Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Haut-Commissaire,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames et Messieurs les délégués,
Cela fait un peu plus d'un an que la Russie a déclenché et mène sa guerre d'agression illégale, injustifiée et injustifiable contre l'Ukraine.
Elle viole la Charte des Nations Unies, la souveraineté et l'intégrité territoriale de l'Ukraine de manière éhontée. Elle viole systématiquement le droit international humanitaire et les droits de l'Homme. Elle inflige d'indicibles souffrances au peuple ukrainien.
Exactions massives et systématiques contre des civils, tueries, viols de masse, attaques délibérées contre des hôpitaux, des écoles, des maternités, déplacements forcés de population, déportations d'enfants : les responsables de ces crimes de guerre, voire de ces crimes contre l'humanité, devront rendre des comptes. Nous n'avons de cesse de le répéter : il n'y a pas de paix durable sans justice. Cette justice, nous la devons aux Ukrainiennes et aux Ukrainiens.
Nous la devons aussi à nous-mêmes, parce qu'il n'y a pas d'humanité sans respect des droits de l'Homme. Nous soutenons donc la Cour pénale internationale, les juridictions ukrainiennes compétentes et la Commission d’enquête mise en place par ce Conseil.
Nous le déplorons, les exactions russes sont commises aussi ailleurs dans le monde. C'est le cas au Mali, où les mercenaires de Wagner s'en prennent aux civils, comme la MINUSMA et bien d'autres ont pu l'établir.
Cela fait 75 ans qu'a été signée à Paris la Déclaration universelle des droits de l'Homme. Cela pour faire en sorte que les atrocités de la Seconde guerre mondiale ne se répètent jamais.
La commémorer, c'est répéter sans fléchir un appel à respecter partout la dignité humaine.
Nous ne pouvons pas nous résigner, nous ne pouvons pas nous censurer. Il faut agir, avec en mémoire les crimes du passé.
Les droits de l'Homme sont universels parce qu'ils sont au fondement même de toute humanité, ils sont le socle de l'égale dignité humaine de tous les hommes à laquelle nous avons tous souscrit.
Et les Etats se sont engagés à respecter et à faire respecter ces droits. Or, les régimes autoritaires ne s'y résolvent pas. Ils les bafouent, ils oppriment les libertés et méprisent l'égalité.
C'est le cas en Iran, où le régime réprime avec une terrible violence les manifestants pacifiques. 500 d'entre eux sont morts tandis que d'autres sont exécutés. La mission d'établissement des faits créée par ce Conseil ne doit ménager aucun effort pour collecter les preuves de ces crimes.
Je souhaite rendre hommage à la bravoure des Iraniennes et des Iraniens, qui ne demandent qu'à vivre libre. Ensemble, avec mon homologue allemande Annalena Baerbock, nous avons remis le prix franco-allemand des droits de l'Homme à Mahsa Amini, à titre posthume, en soutien aux femmes iraniennes qui défendent la liberté. Ensemble avec mes collègues européens, nous avons adopté cinq trains de sanctions contre les responsables de ces crimes. L'Iran a été exclu de la Commission des Nations unies sur la condition de la Femme : elle n'y avait plus sa place.
Et ce Conseil ne peut pas non plus accepter la politique d'otages d'Etat pratiquée par l'Iran et ces intolérables détentions arbitraires qui visent des civils innocents. Les autorités iraniennes doivent libérer sans plus de délais tous les ressortissants étrangers et mettre fin à ces chantages honteux.
Le non-respect des droits universels, c'est le cas aussi en Afghanistan, où les Talibans pratiquent une politique de ségrégation contre les femmes et les filles. Elles sont progressivement chassées hors de la vie et des espaces publics, de l'école, des universités, hors de l'économie, hors même des actions humanitaires qui bénéficient pourtant à la population afghane. Ces violations systématiques vont au-delà de la très grave privation de libertés, au-delà du contrôle social : les femmes et les filles afghanes sont, par obscurantisme, confinées à l'obscurité.
Monsieur le Président,
L'intolérable prend racine dans l'intolérance. C'est pour cela que la France ne transigera jamais dans sa défense de l'égalité et des libertés. Nous tous, au Conseil et au-delà, devons agir résolument.
Cette action, nous souhaitons continuer de la porter au Conseil des droits de l'Homme, auquel la France est candidate pour le mandat 2024-2026.
Candidate pour agir et avec un solide bilan à défendre. Pour le prochain mandat, nous proposerons à nos partenaires de poursuivre ensemble une ambition : celle de sociétés plus justes, plus libres et plus équitables.
Nous sommes à l'oeuvre pour défendre sans concession l'égalité et les libertés.
L'égalité entre les femmes et les hommes et la liberté des femmes, d'abord : les femmes doivent faire valoir partout leurs droits, celui d'être traitées sur un pied d'égalité avec les hommes, d'avoir accès aux processus de décisions publics ou privés, celui de vivre, travailler, se mouvoir à l'abri des violences sexuelles et sexistes, celui de pleinement et librement disposer de leurs corps et donc d'accéder à la santé et aux droits sexuels et reproductifs.
Le Président de la République a organisé le Forum Génération Egalité, qui a permis de lancer des coalitions internationales pour promouvoir les droits. Il avait fait des droits des femmes une priorité du G7 de Biarritz : la France a été le premier pays à appuyer le fonds pour soutenir les survivantes de violences sexuelles dans les conflits, qu'elle a contribué à mettre en place avec le Docteur Mukwege et Nadia Murad.
Nous continuons de mener la campagne pour l'universalisation de la Convention d'Istanbul.
Mais surtout je veux rendre hommage aux femmes qui risquent leurs vies pour la liberté. Nous les soutenons politiquement. Nous avons lancé un Fonds de Soutien aux organisations féministes (FSOF). Nous pilotons le programme Marianne, qui soutient et accueille en France des défenseurs des droits de l'Homme. Je réunirai le 8 mars à Paris des femmes engagées pour la liberté.
Notre défense de l'égalité c'est aussi celle des droits des personnes LGBT+. Je lance un appel à la dépénalisation immédiate et complète de l'homosexualité, mission de notre ambassadeur nommé spécifiquement sur cette question.
Les droits que nous défendons, c'est aussi le droit à une information libre et de qualité. Vous connaissez le rôle joué par la France pour la protection des journalistes, pour la liberté de la presse et pour une information plurielle et fiable. Avec 50 Etats, nous avons lancé le partenariat pour l'information et la démocratie. Nous accueillerons à Paris le Fonds international pour les médias d'intérêt public, cofondé par la Prix Nobel Maria Ressa, qui permettra aux médias de pays en développement de garantir leur indépendance financière. Nous promouvons un ordre public du numérique, en incitant les grandes plateformes du secteur à s'assurer que chacun puisse exercer ses libertés en toute sécurité dans l'environnement numérique, à commencer par les enfants.
La mise au pas des instituts de recherche en Russie a montré les dangers de l'instrumentalisation de l'Histoire, au service de discours révisionnistes et bellicistes. Nous mettrons la défense des libertés académiques, d'enseignement et de recherche, à l'agenda ce Conseil.
Les droits de l'Homme sont indivisibles. Je le dis clairement : il n'y a ni concurrence, ni contradiction entre les droits civils et politiques et les droits économiques et sociaux. Depuis 2015 et notre agenda partagé pour le développement durable, l'agenda 2030 nous engage : le respect de l'Etat de droit est un corollaire du développement. Partout dans le monde, une personne doit avoir le droit de dire ce qu'elle pense aussi bien que de vivre dans un environnement sain. La France est engagée pour la solidarité, et cela continuera de faire partie de son action, y compris au sein de ce Conseil.
Enfin, la France restera engagée contre l'impunité. L'injustice fait obstacle à la paix, à la réconciliation et donc à la fin des cycles de violence. Ce travail de réconciliation, je l'ai vu engagé en Ethiopie quand je m'y suis rendue avec Annalena Baerbock. Il est essentiel.
Monsieur le Président,
Personne ne doit se résoudre à constater sans rien faire les violations, si nombreuses, des droits de l'Homme. Vous pouvez compter sur la France pour continuer de défendre le progrès vers des sociétés qui rendent justice, font mémoire, protègent les droits, les libertés et l'égalité.
Je vous remercie.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 28 février 2023