Texte intégral
ALIX BOUILHAGUET
Marc FESNEAU bonjour.
MARC FESNEAU
Bonjour.
ALIX BOUILHAGUET
Elisabeth BORNE bataille en ce moment beaucoup pour obtenir une majorité sur la réforme des retraites, que dit François BAYROU ? Il dit que le référendum aurait été éventuellement le meilleur moyen pour faire passer cette réforme, ce n’est pas un drôle de moment pour dire ça ?
MARC FESNEAU
Il n’a pas dit précisément, puisque j'étais à ses voeux hier, donc il a dit que le référendum est pour lui un moyen de temps en temps de trancher un certain nombre de questions, il a dit…
ALIX BOUILHAGUET
Mais y compris sur la réforme des retraites.
MARC FESNEAU
Il a dit par ailleurs que sur la question de réforme des retraites il n’était pas pour lui le moment particulièrement de poser un référendum puisqu’on avait un processus qui était en cours au Parlement et que c’était quelque chose qui demandait…
ALIX BOUILHAGUET
Oui, mais que si ça avait été lui, si ça avait été lui, il aurait pu faire ça comme ça.
MARC FESNEAU
Oui, mais c’était dans des choses qu’on avait effectivement proposées je crois en 2007, quand François BAYROU avait été candidat, mais il a acté la procédure telle qu'elle a été décidée et…
ALIX BOUILHAGUET
Vous voulez dire que ce n’est pas un frondeur François BAYROU.
MARC FESNEAU
Non, pas du tout. Alors pour le coup il a très bien expliqué hier, d’abord les fondements de la réforme, pourquoi il fallait une réforme, parce que je crois qu’il ne faut pas renoncer à l'idée d'expliquer pourquoi il faut une réforme. Ce n’est pas une réforme contre les Français, c'est une réforme pour les Français, pour le système de répartition, même si ça nécessite, reconnaissons-le, un certain nombre d'efforts, personne ne peut dire le contraire, mais il dit à chaque fois qu'il faut faire en sorte qu'elle soit faisable, qu'elle puisse passer à l'Assemblée et au Sénat, et que dans l'opinion elle soit comprise, donc c'est ça la volonté de François BAYROU, c'est de faire en sorte que cette réforme devienne possible dans les débats parlementaires et dans l'opinion.
ALIX BOUILHAGUET
Sur le fond, est-ce que vous êtes d'accord aussi sur l'usage d'un référendum, sur cette question, est-ce que ce n'est pas une question trop complexe avec que des cas particuliers ?
MARC FESNEAU
Mais pardon, c'est exactement d'ailleurs ce qu'a dit François BAYROU hier, c’est, il y a un moment où les choses sont parfois complexes, où finalement d'abord c'est beaucoup d'éléments d'un texte, parce que quand vous vous prononcez sur un référendum, vous vous prononcez sur un texte, vous imaginez bien que c’est un texte qui n’est pas un texte à deux ou trois articles, d’ailleurs le Conseil constitutionnel, autant que je me souvienne, vérifie toujours l'intelligibilité de la question qui est posée, et donc il faut qu'on nourrisse le débat. Il y a un Parlement, j'ai été ministre des Relations avec le Parlement, c'est au parlement, à l'Assemblée nationale et au Sénat, qu'il faut respecter dans leurs prérogatives de faire le travail, à la fois de l'explicitation, et puis aussi d'analyse, et éventuellement d'amendements.
ALIX BOUILHAGUET
Je disais tout à l'heure, vous êtes vice-président du MoDem, le MoDem il a fait un certain nombre de propositions concernant cette réforme des retraites, il a proposé la hausse des cotisations patronales, il a proposé de rallonger d'une demi-heure la durée hebdomadaire du temps de travail des Français, ces propositions elles ont toutes été refusées par Elisabeth BORNE qui a souligné avec ironie la créativité du MoDem, vous jouez un jeu en ce moment ?
MARC FESNEAU
Non, on ne joue pas du tout un jeu, d'abord c'est des choses trop sérieuses pour que ce soit un jeu. Il n'est pas illégitime qu'un groupe politique, le MoDem, Renaissance, Horizons, les autres groupes politiques, qui siègent à l'Assemblée nationale, puissent poser sur la table des propositions, des idées, des réflexions, et qu'on puisse en débattre, si ça ce n’est pas la démocratie je ne sais pas ce que c'est, à la fin la seule question qui vaille c'est ce sur quoi on peut avoir des terrains d'entente, ce sur quoi on peut faire évoluer un texte, c'est bien ça qui est en question, mais ce n'est pas un jeu, ce n’est pas un jeu de posture.
ALIX BOUILHAGUET
Ce n’est pas un jeu de posture, quand François BAYROU fait ça il ne pense pas à 2027 ? On sait qu’il en rêve…
MARC FESNEAU
Attendez, ne différenciez pas…
ALIX BOUILHAGUET
D’une quatrième présidentielle.
MARC FESNEAU
J’ai été président de groupe, je suis vice-président du MoDem, je sais différencier ce que sont les propositions d'un groupe, qui ont leur propre autonomie, d'ailleurs on le voit dans tous les groupes, et ce que pense la formation politique. François BAYROU il a évoqué un certain nombre de pistes, le groupe a évoqué un certain nombre de pistes. Pardon, 2027, nous sommes en janvier 2023, vous voyez bien ce qui s’est passé entre 2017 et 2022, je pense qu’il faut être prudent et François BAYROU l’est tout autant que moi.
ALIX BOUILHAGUET
Il l’est, mais il laisse les portes ouvertes, il le dit clairement, il s’en cache à peine.
MARC FESNEAU
Non, laisser les portes ouvertes ce n’est pas dire qu’on y va, laisser les portes ouvertes c’est la vie politique, parce que qui sait ce que sera 2027, personne, et donc laisser les portes ouvertes c’est la chose la plus naturelle qui soit en politique.
ALIX BOUILHAGUET
Un mot encore, est-ce que Franck RIESTER n’a-t-il pas tout simplement dit la vérité en affirmant que les femmes seront un peu pénalisées par la réforme des retraites, François BAYROU affirmait même que leur situation mérite d’être précisée et améliorée, il y a donc un sujet sur les femmes ?
MARC FESNEAU
Non, il y a un sujet global de l’équilibre de la réforme. On sait très bien que les femmes sont celles qui ont souvent les carrières les plus hachées, avec des retraites qui sont souvent les plus faibles, donc la réforme elle vient plutôt, de ce point de vue-là, améliorer les choses, pardon de le dire, aussi des points d’amélioration, après il y a un allongement de durée de cotisation, accélération de durée de cotisation, évidemment ça concerne tout le monde, femmes et hommes, donc moi je crois qu’on a une réforme qui est équilibrée, ça n’empêche pas, comme l’a très bien dit François BAYROU, comme l’a dit d’ailleurs la Première ministre, peut-être de préciser les choses là où il y a des doutes qui peuvent s’exprimer, et puis de regarder…
ALIX BOUILHAGUET
Notamment par exemple les femmes qui ont travaillé et qui ont eu des enfants, c’est elles qui sont le plus pénalisées.
MARC FESNEAU
Oui, oui, et certaines catégories en plus d’entre elles, parce que celles qui ont de très basses pensions de retraite seraient plutôt favorisées dans le dispositif, donc ce qu’il faut regarder… ne tirons pas d’exemples, ou de catégories, des généralités complètes, dans le secteur agricole par exemple il y a un certain nombre de femmes qui seront plutôt avantagées par le système tel qu’il va être présenté, donc il faut essayer de trouver à chaque fois ce que peuvent être des trous dans la raquette, si vous me permettez l’expression, des zones de flou qui doivent être améliorées, et ça c’est le travail parlementaire qui le fera.
ALIX BOUILHAGUET
Justement, les agriculteurs ils prennent en moyenne leur retraite à 63,4 ans, eux aussi ils vont devoir travailler forcément plus longtemps, est-ce que ce n’est pas un peu injuste quand on voit aujourd’hui les difficultés d’être un agriculteur, on est dehors, c’est un travail pénible ?
MARC FESNEAU
Mais c’est tout à fait vrai et c’est ce qui a d’ailleurs été pris en compte dans le premier quinquennat du président MACRON, ce qu’on a appelé les lois Chassaigne, le président Chassaigne est président du groupe communiste à l’Assemblée, donc c’est une loi qui ne vient pas de nos rangs, mais qui a été votée par la majorité, qui vise à améliorer les pensions, de passer de 70 à 85% d’un SMIC. Deuxièmement, dans cette réforme, ce qu’on va faire, parce qu’effectivement c’est des carrières qui sont, souvent en fin de parcours, dures parce que la pénibilité est grande et un certain nombre de chefs d’exploitation sont en arrêt maladie ou sont en… alors il n’y a pas d’arrêts maladie en tant que tels, mais ne peuvent pas exercer une activité à plein temps, et ça les pénalise sur la retraite, ça va viser, cette réforme, à faire en sorte que ceux qui en fin de carrière ne peuvent pas travailler, et donc ne cotisent pas, et donc n’ont pas une retraite à taux plein, à les faire rentrer dans le système pour qu’ils aient le droit à une retraite à taux plein.
ALIX BOUILHAGUET
Donc pour bénéficier de la retraite minimum à 1200 euros il faut une carrière complète, c’est vrai que ça en exclut un certain nombre…
MARC FESNEAU
Oui, des chefs d’exploitation, or à la fin il y a un certain nombre…
ALIX BOUILHAGUET
Donc vous nous dites ce matin que même si on n’a pas une carrière complète, un agriculteur il pourrait obtenir la retraite minimum ?
MARC FESNEAU
Ils ont une carrière complète de chef d’exploitation, mais pas en activité pour un certain nombre d’entre eux parce qu’ils sont en arrêt maladie, donc oui, dans cette configuration-là c’est plus de 50.000 agriculteurs, qui sont aujourd’hui à la retraite, qui n’ont pas pu à la fin de leur carrière travailler sur leur exploitation et qui sont pourtant chef d’exploitation et qui pourront bénéficier de la mesure.
ALIX BOUILHAGUET
Un mot sur l’Ukraine. L’Allemagne, les Etats-Unis, vont bientôt livrer des chars à l’Ukraine, il y avait pourtant des réticences jusque-là, est-ce que la France elle doit elle aussi livrer des chars Leclerc ?
MARC FESNEAU
C’est une réflexion qui est en cours, vous le savez très bien. D’abord la France a beaucoup livré de matériel, je pense aux canons Caesar, et du matériel blindé léger, qui nous paraît aussi un élément important dans la tactique que les Ukrainiens ont sur leur sol, la question se posera éventuellement pour les chars Leclerc, mais ça dépend aussi de la disponibilité, de la tactique qu’on…
ALIX BOUILHAGUET
Oui, on en a moins que nos voisins Allemands.
MARC FESNEAU
Donc c’est une question… non, ce n’est pas que les voisins Allemands, c’est que globalement le nombre de chars Leopard est beaucoup plus nombreux que le nombre de chars Leclerc.
ALIX BOUILHAGUET
Oui, c’est ça, on en a 222, nous, c’est ça il me semble, et eux ils en ont…
MARC FESNEAU
Enfin sur différents… puisque les Polonais en ont, etc., la question qui était d’ailleurs posées aux Allemands, je le rappelle, c’était de savoir s’ils autorisaient à ce que d’autres livrent…
ALIX BOUILHAGUET
Les Polonais en l’occurrence.
MARC FESNEAU
Les Polonais en l’occurrence, donc cette question peut se poser, et c’est une question tactique et de choix tactique.
ALIX BOUILHAGUET
Mais est-ce que livrer du matériel sophistiqué comme celui-là ça veut dire forcément livrer des hommes qui vont avec, pour la formation, pour savoir comment ça fonctionne. Est-ce que la Russie elle peut accuser ceux qui livrent de chars de cobelligérance, autrement dit est-ce qu’on peut se retrouver impliqué dans un conflit par le biais de ces livraisons de chars ?
MARC FESNEAU
Quand vous livrez des armes, quelles que soient les armes, il y a évidemment de la formation pour les utilisateurs.
ALIX BOUILHAGUET
Oui, mais ce n’est pas comme un canon Caesar, c’est plus compliqué paraît-il, je ne suis pas une spécialiste, mais enfin on me dit que c’est plus compliqué.
MARC FESNEAU
Moi non plus, mais ce n’est pas parce que la formation est plus longue et plus compliquée que ce n’est pas de la formation, donc on est bien sur le même statut que toute personne qui livre des armes, qui est celui de la formation à ceux qui vont être appelés à les utiliser, donc il n’y a pas de difficulté particulière de ce point de vue.
ALIX BOUILHAGUET
Donc pas un Français sur le territoire ukrainien ?
MARC FESNEAU
Mais ce n’est pas comme ça que ça fonctionne, vous livrez des armes, vous faites de la formation et ce n’est pas une question de cobelligérance. En voit bien que les Russes veulent absolument entraîner dans cette logique pour justifier de leurs propres actes par ailleurs…
ALIX BOUILHAGUET
Mais ce n’est pas un risque qu’on prend ?
MARC FESNEAU
Il faut prendre ses responsabilités, quand on est dans une situation comme celle-là on a besoin quand même de faire respecter l’Etat de droit, et malheureusement, en l’occurrence, l’Etat de droit il ne peut être respecté qu’en fournissant aux Ukrainiens les moyens de se défendre.
ALIX BOUILHAGUET
Marc FESNEAU merci beaucoup…
MARC FESNEAU
Merci à vous.
ALIX BOUILHAGUET
Bonne journée à vous.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 26 janvier 2023