Texte intégral
Je vous remercie, Monsieur le Président, de votre invitation et de votre présentation, qui a montré à quel point les défis sont nombreux. Nous devons effectivement nous rencontrer pour parler de cette situation internationale qui paraît, en effet, bien désordonnée.
Comme il s'est passé un certain nombre - et même un nombre certain - de choses depuis que nous nous sommes vus à la fin de l'année dernière, permettez-moi de revenir sur plusieurs développements qui se sont produits au cours des dernières semaines. Je ne cacherais pas que le contexte est, comme vous l'avez dit, difficile.
En Ukraine, les événements qui se déroulent sur la ligne de front depuis plusieurs semaines, en particulier autour de Bakhmout, mais pas seulement car la Russie fait pression partout, nous rappellent, après un an de guerre, que la Russie n'est pas dans une logique de négociation - rien n'accrédite l'idée qu'elle l'envisage pour le moment -, mais qu'elle reste au contraire dans une logique d'agression et d'annexion. Devant ce constat, nous devons être à la hauteur de la détermination du peuple ukrainien, en l'aidant à faire face.
L'Ukraine le fait avec courage. Nous avons régulièrement l'occasion, les uns et les autres, de faire part de notre admiration pour la façon dont le peuple ukrainien défend sa liberté et son indépendance. L'Ukraine affronte une situation tout à fait particulière, et peut-être sans précédent depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, dans laquelle un membre permanent du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies (ONU) bafoue ouvertement les principes les plus fondamentaux de la Charte des Nations unies, que ce pays, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, est pourtant censé respecter encore plus que d'autres et même faire respecter, après y avoir adhéré comme tous. L'Assemblée générale des Nations unies l'a rappelé, lors d'un vote acquis à une écrasante majorité, la veille du jour anniversaire de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le 23 février dernier.
Le président Poutine exerce sur le monde, depuis plus d'un an, un chantage inacceptable à l'insécurité alimentaire et énergétique, derrière une propagande qui se déverse partout pour essayer d'inverser les responsabilités et de justifier l'injustifiable. Je l'ai vu, il y a quelques jours à peine, en Inde, au G20, dont la Russie fait partie : le ministre des affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, a tenté de se poser en victime et a continué d'asséner des contrevérités choquantes.
La vérité, telle que nous la connaissons, est tragique et même effrayante : plus de dix millions de personnes déplacées, dont une partie s'est réfugiée ailleurs en Europe, des dizaines de milliers de morts parmi les civils, une politique d'enlèvement d'enfants, une destruction systématique des infrastructures civiles ukrainiennes, par des bombardements délibérés et ciblés, des exactions, des actes de torture et des viols. Chacun de ces actes, qu'il s'agisse de ceux menés intentionnellement contre des cibles civiles ou des exactions dont nous sommes régulièrement les témoins, est constitutif, en droit international, d'un crime de guerre, si ce n'est d'un crime contre l'humanité. Je rappelle que le procureur général de la Cour pénale internationale (CPI) mène une enquête, sur les chefs de crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et de génocide en Ukraine. Il appartiendra à la Cour pénale internationale de dire si les faits sont établis et de les qualifier mais je n'hésite pas, pour ma part, à parler de crimes contre l'humanité tant les actes commis sont systématiques et généralisés.
Le bilan est encore très provisoire, la guerre n'étant pas finie - et sans doute avez-vous eu raison de considérer, Monsieur le Président, qu'elle n'est pas sur le point de s'arrêter, en tout cas à court terme -, mais il est marqué, quoi qu'il en soit, par une série d'échecs pour la Russie, dont le projet impérialiste de conquête ne s'est pas déroulé comme elle l'imaginait, loin de là.
Le Kremlin avait fait le pari d'un effondrement rapide de l'Ukraine. Etait-ce en quarante-huit heures ou trois jours ? Seuls les généraux russes le savent, et encore. Premier échec, Kiev n'est pas tombée et les forces armées ukrainiennes tiennent. La Russie a dû se replier sur une autre partie du territoire ukrainien. Aucune exaction, aucune privation, aucun crime n'est parvenu à entamer la détermination du peuple ukrainien à se battre pour ses terres, sa liberté et sa dignité.
Autre échec, le Kremlin voulait détruire systématiquement les infrastructures énergétiques pour faire de l'hiver une arme de guerre, c'est-à-dire pour faire souffrir du froid et de la faim la population. Or les Ukrainiens n'ont pas plié. Il n'y a pas eu de black-out généralisé, comme d'aucuns le craignaient, avec quelques raisons : les réseaux électriques ont tenu, le pays répare et l'aide que nous apportons - elle n'est pas seulement militaire mais également civile - a permis à l'Ukraine de tenir. Nous sommes, par ailleurs, à pied d'oeuvre pour la reconstruction, qui a déjà commencé dans certaines zones.
Lorsque je dis "nous", ce n'est pas seulement la France, mais les quarante-six pays et vingt-quatre organisations internationales et régionales qui ont participé, le 13 décembre dernier, à la grande conférence internationale de soutien au peuple ukrainien que nous avons organisée à Paris. Des engagements concrets, devant être suivis d'effets avant la fin du mois de mars, ont été pris pour un montant d'un peu plus d'un milliard d'euros, en dons et en matériel. Je ne parle pas d'une aide budgétaire ou macroéconomique mais de tout ce qui peut permettre à l'Ukraine de tenir - des ampoules, des ponts, des biens de première nécessité, des kits, des générateurs ou encore des transformateurs - et de contrer le calcul russe selon lequel le "général hiver" ferait plier l'Ukraine. J'ai pu voir les effets de notre aide et les débuts de reconstruction chaque fois que je suis allée en Ukraine, notamment à Odessa, à la fin du mois de janvier.
Le Kremlin comptait sur la faiblesse et les divisions des Européens mais ce fut un échec, là aussi. Dès le premier jour de l'agression, les Européens ont su réagir et faire bloc. Le Conseil européen s'est ainsi réuni dès le 24 février 2022 pour adopter des sanctions. L'impulsion donnée par la France, qui présidait alors le Conseil de l'Union européenne, a été reprise au vol par la présidence tchèque, puis par la présidence suédoise. L'unité a été maintenue ; il faut parfois discuter et même négocier pour y arriver mais c'est normal. Cette unité est une condition sine qua non de notre efficacité et de notre force.
Dix paquets de sanctions ont été adoptés. Ils visent plus de 1.200 individus, et non des moindres comme Vladimir Poutine et Sergueï Lavrov mais aussi des fauteurs et profiteurs de guerre, des oligarques, des hommes d'affaires, des membres du conseil de sécurité nationale russe, des généraux, des propagandistes et de nombreux autres responsables. Dans le dernier train de sanctions, adopté à la fin du mois de février, trois personnalités impliquées dans les enlèvements d'enfants, dont la commissaire russe aux droits de l'Homme, principale responsable de cette activité criminelle, ont ainsi été sanctionnées. M. Prigojine l'a également été et nous continuons à cibler, avec plus d'intensité, en compagnie de nos partenaires européens, des membres du groupe Wagner et leurs relais en Ukraine et un peu partout dans le monde, notamment en Afrique. Par ailleurs, 170 entités ont été sanctionnées, principalement des banques russes et des pans de l'appareil industriel.
J'insiste sur le fait que ces sanctions ne visent pas le peuple russe mais les fauteurs et les profiteurs de guerre. Elles produisent leurs effets en entravant l'effort de guerre des Russes et en désorganisant leur industrie d'armement car elles les empêchent d'accéder à certains composants ou matériaux dont ils ont besoin. Nous continuerons donc à imposer des sanctions et à les renforcer.
Symbole d'une Europe qui s'affirme et qui a notamment adopté un agenda de souveraineté lors du sommet de Versailles, la Facilité européenne pour la paix (FEP) a été utilisée massivement pour aider les pays européens à fournir du matériel, notamment militaire, à l'Ukraine. À ce jour, un peu plus 3,6 milliards d'euros d'équipements militaires ont été fournis dans ce cadre, qui permet de rembourser partiellement les dépenses engagées par les Etats membres ; leur aide et celle de l'Union européenne, sur le plan militaire, sont donc bien supérieures à ce montant.
Autre erreur de calcul et autre échec, la Russie comptait sur le temps qui passe, sur la fatigue des opinions publiques, pour que l'élan international de soutien à l'Ukraine s'affaiblisse mais cela ne s'est pas produit. Depuis un an, six votes de l'Assemblée générale des Nations unies ont consacré l'isolement de l'agresseur russe. Le 23 février, 141 Etats ont adopté une résolution allant en ce sens, contre seulement 7. Quand on voit quels pays sont du côté de la Russie, on ne peut pas dire que celle-ci soit en bonne compagnie. Les 141 pays - cela va donc bien au-delà des seuls Etats européens ou nord-américains - qui ont voté la dernière résolution ont rappelé à la Russie ses obligations, considérant qu'elle ne respectait pas les principes fondamentaux de la Charte des Nations unies, et lui ont demandé de cesser son agression et de retirer immédiatement, complètement et inconditionnellement ses troupes. Ce n'est donc pas un terrain sur lequel la Russie progresse. Son isolement était également évident quelques jours plus tard, le 27 février, lors de la session ministérielle du Conseil des droits de l'Homme, à Genève, où nous avons rappelé, avec d'autres pays, notre refus de l'impunité russe en Ukraine.
Je ne sais pas ce qui se passera dans les heures ou les jours qui viennent à Bakhmout ou sur d'autres points du front mais la Russie ne peut pas crier victoire au terme de l'année qui vient de s'écouler. Il est patent qu'elle a commis une erreur stratégique. Pourtant, comme vous l'avez souligné, la Russie s'acharne. Elle ne montre actuellement aucun signe d'une disponibilité pour des négociations. Elle envoie ses troupes à l'assaut d'une façon qu'on n'avait pas vue depuis le siècle passé et qui ne peut que provoquer des pertes humaines en très grand nombre. Toutefois, l'ampleur de ces pertes n'est manifestement pas prise en compte par les dirigeants russes.
Nous sommes effectivement, Monsieur le Président, à un moment décisif. La Russie a commencé à lancer une offensive qu'elle voudra vraisemblablement poursuivre avec l'arrivée du printemps et de meilleures conditions météorologiques. Nous devons donc manifester encore davantage notre volonté d'aider l'Ukraine à recouvrer sa souveraineté. Nous n'avons pas attendu ces circonstances, calendaires ou météorologiques, pour savoir qu'il fallait renforcer et intensifier notre aide à l'Ukraine. L'appel au renforcement de l'aide date de l'automne dernier, je vous en avais parlé. Le Président de la République avait alors pris la décision, amplifiée depuis, d'en faire beaucoup plus en matière d'aide militaire, en complément de l'aide humanitaire et économique, et d'aller beaucoup plus vite. Nous devons apporter un soutien massif et rapide pour aider, maintenant, l'Ukraine à résister mais aussi à être en mesure de mener une contre-offensive, comme elle le souhaitera et quand elle le souhaitera, pour changer le rapport de forces, déjouer les calculs de Moscou et peut-être amener les Russes à considérer qu'ils doivent agir autrement.
Si nous devons aider l'Ukraine de façon massive et rapide, comme nous le faisons - je crois que vous savez ce qui arrive en Ukraine -, il faut le faire en répondant aux besoins de ce pays. Les besoins exprimés par le président Zelensky, par M. Reznikov ou par le président de la Rada, que vous avez sans doute reçu, ce sont des munitions, des moyens de défense antiaérienne et de la maintenance, parce que les matériels sont utilisés à très haute intensité : ils s'usent vite et ont donc besoin d'être maintenus en condition opérationnelle. Voilà ce que l'Ukraine demande en ce moment. Vous connaissez le débat sur les chars et les avions mais les besoins exprimés par les militaires et les responsables politiques ukrainiens portent sur ce que je viens d'indiquer, et ce sont ces catégories de matériels que nous livrons.
Pourquoi aidons-nous l'Ukraine ? Je citerais le Président de la République, non seulement parce qu'il s'est exprimé récemment sur ce sujet, mais aussi parce qu'il est le chef de l'Etat et des armées. Il a insisté à plusieurs reprises, lors de la conférence de Munich sur la sécurité et à l'occasion d'autres déplacements, sur le fait que cette guerre n'était pas une guerre européenne, qui concernerait uniquement le continent européen ou, encore moins, la seule Ukraine. Bien sûr, cette guerre concerne au premier chef les Ukrainiens, dont le sort est en jeu, et l'Ukraine, sur laquelle pèse une menace existentielle. Mais il est important de se souvenir que si nous agissons, c'est naturellement pour défendre un pays qui est attaqué, agressé sans aucune raison ni provocation, et qui a légitimement le droit de se défendre, conformément à l'article 51 de la Charte des Nations unies, mais aussi parce que l'agression russe est une attaque contre les principes fondamentaux de la Charte des Nations unies. Si cette agression était récompensée, croyez-moi, il en serait fini de la paix et de la stabilité partout dans le monde : ce qui se produit en Ukraine se produirait ailleurs. Nous devons le répéter à un certain nombre de partenaires qui n'en sont pas aussi conscients que nous. Ce qui se passe actuellement les concerne autant que cela concerne le continent européen. Ils seraient eux-mêmes exposés, si une agression de ce type était récompensée. Voilà pourquoi nous devons la mettre en échec. Nous ne cherchons pas à défaire la Russie mais à faire échouer l'agression de ce pays, seul responsable de la situation actuelle.
Les principes du droit international ne s'appliquent pas qu'en Ukraine. Nous entendons les faire respecter partout. J'ai eu l'occasion de le dire la semaine dernière en Inde, lors de la réunion des ministres des affaires étrangères du G20 qui s'est tenue à New Delhi. La composition même du G20 nous oblige à réfléchir à ce que nous avons en commun et c'est sur la base des principes que nous partageons que nous pourrons rétablir l'unité de la communauté internationale, réduire les divisions ou les désaccords, continuer à faire prévaloir le droit sur la force et poursuivre l'isolement de la Russie. Nous restons mobilisés en faveur d'une réforme du système multilatéral, qui doit être plus efficace et plus représentatif - il ne l'est que partiellement. C'est un des combats de la France depuis plus de vingt ans, et nous continuerons à le mener en juin prochain, j'y reviendrai.
Vous avez évoqué le Proche-Orient et le Moyen-Orient, Monsieur le Président. Je me suis rendue dans le Golfe, en Arabie saoudite et aux Emirats arabes unis, où je retournerai dans les mois qui viennent, pour renforcer nos partenariats, défendre nos positions et faire valoir nos points de vue, en ce qui concerne la guerre menée par la Russie en Ukraine, mais pas seulement. En effet, une bonne partie des entretiens a été consacrée à la menace grandissante que pose le régime iranien.
Je commencerais, à ce sujet, par le mouvement de protestation qui a débuté au mois de septembre et qui se traduit sans doute différemment aujourd'hui. Le nombre de manifestations s'est réduit, parce que la répression a été terrible. On ne connaît pas les chiffres exacts mais des dizaines de milliers d'arrestations auraient eu lieu et 500 personnes auraient été tuées. Vous savez également les interrogations que suscitent les malaises, ou plutôt les empoisonnements de jeunes filles dans des écoles. Le peuple iranien a exprimé des revendications, légitimes à nos yeux, de liberté, d'égalité et de dignité de la personne humaine. Si la répression a fait que les manifestations sont désormais moins visibles, je suis persuadée comme vous, Monsieur le Président, qu'il y a un décrochage, une perte de confiance entre le régime et le peuple iranien, en tout cas la jeunesse.
Nous avons adopté, dans un cadre européen, cinq trains de sanctions contre les responsables de la répression en Iran, en plus des fabricants de drones qui aident la Russie à commettre des crimes en Ukraine. À ce jour, presque trente entités et une centaine d'individus sont concernés, dont des membres du gouvernement iranien - deux ministres sont ainsi visés par le dernier paquet de sanctions, adopté à la fin du mois dernier - et des branches du corps des gardiens de la révolution particulièrement impliquées dans la répression. Aujourd'hui même, l'Union européenne a sanctionné une douzaine de personnes responsables de violations des droits des femmes dans plusieurs pays, dont l'Iran. Nous avons également réussi à obtenir que les Nations unies créent une mission d'établissement des faits pour faire la lumière sur les événements en Iran, au-delà du récit des officiels, en recueillant des éléments de preuve de façon impartiale et indépendante. Je ne dirais pas que l'Iran ait beaucoup apprécié le succès diplomatique qu'a été la création de la mission d'établissement des faits. Il est important qu'elle puisse enquêter, comme elle le fait. Elle présentera un premier rapport oral en juin, puis un rapport complet au mois de mars de l'année prochaine.
(M. le président Jean-Louis Bourlanges - Quelle est l'instance de l'ONU qui a décidé de créer la mission d'établissement des faits ?)
C'est le Conseil des droits de l'Homme des Nations unies. (...) Il se trouve, en effet, que certains de ses membres permanents usent et abusent de leur droit de veto, la Russie au premier chef, ce qu'ils ne peuvent pas faire, en revanche, au sein du Conseil des droits de l'Homme.
J'en viens à la principale menace, qui est nucléaire. Le directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a pu se rendre à Téhéran à la fin de la semaine dernière, à la suite de certaines démarches. Il a été reçu par les autorités iraniennes, il a eu accès à un certain nombre d'installations et il a recueilli des engagements de la part de l'Iran. Ces engagements sont des promesses : il faudra voir si elles sont rapidement suivies de mesures concrètes et si la transparence est au rendez-vous. Cela seul permettra de sortir de l'escalade dans laquelle l'Iran s'est engagé depuis quelques mois. Nous rappellerons demain à ce pays, à Vienne, où se réunit le Conseil des gouverneurs de l'AIEA, ses obligations car il s'agit d'obligations.
La troisième dimension de la crise est la capacité de déstabilisation de l'Iran. Au-delà des livraisons de drones à la Russie, dont j'ai déjà parlé, la prolifération de missiles et les transferts d'armements en provenance de l'Iran menacent la stabilité de la région. Certains pays du Golfe sont particulièrement exposés à cette menace : les Emirats arabes unis ont ainsi été l'objet d'attaques de missiles. Des menaces pèsent également sur le trafic maritime dans cette zone qui compte beaucoup au niveau international. Deux saisies de dizaines de tonnes d'armement iranien, l'une effectuée par les forces françaises et l'autre par les forces britanniques, ont été rendues publiques ces dernières semaines. Il ne s'agissait pas seulement de kalachnikovs ou de mitraillettes, mais aussi de missiles antichars envoyés par l'Iran aux rebelles Houthis, malgré la trêve informelle qui tient au Yémen depuis plusieurs mois.
Aux différentes menaces qui existent actuellement - je n'en ai évoqué que quelques-unes -, la France doit opposer une ferme détermination, conforme à ses valeurs, c'est-à-dire reposant sur la solidarité. Cela consiste à soutenir nos partenaires les plus directement touchés mais aussi à venir en aide aux populations quand elles en ont besoin.
Vous avez évoqué la tournée qu'a effectuée le Président de la République, la semaine dernière, dans plusieurs pays d'Afrique. Le président a apporté son soutien, de façon tout à fait directe et classique, à la stabilité de la République démocratique du Congo et rappelé que nous étions aux côtés de ce pays. Il a fortement plaidé pour la relance des processus de paix : celui de Luanda, peut-être le plus prometteur, et celui de Nairobi, qui a également notre soutien. Nous sommes en contact fréquent avec les dirigeants du Kenya, qui a déployé une force près de Goma. Nous soutenons aussi la mise en place d'un cessez-le-feu. La demande de retrait du M23, mouvement soutenu par le Rwanda, a été au coeur de tous les entretiens du Président de la République. La ligne de la France est claire. Elle s'accompagne d'une solidarité : lors de sa visite, le Président de la République a annoncé une aide humanitaire de 34 millions d'euros, en complément de l'aide européenne, de 45 ou 47 millions, de mémoire.
(M. le président Jean-Louis Bourlanges - Est-ce pour la RDC ?)
Oui. Il est vrai que j'ai également mentionné le Rwanda, mais le Président de la République ne s'y est pas rendu au cours de son dernier déplacement. Il y était, toutefois, allé précédemment, et il faudra sans doute y retourner. La secrétaire d'Etat Chrysoula Zacharopoulou s'est également rendue dans ce pays dernièrement.
Par ailleurs, nous avons annoncé la mise en place d'un pont humanitaire à Goma, qui est sous la pression des forces du M23.
Nous faisons également preuve de solidarité avec la Turquie et la Syrie à la suite du double séisme et des répliques qui viennent de se produire. La France a répondu présente dès le premier jour. Nous avons envoyé en Turquie, juste après la première secousse, des sauveteurs, des équipes cynophiles et du matériel. Nous avons ensuite déployé d'autres équipes, ainsi qu'un hôpital de campagne équipé et approvisionné, qui permet de traiter simultanément une centaine de patients. Nous avons aussi aidé les populations syriennes, malgré des difficultés d'accès. Il a fallu plusieurs jours pour que la Syrie accepte d'ouvrir un deuxième point de passage, puis un troisième, pour permettre l'acheminement de l'aide. Nous avons débloqué près de 20 millions d'euros pour les populations touchées par le séisme dans le Nord du pays, en nous assurant que l'aide ne bénéficie pas au régime mais parvienne directement aux populations, sans possibilité de détournement, par le canal des Nations unies et par celui d'organisations non-gouvernementales (ONG) de confiance, qui se trouvent sur place.
Si nous avons pu agir vite et avec des moyens significatifs, c'est notamment parce que le Parlement a doté le ministère de moyens d'action ambitieux et innovants dans le cadre de la loi de finances pour 2023. Le montant de la provision pour crises, que nous utilisons semaine après semaine depuis quelque temps, a pratiquement été multiplié par dix, ce qui était une sage précaution. La France, qui est redevenue une des grandes puissances de l'humanitaire, est ainsi en mesure d'aider rapidement et concrètement, à hauteur de plusieurs dizaines de millions d'euros, ceux qui en ont besoin.
Au-delà de l'urgence, notre politique de solidarité repose sur des actions et des partenariats de long terme. Nous redoublons d'efforts, dans le cadre du G20, de la prochaine COP28 sur les changements climatiques ou encore de la COP15 sur la biodiversité, pour construire des réponses collectives et plus structurelles aux grands déséquilibres globaux et pour contrer le risque de fragmentation du monde, selon l'expression consacrée. Je tiens notamment à rappeler l'importance de l'enjeu écologique. Si le Président de la République s'est rendu au Gabon, qui mène une action peut-être plus avancée que celle de ses voisins dans ce domaine, c'était en particulier parce que s'y tenait, à Libreville, le premier One Forest Summit. Organisé à l'initiative de la France, ce sommet sur les forêts avait pour objectif de parvenir, pendant qu'il en est encore temps, à un accord juste pour concilier la protection des forêts tropicales, qui sont des espaces cruciaux pour l'environnement et le climat, en raison de leurs puits de carbone non reproductibles, et le développement, raisonné et maîtrisé, dont les pays concernés et leurs populations ont besoin.
Autre enjeu de long terme, sur lequel nous pourrons revenir, nous devons conjurer les risques d'une nouvelle fragmentation Nord-Sud. On connaît, en effet, les observations et les critiques formulées par un certain nombre de pays du "Sud" - je mets des guillemets à ce terme car je crois qu'il n'y a rien de plus faux que de parler d'un "Sud global" : il existe beaucoup de Sud-s. La Chine se décrirait peut-être comme faisant partie du Sud global, mais c'est aujourd'hui la première puissance industrielle et commerciale au monde. Je ne suis donc pas sûre qu'elle fasse partie du Sud. Il existe beaucoup de situations différentes et il faut traiter chacune d'entre elles.
Dans le cadre de la rénovation du multilatéralisme que nous appelons de nos voeux, nous voulons répondre à certains besoins, justifiés, comme celui de la finance climat. C'est à Charm el-Cheikh, lors de la COP27, qu'est venue l'idée de réunir un sommet sur les financements internationaux. Ce sommet, qui vise à sceller un nouveau pacte financier global, aura lieu à Paris, les 22 et 23 juin. J'ai pu transmettre le 24 février au secrétaire général des Nations unies l'invitation du Président de la République, qui a été acceptée. Les institutions financières internationales et nos différents partenaires étatiques seront également présents. Il est indispensable de renforcer l'accès des pays en développement, en particulier les plus vulnérables d'entre eux, aux financements internationaux pour répondre à leurs besoins, notamment en matière de transition écologique et énergétique. Il faut également associer à ces efforts les partenaires privés.
Je viens d'évoquer avec vous la ligne d'action de fond de la France, laquelle consiste à faire prévaloir des principes qui visent à travailler à l'unité contre les tentatives de division et, en même temps, à refonder et rénover certains partenariats pour qu'ils nous permettent de faire face aux défis du temps présent et à ceux que nous voyons poindre pour demain.
Tel est le sens de notre action sur le continent africain. Le Président de la République s'est exprimé lundi 27 février pour fixer un cap qui doit nous faire sortir des logiques passéistes de compétition et de pré carré, lequel a depuis longtemps disparu. C'est dans cet esprit que nous renouvelons les modalités de notre partenariat militaire avec plusieurs pays africains. Il y aura moins de soldats français dans ces pays - le Président de la République l'a indiqué dans son discours du mois de novembre -, et ceux-ci stationneront dans des bases cogérées avec nos partenaires africains et non dans des bases françaises installées dans ces pays. Nous voulons développer notre action en matière de formation et d'équipements : nous souhaitons être aux côtés de nos partenaires africains mais en occupant le second rang et non le premier.
Nous devons continuer d'investir dans ce continent car l'Afrique sera l'un des grands foyers de croissance dans les décennies qui viennent. Il nous faut donc y être présents, quoique d'une façon différente : forgeons des partenariats équilibrés et assumons ce que nous sommes en faisant valoir, sans arrogance et avec plus d'humilité que dans un passé lointain, nos valeurs, nos atouts - les liens humains, notre diaspora, nos entreprises, nos capacités de recherche, notre action en matière de santé - et nos intérêts. Le thème de la visite du Président de la République en Angola en fin de semaine dernière a porté sur ces sujets : le chef de l'Etat s'est engagé auprès d'entrepreneurs agricoles africains et français et de belles perspectives de coopération se font jour dans ce domaine.
En Afrique, nous souhaitons passer d'une logique d'aide à une logique d'investissements solidaires, en déployant davantage de projets concrets, parfois visibles, susceptibles de répondre aux attentes de la jeunesse et de la société civile. J'ai été frappée, parmi tant d'autres expériences, de ma visite du quartier populaire de Yopougon à Abidjan, en fin d'année dernière : j'y ai rencontré des jeunes exerçant les métiers les plus divers - de la lutte pour les droits des femmes en passant par l'agriculture et la création de start-up - et j'ai constaté que nous ne savons pas aider efficacement ces jeunes qui sont extrêmement bien formés, positifs, ambitieux et confiants dans l'avenir. La taille de leurs projets se révèle souvent trop grande pour nos instruments d'ambassade et trop petits pour ceux de l'Agence française de développement (AFD) : nous avons donc créé, avec l'accord du Président de la République, deux nouveaux dispositifs. Le premier est un fonds, doté de 40 millions d'euros, que nos ambassadeurs pourront utiliser pour aider directement, au plus près du terrain, des projets pilotés par ces publics ; le second est un autre fonds, rattaché au ministère et doté de 20 millions d'euros, dans lequel les instituts français à l'étranger pourront puiser pour soutenir les industries culturelles et créatives, qui sont particulièrement prometteuses dans de nombreux pays africains ; le but est également de développer une plus grande intimité avec la société civile, au-delà des cercles officiels.
J'aurai l'occasion de réunir prochainement, par visioconférence, nos ambassadeurs en Afrique pour échanger avec eux, leur rappeler les grands axes de notre politique, tels que le Président de la République les a définis, et les entendre témoigner de leur expérience et formuler des recommandations et des propositions. Notre politique doit être, encore plus qu'avant, au contact des sociétés et pas uniquement des gouvernants. Ce n'est pas la France qui désigne les dirigeants des pays étrangers : nous nous adressons aux responsables en place mais aussi aux artistes, aux sportifs, aux jeunes, aux chercheurs, aux entrepreneurs et aux diasporas. Il n'y a aucune fatalité à voir des incompréhensions s'installer : nous savons ce qui les crée et, encore plus, qui en joue et par quels moyens ; vous savez à quels pays je fais référence et aux moyens qui sont utilisés.
Je vous sais attentifs aux évolutions en cours au sein de mon ministère : le rapporteur général des Etats généraux de la diplomatie, l'ambassadeur Jérôme Bonnafont, a achevé ses travaux et me remettra bientôt son rapport, réalisé dans les temps, en quelques mois. Avec son équipe, il a mené une consultation, inédite dans notre ministère, de l'ensemble des agents, quel que soit leur statut ou leur pays de résidence : près de 5.000 agents ont répondu, chiffre énorme car ce ministère, le plus beau de tous bien entendu, ne compte que 13.500 agents ; ainsi, plus d'un tiers du personnel a participé à cette consultation, signe du remarquable travail de l'équipe des Etats généraux et de son rapporteur général. Tout en me réjouissant de leur contribution, je remercie les parlementaires qui nous ont apporté leurs idées et leurs observations : nous en avons tenu compte autant que faire se peut ; je vous mets au premier rang, Monsieur le Président, car votre contribution personnelle fut très forte.
(...)
J'ignore moi-même ce qu'il en adviendra mais j'ai commencé à lire le contenu de ce rapport, que j'ai reçu officieusement et qui nourrira mes échanges avec le Président de la République et la première ministre. Je serai ensuite à l'écoute de leurs décisions, ce document devant servir de base à la nécessaire transformation du Quai d'Orsay, laquelle devra lui permettre de faire face aux grands défis de notre époque. Il peut mieux accomplir sa mission d'ouverture de notre pays sur le monde en étant un ministère de l'innovation ; il peut être le ministère d'une expertise précise, qui articule les savoirs dits traditionnels - le sens de la négociation, la maîtrise des langues, l'expérience du métier et la connaissance des sociétés - avec les savoirs nouveaux en matière de numérique et de communication. À titre d'illustration, les négociations sur la protection de la haute mer - biodiversité au-delà des juridictions nationales ou biodiversity beyond national juridiction (BBNJ) - viennent de se conclure avec succès à New York, grâce notamment au secrétaire d'Etat chargé de la mer, Hervé Berville, mais également aux équipes de mon ministère qui l'ont entouré - comme il a eu la gentillesse de le souligner, je me sens autorisée à le rappeler - ; pourtant, le droit de la mer est une matière particulièrement complexe, même pour les juristes talentueux. Nous devrons maîtriser des compétences précises pour investir d'autres champs, comme le climat, la santé, l'énergie, l'intelligence artificielle et sans doute bien d'autres. C'est ce chantier de transformation qui placera le ministère de l'Europe et des affaires étrangères au centre de l'action internationale de l'Etat dans le monde : voilà pourquoi, je le situe au premier rang de mes priorités à la tête du ministère et souhaite le mener à bien.
(...)
R - Je regrette de ne pas vous avoir convaincu sur la tournée du Président de la République en Afrique et, plus particulièrement, sur les grands axes de l'action de la France J'ai pris le soin d'assortir mon propos général de précisions sur l'aide que nous apportons ou que nous comptons apporter aux forces vives de ces pays. Je ne ferai pas de commentaire sur la presse - elle en fait suffisamment - car j'ai pour habitude depuis quelques dizaines d'années de la laisser libre de ses jugements, et il lui arrive de se tromper comme chacun d'entre nous.
Des sanctions visent la junte birmane et, à l'occasion du deuxième anniversaire du coup d'Etat de février 2021, nous avons renforcé notre pression diplomatique et saisi le Conseil de sécurité dans la perspective de cette échéance ; pour la première fois, à la fin de l'année dernière, une résolution a pu être adoptée sur la Birmanie. Par ailleurs, l'action diplomatique de la France et de certains de ses partenaires se poursuit ; j'ai eu l'occasion de parler, il y a seulement un peu plus de huit jours, à mon homologue indonésien, dont le pays préside actuellement l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN), laquelle entend jouer un rôle pour amener la junte - le pourra-t-elle ? nous le verrons - à accélérer la transition. Ce sujet fut l'objet principal de notre entretien.
(...)
R - Nous soutenons le travail de la CPI, en particulier celui du procureur général, Karim Khan. Vous avez noté avec intérêt qu'il s'était récemment déplacé à Kiev où il avait été bien reçu par les autorités de ce pays, ce qui augure d'une meilleure coopération entre la CPI et l'Ukraine, laquelle nous paraît indispensable pour lutter efficacement contre l'impunité. Au-delà du travail de la justice ukrainienne et de celui de la CPI - instance saisie par quarante-trois Etats, dont la totalité des pays européens -, nous participons aux réflexions en cours sur la possibilité de compléter le dispositif international, afin de pouvoir sanctionner le crime d'agression perpétré par la Russie.
Je regarderai plus en détail le contenu de la déclaration de Mme Laura Codru?a Kövesi - j'étais en déplacement la semaine dernière -, mais la lutte contre le contournement des sanctions compte parmi les priorités de l'Union européenne et de la France, notamment quand d'autres pays sont utilisés à cet effet. Les sanctions ne sont applicables qu'aux pays qui les ont prises : il y a donc là une voie de contournement que l'on ne peut pas qualifier juridiquement comme tel. Je vous enverrai une réponse sur des irrégularités qui seraient commises : les autorités nationales sont en principe compétentes pour sanctionner les personnes morales ou physiques qui relèvent de leur juridiction et qui contourneraient de manière avérée les sanctions.
(...)
R - Vous me rendez perplexe sur le Sénégal, car j'avais compris de votre intervention tout à l'heure et de vos positions générales que vous militiez pour le renouvellement de nos relations avec l'Afrique, comme nous nous employons à le faire, mais vous vous inquiétez dans le même temps de notre incapacité à dicter son comportement à un pays de ce continent. Il ne faut pas s'ingérer dans la politique intérieure d'un pays étranger. En revanche, nous parlons avec tout le monde, y compris avec le Sénégal, des questions qui nous tiennent à coeur comme l'Etat de droit - qui comprend le respect de la Constitution - et les droits de l'Homme : quoi qu'il en soit, nous ne décidons pas pour autrui.
Je ne crois pas qu'un président français ait décidé seul de la position de l'Union européenne sur l'adhésion de la Turquie : les négociations n'ont pas été interrompues à l'initiative de la France mais après une série de difficultés avec un pays qui avait beaucoup de mal à faire progresser les discussions et à accepter ce que recouvrent les valeurs de l'Union européenne, qu'il aspirait pourtant - disait-il - à rejoindre. Ce détail historique étant rappelé, nous serons attentifs, en Turquie comme ailleurs, au respect des règles ; la date des élections n'a pas été modifiée par le séisme, alors que certains s'interrogeaient à ce sujet ; nous y voyons plutôt un bon signe, même si certains considèrent que le scrutin ne se déroulera pas dans de parfaites conditions dans certaines régions. Nous serons attentifs à cette dimension. Parallèlement, nous dialoguons avec la Turquie ; j'ai vu mon collègue turc, avec qui j'entretiens de bonnes relations, au G20 et, même si nous ne sommes pas d'accord sur tout, nous saluons le rôle positif de la Turquie dans l'accord de la mer Noire, qui autorise l'exportation de grains, de céréales et d'engrais via cette mer. Il arrive cependant qu'il soit nécessaire de rappeler la règle de droit, comme je l'ai fait avec mon homologue à au moins deux reprises lorsque la Turquie a bombardé des populations kurdes situées en dehors de ses frontières.
(...)
R - Mon cabinet me cachant tout, j'ignorais que vous vouliez m'interroger sur la situation au Proche-Orient. Je vais néanmoins faire de mon mieux pour vous répondre, en usant peut-être de termes plus modérés que les vôtres.
Nous sommes extrêmement préoccupés - nous l'avons dit dans plusieurs déclarations officielles - par la dégradation continue de la situation sur le terrain. La violence engendrant la violence, nous avons appelé les uns et les autres à changer leur comportement. Le contraste est saisissant entre la hausse des violences et les promesses que les accords d'Abraham étaient censés porter. M. Benyamin Netanyahou a signé ces accords auxquels il semble imparfaitement attaché. Ces accords sont utiles parce qu'ils permettent de faire baisser la tension mais ils sont insuffisants parce qu'ils sont construits autour du vide, puisqu'ils éludent la question politique.
Ne dites pas que nous ne faisons rien : le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté une déclaration présidentielle, objet de longues et délicates négociations, qui appelle à la fin des violences. Publiée dans la semaine du 20 février, elle a nécessité d'âpres efforts de nos partenaires, notamment américains qui ont joué un rôle extrêmement positif, et de nous-mêmes : comme vous le savez, les déclarations présidentielles supposent l'unanimité des membres du Conseil de sécurité, donc parvenir à en élaborer une est un signal important.
À l'instigation des Etats-Unis d'Amérique, les parties se sont réunies et ont pris des engagements ces derniers jours, notamment une trêve de plusieurs mois. C'est sans doute insuffisant, jugerez-vous, mais cela n'était pas arrivé depuis des années. Il faut encourager ce genre de décisions pour oeuvrer à la désescalade et restaurer un horizon politique, seul à même de parvenir à une solution juste et durable reposant sur deux Etats, je tiens à le redire.
Le temps ne me permet pas de revenir sur les propos du ministre israélien des finances mais nous nous sommes exprimés officiellement et rapidement à ce sujet, dans des termes moins diplomatiques que d'habitude.
(...)
R - Je vous remercie d'avoir rappelé l'étymologie du mot " crise " mais, lorsqu'il y a trop de crises, il y a peut-être moins d'opportunités. Nous vivons l'un de ces moments, voilà pourquoi, au-delà des réponses que nous tenons à apporter à chaque situation, parfois dans l'urgence, je me suis employée à décrire ce que nous essayons de faire sur le long terme pour réduire les fractures, éviter qu'il y en ait de nouvelles et empêcher un nouveau et second cycle de fragmentations conduisant à des brutalisations.
Notre vision, que le Président de la République et quelques autres exposent régulièrement et clairement, repose sur une France forte dans une Europe forte et plus souveraine. C'est tout l'objet de l'agenda de Versailles : nous avons réussi, lors de la présidence française de l'Union européenne, à faire converger nos partenaires vers cette orientation. Nous renforçons, dans des proportions inimaginables il y a quelques années, la composante industrielle comme celle de la défense. Les actions de l'Union européenne en termes de réinvestissement dans nos industries sont remarquables, notamment la dernière proposition de la Commission en réponse à la loi américaine sur la réduction de l'inflation : l'Inflation Reduction Act ou IRA.
J'ai essayé de vous décrire notre message aux Africains, dont le maître-mot est le partenariat. Respectueux et passé entre égaux, celui-ci répond à notre volonté de défendre nos atouts, nos intérêts et nos valeurs. Ne doutez pas que nous parlions de tout dans notre dialogue avec les pays africains.
Il faut reprendre les propos du Président de la République sur le Rwanda : le chef de l'Etat a toujours été clair lorsqu'il s'est agi de demander le retrait du M23 de la République démocratique du Congo : il l'a fait publiquement mais aussi à l'occasion de ses contacts avec le président Kagame, qu'il a rencontré à plusieurs reprises, notamment pour évoquer, j'en suis témoin, ce sujet.
(...)
R - Il me faudra toute votre aide et tout votre talent pour convaincre mon collègue de l'intérieur du bien-fondé de votre proposition. Ce sujet ne relève pas uniquement de mon ministère, pas plus que de la France seule, puisqu'il s'agit de visas de l'espace Schengen.
Je vous remercie de votre propos sur la refonte de notre politique à l'égard du continent africain. Nous souhaitons transformer notre relation et nous nous attelons à cette tâche depuis 2017, date du premier grand discours du Président de la République sur la politique de la France à l'égard de l'Afrique, prononcé à Ouagadougou. Nous voulons aller plus loin : pour ce faire, mon ministère et celui des armées ont adapté leurs instruments ; lors de son récent déplacement, le Président de la République a évoqué le projet d'élaborer une loi-cadre sur les restitutions de biens culturels et de continuer à travailler sur l'importante question de la mémoire. Il nous faut, d'un côté comme de l'autre, regarder le passé avec plus de distance. Nous allons continuer à changer notre regard sur l'Afrique et parvenir, espérons-le, à modifier celui que posent certains segments de la population africaine sur la France, grâce à ce merveilleux projet qu'est la Maison des mondes africains, qui devrait ouvrir dans un an. Je voudrais également revenir sur l'intérêt des deux fonds que nous avons créés : nous devons, au-delà des grands projets, aider les petits entrepreneurs africains et la jeunesse de ce continent qui a tant d'idées.
L'équation des visas est complexe car il faut répondre aux demandes de nos compatriotes qui veulent avoir accès à un service consulaire efficace et rapide tout en se montrant rigoureux dans le contrôle de l'immigration irrégulière : la conciliation de ces deux objectifs est parfois difficile, en particulier dans certains postes mal ou peu équipés. J'ai demandé aux services de mon ministère d'aider les postes les plus sollicités ; du fait de la pandémie et de la reprise des déplacements après celle-ci, nous avons accumulé de gros retards, notamment en Afrique subsaharienne. Il faudra renforcer ces postes et nous embaucherons quelques agents, à la hauteur de nos moyens, dès l'été 2023. J'ai pu prendre cette décision en début d'année grâce à la loi de finances pour 2023 ; ces renforts doivent nous aider à déstocker les demandes de visas dont le traitement accuse du retard. Toute oeuvre humaine est imparfaite, et je reconnais que nous pourrions parfois être plus efficaces : nous tâcherons d'optimiser le traitement des demandes de visas, afin de le fluidifier et de réduire les délais d'examen.
(...)
R - Je vous trouve injuste : la vision existe bel et bien ; le Président de la République l'a déclinée de façon précise pendant près de deux heures et son application est en cours. Nous cherchons à faire du gagnant-gagnant. Qu'il n'y ait pas ou plus de politique africaine ne veut pas dire qu'il n'y a pas de politique avec l'Afrique. Cela ne signifie pas non plus que l'Afrique et le rapport avec les pays africains n'ont plus d'importance. Pas de sophismes, s'il vous plaît ! Nous voulons voir ce continent et ces pays pour ce qu'ils sont, avec leurs difficultés mais aussi les possibilités qui s'offrent à eux.
Nous entretenons une relation de long terme avec l'Algérie et chacun de nous doit travailler, à sa place, pour que cette relation soit utile pour les deux côtés de la Méditerranée.
S'agissant du Maroc, je n'ai lu que des commentaires de presse. Je ne crois pas que la France ait pris quelque initiative que ce soit ayant pu provoquer l'ire des autorités marocaines. Si je me trompe, dites-moi laquelle. Je n'ai pas d'informations quant à la non-délivrance de laissez-passer, mais je vérifierai auprès de mon collègue ministre de l'intérieur.
À Djibouti, la présence chinoise est établie depuis plusieurs années. Si je me suis rendue en Ethiopie avec mon homologue allemande, c'est parce que nous pensons que certains Etats tiers peuvent jouer un rôle dans la Corne de l'Afrique et que l'Union européenne doit y être présente. Des discussions sont en cours pour le renouvellement de notre accord de défense avec Djibouti ; j'ai bon espoir qu'elles aboutissent.
(...)
R - Nous nous sommes exprimés clairement à propos des déclarations du ministre israélien des finances, ce qui nous a d'ailleurs valu des remerciements de la partie palestinienne. Nous avons dit que nous étions consternés par ces propos inacceptables, irresponsables et indignes d'un membre du gouvernement israélien, qui plus est lorsque la personne en question est chargée de l'administration civile des territoires occupés. De tels propos ne font qu'attiser la haine et contribuent à alimenter l'engrenage de la violence.
Nous sommes attachés à l'Etat de droit, au Sénégal comme ailleurs. Le dialogue que nous entretenons avec ce pays nous permet d'aborder toutes les questions, même les plus sensibles. C'est ce que nous faisons en ce qui concerne le respect de la liberté de la presse, qui du reste n'est pas une question particulièrement sensible.
S'agissant de la délivrance de visas à la suite du séisme en Turquie, nous avons demandé à nos postes diplomatiques et consulaires sur place de traiter de façon accélérée les demandes de victimes ou de membres de leur famille, en particulier lorsque ces personnes ont, dans notre pays, des proches susceptibles de les accueillir. Il s'agit d'un dispositif accéléré mais pas dérogatoire : c'est le droit commun qui s'applique.
Une fois qu'il m'aura été remis, le rapport des états généraux de la diplomatie sera rendu public.
(...)
R - En ce qui concerne les relations avec l'Afrique, si vous vous reportiez directement aux déclarations du Président de la République au lieu de lire des articles de presse, votre jugement serait peut-être légèrement différent.
S'agissant du Maroc, les propos désagréables que vous rapportez émanent d'une source anonyme ; je n'y accorde donc pas d'importance particulière. J'en reste pour ma part à mes échanges avec nos amis marocains lors de ma visite sur place les 15 et 16 décembre.
Quant au reste de vos interpellations, vous les avez prononcées comme si vous considériez que la France était à l'origine de la difficulté. Pourquoi ?
(M. le président Jean-Louis Bourlanges - En écoutant M. Dumont, je me suis posé la même question...
La France, l'Europe et plus largement l'Occident se trouvent dans une situation très difficile. Depuis 1989, l'aire d'influence de nos valeurs a rétréci comme peau de chagrin. On a toujours des responsabilités dans ce qui se produit mais, en l'occurrence, nous ne sommes pas les seuls. Par ailleurs, certaines tendances sont très profondes et relèvent du temps long.
M. le député Pierre-Henri Dumont - Les torts sont probablement partagés mais dans une telle situation, soit on ne fait rien, soit chacun essaie de faire un pas vers l'autre. Certaines choses ont pu irriter le Maroc, comme le fait d'être mis constamment sur un pied d'égalité avec l'Algérie en ce qui concerne les visas, alors que le taux de délivrance des laissez-passer consulaires et celui des reconductions ne sont pas du tout les mêmes pour les deux pays. Je pense aussi au vote du groupe Renew, qui représente la majorité présidentielle, au Parlement européen.)
(...) (Mme la députée Maud Gatel - (...) À la veille de l'organisation des Jeux olympiques, et alors que la Cour des comptes a consacré un rapport à la sécurité, pouvez-vous éclairer la commission sur la stratégie de lutte contre les intrusions technologiques émanant de pays tiers ?)
R - Je demanderai votre indulgence en ce qui concerne la dernière question : j'avoue ne pas être en mesure de vous répondre. Je vous adresserai des éléments sur ce point.
Nous avons réussi à faire en sorte que l'Union européenne adopte une attitude plus nette s'agissant des otages en Iran : les Vingt-Sept parlent désormais d'une politique d'otages. Si nous nous sommes réjouis de la libération de Mme Fariba Adelkhah, celle-ci n'est pas encore en mesure de jouir de sa liberté : au moment où je vous parle, je ne sais pas si elle est autorisée à quitter l'Iran.
Il reste six autres otages. Je vous remercie de penser à eux. Nous demandons régulièrement leur libération immédiate et sans condition.
Je me suis exprimée brièvement sur les empoisonnements qui semblent toucher les écoles iraniennes, en particulier les jeunes filles. Pour le moment, nous disposons uniquement d'informations émanant des réseaux sociaux et de la presse. Nous souhaitons que la lumière soit faite sur ces événements qui ont commencé au mois de septembre, c'est-à-dire de manière concomitance au mouvement de protestation lancé par les femmes. Le nombre de cas paraît s'amplifier. Une enquête sérieuse doit être menée, dans la mesure où les autorités iraniennes reconnaissent désormais l'existence de ce phénomène troublant.
Le corps des gardiens de la révolution est déjà visé par des sanctions européennes, compte tenu de l'appui qu'il a apporté aux activités de prolifération. Lui imposer les mêmes sanctions à un autre titre aurait surtout une portée symbolique. En outre, la plupart des responsables de l'organisation ont fait l'objet récemment de sanctions supplémentaires. L'opinion exprimée par M. Borrell ne fait que refléter celle du service juridique du Conseil : l'Union européenne ne peut placer une organisation sous ce régime particulier si une action en justice n'a pas été engagée et conduite à son terme dans l'un des Etats membres. Nous nous en tenons à cet avis.
(...)
R - Le jugement que vous avez porté sur la tournée du chef de l'Etat en Afrique mériterait que je vous réponde avec vivacité. Sachez que c'est uniquement par souci de ne pas polémiquer que je ne le fais pas.
Je me réjouis de vous entendre dire qu'il faut défendre l'intégrité de l'Ukraine. C'est une évolution positive. J'aimerais toutefois que vous soyez encore plus clair et que vous acceptiez de considérer que, dans cette guerre, il y a un agresseur et un agressé, et que l'un et l'autre ne sauraient être mis sur le même plan. La Russie viole les principes les plus élémentaires du droit international, y compris les engagements qu'elle-même avait pris au moment de la disparition de l'Union soviétique. Il convient de défendre l'Ukraine car, au-delà de ce pays, ce sont la paix et la stabilité du monde que nous défendons. Si une agression comme celle-ci était couronnée de succès, d'autres se produiraient ailleurs. L'histoire nous l'a enseigné.
Je crois utile, pour votre information et celle de la commission, de rappeler que le président Zelensky avait toujours recherché le dialogue jusqu'au 24 février 2022, et que ce n'est pas lui qui a déclenché l'agression. De même, il a présenté un plan de paix au mois de novembre, lorsqu'il a été invité à participer au G20. Nous soutenons ce plan. Il a d'ailleurs trouvé une déclinaison dans les termes choisis par les négociateurs dans la résolution adoptée le 23 février lors de l'Assemblée générale des Nations unies. La Russie, en revanche, ne semble pas avoir de dispositions particulières pour la paix et la recherche du dialogue. Il suffit d'écouter les propos répétés du président Poutine ou de M. Medvedev pour considérer qu'elle persiste dans la logique impérialiste et colonialiste qui a présidé à l'agression.
Si nous avons accepté que l'accord avec le Chili soit paraphé, c'est parce que ce pays a accepté ce que les Européens lui demandaient, à savoir le respect d'exigences environnementales et sociales pour tout accord commercial de nouvelle génération. Le Chili a accepté, en particulier, de faire référence à la nécessité de respecter l'accord de Paris sur le climat et les conséquences que cela implique en matière de flux commerciaux.
L'accord avec le Mercosur s'inscrit dans un horizon plus lointain car tous les pays membres de cette organisation n'ont pas la même approche dans ces négociations. D'une façon générale, nous sommes opposés à la dissociation, comme l'a rappelé le Président de la République lors de sa visite au salon de l'agriculture.
(...)
R - L'Inde entretient traditionnellement des relations de proximité avec la Russie et, parallèlement, des relations plus difficiles avec la Chine. Cela peut la conduire à avoir des vues un peu moins équilibrées que les nôtres s'agissant du conflit. Néanmoins, l'Inde a assumé comme il le fallait son rôle de présidente du G20. Mon homologue indien s'est efforcé de reprendre le langage qui avait été agréé par les dirigeants du G20 à la fin du mois de novembre ; je pense aux paragraphes qui mentionnaient la gravité du conflit engagé par la Russie. Il s'est trouvé que le durcissement de la position russe ne lui a pas permis d'aboutir. La Chine, quant à elle, a laissé les choses se faire, considérant peut-être que le G20 indien ne méritait pas des efforts allant au-delà de ce que son premier sentiment lui dictait.
Les effets des sanctions, combinés au fait que les Européens ont réduit drastiquement leur dépendance aux hydrocarbures russes, au point que ces derniers sont quasiment résiduels, ont entraîné une baisse des prix. Certains pays n'appliquant pas les sanctions en achètent donc, en effet, à des prix plus faibles, et ils ont le droit de le faire. Nous sommes vigilants au contournement des sanctions ; toutes les dispositions sont prises à cet égard. Je n'ai pas connaissance du fait que des produits d'origine russe atteindraient notre pays à travers les activités de raffinage indiennes.
(...)
R - Ne doutez pas un instant de la position de la France : Mayotte est dans la République et y restera. Cela dit, nous sommes vigilants - je devrais même dire inquiets - devant l'offensive russe partout en Afrique, notamment dans le canal du Mozambique : là comme ailleurs, les Russes mènent des campagnes de désinformation et répandent des messages anti-français. Ceux que vous évoquez en font partie. Vous me pardonnerez de ne pas commenter toutes les déclarations du ministre des affaires étrangères russe à ce propos : j'y passerais beaucoup de temps. De la même façon, je ne commente pas celles faisant état de la présence de nazis en Ukraine, censée justifier l'agression.
Nous renforçons notre coopération avec le Mozambique, Madagascar et l'Afrique du Sud.
Nous avons déployé, avec l'Union européenne, une mission de formation de l'armée mozambicaine en matière de sécurité maritime.
Nous entretenons un dialogue régulier avec l'Afrique du Sud, où j'espère me rendre avant l'été. Il s'agit d'une puissance régionale influente. Ainsi, j'ai tenu à m'entretenir avec mon homologue sud-africaine la semaine dernière à New Delhi, afin notamment d'ajuster nos positions concernant la guerre en Ukraine, car elles ne le sont pas spontanément, si l'on se réfère aux votes émis par l'Afrique du Sud aux Nations unies.
Il existe un réseau de coopération dynamique avec Madagascar et une communauté française importante est installée sur l'île. Le bureau de la coopération décentralisée représentant Mayotte à Madagascar est un autre point d'appui.
Reste que nous devons continuer à renforcer notre dispositif pour lutter plus efficacement contre la désinformation et les manipulations auxquelles se livrent les Russes, là-bas comme ailleurs. C'est l'objet d'une des transformations du ministère de l'Europe et des affaires étrangères que nous opérerons : nous entendons améliorer nos méthodes de travail, notamment en renforçant les moyens de la direction de la communication et de la presse. Vous verrez, à la suite des Etats généraux, quelles sont nos intentions en la matière.
(...)
R - Ces déclarations désagréables lues dans la presse sont de source anonyme et n'appellent donc pas, à mes yeux, de commentaire particulier. Je crois avoir pratiqué l'apaisement en me rendant au Maroc mi-décembre avec un certain nombre de dossiers que nous avons évoqués, dont celui qui permettait de constater que, d'un côté comme de l'autre, nous reprenions des relations consulaires normales. Je souhaite, pour ma part, continuer à pratiquer le même apaisement.
À ma connaissance - mais nous vérifierons les chiffres -, la politique concernant les visas n'a pas permis d'augmenter sensiblement le taux de réadmission, ni dans ce pays, ni dans un autre. C'est ce constat qui a conduit à une évolution de notre position.
(...)
R - Je demanderai à Bercy de vous envoyer une réponse précise car la question est suivie par le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. J'ai évoqué le sujet il y a moins d'un mois avec notre ambassadrice au Luxembourg, pays ami dans lequel les Français sont particulièrement actifs, grâce à l'excellente coopération transfrontalière que nous avons nourrie depuis plus de dix ans à travers ces accords.
Le ministère de l'économie mène des discussions avec les autorités luxembourgeoises à propos de la convention fiscale bilatérale, pour s'assurer qu'elle correspond toujours aux réalités. Un rapport sera remis au Parlement dans les tout prochains jours concernant les effets d'un changement de méthode.
Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 15 mars 2023