Interview de M. Gabriel Attal, ministre chargé des comptes publics, à BFMTV le 12 janvier 2023, sur la réforme des retraites, une attaque par un immigré illégal à la Gare du Nord et l'uniforme à l'école.

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Texte intégral

APOLLINE DE MALHERBE
Bonjour Gabriel ATTAL

GABRIEL ATTAL
Bonjour Apolline de MALHERBE et bonne année à vos téléspectateurs.

APOLLINE DE MALHERBE
Et bonne année à vous, elle ne commence pas forcément très bien pour vous si je peux me permettre parce que, j'ai une question ce matin, est-ce que vous dites tous ceux qui nous écoutent, qui nous regardent, qu'il va falloir qu'ils aillent faire le plein là, rapidement, pour anticiper ?

GABRIEL ATTAL
Ce que je leur dis c'est qu'on défend une réforme des retraites, qu'on propose une réforme des retraites qui vise à sauver notre système par répartition et à faire en sorte que tous les Français qui travaillent puissent compter sur une retraite quand ils auront atteint l'âge et qu'il y a…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais si je vous interroge sur le plein, vous avez bien compris Gabriel ATTAL.

GABRIEL ATTAL
Et qu'il y a, j'y viens, qu'il y a un débat, une discussion avec les organisations syndicales, une opposition d'un certain nombre de syndicats qui annoncent des mouvements. Moi je ne veux pas résumer la situation à un face à face entre le gouvernement et les syndicats, je pense que l'essentiel aujourd'hui c'est d'aller parler aux Français, c'est de convaincre les Français du bien-fondé de cette réforme et en tout cas c'est ce à quoi je vais m'atteler.

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais la question c'est est-ce que vous pourrez réussir à leur parler, est-ce qu'ils ne sont pas tout simplement bloqués, j'en veux pour preuve évidemment la déclaration d'Éric SELLINI ce matin de la CGT-Pétrole, il était l'invité de "Première édition" sur BFM TV, il travaille chez TOTAL, écoutez ce qu'il dit.

ÉRIC SELLINI, COORDINATEUR NATIONAL CGT TOTALENERGIES
J'appelle dès maintenant l'ensemble des salariés, quel que soit leur secteur, à se mobiliser dès maintenant et à rejoindre les raffineurs dans la grève. Si le conflit devait être amené à durer, il y aurait forcément des conséquences sur l'ensemble du raffinage, oui, bien sûr, avec potentiellement un arrêt des installations dans les semaines à venir, ça dépendra effectivement de la vitesse de réponse du gouvernement face à la mobilisation.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous allez vous retrouver dans ce bras de fer ?

GABRIEL ATTAL
Moi ce que je vous dis, encore une fois, c'est que je ne vois pas la situation comme un bras de fer ou un face à face, il y a une réforme, qui est nécessaire, qui est essentielle…

APOLLINE DE MALHERBE
Il s'adresse à vous, il dit ça dépend de vous, il dit…

GABRIEL ATTAL
Ça fait des mois, vous savez, qu'on discute…

APOLLINE DE MALHERBE
Ça sera bloqué ou pas bloqué selon votre vitesse de réaction, voilà ce qu'il dit.

GABRIEL ATTAL
Ça fait des mois qu'on travaille, qu'on discute avec les organisations syndicales, d'ailleurs la dernière fois que j'étais venu vous m'aviez interrogé sur le fait qu'on ait retardé la présentation de notre projet de loi, précisément parce qu'on voulait donner du temps à la concertation, il y a beaucoup de choses qui ont avancé sur des sujets comme la prise en compte de la pénibilité, des carrières longues, d'autres progrès, il y a des sujets d'ailleurs qui restent à la discussion, notamment sur l'emploi des seniors ou sur la prise en compte de certaines situations, mais il y a aussi des accords de fond. Vous avez des syndicats qui disent il faut équilibrer le système de retraite en augmentant les cotisations, c'est-à-dire soit pour les salariés moins de salaire, soit pour l'entreprise moins de possibilités d'embaucher, et nous c'est vrai qu'on est en désaccord avec cette ligne-là, on assume de dire que le système il faut l'équilibrer en travaillant globalement un peu plus, en tenant compte des situations de pénibilité et de carrières longues.

APOLLINE DE MALHERBE
On va revenir sur le détail et le contenu de cette réforme, mais si on en reste à la question de la mobilisation, là, ne serait-ce que cette mobilisation, parce qu'il y a eu la mobilisation qui a déjà été annoncée pour le 19 janvier comme première journée de blocages, dans l'ensemble des syndicats de la fonction publique, dans les transports, et puis je le disais à l'instant, dans le secteur du pétrole, avec trois dates déjà, 24 heures d'arrêt, notamment des raffineries, le 19, 48 heures d'arrêt le 26 février, le 26 janvier pardon, et 72 heures le 6 février, donc on a déjà ce calendrier, ça ne vous inquiète pas, est-ce que le pays est prêt à affronter ces blocages ?

GABRIEL ATTAL
Apolline de MALHERBE je pense que vous êtes une journaliste qui suit la vie politique depuis un certain temps et vous savez qu'à chaque fois qu'il y a une réforme des retraites, dans le passé, et notamment des réformes qui ont conduit à reculer l'âge légal de départ, il y a des mouvements, il y a des mouvements syndicaux, c'est un droit constitutionnel…

APOLLINE DE MALHERBE
La question c'est le timing, c'est-à-dire est-ce qu'il y avait une urgence absolue à le faire maintenant, dans le contexte dans lequel est la France, c'est-à-dire une France qui a déjà subi beaucoup de blocages, beaucoup de difficultés, que ce soit des difficultés politiques ou des difficultés liées au Covid, dans un contexte de l'inflation, est-ce que le choix de faire cette réforme maintenant, vous aviez peut-être la possibilité de le faire dans six mois ou dans un an, vous choisissez maintenant, c'est un moment dans lequel la France va être bloquée, c'est une responsabilité, c'est une priorité que vous avez choisie de mettre maintenant.

GABRIEL ATTAL
D'abord ça fait un certain temps qu'on parle de cette réforme, elle a été débattue, discutée, dans la campagne présidentielle, ensuite je pense qu'il y aura toujours des gens pour considérer que ce n'est jamais le bon moment de la faire, moi ce que je pense c'est qu'il y a urgence à sauver notre système de retraite, il y a 500 milliards de dette sur les 25 ans à venir si on ne fait pas la réforme, qu'il y a urgence à revaloriser les petites pensions pour ceux qui ont travaillé toute leur vie et qui aujourd'hui ont des pensions de retraite de 900, 950, 960 euros, on veut qu'ils aient une pension à 85 % du SMIC. Il y a urgence à prendre en compte le congé parental pour les femmes qui ont élevé leurs enfants et qui aujourd'hui voient un impact sur leur retraite, il y a urgence à tenir compte de la situation des Français qui ont été ou qui sont aidants, c'est-à-dire qui ont un enfant handicapé, qui prennent du temps pour s'en occuper…

APOLLINE DE MALHERBE
Et qui auront des trimestres qui seront en effet comptabilisés.

GABRIEL ATTAL
…Trimestres pris en compte dans la retraite, cette réforme c'est aussi ça, et moi je pense que ces mesures, dont je viens de parler, et il y en a d'autres, elles arrivent à convaincre une très grande majorité des Français. Il y a un débat sur le report de l'âge…

APOLLINE DE MALHERBE
Non, pas une très grande majorité, non.

GABRIEL ATTAL
Je parle de ces mesures, je pense que…

APOLLINE DE MALHERBE
Ces mesures-là oui…

GABRIEL ATTAL
Oui, mais elles sont importantes, moi ce que je ne veux pas c'est qu'on résume…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais enfin vous prenez un petit morceau quand même !

GABRIEL ATTAL
Ce que je ne veux pas c'est qu'on résume…

APOLLINE DE MALHERBE
Globalement cette réforme n'a pas l'adhésion de la majorité des Français aujourd'hui.

GABRIEL ATTAL
Ce que je ne veux pas c'est qu'on résume cette réforme à la dimension qui est essentielle, mais très importante, du report de l'âge légal de départ, il y a des dimensions très importantes pour la vie quotidienne des Français, pour améliorer leur situation au moment de la retraite, c'est important aussi d'en parler. Il y a des points qui sont aussi attendus par une grande majorité de Français, je pense notamment aux classes moyennes qui travaillent, la suppression des régimes spéciaux par exemple, ce n'est pas normal aujourd'hui qu'un chauffeur de bus à Paris, qui a la même carrière, le même salaire, la même entrée dans le travail que son collègue du Havre par exemple, puisse partir trois ou cinq ans avant lui, donc on met aussi fin à un certain nombre d'inégalités.

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais vous auriez pu faire le choix de mettre tout le monde sur un pied d'égalité, mais en tirant plutôt vers le haut.

GABRIEL ATTAL
Mais, Apolline de MALHERBE, on fait converger des régimes spéciaux, qui permettent aujourd'hui de partir à 52 ou 57 ans, quand vous avez les mêmes métiers, les mêmes professions, qui partent deux ou cinq ans plus tard, donc je pense que c'est aussi ce qui est attendu par nos concitoyens.

APOLLINE DE MALHERBE
Gabriel ATTAL, est-ce que dans cette question, là pour le coup de la mobilisation, quand vous entendez le responsable de la CGT-Pétrole qui dit tout dépendra de la vitesse de réaction du gouvernement, est-ce qu'il y a encore des points sur lesquels la réforme n'est pas figée, sur lesquels vous seriez prêt à continuer à négocier, parce que vous dites il y a eu des négociations, visiblement elles n'ont pas abouti, même, alors là sans parler de la CGT, la CFDT, qui est un syndicat qui était prêt à réformer avec vous, là il dit on n'est pas du tout d'accord, on n'est pas d'accord sur les termes, et Laurent BERGER sera un des premiers dans la mobilisation. Est-ce qu'il y a encore des points sur lesquels vous pourriez négocier avec eux ?

GABRIEL ATTAL
D'abord notre porte elle toujours ouverte, ça fait des mois qu'on discute avec les organisations syndicales, ce n'est pas pour maintenant fermer…

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais est-ce qu'il y a des choses à négocier, c'est-à-dire si c'est venir pour venir…

GABRIEL ATTAL
Ce n'est pas pour maintenant fermer la porte, et la présentation de la réforme par la Première ministre Élisabeth BORNE, c'est déjà un compromis, je rappelle qu'au départ c'était 65 ans, on est passé à 64 ans sur 10 ans, ensuite il y a des points sur lesquels on va avoir besoin de travailler avec les organisations syndicales, sur l'emploi des seniors et la mise en œuvre de l'index senior pour garantir que les entreprises recrutent et gardent dans l'emploi des seniors, sur la question de la prise en compte des congés pour les aidants, dont je parlais tout à l'heure, ces personnes qui doivent s'arrêter de travailler, ou passer à temps partiel parce qu'elles ont un proche en perte d'autonomie, un enfant handicapé, comment est-ce qu'on le prend en compte, évidemment qu'on travailler avec les syndicats.

APOLLINE DE MALHERBE
Sur la durée des cotisations, quand on aura commencé à 20 ans, il semble qu'il y ait quand même un petit biais, puis qu'Élisabeth BORNE avait dit : il n'y aura pas, jamais, plus de 43 années de cotisations, or, ceux qui ont commencé à travailler à 20 ans, eh bien ils vont forcément cotiser, enfin, si mes calculs sont bons, 44 ans, s'ils doivent partir à 64 ans. Est-ce que vous seriez prêts, à ce que, eux, ils partent à 63 ?

GABRIEL ATTAL
Il y a un âge légal de départ, qui est passé globalement à 64 ans. Mais moi je pense que ce qui est important de rappeler, c'est qu'avec notre réforme, vous aurez 40% des Français qui partiront avant l'âge légal.

APOLLINE DE MALHERBE
Non non, mais vous n'avez pas répondu là-dessus, Gabriel ATTAL. La question est très précise : il y a eu deux engagement de la Première ministre, oui, le départ à 64 ans, mais elle a dit, pas plus de 43 années de cotisations. Je vous reprends l'exemple d'une personne qui a commencé à travailler à 20 ans, si elle ne cotise pas plus de 43 ans, elle doit pouvoir partir à 63 ans.

GABRIEL ATTAL
Vous avez des personnes qui ont commencé à travailler à 20 ans, l'âge légal c'est 64 ans, si ces personnes ont eu un métier pénible, par exemple qu'elles ont travaillé la nuit, qu'elles ont été dans des postures pénibles, elles pourront partir avant l'âge légal de 64 ans. Ce que je vous dis…

APOLLINE DE MALHERBE
Ce qui veut dire qu'il y aura des personnes qui cotiseront plus que 43 ans.

GABRIEL ATTAL
Il y aura des personnes…

APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes en train de nous dire ce matin qu'il y a des gens qui cotiseront 44 ou 45 ans.

GABRIEL ATTAL
Il y aura des personnes, Apolline de MALHERBE, qui ont commencé à travailler à 20 ans, qui partiront à 64 ans, oui, c'est le nouvel âge légal. Maintenant, ce que je redis…

APOLLINE DE MALHERBE
Oui, mais alors, pourquoi avoir dit : "Il n'y aura jamais plus de 43 années de cotisation" ? C'est faux.

GABRIEL ATTAL
Vous aurez 40 % des Français, 40 % des Français partiront avant l'âge légal de départ, et d'ailleurs je crois qu'on est en train de mettre en place un système pour les carrières longues, qui est plus lisible. Si vous avez commencé à travailler avant 16 ans, vous pourrez partir jusqu'à 6 ans avant les autres. Si vous avez commencé à travailler…

APOLLINE DE MALHERBE
En fait, celui qui n'a pas de bol, c'est celui qui a commencé à 20 ans.

GABRIEL ATTAL
Si vous avez commencé à travailler entre 16 et 18 ans, vous pourrez partir jusqu'à 4 ans avant les autres. Si vous avez commencé à travailler entre 18 et 20 ans, vous pourrez partir jusqu'à 2 ans, avant les autres…

APOLLINE DE MALHERBE
C'est bien ce que je vous dis, si vous travaillez à 20 ans tout pile, vous allez du coup cotiser une année de plus que tout le reste de la population.

GABRIEL ATTAL
Et ensuite vous partirez avant la plupart de la population qui a commencé à travailler plus tard et qui partira plus tard que 64 ans. Vous partirez avant eux. Et je rappelle que 40 % des personnes qui travaillent, pourront partir avant cet âge légal de 64 ans…

APOLLINE DE MALHERBE
Bon, ils cotiseront un an de plus…

GABRIEL ATTAL
… parce qu'elles ont eu des métiers pénibles, parce qu'elles ont commencé à travailler tôt, et moi je veux vraiment réaffirmer que cette réforme elle demande plus d'efforts à ceux qui ont commencé à travailler plus tard.

APOLLINE DE MALHERBE
Il y a des gens dans votre proche entourage qui visiblement n'ont toujours pas compris et qui demandent des gages, en l'occurrence c'est François BAYROU et Édouard PHILIPPE, qui pourtant sont tous les deux normalement associés à la majorité. François BAYROU qui dit, quand on lui demande si cette réforme est juste, il dit : eh bien, ça dépend en gros. Il dit "je sais très bien que le gouvernement n'est pas de mon avis, mais je pense qu'il faut quand même faire contribuer les entreprises, qui contribuent certes déjà pas mal, mais j'ai chiffré cet effort à environ 0,7%. Mon idée est de chercher la solution pour que dans les semaines qui viennent, où ce débat va se développer, ce dialogue avec les Français, y compris les plus contestataires, qu'on puisse essayer de trouver des marges de progrès, et faire en sorte que les Français trouvent que le nouveau système est juste".

GABRIEL ATTAL
François BAYROU, c'est un acteur essentiel de la majorité. Il a toujours une parole mesurée, pondérée, et je rappelle que dans ses propos il rappelle toujours ce que l'on fait, c'est-à-dire que le système de retraite est aujourd'hui en danger, et que si on ne fait pas de réforme ce sera la faillite, ou alors ce sera la perte de pouvoir d'achat pour les Français ou la baisse des pensions pour nos retraités.

APOLLINE DE MALHERBE
Comment jugez-vous sa proposition, elle est très précise, "je réitère ma proposition dit-il, de l'inclusion dans cette réforme d'une hausse des cotisations patronales".

GABRIEL ATTAL
Je suis ministre du Budget, et à Bercy on a tous les outils qui nous permettent de mesurer l'impact de propositions qui sont faites. Si on considérait qu'il fallait équilibrer le système de retraite en augmentant les cotisations des entreprises, il y aurait entre 150 000 et 200 000 emplois qui seraient supprimés. Qu'est-ce qu'on a vu ces dernières années ? On a réussi à atteindre le taux de chômage le plus bas depuis 15 ans, le taux de chômage des jeunes le plus bas depuis 40 ans, le taux d'emploi le plus haut depuis qu'il est mesuré. Ça on l'a obtenu comment ? On l'a obtenu notamment en renforçant la compétitivité de nos entreprises, pour leur permettre de se développer, pour leur permettre de recruter en faisant baisser le coût du travail. Il ne faut pas faire le chemin inverse en renchérissant le coût du travail, vous aurez des emplois qui seraient détruits.

APOLLINE DE MALHERBE
Donc, la proposition de François BAYROU c'est non, passons à celle d'Édouard PHILIPPE…

GABRIEL ATTAL
Parce qu'il y a beaucoup d'autres sujets sur lesquels évidemment on est en accord avec…

APOLLINE DE MALHERBE
Édouard PHILIPPE, qui a été votre Premier ministre, et qui pose aussi ses conditions. Quand on lui demande s'il soutiendra cette réforme, il répond "si". Si l'on va vers un système qui équilibre à terme les retraites, si la mesure que le gouvernement propose a un effet, le même effet sur la réforme et sur l'équilibre qu'un report à 65 ans, alors ce sera oui. Mais ce n'est pas complètement gagné.

GABRIEL ATTAL
Non mais si…

APOLLINE DE MALHERBE
Il a un petit doute.

GABRIEL ATTAL
La réforme qui a été annoncé par la Première ministre, elle permet le retour à l'équilibre du système de retraites en 2030, et elle permet en même temps de financer des progrès pour les Français. Moi je le redis, avoir une retraite minimale à 85 % du smic, pour des gens qui ont travaillé toute leur vie, ce n'est pas pour tout le monde, c'est pour des gens qui ont travaillé toute leur vie et qui aujourd'hui ont des retraites en dessous de 1 000 euros, parfois en dessous de 900 euros. C'est quand même un progrès majeur. Et on arrive…

APOLLINE DE MALHERBE
Mais ce n'est pas à moi qu'il faut le dire, c'est à Édouard PHILIPPE.

GABRIEL ATTAL
Mais on arrive à le financer en équilibrant notre système. Donc les conditions que vous évoquez, sont remplies par les annonces de la Première ministre.

APOLLINE DE MALHERBE
C'est pour qui cette réforme ? C'est pour Bruxelles, c'est pour les marchés, c'est pour leur donner des gages ?

GABRIEL ATTAL Cette réforme elle est pour les Français, Apolline de MALHERBE, et notamment pour les Français de classe moyenne, qui travaillent, qui sont ceux moi à qui je veux vraiment m'adresser, et la dernière fois que j'étais venu on en avait parlé, qui ont aujourd'hui le sentiment souvent de travailler pour d'autres. Et moi je ne veux pas qu'ils aient le sentiment de travailler pour rien. Qui voient les retraites pour lesquelles ils ont cotisé partir en fumée. Les plus riches, les nantis, les à 10 % des plus riches, vous savez eux ils peuvent considérer que leur pension de retraite à laquelle ils auront droit est accessoire, parce qu'ils ont accumulé un patrimoine. Il y a des Français qui ne peuvent pas cumuler un patrimoine, pour qui la retraite c'est essentiel.

APOLLINE DE MALHERBE
Je recevais hier matin Xavier BERTRAND qui disait : c'est une réforme faite par des gens qui vont bien pour des gens qui vont bien. Et Jean-Claude MAILLY, complètement à l'autre bout, qui lui est l'ancien secrétaire général de Force ouvrière, qui dit à peu près la même chose, et il le disait ce matin à mon micro de RMC.

JEAN-CLAUDE MAILLY, ANCIEN SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DE FORCE OUVRIÈRE
Ce sont les engagements de la France vis-à-vis de l'Europe. Là on a dépassé les 3000 milliards de dette, on a le Fonds monétaire international qui dit : attention attention, il faudrait reprendre quelques réformes dites structurelles, les alertes européennes, bon, voilà, ça fait beaucoup, donc il faut montrer une forme de gage si vous voulez, oui, c'est ça, aux marchés, aux instances européennes vis-à-vis des engagements qu'on a pris. Après c'est un choix budgétaire, comment on fait pour réduire des dépenses ? Et là, les axes privilégiés c'est la retraite, c'est évident La motivation premières je pense qu'elle est là.

APOLLINE DE MALHERBE
Pour faire plaisir à Bruxelles et aux marchés.

GABRIEL ATTAL
Non, la réforme des retraites elle finance le système de retraite. Et si on ne le fait pas, soit on devra baisser le salaire des Français en augmentant les cotisations, soit baisser les pensions des retraités, ou alors effectivement continuer les déficits et prendre de l'argent de l'État, du budget de l'État, pour combler le déficit des retraites, ça veut dire moins d'argent pour l'école, moins d'argent pour l'hôpital, moins d'argent pour la sécurité des Français, et ça c'est évidemment pas notre souhait. Donc la réforme des retraites c'est pour le système de retraite, pour que les Français qui travaillent, qui n'ont pas d'autre patrimoine que leur travail et que ce qu'ils ont cotisé pour bénéficier d'une retraite, puissent compter sur leur retraite au moment de la liquider. C'est pour eux qu'on fait cette réforme. Encore une fois, vous avez des Français qui peuvent se dire : ma retraite ça sera accessoire, ils sont quand même minoritaires dans le pays, il faut aller vraiment très très très bien pour se dire ça, mais ce n'est pas pour eux qu'on fait cette réforme, on la fait pour ceux qui doivent pouvoir compter sur une retraite, et si on garde un système qui est totalement déséquilibré, totalement en déficit avec 500 milliards de dettes en plus sur les 25 ans qui viennent, leur possibilité de bénéficier d'une retraite serait fragilisée.

APOLLINE DE MALHERBE
La retraite à 1 200 euros, c'est pour tout le monde, c'est-à-dire y compris les retraités actuels qui parfois ont des retraites en dessous de 1 200 euros ?

GABRIEL ATTAL
Oui, la Première ministre l'a dit, il faut avoir une carrière complète, parce que sinon il y aurait une forme d'injustice, encore une fois, je vous renvoie à ce que je disais sur le travail, pour des Français qui ont travaillé toute leur vie. Quand on a travaillé toute sa vie, on ne doit pas avoir la même retraite que quelqu'un qui n'a pas travaillé toute sa vie.

APOLLINE DE MALHERBE
Ceux qui ont 80 ans aujourd'hui, vous n'allez pas leur dire : "ah ben oui, mais vous n'avez pas eu une carrière complète", ils ne vont pas se remettre à bosser.

GABRIEL ATTAL
Alors, Apolline de MALHERBE…

APOLLINE DE MALHERBE
Parce que, eux, auront une pension à plus de 1 200 euros.

GABRIEL ATTAL
… les 85 % du smic, c'est pour tous les retraités qui ont travaillé toute leur vie. Ensuite, si jamais vous n'avez pas atteint le nombre de trimestres pour dire que vous avez une carrière complète, il y aura une revalorisation qui sera. Proratisée, en fonction du nombre de trimestres…

APOLLINE DE MALHERBE
Donc ça ne sera pas 1 200 euros pour eux.

GABRIEL ATTAL
En fonction du nombre de trimestres qui vous manquent. 85 % du smic, 1 200 euros aujourd'hui, c'est pour les retraités qui ont eu une carrière complète.

APOLLINE DE MALHERBE
C'est brut ou c'est net ?

GABRIEL ATTAL
Alors, quand vous avez une retraite on parle toujours de brut, et vous avez ensuite un petit delta qui dépend notamment de votre taux de CSG. Le taux de CSG il y en a quasiment autant qu'il y de retraités, puisqu'il ne dépend pas uniquement de votre montant de retraite, mais de celui aussi de votre conjoint, en tout cas des revenus du foyer et du ménage. On parle de personnes qui ont eu un salaire très faible toute leur vie, donc a priori ils ont soit un taux de CSG à 0 soit un taux de CSG super réduit…

APOLLINE DE MALHERBE
Donc c'est quasi net.

GABRIEL ATTAL
C'est quasi net, et c'est net pour la plupart de ceux qui en bénéficieront.

APOLLINE DE MALHERBE
Il y a deux points dont je voudrais qu'on parle à nouveau, qui sont la question du pouvoir d'achat et la question des OQTF. Alors, le pouvoir d'achat d'abord, parce qu'il y a une loi, une proposition de loi de la majorité, qui arrive à l'Assemblée, et qui a été votée en Commission économique hier, et qui vise les négociations entre les industriels et les distributeurs. Et si je veux m'arrêter un instant là-dessus, c'est qu'il semble que le consommateur soit le grand perdant. L'idée de cette nouvelle loi ce serait que quand il y a des négociations entre les industriels, en gros COCA-COLA, DANONE et la grande distribution, si ces négociations n'aboutissent pas, c'est l'industriel, c'est le gros groupe qui gagne. Écoutez le patron de LIDL qui était sur mon antenne ce matin, sur RMC.

MICHEL BIERO, DIRECTEUR EXÉCUTIF ACHATS ET MARKETING DE LIDL FRANCE
Pour moi ce sont des pompiers pyromanes. D'un côté on fait des boucliers anti-inflation et de l'autre côté on va voter une loi qui est pro-inflation et qui va faire valser les étiquettes à des 20, des 2, des 30% d'inflation.

APOLLINE DE MALHERBE
Le pompier pyromane c'est vous, enfin, c'est le patron de LIDL qui le dit. Il dit vous êtes des pompiers pyromanes avec cette loi.

GABRIEL ATTAL
Non, puisque, c'est une proposition de loi, qui vient de députés, qui ne vient pas du gouvernement.

APOLLINE DE MALHERBE
Mais députés de la majorité.

GABRIEL ATTAL
Qui n'est pas encore adoptée définitivement. Il y a une discussion parlementaire qui se poursuit. Pour connaître le député DESCROZAILLE, qui est à l'initiative de ce texte, enfin évidemment que son objectif ce n'est pas que les prix augmentent, c'est d'avoir une meilleure répartition de la valeur entre la grande distribution et les fournisseurs. Donc il y a un travail qui va se poursuivre, mais évidemment on sera toujours, là je parle du gouvernement, extrêmement attentifs à ce qu'on ne mette pas en risque la facture des Français.

APOLLINE DE MALHERBE
Donc vous dites ce matin, qu'en l'état, il n'est pas question que cette loi passe.

GABRIEL ATTAL
Non, ce que je dis, c'est qu'il y a des travaux qui se poursuivent et qu'encore une fois c'est pas du tout l'intention de l'auteur de ce texte…

APOLLINE DE MALHERBE
Ce n'est peut-être pas l'intention, je ne dis pas du tout que c'est de l'intention…

GABRIEL ATTAL
… que vous pouvez inviter je pense…

APOLLINE DE MALHERBE
… je dis que dans les faits, voilà la traduction sur les prix, que donne…

GABRIEL ATTAL
Je ne suis pas sûr que l'on puisse dire ça, je crois que c'est une histoire de négociations de contrats, et que s'il n'y a pas d'accord sur le contrat, le contrat tombe à un certain moment. Je crois que c'est ça la proposition qui est faite, mais encore une fois vous pourrez inviter l'auteur de ce texte. Moi ce que je dis, c'est que le gouvernement sera toujours vigilant. Et puisque vous me parlez de pouvoir d'achat, Apolline de MALHERBE, vous me permettrez de rappeler que lundi prochain ouvre la plateforme qui va permettre aux Français qui utilisent leur voiture pour aller travailler, et qui voient le prix de l'essence augmenter, de bénéficier d'une aide pour être accompagnés, ça sera lancé la semaine prochaine, je pense que c'est important de le dire. Encore une fois on l'accompagne les Français qui travaillent, c'est ma priorité.

APOLLINE DE MALHERBE
Gabriel ATTAL, cette attaque qui a fait six blessés hier matin Gare du Nord, on a appris que l'assaillant était sous le coup d'une OQTF, une Obligation de Quitter le Territoire Français, pourquoi on appelle ça "obligation" puisque visiblement ce n'est pas du tout obligatoire ?

GABRIEL ATTAL
D'abord moi je veux avoir une pensée pour les victimes, les blessés, et puis rendre hommage aux policiers qui sont intervenus pour neutraliser l'assaillant. Je ne suis pas en charge de ce sujet, je n'ai pas toutes les informations…

APOLLINE DE MALHERBE
Je sais bien, mais je veux dire vous êtes ministre, vous avez été porte-parole du gouvernement…

GABRIEL ATTAL
Mais je n'ai pas toutes les informations, ce qui est certain…

APOLLINE DE MALHERBE
Vous savez que cette question, malheureusement des OQTF, elle revient régulièrement aujourd'hui…

GABRIEL ATTAL
C'est une question majeure, bien sûr.

APOLLINE DE MALHERBE
Et on se rend compte qu'il y a quand même… c'est un leurre en fait, non ?

GABRIEL ATTAL
Vous avez des personnes, aujourd'hui sur notre sol, qui n'ont rien à faire sur notre sol, ça c'est un fait, c'est établi, je ne vais pas vous faire de langue de bois en vous disant l'inverse, la question c'est comment est-ce que vous faites en sorte qu'il y ait moins de personnes, qui n'ont rien à faire chez nous, qui arrivent, donc ça c'est tout le renforcement aux frontières, et je peux vous dire qu'on refuse beaucoup plus de personnes aux frontières grâce aux moyens qui ont été renforcés, et deux, comment est-ce que vous expulsez les personnes qui n'ont pas vocation à rester en France.

APOLLINE DE MALHERBE
Au ministère de l'Intérieur on nous explique que comme il est libyen, enfin en tout cas il prétend être libyen, parce que toute la question c'est visiblement quand on dit qu'on est libyen, quand on n'a pas de papiers, eh bien c'est plus commode, puisqu'ils savent qu'au ministère de l'Intérieur, comme nous le confirme tout à fait le cabinet du ministre, eh bien la nationalité libyenne il n'est pas possible de l'éloigner parce qu'il y a de l'instabilité dans le pays et parce qu'il n'y a pas de canal d'échange dans l'identification des ressortissants, donc en fait vous pouvez ne pas être libyen, dire que vous êtes libyen, et vous êtes carrément sûr de ne jamais être expulsé.

GABRIEL ATTAL
Je ne crois pas que ce soit aussi simple que ça et encore une fois…

APOLLINE DE MALHERBE
Il y a un doute sur…

GABRIEL ATTAL
C'est le ministère de l'Intérieur, il y a des vérifications qui sont en cours, moi je suis très prudent sur ces questions-là, ce qui est certain, encore une fois, c'est qu'on doit être plus efficace dans notre capacité à expulser des personnes qui n'ont rien à faire sur notre sol, et vous savez qu'il y a un projet de loi porté par Gérald DARMANIN sur l'immigration, qui va être présenté prochainement, pour qu'on soit plus efficace en la matière pour les expulsions.

APOLLINE DE MALHERBE
Vous êtes pour l'uniforme à l'école ?

GABRIEL ATTAL
C'est un beau débat. Moi j'ai été secrétaire d'État à l'Éducation, c'est un vrai débat, j'ai mis en place le Service national universel et j'ai décidé qu'il y aurait un uniforme, ça m'avait été critiqué à l'époque, moi je pense que ça fait partie des sujets qui pourraient donner lieu à une expérimentation, on pourrait tenter les choses, moi je crois beaucoup à l'autonomie des établissements scolaires, donc il pourrait y avoir…

APOLLINE DE MALHERBE
Brigitte MACRON dit qu'elle est pour, c'est assez simple, elle répond oui.

GABRIEL ATTAL
Mais elle est très engagée, Brigitte MACRON, sur la question, vous savez, sur la question notamment de lutte contre le harcèlement scolaire.

APOLLINE DE MALHERBE
Mais vous vous n'allez pas prendre parti ?

GABRIEL ATTAL
Si, moi ce que je dis c'est que je suis en tout cas…

APOLLINE DE MALHERBE
Personnellement vous y seriez plutôt favorable ?

GABRIEL ATTAL
Que je suis en tout cas ouvert à ce qu'on puisse l'expérimenter, le tester, je pense que c'est toujours positif d'essayer des choses.

APOLLINE DE MALHERBE
C'est déjà expérimenté dans les départements, ne serait-ce que…

GABRIEL ATTAL
En Outre-mer par exemple.

APOLLINE DE MALHERBE
En Outre-mer.

GABRIEL ATTAL
J'ai été allé en Martinique, je crois qu'il y a un tiers des établissements scolaires où vous avez l'uniforme.

APOLLINE DE MALHERBE
Donc on n'a peut-être pas besoin de faire plus d'expérimentations, c'est déjà expérimenté.

GABRIEL ATTAL
Moi, donner la possibilité aux chefs d'établissement, ou aux parents d'élèves, il pourrait y avoir des consultations, de décider de la mise en place de l'uniforme, ou d'une tenue commune, à l'échelle de leur établissement, dans un premier temps en tout cas, pourquoi pas.

APOLLINE DE MALHERBE
Gabriel ATTAL, ministre des Comptes publics, merci d'avoir répondu à mes questions ce matin


source : Service d'information du Gouvernement, le 13 janvier 2023