Texte intégral
ALIX BOUILHAGUET
Stanislas GUERINI, bonjour.
STANISLAS GUERRINI
Bonjour.
ALIX BOUILHAGUET
Selon une note des services territoriaux, on retrouve entre un et 1,4 millions de personnes pour aller défiler demain. Vous redoutez une France à l’arrêt ?
STANISLAS GUERINI
D’abord, moi, vous ne m’entendrez jamais minorer, minimiser le droit de grève, le droit de manifester dans le pays. Il est constitutionnel, il est important et je note que pour l’instant, toutes les journées de manifestations se sont bien passée.
ALIX BOUILHAGUET
On sent quand même une, excusez-moi, Stanislas GUERINI, mais on sent le Gouvernement, y compris le porte-parole du Gouvernement, Olivier VERAN, très tendu sur la question, lorsqu’Olivier VERAN évoque qu’il y a une catastrophe écologique, sanitaire et j’en passe en cas de blocage du pays, c’est quand même insensé ?
STANISLAS GUERINI
Non, ce que je crois, parce que j’allais vous répondre, c’est qu’il faut distinguer le droit de manifester, le droit d’exprimer sa colère, ses inquiétudes parfois, parce qu’il y a beaucoup de choses qui ont été exprimées dans ces journées de manifestations. Et moi, j’ai noté, comme tout le monde, que la mobilisation était forte dans les différentes journées. Et puis, la capacité de blocage du pays. J’entends des responsables syndicaux qui veulent mettre l’économie à genoux. Je pense qu’il faut dire les choses simplement. Ça ne serait bon pour personne, à commencer pour les Français eux-mêmes, ceux qui travaillent, ceux qui sont parfois en difficulté financière, personne n’a intérêt.
ALIX BOUILHAGUET
Mais ça veut dire qu’il pourrait y avoir une catastrophe écologique, sanitaire ? Olivier VERAN, il a trop dramatisé, quand même.
STANISLAS GUERINI
Je ne vous parle pas, lui-même est revenu, en était, sur ces termes-là. Je ne vous parle pas de catastrophe écologique mais je vous parle, très simplement, de ce que ça veut dire, une économie à l’arrêt, une économie à genoux. Ça veut dire des entreprises qui sont freinés, qui sont en difficulté pour faire leurs activités. Ça veut dire des salariés qui vont en pâtir. Et donc ça, je crois que ça n'est bon pour personne. Et donc, dans une démocratie qui fonctionne bien, une démocratie apaisée, il peut y avoir une mobilisation, une manifestation. Et puis, par exemple, un débat parlementaire parce que ça compte aussi. Il y a eu plusieurs temps, il y a eu un temps de dialogue social, il y a eu un temps de débat parlementaire et maintenant, on est dans le temps des débats au Parlement.
ALIX BOUILHAGUET
Si, demain, il y a beaucoup de monde dans la rue, est-ce que vous pourriez en tirer des conséquences ? Et dans ces cas-là, lesquelles ? Ou, au contraire, ou c'est un petit peu, cause toujours ?
STANISLAS GUERINI
Vous savez, moi, j'entends qu'on dit parfois " Cause toujours " ou que le Gouvernement serait sourd. Je crois que rien n'est plus faux que cela. Depuis le début, notre texte a évolué. Il a évolué pendant justement, le temps de discussions avec les organisations syndicales, il a profondément évolué. Il a évolué pendant le temps d'examen parlementaire. Donc, ce n'est pas vrai de dire que nous n'entendons rien. Il a évolué sur des questions très importantes, il a évolué sur la question des carrières, longues, la question de la pénibilité, peut-être à l'occasion de l'examen au Sénat, sur les questions de l'égalité entre les femmes et les hommes, sur les pensions de retraite des femmes. Voyez, tout ça, ce sont des évolue de texte, donc, on voit bien qu’oui, il y a une porosité avec ce qu’il se passe avec le mouvement social, avec des organisations syndicales.
ALIX BOUILHAGUET
Est-ce que cette réforme, c'est une réforme de Gauche, comme l'affirmait hier, Olivier DUSSOPT, dans Le Parisien ? Ce soit à quoi, Bruno RETAILLEAU, lui a répondu que c'était une réforme de Droite. Alors, c'est vrai que c'est un petit peu maladroit de la part du ministre du Travail de dire que c'est une réforme de Gauche, alors qu'il compte sur la Droite, et notamment la Droite sénatoriale pour adopter cette réforme.
STANISLAS GUERINI
Cette réforme, c’est une réforme qui est nécessaire pour des raisons simples, pour des raisons démographiques, pour des raisons financières et c'est une réforme qu'une Gauche de Gouvernement, Gauche social-démocrate, aurait pu voter en son temps. Je vois qu’aujourd'hui, c'est un choix différent qui est fait par ceux qui représentent la Gauche et l'extrême Gauche. Mais, je crois, c'est une erreur parce que cette réforme, j'en suis certain. Elle sera adoptée et elle ne sera pas déjugée par les Gouvernements qui suivront, parce qu'elle est nécessaire pour notre pays, pour préserver nos systèmes par répartition. Et ça, je crois que, et la Gauche et la Droite sont attachés à cet actif-là, parce que c'est la retraite de ceux qui n'ont pas de retraite autrement que par le fruit de leur travail.
ALIX BOUILHAGUET
Mais, juste sur la forme, est-ce que c'était malin de la part d'Olivier DUSSOPT, de dire que c'était une réforme de Gauche, quand on compte sur la Droite ?
STANISLAS GUERINI
Je pense que ce qu’il a voulu dire profondément, c’est que la Gauche de Gouvernement devrait et pourrait voter cette réforme des retraites, celle que nous proposons aujourd'hui, celle que nous faisons évoluer, que nous enrichissons, avec les contributions, les idées, qu'elles viennent de Gauche ou qu'elles viennent de Droite. Vous savez, ne me demandez pas à moi, qui suit apôtre avec Emmanuel MACRON, du dépassement politique de la Gauche et de la Droite, à commencer à donner qualificatif de cette matière.
ALIX BOUILHAGUET
Du côté des coûts des fonctionnaires, on touche à quoi avec cette réforme ? Leur pension, elle est calculée sur les six derniers mois de salaire, dans le privé, c'est sur les 25 meilleures années, les fonctionnaires, ils sont quand même avantagés, ils ne doivent pas, eux aussi faire un effort ?
STANISLAS GUERINI
Non. A chaque fois, je m'élève contre cette idée-là. Les fonctionnaires, ils ne sont pas plus avantagés que les salariés privés.
ALIX BOUILHAGUET
Non mais, à chaque fois que vous dites, parce qu’il y a des primes. Mais, les primes, elles sont de plus en plus intégrées dans le calcul des retraites, c’est de plus en plus compensé ?
STANISLAS GUERINI
Non. Ce n'est pas vrai. Mais prenez les chiffres telles qu'ils le sont aujourd'hui, c'est-à-dire, qu'est-ce qu'un fonctionnaire touche à sa retraite par rapport à ce qu’il va toucher pendant sa carrière ? C'est la même chose que le privé. Les fonctionnaires, ils sont appelés, comme le reste des Français, à un effort contributif, puisqu'ils vont voir l’augmentation d'âge de départ à la retraite augmenter. Ils vont voir leur durée de cotisation augmenter. Mais, vous me posez la question de ce qui change. Justement, il y a beaucoup de choses qui changent et qui vont améliorer le système de retraite pour les fonctionnaires. Vous savez, moi, quand j'ai vu le débat à l'Assemblée nationale, j'étais très triste, en réalité, parce qu'on n'a même pas prononcé une seule fois le nombre d'agents publics, le nom de fonctionnaires. Ça n'intéressait pas visiblement le débat à l'Assemblée nationale. Donc, je souhaite qu'on puisse montrer les avancées. Elles sont réelles. Dans ce texte, nous introduisons, par exemple, la retraite progressive, c'est-à-dire la capacité à se mettre à temps partiel à la fin de sa carrière. On donne plus de possibilités pour pouvoir changer de métier, c'est ça aussi les questions qui sont derrière ce débat sur la retraite, c’est, celui de la qualité du travail de l'aménagement des parcours de carrière. Et toutes les mesures, que nous prenons spécifiques pour les fonctionnaires, dans ce texte de retraite, elles visent tous à une seule et même chose : pouvoir mieux aménager les carrières professionnelles.
ALIX BOUILHAGUET
Au Sénat, la situation des femmes, on en parlait à l'instant, et notamment celle des mères de famille, elle va être améliorée. C'est Olivier DUSSOPT, effectivement, qui nous le dit. Franck RIESTER, il disait donc un petit peu la vérité, quand il disait que les femmes étaient jusqu'à présent, pénalisées dans cette réforme.
STANISLAS GUERINI
Mais, écoutez, jusqu'à présent, si vous pouvez me permettre cette expression, le système de retraite, aujourd'hui, est plus injuste pour les femmes qu'il ne sera demain, après la réforme. La réalité, c'est que les femmes, elles partent, aujourd'hui, un peu plus tard que les hommes. Elles partiront un peu plus tôt que les hommes demain. Mais, dans notre pays, il y a une autre réalité, qu'il y ait des différences et des inégalités pendant les carrières professionnelles. Ce sont elles qui génèrent principalement les inégalités, ensuite, à la retraite, donc, il faut agir ?
ALIX BOUILHAGUET
Le système, ça va être le système de surcote ? C'est-à-dire qu’une de famille avec une carrière complète, elle pourra partir certes, plus tard. Elle devra partir plus tard, mais avec une surcote, une pension plus haute ?
STANISLAS GUERINI
Les sénateurs ont posé, effectivement, des améliorations pour permettre aux mères de famille de bénéficier d'une surcote. Le Gouvernement est ouvert à ces améliorations-là. Et je crois qu'il faut travailler à la fois sur l'amélioration de notre système de retraite, c'est ce que nous faisons, mais aussi, ne pas abandonner cette bataille qui est fondamentale pour combattre les inégalités pendant la carrière, parce que, encore une fois, j'insiste, ce sont elles qui vont principalement…
ALIX BOUILLAGUET
J’entends, mais, en attendant, il y a des femmes qui vont partir à la retraite, les jeux sont faits. Et la surcote, ce sera pour toutes les femmes quel que soient les conditions de salaire ?
STANISLAS GUERINI
Je vous réponds précisément là-dessus et c’est intéressant, pardon, Alix BOUILHAGET, vous me disiez, il y a une seconde : " Est-ce que le Gouvernement est sourd aux manifestations, aux contestations sur la réforme des retraites ? ". Voilà une démonstration que ça n'est pas le cas. Pour les femmes qui ont des enfants, qui sont parfois pénalisées, je le rappelle, par le système tel qu'il est constitué aujourd'hui, nous prévoyons d'améliorer le système.
ALIX BOUILHAGET
Surcote pour toutes les femmes ? Quelles que soient les conditions de salaire ? Ou ce sera seulement pour les plus précaires ?
STANISLAS GUERINI
Ce sera d'abord en fonction du nombre d'enfants. Le texte est en discussion au Sénat. Je ne veux pas me précipiter pour voir. La mesure n'a pas encore été discuté. Donc, n'anticipons pas les choses. Ayons ce débat parlementaire, c'est ça qui compte, quand même, dans le détail, qu'on puisse améliorer ce texte-là.
ALIX BOUILHAGET
Cette mesure, effectivement, on n’en connaît pas encore trop les contours, mais on sait qu’elle pourrait coûter à peu près coûter 300 millions d'euros en plus. Quand on met bout à bout tous les aménagements qui ont été faits, aussi bien à l'Assemblée nationale que ceux qui vont être faits au Sénat, la réforme, elle ne permet plus d'atteindre l'objectif budgétaire en 2030, il y aurait même un déficit d'après le Sénat, de 600 millions d'euros. A ce stade, faire des économies, c'était pourtant l'objectif de cette réforme. Vous êtes passés à côté ?
STANISLAS GUERINI
Non. Je le dis et je le répète, cette réforme, elle est nécessaire. D'abord, pour des raisons démographiques et financières. Donc, nous, notre objectif, c’est d’avoir un système qui le permet.
ALIX BOUILHAGET
Oui. Mais, 600 millions de déficit, ce n’est pas une manne financière en plus.
STANISLAS GUERINI
Vous les voyez, vous me consacre quand même que vous avez parfois des injonctions un peu contradictoires. Vous n’écoutez et puis, en même temps, vous faites des concessions qui coûtent de l’argent. Oui, c'est l'évidence. Donc, notre objectif reste le même, de garder le système en équilibre, ça veut dire que pour les améliorations qui sont mises sur la table, il faut qu'il y ait des pistes d’économie en face.
ALIX BOUILHAGET
600 millions de déficit, ce n'est pas tout à fait l'équilibre.
STANISLAS GUERINI
C’est tout l’objet du débat avec les sénateurs justement, de voir quelles sont les pistes d'économies qui sont proposées pour financer les améliorations du système de retraite. Ça reste la philosophie du Gouvernement.
ALIX BOUILHAGET
On verra ça dans les jours qui viennent. Merci beaucoup, Stanislas GUERINI.
STANISLAS GUERINI
Merci à vous.
ALIX BOUILHAGET
Bonne journée.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 8 mars 2023