Texte intégral
ORIANE MANCINI
Et notre premier invité politique ce matin, c’est Stanislas GUERINI. Bonjour.
STANISLAS GUERINI
Bonjour.
ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'être avec nous, ministre de la Transformation et de la Fonction publiques. On est ensemble pendant 20 minutes, pour une interview en partenariat avec la Presse régionale, représentée par Stéphane VERNAY de Ouest France. Bonjour Stéphane.
STEPHANE VERNAY
Bonjour bonjour.
STANISLAS GUERINI
Et bonjour.
ORIANE MANCINI
Et Stanislas GUERINI on va évidemment parler de la réforme des retraites on va évidemment parler de la réforme des retraites, puisque vous êtes l'un des ministres à l'oeuvre dans cette réforme. Elle a été présentée hier en Conseil des ministres. L'exécutif qui reste ferme sur le report de l'âge légal de départ à 64 ans. Vous restez sourds à la mobilisation qui s’est exprimée jeudi dernier dans la rue ?
STANISLAS GUERINI
Je ne crois pas qu'on puisse dire qu'on est sourd, quand on a pendant des semaines, discuté, échangé avec les organisations syndicales, fait bouger le projet de loi. On l'a rappelé hier, le projet de loi qui a été présenté, ce n’est pas le projet de loi qui était envisagé initialement, sur beaucoup d'aspects. Sur l'âge, je rappelle que le président de la République a fait campagne sur un report de l'âge de 65 ans, de n’est pas le choix qui a été fait au final, avec 64 an, avec une augmentation de la durée de cotisation. Mais aussi sur bien d'autres aspects. Je viens devant vous en tant que ministre de la Fonction publique, en ayant intégré, en ayant enrichi le texte proposé, de beaucoup de modifications qui étaient portées par les syndicats, je pense à des mesures très importantes sur la retraite progressive, sur la portabilité des droits pour les catégories actives. Tout ça, c'est le fruit du dialogue social.
STEPHANE VERNAY
Il y a quand même eu plus d'un million de personnes dans la rue la semaine dernière. Est-ce que vous vous attendiez à une mobilisation pareille et qu'est-ce que ça change ?
STANISLAS GUERINI
Mais, vous savez, nous on n'est pas là pour faire des pronostics de mobilisation, on est là…
STEPHANE VERNAY
Mais personne ne s’attendait à ce qu'il y ait autant de monde.
STANISLAS GUERINI
Vraiment, sincèrement, moi je ne me suis jamais livré au débat de savoir combien il y aurait de personnes dans la rue. C'est la démocratie. Les gens ont manifesté, ils ont manifesté des désaccords, de la colère, parfois des inquiétudes aussi qui montrent qu'il faut qu'on continue à convaincre…
STEPHANE VERNAY
Ça n’aura aucun impact sur votre façon d’aborder les choses.
STANISLAS GUERINI
Mais, je crois… ce n’est pas vrai de dire ça, aucun impact, on va maintenant, après avoir présenté le texte, rentrer dans un temps parlementaire, et donc les parlementaires vont pouvoir enrichir le texte, bouger les lignes. Nous on a été clair sur un point…
ORIANE MANCINI
Mais lesquelles, en fait, c’est ça que l’on ne comprend pas bien, Stanislas GUERINI.
STANISLAS GUERINI
… je rappelle aujourd'hui devant vous, c'est l'équilibre. Ce n’est pas un gros mot de parler d'équilibre, ce n’est pas simplement une vision financière pour se faire plaisir. L'équilibre d'un système de retraite c'est la garantie de la solidarité entre les générations. C'est la garantie que, en réalité on continue de préserver un système par répartition. Parce qu'un système de retraite qui n'est plus équilibré, ça n'est plus un système par répartition. Donc ça c'est le cadre que nous fixons. Et si dans ce cadre-là on peut continuer à corriger des inégalités, continuer à travailler sur la question des carrières hachées, continuer à travailler sur la question du travail des seniors, sur toutes ces questions qui sont essentielles, et qui sont au fond au coeur du débat de société, c'est-à-dire sur la qualité du travail, eh bien il faudra le faire bien entendu, mais il me semble que, autant il est légitime et démocratique que les Français qui sont en désaccord avec cette réforme puissent manifester, il est tout aussi légitime que le gouvernement, et singulièrement le président de la République qui a présenté un programme aux Français, puisse présenter un projet de loi et le soumettre à discussion au Parlement.
ORIANE MANCINI
Oui, mais sauf que le coeur de cette contestation, et vous l'avez entendu jeudi dans la rue, c'est les la question des 64 ans. Est-ce qu'il n’y a pas eu aussi une erreur du gouvernement de faire tourner cette réforme autour des 64 ans ? Vos autres mesures, elles ne sont pas très audibles, reconnaissez-le.
STANISLAS GUERINI
Mais, vous savez, je pense que c'est jamais très populaire que de réclamer un effort collectif. Moi je pense que si on veut être entendu, crédible sur l'amélioration du système que nous proposons, il faut dire les choses telles qu'elles sont. Oui c'est un effort que nous demandons et c'est une réforme qui est d'abord nécessaire. Je crois que c'est très important de le dire comme ça, pour pouvoir simplement être crédible. Elle est nécessaire pourquoi ? En réalité pour des raisons démographiques, et qu'il faut répéter, parce que c'est très important de le comprendre. Dans les années 60, il y avait 4 actifs pour 1 retraité, aujourd'hui à 1,7 actif pour 1 retraité, et donc quand on pose ce fait, qui n’est pas une opinion, ce fait incontestable, on voit bien qu'il y a une nécessité de porter à cette réforme. J'insiste sur le fait que nous aurions pu rester sourds, pour reprendre votre expression, et dire : « Nous on avait dit 65 ans, ça reste 64 ans…65 ans », et on a fait un choix différent, un choix qui me semble plus juste d'ailleurs, de combiner la durée de cotisation et l'âge de départ à la retraite. C’est déjà le fruit d’une écoute et d’un respect de la démocratie.
ORIANE MANCINI
Mais cette nécessité que vous nous expliquez, cette nécessité d'une réforme pour sauver le régime, vous voyez bien que ça ne passe pas. On entend beaucoup de Français qui disent : mais 12 milliards de déficit, c'est rien, on a mis des milliards pendant le Covid, pourquoi on ne peut pas mettre 12 milliards, pourquoi on ne peut pas aller les chercher ailleurs ?
STANISLAS GUERINI
Deux remarques. D'abord si vous voulez être parfaitement populaire, vous ne faites pas de réforme des retraites, et vous êtes bien plus tranquille comme ça. Est-ce que vous faites ce qui correspond à votre responsabilité ? Je ne crois pas. Et donc notre responsabilité, c'est de porter les réformes qui nous semblent nécessaires, et au fond justes, justes pour les prochaines générations, parce que c'est ça qu'il faut expliquer aussi. Si on ne réforme pas le système de retraite, mécaniquement les pensions de retraite vont baisser, et d'ailleurs personne ne conteste ce fait là ; mécaniquement les pensions de nos parents, de nos grands-parents, mais aussi de nos enfants et petits-enfants, vont baisser et voire même le système sera en danger. Et donc c'est pour ça, alors bien sûr ce n'est pas la réforme la plus populaire, elle ne l'était pas pendant la campagne, je le rappelle, quand les études d'opinion mesuraient la popularité des différentes réformes que nous portions, pendant les élections législatives notamment, parce que nous avons fait campagne de façon transparente, ça n’était pas la réforme des retraites qui venait tout en haut du classement. Eh bien nous le faisons quand même, parce que nous avons cet esprit de responsabilité, et parce que je veux le souligner ici, grâce aux efforts collectifs on va pouvoir corriger des injustices, on va pouvoir améliorer les pensions de retraite, notamment des plus faibles pensions du pays, de ceux qui ont travaillé toute leur vie et qui ont aujourd'hui en vue le bénéfice de 100 € par mois, de pouvoir passer de 1 100 à 1 200 € de pension de retraite. Je pense que ça c'est tout à fait important.
STEPHANE VERNAY
Alors, parmi les choses qui peuvent être amendées ou améliorées dans le projet, vous évoquiez un travail sur les inégalités, les carrières hachées, le travail, l’employabilité des seniors. Peut-être qu'on peut revenir sur ces différents points. Par exemple vous venez d'évoquer la pension minimale, est-ce qu'elle sera bien de 1 200 € brut pour toutes les personnes qui ont eu une carrière complète ? Olivier DUSSOPT laissait entendre qu’il pourrait y avoir quelques difficultés techniques par rapport à ça.
STANISLAS GUERINI
Non, ce ne sont pas des difficultés techniques. Il y a eu quelques confusions sur le brut ou le net. Je veux être le plus clair possible ce matin…
STEPHANE VERNAY
Est-ce qu’éventuellement, pour soulever ou lever ce point de friction, ce serait possible de passer à 1 200 € nets pour… comme pension minimale ?
STANISLAS GUERINI
Ce n’est pas un point de friction, et je vais essayer de m'expliquer. D'abord, c'est 85 € du smic…
ORIANE MANCINI
85%.
STANISLAS GUERINI
Pardon, oui, ça commence bien, si je veux expliquer en disant euro à la place de %. 85% du smic net. Voilà, parce qu'il y a eu d'abord une première confusion. Et ensuite, ce sont effectivement 1 200 € bruts, mais quand on dit ça, on laisse parfois penser qu'il y a les mêmes charges que vous avez, quand vous avez votre salaire brut. Ça n'est pas le cas. Une pension de retraite, il y a simplement la CSG dessus. La CSG, elle peut être variable en fonction de la composition du foyer. C'est pour ça qu'on ne veut pas donner un montant de CSG. Pour les personnes concernées, ce sont souvent les plus faibles rémunérations, ce sont la majorité du temps dans une CSG à taux très réduit, donc ce sont quelques dizaines d'euros qui seront retranchés de ces 1 200 €. Voilà pour est parfaitement clair. Donc il n’y a pas d'ambiguïté sur cette question-là, il y a simplement la CSG qui continuera de s'appliquer comme pour toutes les pensions de retraite, sur la pension minimum.
STEPHANE VERNAY
Donc il n’y aura pas d’évolution sur ce point.
STANISLAS GUERINI
Mais, l’augmentation de 100 €, par rapport à ce qu'était à pension minimum auparavant, elle sera intacte d'une certaine façon, parce que ce qu'il faut préciser, c'est la CSG elle s'appliquait aussi sur la pension minimum avant la réforme des retraites. Donc je pense qu'il faut de la clarté, tout simplement. Ce sont des sujets qui sont très rapidement techniques, parce qu'il faut regarder toutes les lignes d'une certaine façon, mais en l’expliquant bien, je pense qu'on montre qu’il y a une vraie mesure de justice, qui est d’augmenter de façon significative les plus faibles pensions dans notre pays.
STEPHANE VERNAY
Autre point de friction, est-ce que vous reviendrez sur les 44 annuités nécessaires pour les personnes qui ont commencé à travailler plus tôt ?
STANISLAS GUERINI
Mais, on demande à tous un effort. Voilà, là encore je pense qu'il faut dire les choses très clairement. Pour certaines personnes, 2 ans de plus, c'est la majorité, 6 personnes sur 10, et puis pour d'autres, un an de plus, c'est le cas des personnes que vous mentionnez. Donc cet effort il est moindre pour ces personnes-là, mais ça reste un effort quand même…
ORIANE MANCINI
Donc ça, vous ne reviendrez pas dessus. Parce que vous dites « on écoute les parlementaires, on écoute les modifications ». Il y a des parlementaires, et notamment LR, qui sont plutôt enclins à soutenir cette réforme, qui disent : sur les 44 annuités, ça ce n’est pas possible. Ça veut dire que là-dessus vous ne les écouterez pas, ça ne changera pas ?
STANISLAS GUERINI
Ce que je vous dis ce matin, c’est que, tel est le texte que nous présentons au Parlement. Il a été travaillé en conscience, en lucidité sur l'ensemble de ces points-là. Si les parlementaires souhaitent revenir précisément sur cet aspect, et l'envisagent comme un enrichissement prioritaire du texte, eh bien ils seront libres de pouvoir voter le texte de cette façon-là, mais dans un cadre, je veux rappeler devant vous, dans un cadre d’équilibre global, et donc se fera…
ORIANE MANCINI
Mais vous l’accepterez, parce que les économies, elles se font aussi beaucoup sur ces 44 ans, Stanislas GUERINI. Est-ce que vous accepterez que personne ne travaille plus de 42 ans ?
STANISLAS GUERINI
Mais alors, dans ce cas-là, ça veut dire qu’il faudra retravailler l'équilibre d'ensemble, pour que la copie de sortie puisse rester équilibrée. Vous avez compris que le projet que nous préparons…
ORIANE MANCINI
Donc oui, oui pour revenir sur ces 44 ans, à condition de trouver d'autres sources d’économies.
STANISLAS GUERINI
Mais, de façon générale, je pense pouvoir dire, et je sors de ma condition en le disant, je le travaille évidemment avec Olivier DUSSOPT, avec la Première ministre, et Olivier DUSSOPT est le ministre en charge des grands équilibres de cette réforme. Et donc il y aura un dialogue avec le gouvernement Mais ce que je veux dire, c'est que le gouvernement n'est pas insensible ou sourd à toutes les revendications, mais est très clair sur un équilibre global, et donc ces modifications, ces enrichissements, il faudra les porter dans le cadre d'un système qui reste équilibré, c'est-à-dire responsable vis-à-vis des générations futures.
ORIANE MANCINI
Vous défendez beaucoup une réforme juste, c'est un mot qu'on entend dans la bouche de l'exécutif, pourtant hier sur notre antenne, Franck RIESTER, le ministre chargé des Relations avec le Parlement, a reconnu que les femmes seraient un peu pénalisées par cette réforme. On est quand même loin d'une réforme juste, du coup.
STANISLAS GUERINI
Ça dépend ce qu'on veut dire par " pénalisées ". Vous faites mention de ce qui ressort de l'étude d'impact de cette réforme. Là aussi il faut dire les choses de façon transparente et complète. La durée de cotisation des femmes a augmenté un peu légèrement à celle des hommes, en moyenne. Mais il faut apporter plusieurs précisions. D'abord, les femmes continueront de partir à un âge de départ effectif à la retraite, similaire à celui des hommes, après la réforme par rapport à avant la réforme. Puis, la deuxième précision qu'il faut apporte, c’est que la pension de retraite des femmes va en revanche augmenter significativement plus fortement que celle des hommes. Et donc c'est ça dire les choses de façon complète. Avant la réforme vous aviez 30% d’écart de pensions entre les femmes et les hommes. Après la réforme, à terme, on va réduire d’un tiers cet écart. Et donc c'est ça aussi la justice qui est apportée par cette réforme-là. Elle réclame des efforts collectifs, mais elle va permettre d'améliorer les pensions de retraite, et …
ORIANE MANCINI
Mais elles seront pénalisées, concernant les trimestres validés par …
STANISLAS GUERINI
… significativement des plus faibles pensions de retraite, ce sont 30% des femmes qui vont bénéficier de l'augmentation de la pension minimale, qu'on mentionnait à l'instant, ce sont 15% des hommes simplement. Donc, dans son ensemble, oui je dis que cette réforme est une réforme juste, une réforme nécessaire, c'est-à-dire qu'elle réclame un effort collectif à un allongement de la durée du travail, mais cet allongement de la durée du travail il va permettre de financer les améliorations du système, il va permettre de diminuer les injustices concernant la rémunération entre les femmes et les hommes. Le travail ne va pas s'arrêter là. Et on voit bien que ces inégalités à la retraite, elles sont générées par des inégalités dans la carrière, et donc c'est ça aussi qu'il faut continuer à travailler.
ORIANE MANCINI
Donc il n'aurait pas dû faire passer ce message, hier, Franck RIESTER ?
STANISLAS GUERINI
Non, ce n’est pas ça du tout que je dis, je crois qu’il a eu raison, on n'a jamais intérêt à essayer de faire en sorte ou de dissimuler des choses issues de l'étude d'impact, c'est pour ça, pardon j'essaie de vous répondre de façon un tout petit peu complète, il faut dire les choses, à la fois sur l'augmentation de la durée de cotisation mais aussi sur l'augmentation significative des pensions de retraite, et ça compte.
STEPHANE VERNAY
Vous avez évoqué la question d'employabilité des seniors tout à l'heure, est-ce que ça ce n’est pas un gros point ou un gros problème qu'il aurait fallu résoudre avant de proposer cette réforme et de reporter l'âge de départ ?
STANISLAS GUERINI
Eh bien je crois que…
STEPHANE VERNAY
Sachant que l’on est le pays d'Europe qui a le plus faible taux d'employabilité des seniors.
STANISLAS GUERINI
Mais oui, vous avez raison, mais il faut travailler sur ces questions en même temps. On peut faire une réforme des retraites…
STEPHANE VERNAY
… c'est proposé aujourd'hui, c'est-à-dire un index seniors et obliger les entreprises à le publier, c'est du pipeau, ce n’est pas ça qui mécaniquement va améliorer l'employabilité des seniors dans les entreprises.
STANISLAS GUERINI
D’abord, il faut dire une chose, vous mentionnez la comparaison avec les autres pays européens. Après la réforme des retraites, après cette réforme des retraites, en France nous continuerons d'être le pays où l'on part le plus tôt en Europe, avec le système de retraite le plus généreux d'Europe, et donc ça aussi, je crois que c’est un fait incontestable et donc il faut dire cela quand on compare avec les autres pays européens. Est-ce à dire qu'on va baisser les bras ? Cette question absolument cruciale de l'emploi des seniors, cruciale pour notre économie, cruciale pour les parcours de carrière, cruciale pour les gens qui sont concernés, eh bien évidemment qu'on ne va pas continuer et qu'on ne va pas baisser les bras. Donc on va agir, on va agir en travaillant avec des entreprises, elles ont une large part de responsabilité sur l'employabilité des seniors, on va agir dans la l'emploi public aussi, je me permets de le dire en tant que ministre de la Fonction publique, parce que nous allons introduire…
ORIANE MANCINI
Comment alors ? Dans la Fonction publique, comment vous allez faire ?
STANISLAS GUERINI
Eh bien justement, pour pouvoir mieux aménager les carrières. Moi c'est le coeur de mes chantiers, ceux que j’ai lancés, avec l'ensemble des parties prenantes, avec les organisations syndicales, de pouvoir proposer des améliorations de carrière. Vous voyez, ça n'était pas explicable qu'au fond à la fin d'une carrière professionnelle on puisse dans la Fonction publique, aussi difficilement changer de métier. Eh bien là on va faire en sorte, justement ce qui n'était pas possible avant, de pouvoir par exemple changer de métier entre des métiers pénibles, eh bien ça soit rendu possible. Je vais être très concret, avant que nous fassions cette réforme, des retraites, parce que je suis convaincu qu’il faut aller au bout, eh bien vous aviez un système où si vous abandonnez votre métier pénible pour passer derrière un bureau, à la fin de votre carrière professionnelle dans l'administration, vous perdez tout le bénéfice du temps passé sur le terrain. Eh bien nous allons mettre fin justement à ce qui est une injustice, et un empêchement…
STEPHANE VERNAY
C’est les travaux, ce qu’on appelle la portabilité des droits, c’est ça ?
STANISLAS GUERINI
Oui, bien entendu. Avant, quand on était policier…
STEPHANE VERNAY
Et aménager les fins de carrière ?
STANISLAS GUERINI
Oui, aussi. Quand on était policier, je termine juste là-dessus, et que l’on devenait douanier, eh bien on perdait tout le bénéfice de ces années passées en tant que policier. Eh bien ça, c'est fini. Oui, on va aussi aménager les carrières, pour vous répondre très directement ; nous allons introduire ce qui n'était pas existant dans la Fonction publique, c'est-à-dire un dispositif de retraite progressive. Ça va permettre, pour un professeur par exemple, d'avoir la possibilité de se mettre à temps partiel à la fin de sa carrière professionnelle, dans l'administration, et de conserver sa rémunération, parce qu’on va pouvoir bénéficier de sa pension de retraite. Donc ce sont des grandes avancées.
ORIANE MANCINI
Est-ce qu’il y aura des évolutions, Stanislas GUERINI ? Est-ce qu’il y aura des évolutions dans le mode de calcul de la retraite pour les fonctionnaires ? Est-ce qu’il y aura une intégration des primes par exemple ?
STANISLAS GUERINI
Je vais être très clair là aussi. On bouge de façon symétrique l'effort qui est demandé à tous les actifs du pays, privé et public, donc les 2 années de recul de l'âge de départ à la retraite, elles s'appliqueront aussi aux fonctionnaires du pays, et c'est l'équité que de faire comme cela. Ce que nous allons conserver, c’est les modes de calcul. Donc cette réforme, ce n’est pas une convergence systémique des deux systèmes, qui je le dis, n'étaient pas prêts à pouvoir converger. Et donc on va conserver les caractéristiques fondamentales, de calcul de pensions de retraite des fonctionnaires, à la fois la question des 6 derniers mois, ça continuera de s'appliquer comme tel, mais aussi de l'assiette de cotisations qui continuera d'être l'assiette indiciaire, c'est-à-dire qui ne compte pas les primes les fonctionnaires.
ORIANE MANCINI
Et ça, ça ne peut pas changer dans le débat parlementaire ?
STANISLAS GUERINI
Non, parce que sincèrement ça serait des modifications…
ORIANE MANCINI
Ça, vous ne souhaitez pas que ça change.
STANISLAS GUERINI
… sur deux systèmes, qui ne sont pas prêts à la convergence aujourd’hui. Aujourd'hui il y a beaucoup d'hétérogénéité entre les différentes catégories de fonctionnaires. En 2019 c'était l'ambition, on voyait bien qu'elle était extrêmement complexe, elle avait d'ailleurs généré beaucoup de craintes chez les fonctionnaires, parce que la bascule d'un système à l'autre est extrêmement complexe. Mais ce qu'il faut dire très simplement, parce que j'entends parfois que le système de retraite des fonctionnaires ça privilégierait les fonctionnaires par rapport aux salariés du privé. Moi je veux tordre le cou à cette idée-là. Ce qu'il faut regarder au fond, c'est le taux de remplacement, c’est ça le juge de paix, c'est qu'est-ce que vous avez à votre retraite par rapport à ce que vous aviez pendant votre carrière. Et on constate que le taux de remplacement des fonctionnaires il est strictement identique à 74% au taux de remplacement des salariés du privé. Je pense que c'est bon d'avoir ce paramètre en tête, quand on aborde le débat.
ORIANE MANCINI
Dernière question sur la Fonction publique, sur la question des contractuels. Comment là vous faites pour intégrer notamment la question de la pénibilité, notamment peut être dans la Fonction publique hospitalière…
STANISLAS GUERINI
Bien sûr…
ORIANE MANCINI
… à l’hôpital évidemment c'est plus compliqué.
STANISLAS GUERINI
Mais vous voyez, vous avez un peu plus de 100 000 aides-soignants dans la Fonction publique hospitalière, qui sont contractuels, c'est-à-dire qu'ils font le même métier que des titulaires, que des fonctionnaires qui sont eux catégorie active, qui n'ont aucun bénéfice de leurs années passées. Et donc ce que nous allons faire, parce que nous allons pouvoir financer ces améliorations, on va proposer à ses contractuels là, quand ils seront titularisés dans la Fonction publique, que leurs années passées en tant que contractuel, elles ne comptent pas pour du beurre, mais elles soient intégrées dans leur calcul et dans leur durée de service, pour calculer leurs métiers pénibles. Ça c'est une vraie amélioration. Elle était demandée par les organisations syndicales, à juste titre, eh bien grâce à la réforme on va pouvoir donner suite à cette demande-là.
ORIANE MANCINI
Dernière question sur la procédure parlementaire.
STEPHANE VERNAY
Sur la procédure, oui le gouvernement a choisi de passer par le 47.1, l’article 47.1 de la Constitution, qui limite le temps des débats au Parlement, ça n'a jamais été utilisé pour nous pour une réforme des retraites, est-ce que c'est, est-ce que vous redoutez un enlisement, une obstruction, est-ce que… ?
STANISLAS GUERINI
D'abord, le gouvernement n’a pas fait le choix du 47.1, le gouvernement a fait le choix d'avoir un texte qui est un PLFSS, un Projet de Loi de Finances de la Sécurité Sociale, ce qui n’est pas illégitime quand il s'agit de prendre des mesures sur les retraites, qui sont justement adossées à la Sécurité sociale. Ensuite il y a un temps d’examen…
STEPHANE VERNAY
Enfin, le choix de … aussi parce que vous saviez qu'il y avait une obstruction, massive annoncée.
STANISLAS GUERINI
Je vais y venir. Il y a un temps d'examen qui n’est pas, je le dis très sincèrement, indigne, pour examiner un projet de loi de retraite, 50 jours de débat. Ça doit permettre d'avoir un débat de qualité entre le Sénat et l'Assemblée nationale. Et puis je trouve parfois contradictoires par des attaques ou des critiques qui viennent de l'opposition, qui disent " On ne va pas avoir assez de temps pour débattre ", mais par contre on va déposer des centaines de milliers d'amendements pour justement rendre impossible la tenue du débat…
ORIANE MANCINI
Alors, la France insoumise revient là-dessus, Alexis CORBIERE hier était notre invité, il a dit : " Finalement on ne déposera pas des dizaines de milliers d’amendements ".
STANISLAS GUERINI
Je souhaite sincèrement qu'il puisse revenir à la raison sur cette question-là, parce que c'est absolument incompréhensible qu'à la fois de critiquer le manque de débat et de l'enliser totalement et de le rendre impossible. Donc moi ce que je souhaite, je crois avec la Première ministre, l'ensemble du gouvernement, c'est que nous puissions avoir un débat de qualité. On peut ne pas être d'accord, c'est la démocratie, mais il faut qu'on puisse débattre argument contre argument, et permettre à la démocratie justement de vivre pleinement.
ORIANE MANCINI
Merci Stanislas GUERINI.
STANISLAS GUERINI
Merci à vous.
ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'avoir été notre invité. On suivra bien évidemment ce débat qui commence au Parlement dès la semaine prochaine en Commission.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 25 janvier 2023