Interview de M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion, à Europe 1 le 6 février 2023, sur les principales mesures de la réforme des retraites.

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Média : Europe 1

Texte intégral

SONIA MABROUK
Bonjour Olivier DUSSOPT.

OLIVIER DUSSOPT
Bonjour.

SONIA MABROUK
Tandis que le texte sur les retraites arrive aujourd'hui en débat à L'Assemblée nationale, hier, Élisabeth BORNE, dans le but d'obtenir une majorité sur ce texte, a donc concédé à certains députés LR, une extension du dispositif des carrières longues ; mais, Olivier DUSSOPT, à en croire les premières réactions, ces députés LR demandent encore plus. Que leur dites-vous ce matin, à ces parlementaires, qui affirment en somme que vous vous moquez d'eux ?

OLIVIER DUSSOPT
Personne ne se moque de personne. Cette annonce de la Première ministre répond à la fois à une demande exprimée par le groupe des Républicains, mais aussi à une demande des groupes de la majorité, de Renaissance, de MoDem, d'Horizons, qui nous ont dit : finalement, le relèvement de l'âge amène celles et ceux qui rentrent dans la vie active, pile à 20 ans, à avoir l'obligation de travailler jusqu'à 44 ans… pendant 44 ans, pour bénéficier d'un départ à la retraite. Il existe un certain nombre de dispositifs, qui peuvent amodier. Nous savons aussi que dans le système tel qu'il est construit, tel qu'il existe aujourd'hui, presque un retraité sur quatre, un départ à la retraite sur quatre, aujourd'hui, avant la réforme, part avec plus de trimestres qu'il n'en faut, mais effectivement, nous avons voulu apporter une forme de protection à ces carrières longues, puisque depuis 2003, chacun cherche à réduire cette inégalité, l'écart entre ceux qui commencent très tôt et ceux qui commencent plus tard. L'annonce de la Première ministre répond à cela. Et j'entends un certain nombre de députés républicains dire : soit, c'est impossible de faire 4 trimestres entre l'année, le jour de ses 20 ans été le jour de ses 21 ans.

SONIA MABROUK
Oui, la règle des trimestres.

OLIVIER DUSSOPT
Sauf que ce n'est pas ça le dispositif.

SONIA MABROUK
C'est-à-dire ?

OLIVIER DUSSOPT
Depuis 2003, quand on dit qu'il faut faire, il faut cotiser 5 trimestres avant ses 18, avant ses 20 ans, c'est avant le dernier jour de l'année des 20 ans. Et donc si vous commencez le jour de vos 20 ans, pour valider les 5 trimestres, vous avez jusqu'à 20 ans + 11 mois, + 11 mois et 30 jours finalement. Donc, ça répond à cette demande. Si on va plus loin, si on prend un certain nombre d'amendements déposés par, non pas le groupe mais des députés Républicains, qui disent par exemple : un seul trimestre avant 21 ans et ça vous donne le droit à un départ anticipé, ça coûte 10 milliards d'euros par an. Parce qu'un trimestre avant 21 ans, je le dis de manière peut être légère, mais c'est facile à faire. C'est facile à faire, parce qu'il suffit d'un job d'été. Pour valider un trimestre, il ne faut pas travailler 3 mois consécutifs, il faut travailler 150 heures payées au smic, pendant une durée de 3 mois.

SONIA MABROUK
Olivier DUSSOPT, que répondez-vous à l'argument selon lequel cette extension, cette mesure, ne concerne pas grand-monde finalement, c'est de 30 000 personnes.

OLIVIER DUSSOPT
C'est un peu plus de 30 000 personnes par an et…

SONIA MABROUK
Reconnaissez que pour ces 30 000, c'est important.

OLIVIER DUSSOPT
Pardon, mais on parle de 800 000 départs à la retraite chaque année. Chaque année on parle de 800 000 départs à la retraite, et nous avons un système qui fait que sur ces 800 000 départs à la retraite, 4 sur 10 sont des départs avant l'âge légal. Pourquoi est-ce qu'il y a des départs avant l'âge légal ? Parce que malheureusement, un départ sur six, 15 % des départs, un départ sur 15 %, ce sont des gens qui partent avant, parce qu'ils sont cassés par le travail. Qu'ils ont un problème de santé. Ce sont des départs pour incapacité, pour inaptitude, et on va les faciliter parce que c'est normal, lorsque vous avez subi l'usure, de pouvoir partir plus tôt. Et puis vous avez quasiment un départ sur quatre, presque 25 %, qui sont des départs anticipés, parce qu'il y a des carrières longues. Et c'est là qu'on ajoute une protection, et 30 à 40 000 personnes, sur un total de 750 à 800 000…

SONIA MABROUK
Vous dites que ce n'est pas rien.

OLIVIER DUSSOPT
Ça n'est pas négligeable.

SONIA MABROUK
Olivier DUSSOPT, sur le plan politique, vous dites, si je vous entends bien, que vous avez répondu finalement à cette demande de ces quelques députés LR. Qu'est-ce que vous leur dites ce matin ? Est-ce que vous comprenez aujourd'hui, cette droite.

OLIVIER DUSSOPT
Je leur dis qu'il y a des demandes de parlementaires, des demandes qu'ils ont portées, comme celle-ci, des demandes portées par d'autres groupes de la majorité, des demandes portées par les parlementaires qui souhaitent s'inscrire dans le débat et dans la proposition. Je leur dis que nous allons aussi continuer à travailler sur certains sujets qui leur tiennent à cœur, je pense aux politiques familiales, et par exemple nous sommes tout à fait prêts à avoir un débat sur un sujet qui leur tient beaucoup à cœur, qui est la prestation d'accueil du jeune enfant, c'est-à-dire comment mieux concilier la vie professionnelle et l'arrivée d'un enfant, donc la vie personnelle, pour que plus de ménages des classes moyennes puissent y avoir accès. Je leur dis aussi que, à eux comme à l'immense majorité finalement des députés et des élus de ce pays, qu'il y a une forme de responsabilité. La responsabilité, c'est de faire en sorte que notre système de retraite par répartition, qui est le premier outil de solidarité, soit préservé. Et là…

SONIA MABROUK
Pardonnez-moi, est-ce qu'il l'est encore ? Parce que là, quand on fait la note, ça commence à coûter cher ; Élisabeth BORNE a d'ailleurs reconnu que ces concessions sur les carrières longues vont coûter entre 600 millions et un milliard par an, et la Première ministre, Olivier DUSSOPT, admet qu'il va falloir trouver des voies de financement.

OLIVIER DUSSOPT
Bien sûr, parce que nous avons…

SONIA MABROUK
Vous les voyez ?

OLIVIER DUSSOPT
Bien sûr, parce que nous avons un système, qui est déficitaire, si nous ne faisons pas de réforme, il faut toujours le rappeler…

SONIA MABROUK
Oui mais alors là, vos concessions, vos ouvertures, est-ce qu'elles mettent en cause cet équilibre ?

OLIVIER DUSSOPT
Non. Je vais au bout de ce que nous allons faire. Aujourd'hui, nous avons un système, si on ne fait rien, en 2027, c'est demain, c'est 12 milliards et demi de déficit par an et c'est 15 milliards en 2030.

SONIA MABROUK
Cet argument, vous le répétez, mais aujourd'hui ?

OLIVIER DUSSOPT
Ce n'est pas un argument, c'est une vérité, c'est une réalité comptable…

SONIA MABROUK
Que certains contestent.

OLIVIER DUSSOPT
Que personne ne conteste, parce que c'est écrit dans le rapport du COR.

SONIA MABROUK
Les oppositions.

OLIVIER DUSSOPT
Les oppositions ne contestent pas le chiffre, elles disent : "Ça n'est pas grave".

SONIA MABROUK
Oui mais aujourd'hui…

OLIVIER DUSSOPT
12 milliards et demi par an, c'est grave. Et donc nous avons une disposition qui nous permet de rétablir l'équilibre du système en 2030, c'est notre réforme, et de financer les droits nouveaux. L'annonce…

SONIA MABROUK
Mais avec quoi vous financez un début de piste ?

OLIVIER DUSSOPT
L'annonce faite par Élisabeth BORNE, hier sur la question des carrières longues, va avoir un coût de quelques centaines de millions d'euros. Pendant ce débat…

SONIA MABROUK
Dites-moi, ce n'est pas rien, en ce moment…

OLIVIER DUSSOPT
Ah, ce n'est pas rien…

SONIA MABROUK
Vous les cherchez partout.

OLIVIER DUSSOPT
Pardon madame MABROUK, mais il y a un instant, vous m'avez dit : "certains considèrent que 12 milliards et demi d'euros, ce n'est rien du tout", et là on dit : quelques centaines de millions d'euros c'est beaucoup. Et moi je suis…

SONIA MABROUK
Mais vous êtes aux responsabilités.

OLIVIER DUSSOPT
Et moi je suis d'accord avec vous, je pense que c'est beaucoup. J'ai été ministre du Budget, je sais, quelques centaines de millions d'euros c'est beaucoup. Et donc il faut trouver ces pistes-là. Nous avons…

SONIA MABROUK
Mais vous, vous y avez réfléchi.

OLIVIER DUSSOPT
Nous nous commençons à y travailler et nous avons un peu de temps, pardon de le dire comme ça, parce que ce sont des mesures qui vont se mettre en place progressivement. Le coût annoncé par la Première ministre, il est un coût en 2030, ça n'est pas un coût en 2023 ou en 2024, et donc nous avons, d'ici…

SONIA MABROUK
Monsieur DUSSOPT, je vous demande une mesure, ne me dites pas, par exemple, que l'alignement de la fiscalité des ruptures conventionnelles pour les seniors sur la fiscalité des départs à la retraite, va suffire.

OLIVIER DUSSOPT
Ça ne suffira pas, mais c'est entre 150 et 200 millions d'euros. Vous voyez, c'est pas mal.

SONIA MABROUK
On est loin des 600 millions par an.

OLIVIER DUSSOPT
Oui, mais j'ai dit que ça ne suffisait pas, mais ça représente une part qui n'est pas si mal, et…

SONIA MABROUK
Vous avez une deuxième piste ?

OLIVIER DUSSOPT
Il y a d'autres pistes, mais laissons le temps au débat de s'installer.

SONIA MABROUK
Quand même, c'est important. Depuis des semaines, vous nous dites, l'argument financier pour atteindre l'équilibre est important, et aujourd'hui, alors qu'il manque de l'argent…

OLIVIER DUSSOPT
C'est important…

SONIA MABROUK
Vous ne donnez pas le début d'une piste.

OLIVIER DUSSOPT
Pardonnez-moi, mais c'est important. La réforme telle que nous la présentons, prévoit un retour à l'équilibre et même un léger excédent, entre 200 et 300 millions d'euros en 2030. Donc il y a cette toute petite marge. Nous allons trouver comment financer le reste…

SONIA MABROUK
Ce matin, vous ne pouvez pas me donner une piste, Monsieur le Ministre ?

OLIVIER DUSSOPT
Mais, d'abord vous en avez évoqué une et que j'ai validée. Donc, ne me dites pas que je n'ai rien dit. Et la deuxième chose, c'est que c'est tellement important, et cela représente des sommes assez considérables, pour que chacun comprenne qu'on n'invente pas une piste comme ça, au détour d'une conversation. Ça se travaille sérieusement, mais je peux vous assurer que le résultat sera là.

SONIA MABROUK
Mais pour ceux qui sont convaincus, il y en a, que cette réforme des retraites est importante pour l'équilibre, ils se posent des questions ce matin, Monsieur le Ministre. Vous avez accepté une clause de revoyure en 2027, c'est bien que vous anticipiez des problèmes éventuels de financement dès cette période.

OLIVIER DUSSOPT
Non. Je vais vous dire pourquoi nous acceptons une clause de revoyure. Je l'ai moi-même dit dans les colonnes d'un journal ce matin, à l'occasion d'une interview. Les députés, et les sénateurs aussi, mais les parlementaires en général, souhaitent et c'est très normal, moi je suis député depuis 2007, je pense que quand on est député, on vote la loi mais on doit l'évaluer. Ils souhaitent pouvoir évaluer la réforme. Moi je suis prêt à ce qu'il y ait un point de rendez-vous, un bilan à mi-étape, 2e semestre 2027, un rapport du gouvernement au Parlement, pour permettre au Parlement d'être parfaitement informé, et si c'est nécessaire, de prendre les décisions qu'il faut. Et je vais même plus loin, parce que je sais que la demande des députés, de la majorité comme de certains groupes d'opposition, c'est d'avoir sur ce point d'étape en 2027. Moi je pense qu'en réalité il faut qu'on puisse donner aux députés, aux sénateurs, la possibilité d'avoir un point d'étape chaque année. Parce qu'une réforme importante comme celle-ci, ça se suit. Il y a des choses que le gouvernement peut faire, et puis il y a dans notre Constitution, dans nos lois, il y a un point qui est que le Parlement est en charge de l'évaluation de l'action du gouvernement. Et je le dis à votre micro, comme je le dirai cet après-midi devant l'Assemblée nationale, la responsabilité du gouvernement c'est de donner au Parlement tous les éléments pour qu'il puisse juger, évaluer, et s'il le souhaite, à un moment ou à un autre, dans 5 ans, dans 10 ans, dans 15 ans, prendre des décisions différentes, ça s'appelle la souveraineté du Parlement.

SONIA MABROUK
Bien. Justement, ce Parlement, il y a environ 20 000 amendements dont près de 13 000 de la France insoumise qui ont été déposés en vue de l'examen de la réforme ? Comment vous qualifiez, Olivier DUSSOPT, les objectifs de la France aux prémices de ce débat ?

OLIVIER DUSSOPT
Pour être tout à fait précis, c'est 20 000 amendements, 13 000 de la France insoumise, mais en réalité de 18 000…

SONIA MABROUK
De la NUPES.

OLIVIER DUSSOPT
… de la coalition de gauche autour de la France insoumise, avec une volonté claire d'obstruction. On nous dit à longueur de temps : il faut débattre, il faut parler, vous n'écoutez pas, et c'est quoi le résultat ?

SONIA MABROUK
Mais pourquoi vous le dit-on ? Parce que vous êtes adepte du 49.3.

OLIVIER DUSSOPT
Mais, pardon, alors, une parenthèse, le 49.3, nous l'avons utilisé sur combien de textes ? Deux. La Loi de financement de la Sécurité sociale et la Loi de financement de l'État, c'est-à-dire budget.

SONIA MABROUK
Pour certains, c'est deux de trop, mais je vous laisse poursuivre.

OLIVIER DUSSOPT
C'est une possibilité constitutionnelle. Tous les autres textes sont passés…

SONIA MABROUK
Comme les 20 000 amendements de la NUPES.

OLIVIER DUSSOPT
Bien sûr. Tous les autres textes sont passés. La Loi sur les énergies renouvelables, la Loi sur la sécurité intérieure, la Loi sur le marché du travail que j'ai eu l'honneur de porter au mois de novembre, tout est passé sans 49.3. 20 000 amendements, c'est faire croire qu'on veut le débat et opposer la violence de l'obstruction. Parce que 20 000 amendements, ça ne permet pas un débat serein.

SONIA MABROUK
"Violence de l'obstruction". C'est violent l'obstruction ?

OLIVIER DUSSOPT
L'obstruction c'est violent, parce que ça prive de débats. Ça prive de débats. Ça empêche de parler du fond, et c'est fait pour ça. Et pourquoi est-ce que la NUPES ne veut pas parler du fond ? Parce qu'il n'y en a pas un de d'accord entre eux. Vous avez monsieur MÉLENCHON qui dit : retraite à 60 ans, avec 40 annuités, ça coûte 90 milliards d'euros par an. Dites-nous où ils les prennent ? Vous avez monsieur FAURE qui dit : retraite à 60 ans, mais avec 43 annuités. Pour avoir 43 annuités à 60 ans il faut commencer assez tôt. Ça s'appelle une machine à décote, une machine à faire des petites retraites, et de la pauvreté. Et puis vous en avez d'autres qui nous disent : il faut arrêter de travailler, qui font une ode à la paresse. Il n'y n'en a pas un qui pense la même chose. Donc l'obstruction, c'est pour cacher leurs divisions.

SONIA MABROUK
Ceux qui vont penser probablement la même chose, ce sont une partie des Français dans la rue demain, mardi. Une nouvelle journée de mobilisation. S'il y a encore, Olivier DUSSOPT, plus d'un million, en tout cas près d'un million de Français dans la rue, quel message politique en tirerez-vous ?

OLIVIER DUSSOPT
Je pense qu'il faut entendre cette inquiétude et parfois cette opposition. Moi je considère qu'il ne faut jamais être dans le déni. Et il y a des Français qui s'opposent à la réforme, parce qu'ils ne veulent pas travailler 2 ans de plus pour certains, et en réalité progressivement un peu plus, puisque cette augmentation de 2 ans de l'âge, ne va pas s'appliquer demain, ça va s'appliquer progressivement d'ici 2030. Et puis il y a des Français qui ont des inquiétudes, parce que le moment de la retraite, la perspective de la retraite, c'est aussi un moment de sa vie où on se projette dans un avenir, où parfois on a le sentiment que l'ombre de la maladie, de la dépendance, peuvent roder, et ça fait peur, c'est normal. C'est un moment aussi, où on se retourne sur sa vie, on reconstitue sa carrière, avec des éléments personnels.

SONIA MABROUK
Et puis ils ont fait leurs calculs, tout simplement. Mais certains sont perdants avec votre réforme.

OLIVIER DUSSOPT
Non, il n'y a pas de perdant sur le montant des réformes.

SONIA MABROUK
Il n'y a pas de perdant, vous l'affirmer ce matin.

OLIVIER DUSSOPT
Personne ne verra sa réforme… sa retraite baisser du fait de notre réforme, personne, et tout le monde verra sa retraite protégée, parce que le système sera garanti dans le temps. Donc il faut entendre tout cela, il faut continuer à expliquer et montrer que si…

SONIA MABROUK
Expliquer ?

OLIVIER DUSSOPT
Oui, et montrer que si nous demandons…

SONIA MABROUK
Pas de pédagogique quand même.

OLIVIER DUSSOPT
Si… non… Vous savez que je n'aime pas ce mot-là, mais montrer que si oui nous demandons un effort, parce que c'est un effort que nous demandons, nous faisons en sorte que cet effort soit le plus justement réparti, qu'il soit progressif et que ce ne soit pas pareil brutalement pour tout le monde, mais qu'on tienne compte des carrières difficiles, de la pénibilité…

SONIA MABROUK
J'entends, mais à ma question, il n'y a pas de changement : quel message politique…

OLIVIER DUSSOPT
Vous savez, il y a déjà un certain nombre de changements que nous avons introduits dans le texte.

SONIA MABROUK
Oui, mais ça vous répondez aux parlementaires, notamment LR.

OLIVIER DUSSOPT
Non, les…

SONIA MABROUK
C'est sous la pression de la rue ?

OLIVIER DUSSOPT
Non, il y a des organisations syndicales avec lesquelles nous avons, certes des désaccords, mais avec lesquels nous avons pu avancer sur un certain nombre de dispositions, parfois des dispositions majeures, pénibilité, carrières longues, et puis d'autres fois, des dispositions qui paraissent moins importantes, alors qu'elles sont essentielles pour ceux qui sont concernés, par exemple dans le texte, et après les concertations, nous avons mis disposition pour faire que tous ceux qui dans les années 80, 90 ont travaillé dans des TUC qui ont travaillé, ils ont travaillé à temps partiel, mais ils ont travaillé, ils pensaient travailler avec un contrat de travail et cotiser, on leur avait menti. Et ils n'avaient pas cotisé. Nous allons régulariser leurs trimestres pour qu'ils ne soient pas pénalisés, c'était une demande, nous le faisons.

SONIA MABROUK
Olivier DUSSOPT, vous allez défendre cette réforme au Parlement, les oppositions politiques pourraient mettre en avant, dès cet après-midi, le grief qui a été retenu à votre encontre par le Parquet national financier, qui est celui de favoritisme dans cette affaire de relations avec un groupe d'eau, lorsque vous étiez maire il y a quelques années. Quatre autres griefs ont été écartés, mais celui de favoritisme est pour l'instant maintenu. Vous comptez vous défendre, vous êtes présumé innocent, mais politiquement et malgré le soutien de la Première ministre, n'est-ce pas un ministre affaibli face à moi qui défend une réforme inflammable ?

OLIVIER DUSSOPT
D'abord, vous l'avez dit, une enquête a été ouverte après un article en 2020, et à l'issue de cette enquête, le Parquet financier a classé sans suite quatre des cinq faits, des cinq reproches possibles, et donc il n'y a pas d'accusations de corruption, de prise d'intérêt, c'est très important pour moi. Que ce soit dit et que ce soit écrit.

SONIA MABROUK
Mais on voit le verre à moitié vide, et c'est celui de favoritisme qui est retenu.

OLIVIER DUSSOPT
Il reste effectivement, aux yeux du Parquet, la possibilité d'une infraction pour une procédure de marché public en 2009, il y a 14 ans de cela. J'ai convaincu de me ma bonne foi, de mon honnêteté sur les quatre premiers points, et je souhaite convaincre de la même chose sur le 5e point.

SONIA MABROUK
Ça c'est la justice, mais politiquement, Monsieur le Ministre, vous imaginez un ministre du Travail un exercice qui fait face à de telles accusations, vous est présumé innocent, mais ce n'est pas compliqué dans de telles circonstances de défendre une réforme de justice ?

OLIVIER DUSSOPT
Vous allez voir que cet après-midi on va parler du fond, et vous allez voir que je serai en pleine forme…

SONIA MABROUK
Mais, et les oppositions, vous croyez qu'elles ne seront pas en pleine forme pour mettre en cause peut-être…

OLIVIER DUSSOPT
Elles seront aussi en pleine forme, mais j'ai une grande chance, c'est d'être soutenu par une majorité, par un gouvernement et par une cheffe du gouvernement, pour affronter ce débat.

SONIA MABROUK
Est-ce que vous vous interrogez sur le timing de ces révélations ? Ça arrive au moment où vous portez une réforme inflammable. Est-ce vrai que la majorité s'interroge sur le hasard du calendrier ?

OLIVIER DUSSOPT
Ce n'est pas à moi de répondre à cela et à faire de tels commentaires. J'ai toujours respecté depuis 2020, parce que le premier article a été publié en 2020, j'ai toujours respecté le travail de chacun, et je considère…

SONIA MABROUK
Vous parlez de Mediapart.

OLIVIER DUSSOPT
Et je considère… pour l'article, et j'ai toujours respecté le travail du Parquet financier, qui a mené ces investigations, qui m'a posé de nombreuses questions, auxquelles j'ai répondu à l'oral et à l'écrit. Je souhaite une seule chose aujourd'hui, c'est d'abord aller au bout de cette réforme, et faire mon travail de ministre, et puis comme citoyen de finir et de lever ce dernier point.

SONIA MABROUK
Une dernière question, Monsieur le Ministre. Si c'était quelqu'un de l'opposition à votre place auriez-vous eu la même mansuétude, ou le député socialiste que vous avez été aurait tout de suite demandé la démission ?

OLIVIER DUSSOPT
Je n'aurais pas demandé de démission, mais il est vrai que ce genre d'épreuve apprend aussi, et je note que dans l'opposition il y a un certain nombre de paroles aujourd'hui, là je pense notamment à ce qu'a dit Xavier BERTRAND hier, qui sont respectueuses de la procédure, mais respectueuse de l'honneur des uns et des autres et je les en remercie.

SONIA MABROUK
Merci Olivier DUSSOPT, et bon débat cet après-midi et bonne journée à vous.

OLIVIER DUSSOPT
Merci à vous.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 13 février 2023