Interview de M. Gabriel Attal, ministre chargé des comptes publics, à France 2 le 13 février 2023, sur la réforme des retraites et la question des superprofits.

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Texte intégral

THOMAS SOTTO
Bonjour et bienvenue dans les "4V ", Gabriel ATTAL.

GABRIEL ATTAL
Bonjour.

THOMAS SOTTO
Plus les jours passent, plus la grande incompréhension semble se creuser entre une majorité des Français et le Gouvernement à propos de la réforme des retraites. Alors, j’aimerai bien, pour commencer, qu’on clarifie quelques points précis, ce matin. Tous ceux qui avaient compris qu’à partir du 1er septembre prochain, il n’y aurait plus une pension de retraite à moins de 1 200 euros pour une carrière complète. Ont-ils compris de travers.

GABRIEL ATTAL
Non. Une carrière complète, ça veut dire quand vous avez cotisé tous vos trimestres, on met en place une pension minimale à 1 200 euros. Après, si vous n’avez pas une carrière complète, si vous n’avez pas cotisé tous les trimestres…

THOMAS SOTTO
Carrière complète ; mais il faut au moins avoir gagné au moins le SMIC pendant cette carrière.

GABRIEL ATTAL
Oui. Mais si vous n’avez pas une carrière complète, si vous avez cotisé moins de trimestres que ce qui est nécessaire, vous aurez quand même une revalorisation de votre pension qui pourra aller jusqu’à 100 euros.
Il y a 1 800 000 personnes …

THOMAS SOTTO
Donc, si on est en dessous de 1 100 euros, même avec 100 euros de plus, on sera au-dessous de 1 200 euros, on est d’accord ?
Donc, toutes les pensions ne seront pas 1 200 euros minimum.

GABRIEL ATTAL
Si vous êtes à 1 100 euros, que vous avez une carrière complète, vous aurez une revalorisation qui portera votre pension à 1 200 euros. Il y a 1 800 000 retraités actuels qui vont voir leurs pensions augmenter. Pour un certain nombre d’entre eux, ça portera la pension à 1 200 euros parce qu’ils ont une carrière complète. Pour d’autres, qui n’ont pas une carrière complète, ça sera une revalorisation de leurs pensions, petites pensions en l’occurrence. C’est quoi le sens de ça…

THOMAS SOTTO
Pardon, mais pour un agriculteur qui a 800 euros de revenus par mois sur l'ensemble de sa carrière, il ne sera pas à 1 200 euros.

GABRIEL ATTAL
Ça dépend de ce qu'il a cotisé. Par ailleurs, je précise que pour les agriculteurs, il y a déjà une loi qui a été adoptée. Et la revalorisation des petites pensions a déjà eu lieu. C'est une loi communiste portée par monsieur CHASSAIGNE qu'on aura retenue, ça fait maintenant un certain temps. Mais c'est quoi la logique de ça, Thomas SOTTO ? C'est que quelqu'un qui a travaillé, doit toujours être plus valorisé que quelqu'un qui n'a pas travaillé ou qui a moins trop travaillé, parfois par choix. Vous avez d'autres modèles qui sont proposés. Moi, je ne suis pas en accord avec ça. Vous savez qu'on est en débat à l'Assemblée nationale. Les oppositions proposent, par exemple, que les trimestres passés au RSA comptent autant que les trimestres travaillés une fois à la retraite. Je ne suis pas en accord avec cette position-là. Je rencontre tous les jours.

THOMAS SOTTO
Avant de développer… Non mais attendez.

GABRIEL ATTAL
Non mais je veux le dire, je rencontre tous les jours des Français…

THOMAS SOTTO
Combien de retraités vont être concernés par cette pension minimum qui va passer à 1 200 euros ?

GABRIEL ATTAL
Je le disais, vous avez 1 800 000 retraités actuels qui vont voir leurs pensions revalorisées.

THOMAS SOTTO
D’accord.

GABRIEL ATTAL
Parmi eux, vous en aurez plusieurs centaines de milliers qui auront la pension minimale à 1 200 euros, et dont les nouveaux retraités, vous en avez autour de 200 000 chaque année, qui auront une revalorisation de leurs pensions.

THOMAS SOTTO
Et qui passeront à 1 200 euros aussi, ces 200 000 ?

GABRIEL ATTAL
S’ils auront une revalorisation de leurs pensions, et parmi eux, qui auront 1200 euros.

THOMAS SOTTO
Parmi eux, donc pas tous ? Pas les 200 000.

GABRIEL ATTAL
Je viens de vous dire que c'est ceux qui ont une carrière complète.

THOMAS SOTTO
Pardon, on est un peu bouées parce que ce n'est pas ce qu'a compris la population. Il y avait un minima d’ambiguïté et vous êtes un trop bon communicant, Gabriel ATTAL, pour ne pas le savoir.

GABRIEL ATTAL
C’est pour ça que je suis là, pour expliquer les choses. Mais vous, moi, je rencontre tous les jours, Thomas SOTTO, des Français qui travaillent et qui me disent qu'ils ont le sentiment de travailler, de faire des efforts là où d'autres qui, parfois, font le choix de ne pas travailler, qui sont soutenus par la solidarité nationale. Et ceux qui travaillent disent « moi, je ne peux croire qu’en ma bonne étoile pour être soutenu ». C'est important qu'au moment de la retraite, on valorise ceux qui ont travaillé toute leur carrière.

THOMAS SOTTO
Donc, pour vous, c’est une question de Justice ?

GABRIEL ATTAL
Oui, quelqu'un qui soit n'a pas travaillé, soit moins travaillé, ne doit pas avoir une retraite meilleure que quelqu'un qui a travaillé toute sa vie. Ça me semble être quelque chose de bon sens, en tout cas, qui est attendu par les Français.

THOMAS SOTTO
Puisqu'on parle de Justice, on s'aperçoit en décortiquant cette réforme que les femmes ne s'en sortent pas toujours très bien et moins bien que les hommes. Les carrières longues vont devoir travailler plus longtemps. La pénibilité, notamment pour les employés les ouvriers, va faire qu'ils vont devoir parfois travailler deux ans de plus.
Est-ce que vous diriez toujours que cette réforme est juste, pour reprendre le qualificatif sur lequel insistait Elisabeth BORNE quand elle a présenté la réforme le 10 janvier. Est-ce qu'elle est juste cette réforme ?

GABRIEL ATTAL
Cette réforme, elle va permettre qu'on continue à payer les pensions de bientôt 20 000 000 de retraités.

THOMAS SOTTO
Donc ça c'est la réponse à est qu’elle est nécessaire, est-ce qu’elle est juste ?

GABRIEL ATTAL
Non, mais ça me paraît juste. Ça ne serait pas juste de devoir baisser les pensions. Rendez-vous compte, en 2000, il y avait 12 millions de retraités à qui il fallait payer la pension chaque mois. Dans quelques années, on sera à 20 millions de retraités à qui il faudra payer la pension chaque mois ? Aucun pays ne peut affronter un tel choc sans prendre des mesures et demander, oui, certains efforts aux Français. Vous avez les oppositions qui disent « pour payer 20 millions de pension chaque mois, on va augmenter les impôts ». Nous, on n’est pas d'accord avec ça.

THOMAS SOTTO
Est-ce que vous n’êtes pas prisonnier de ce dogme ? De dire " on a décidé qu'on n'augmenterait pas les impôts et donc on ne peut pas faire autrement. " ?

GABRIEL ATTAL
Je ne vois pas ça comme un dogme ; je vois ça comme un engagement qu'on a pris devant les Français. Et je pense que les Français ne souhaitent pas qu'on augmente leurs impôts. On est le deuxième pays dans l'OCDE ; sur les 38 pays de l'OCDE, on est le deuxième pays où il y a le plus d'impôts. Donc nous, on ne veut pas les augmenter. On va même continuer à les baisser quand c’est possible.

THOMAS SOTTO
Non, mais est-ce que parfois les Français c’est,… Ne tapez pas sur les plus fragiles, mais peut-être que ceux qui sont les plus fortunés peuvent faire un effort supplémentaire. Ça, ce n'est pas question ?

GABRIEL ATTAL
On demande des efforts… Enfin, les plus fortunés, ils payent des impôts. Je rappelle que 10% des contribuables payent 70% de l'impôt sur le revenu. Que plus vous avez un salaire élevé, plus vous payez de cotisations, donc il y a déjà cette progressivité. Maintenant, moi, je le dis " on ne souhaite pas augmenter les impôts des Français ". C'est ce que proposent les oppositions qui disent « pour payer les pensions de retraite… (il y a est un problème pour payer les pensions, ça, je crois que tout le monde le reconnaît) pour payer les pensions, on va augmenter les impôts ; » Nous, on n’est pas d'accord avec ça. Mais on dit " globalement, on va tous travailler un peu plus longtemps. Mais évidemment, en tenant compte des situations de la pénibilité, de l'âge auquel vous avez commencez à travailler. "

THOMAS SOTTO
Mais beaucoup de Français ont l'impression que l'effort n'est pas partagé ; qu'il pèse sur les mêmes. Vous qui venez du PS, c'est un argument qui doit vous parler quand même.

GABRIEL ATTAL
Alors, évidemment, c'est quelque chose qui me préoccupe. Maintenant, quand je regarde la réforme qu’on porte, qui tient compte des carrières longues : du fait que si vous avez commencé à travailler à 15 ans, à 16 ans, à 17 ans, vous partirez bien avant les 64 ans. Quatre Français sur dix partiront, après notre réforme, avant 64 ans ; certains deux ans avant ; d'autres quatre ans avant ; certains six ans avant 64 ans parce qu'ils ont commencé à travailler jeunes, parce qu'ils ont eu un métier pénible. C'est ça, pour moi, la justice. C'est qu'un effort demandé aux Français mais que, évidemment, c'est un effort qui est justement réparti selon les carrières, selon les situations. On n'a pas tous la même carrière. On n'a pas tous le même rapport au travail.

THOMAS SOTTO
Il y a ceux qui travaillent et il y a ceux qui…

GABRIEL ATTAL
Vous avez des Français qui ont refusé, une fois à la retraite, évidemment, il faut qu'ils puissent partir avant les autres.

THOMAS SOTTO
Taxer les revenus financiers, pourquoi c'est exclu ?

GABRIEL ATTAL
Ils sont taxés aujourd'hui.

THOMAS SOTTO
Mais davantage, pardon.

GABRIEL ATTAL
J’entends qu’il y a toujours des propositions d'augmentation d'impôts. Je le redis : on est le deuxième pays européen, le deuxième pays de l'OCDE en matière de pression fiscale.

THOMAS SOTTO
Mais les revenus financiers, ce n'est pas les revenus du travail, la plupart du temps. C'est les revenus de la spéculation, c'est… Pourquoi ne pas les chercher ?

GABRIEL ATTAL
Vous avez des transactions financières qui sont taxées. Encore une fois, on peut se dire " on va augmenter tous les impôts pour payer 20 millions de pensions de retraite chaque mois ". Je peux vous dire qu'il va falloir en augmenter beaucoup. Donc nous, on a fait le choix de dire : pas d'augmentation d'impôts. En revanche, on va payer les pensions de retraite. On ne baissera pas les pensions des retraités, en travaillant un peu plus longtemps, mais en faisant en sorte que ceux qui ont commencé à travailler tôt, que ceux qui ont eu des carrières pénibles, n'aillent pas jusqu'à 64 ans.

THOMAS SOTTO
Gabriel ATTAL, est-ce que vous comprenez que quand TotalEnergies annonce 20 milliards de dollars de bénéfices, par un effet d'aubaine qui est directement lié à la guerre en Ukraine, ça lui tombe dans le bec. Est-ce que vous comprenez que ceux qui écoutent et qui vont payer leur litre d'essence ou de diesel plus de 2 euros ce matin, ça les fassent réagir ?

GABRIEL ATTAL
Je comprends que c'est des chiffres qui interpellent et qui heurtent. Moi, ce que je rappelle, c’est que l'essentiel de ces bénéfices sont réalisés en dehors de France, donc qui sont taxés dans les pays où ils sont réalisés. C’est des règles fiscales internationales. Et qu'en France, on a mis en place une taxation des superprofits de TOTAL. Sur les bénéfices qu'a réalisés TOTAL en France en 2022, on a fait une taxation exceptionnelle.

THOMAS SOTTO
Est-ce qu'il faut aller plus loin ?

GABRIEL ATTAL
Je crois qu'il y a eu autour de 300 millions de bénéfices exceptionnels de TOTAL en 2022. Et la contribution, la taxe sur les superprofits qu'on a mis en place, c'est autour de 200 millions d'euros. Et plus globalement, on a mis en place une taxe sur les superprofits des énergéticiens qui, effectivement, bénéficient de la spéculation sur les prix de l'énergie. C'est 11 milliards d'euros qu’on récupère des grandes entreprises de l'énergie.

THOMAS SOTTO
J’en reviens à la pompe, pardon, est-ce qu'il va y avoir une nouvelle ristourne à la pompe ?

GABRIEL ATTAL
D'abord, on a mis en place, vous le savez,…

THOMAS SOTTO
Le chèque.

GABRIEL ATTAL
Une indemnité carburant travailleurs pour les Français qui travaillent.

THOMAS SOTTO
100 euros par travailleur, avec condition de revenus.

GABRIEL ATTAL
Il y a autour de 5 millions qui l’ont demandé, alors que 10 millions peuvent en bénéficier. Allez sur le site impots.gouv.fr, il y a un simulateur pour voir si vous êtes dans les revenus qui permettent d’en bénéficier.

THOMAS SOTTO
Dans ces cas-là, on a droit à un chèque de 100 euros. Il peut y en avoir deux par famille, d'ailleurs, sur un compte.

GABRIEL ATTAL
Exactement, c’est selon le nombre de véhicules.

THOMAS SOTTO
Ça ne suffit pas, vu le prix et l'explosion des prix. Est-ce qu'il va y avoir une nouvelle ristourne à la pompe. Est-ce que TOTAL va faire une nouvelle ristourne ? Est-ce que le Gouvernement va en faire une ?

GABRIEL ATTAL
Moi, je souhaite que les entreprises qui le peuvent, et notamment TOTAL, si c'est le cas, puissent faire un nouveau geste pour permettre aux Français, qui vont travailler tous les jours, encore une fois, et qui ont besoin de leur véhicule pour aller travailler.

THOMAS SOTTO
Vous demandez combien ?

GABRIEL ATTAL
Je ne suis pas là pour faire une négociation avec TOTAL à travers votre plateau, évidemment. Il y a mes collègues, Bruno LE MAIRE notamment, échangent régulièrement avec les entreprises. Mais encore une fois, on a aujourd'hui une situation d'inflation qui touche le monde entier, qui touche l'Europe entière. En France, on a une inflation qui est moins élevée que chez la plupart de nos voisins européens, parce qu'on a pris nos responsabilités, parce qu'on a demandé à des entreprises de faire des efforts, parce que l'Etat aussi a fait des efforts en accompagnant les ménages et les Français. Mais il faut évidemment continuer pour protéger les Français.

THOMAS SOTTO
Encore un effort, peut-être qu'on pourrait demander à VINCI ; plus 64% de bénéfices, la plupart sur les autoroutes ? Et dans le même temps, on augmente les prix des péages. Est-ce que là encore, on ne pourrait pas leur dire « soyez sympas, soyez patriotes. Faites un peu de patriotisme économique et laissez tomber l'augmentation là » ?

GABRIEL ATTAL
Alors déjà, il y avait des augmentations qui étaient souhaitées manifestement par les concessionnaires d'autoroutes, qui souhaitaient aller bien au-delà, qui souhaitaient revaloriser à la hauteur de l'inflation. Et mes collègues qui sont en charge des Transports ont une action auprès des concessions autoroutières pour limiter les augmentations.

THOMAS SOTTO
Ça reste près de 5% d'augmentation quand même.

GABRIEL ATTAL
Ensuite, vous avez des contrats qui ont été signés il y a des années par des Gouvernements précédents avec les sociétés d'autoroutes qui laissent peu de marge de manœuvre pour agir. Je pense que la vraie question c'est, au moment où ces contrats vont arriver à échéance et où ils devront être renouvelés, qu’on puisse mettre en place des mécanismes pour garantir qu'il n'y a pas d'explosion des tarifs.

THOMAS SOTTO
Il faudra tout remettre à plat sur les concessions d’autoroutes ?

GABRIEL ATTAL
Je pense, oui. Parce que vous avez aujourd'hui une situation où c'est même très compliqué pour l'Etat de pouvoir mettre en place des contributions exceptionnelles etc… C'est des contrats qui ont été signés il y a quinze ou vingt ans. Ils vont arriver à échéance dans les prochaines années. Et je pense qu'il aura un énorme travail à faire à ce moment-là.

THOMAS SOTTO
Gabriel ATTAL, il reste cinq petits jours de débats à l'Assemblée nationale autour de cette réforme des retraites : 16 000 amendements à discuter. Ça se passe dans une ambiance caricaturale qui doit donner envie à une partie des Français de manger leurs cartes d'électeurs. Et vu de l'extérieur, on a l'impression que ce bordel (pour reprendre le mot de Gérald DARMANIN) arrange tout le monde. Est-ce que vous ne craignez pas qu'à un moment les Français ne mettent tout le monde dans le même sac et vous rejettent tous ?

GABRIEL ATTAL
Il y a un débat qui a démarré à l'Assemblée nationale. Le texte est examiné. Et effectivement, vous avez de la part des oppositions un choix qui est celui de bloquer le débat. Avec 20 000 amendements qui ont été déposés, il faut regarder les amendements. Quand vous avez un amendement qui dit " on va remplacer le mot " Index seniors " dans la loi par " Index feuille de salade ", c'est-à-dire que c’est ça qui écrit ; quand on va faire une batterie d'amendements pour dire « la réforme des retraites va rentrer en vigueur en 2050, en 2060, en 2070, en 2080…

THOMAS SOTTO
Est-ce que vous ne craignez pas de tous en payer le prix de ça, au final ?

GABRIEL ATTAL
Moi, je pense que personne ne sort gagnant d'un tel spectacle et d'une telle situation. Et moi, je suis très fier des députés de la majorité sont extrêmement patients, qui cherchent à pouvoir entrer dans le débat véritablement, avoir un vrai débat d'idées. Il y a deux visions qui s'opposent : vous avez ceux qui veulent augmenter les impôts (c’est les oppositions) et vous avez nous qui disons " on ne veut pas augmenter les impôts. En revanche, on va demander de travailler un peu plus longtemps en répartissant justement les fonds. "

THOMAS SOTTO
Mais il reste quoi à négocier ? Parce qu’en fait, chaque mesure coûte de l'argent. Est-ce qu'avec les concessions qui ont été faites, l'équilibre du régime est encore garanti en 2030 ?

GABRIEL ATTAL
Moi, je pense qu’on peut toujours avancer. Oui, pour répondre à votre question ; l’enjeu de la réforme, c'est de pouvoir payer les pensions sans avoir à les baisser. Evidemment, on ne dérogera pas de cet objectif. Moi, je pense qu'on peut continuer à avancer sur beaucoup de sujets. Sur la question de l'emploi des seniors, comment est-ce qu'on incite, on favorise davantage l'emploi des seniors dans notre pays. Sur la question des carrières longues, on a évolué sur le sujet. Par exemple, pour ceux qui ont commencé à travailler à 20 ans, ils pourront partir à 63 ans au lieu de 64 ans.

THOMAS SOTTO
Donc, il y a encore des marges de manœuvre financière ?

GABRIEL ATTAL
Notre porte, elle est toujours ouverte. Hier soir, Elisabeth BORNE échangeait encore avec les organisations syndicales.

THOMAS SOTTO
Pour leur dire qu’elle n’était pas très contente, visiblement.

GABRIEL ATTAL
Si on veut éviter le blocage du pays, il faut que le débat avance. Pour que le débat avance, il faut qu'on soit ouvert à discuter. On l'est. Il faut ensuite que les oppositions acceptent que le débat puisse avoir lieu au Parlement, qu'elles arrêtent de bloquer les débats.

THOMAS SOTTO
Retraites, l’ultimatum du 7 mars, c’est la une de l'Alsace, ce matin. La mobilisation de la rue reste très forte. Il ne faut pas être dans le déni ; il faut la prendre en compte cette mobilisation, a dit votre collègue, le ministre du Travail - Olivier DUSSOPT – hier. Est-ce que ça veut dire que concernant la revendication commune, les 64 ans, il y a une marge négociante, ou toujours pas ?

GABRIEL ATTAL
Moi, je suis un jusqu'au-boutiste du dialogue. Je pense qu’il n’est jamais trop tard pour se parler. Encore une fois, il y a eu des échanges encore hier entre la Première ministre….

THOMAS SOTTO
Donc est-ce que cet article 7 est discutable ?

GABRIEL ATTAL
Ce qui est, encore une fois, notre objectif, c'est d'arriver à payer les pensions sans augmenter les impôts. Ensuite, on peut discuter des choses.

THOMAS SOTTO
Ce point, les 64 ans, sont discutables ? C'est très important ce que vous dites. Est-ce que les 64 ans sont discutables ?

GABRIEL ATTAL
Non, Thomas SOTTO, ce que je suis en train de vous dire, c'est que vous avez des organisations syndicales qui disent « il ne faut pas reculer l'âge légal de départ, il faut plutôt augmenter les impôts, les cotisations sur les entreprises ou sur les salariés. » Ce qui n'est pas notre choix. Nous, effectivement, on ne veut pas augmenter les impôts, pas augmenter les cotisations. Mais ensuite, on peut évidemment se parler. Et moi, je veux voir dans le fait que les organisations syndicales aient choisi le 7 mars, c'est-à-dire dans près d'un mois, la date pour le blocage ; le fait qu’elles aussi souhaitent continuer à avancer sans bloquer le pays.

THOMAS SOTTO
Les 64 ans, c'est négociable, oui ou non ?

GABRIEL ATTAL
Ce qui n’est pas négociable, c'est le fait de continuer à payer nos pensions sans augmenter les impôts. L'équilibre qu'on a trouvé pour ne pas avoir à augmenter les impôts et pour continuer à payer les pensions, c’est reculer l'âge légal à 64 ans au lieu de 65, qui était prévu au départ, tout en prenant des mesures pour que quatre Français dix qui ont commencé à travailler tôt, qui ont eu des métiers pénibles, puissent partir bien avant 64 ans.

THOMAS SOTTO
Merci beaucoup Gabriel ATTAL. A bientôt.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 15 février 2023