 septembre dernier.
Mme la présidente.
La parole est à M. Bertrand Sorre.
M. Bertrand Sorre (RE).
Le droit à l’éducation pour tous les enfants, quel que soit leur handicap, est un droit fondamental. Depuis 2017, la politique éducative conduite par le Gouvernement et notre majorité vise à renforcer ce droit à la scolarisation pour tous. Ainsi les différentes mesures mises en place depuis cinq ans permettent d’adapter l’école aux besoins de ces enfants en situation de handicap, afin qu’ils suivent une scolarisation ordinaire.
Le budget pour l’école inclusive a augmenté de plus 66 % depuis 2017 pour atteindre 3,5 milliards d’euros en 2022. Lors de la rentrée de 2022, ces efforts financiers ont permis notamment d’accueillir 430 000 élèves en situation de handicap dans les établissements scolaires, 67 000 enfants en établissements hospitaliers ou en établissements médico-sociaux et 6 000 enfants supplémentaires en Ulis avec la mise en place de 10 272 dispositifs Ulis.
En effet, selon la gravité de leur handicap, les enfants ont besoin de certains aménagements particuliers comme une aide humaine ou matérielle adaptée. Ces dispositifs toujours plus nombreux et adaptés aux besoins particuliers tendent à offrir une scolarisation de qualité à tous les élèves. Ayant été enseignant moi-même en section d’enseignement général et professionnel adapté (Segpa) durant plus de trente ans, je peux en témoigner.
Je salue l’objectif du Gouvernement de poursuivre le développement de l’école inclusive en augmentant le nombre de personnels accompagnants et en renforçant leur formation. Je pense notamment aux AESH et aux enseignants spécialisés, essentiels à la construction d’une école pour tous.
Monsieur le ministre, même si des défis sont encore à relever en matière de handicap – je pense particulièrement au regard porté sur lui par notre société – l’école pose les fondations d’une société plus inclusive, plus juste et acceptant les différences de l’autre.
Comment comptez-vous continuer à améliorer l’accueil de ces élèves ? Comment entendez-vous valoriser les accompagnants et les enseignants spécialisés qui font au quotidien un travail formidable ?
Mme la présidente.
La parole est à M. le ministre.
M. Pap Ndiaye, ministre.
Merci, monsieur le député Sorre, de votre question qui me donne l’occasion de saluer une nouvelle fois l’effort réalisé par l’éducation nationale et ses agents pour accueillir les 430 000 élèves à besoins particuliers. Le budget a progressé de 6 à 8 % par an depuis plusieurs années grâce à mes prédécesseurs.
À cette occasion, je tiens aussi à mentionner les 3,8 milliards d’euros inscrits dans le budget pour 2023 pour l’école inclusive. Nous avons consenti des efforts importants pour améliorer la situation des AESH, tout en reconnaissant les difficultés concernant notamment le recrutement et le nombre de notifications que nous pouvons recevoir.
C’est pour affronter ces difficultés que, sous l’égide du Président de la République, nous nous sommes engagés dans la préparation de la Conférence nationale du handicap qui vise à remettre le système à plat plutôt qu’à simplement ajouter des AESH et à courir derrière, si je puis dire, un nombre très élevé de notifications.
Nous devons trouver les voies et moyens d’atteindre notre objectif : la scolarisation de tous les enfants. Au printemps 2023, nous présenterons les pistes très sérieuses qui nous permettront de réaliser pleinement l’objectif de l’école inclusive et de mieux répondre aux besoins et aux demandes des familles, que j’entends presque quotidiennement. Nous devons évidemment les entendre et poursuivre cet objectif tout en étant plus efficaces dans l’accueil des élèves en situation de handicap. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
Mme la présidente.
Le débat est clos.
Source https://www.assemblee-nationale.fr, le 12 janvier 2023