Interview de Mme Patricia Mirallès, sur le site internet du ministère de la défense le 17 mars 2023, concernant la décentralisation des grandes cérémonies nationales et la Journée nationale du souvenir et du recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.

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  • Patricia Mirallès - Secrétaire d’État, chargée des anciens combattants et de la mémoire

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Q : En 2023, vous souhaitez décentraliser en région certaines des grandes cérémonies nationales*. Quelles sont les raisons qui ont motivé votre décision ?

Patricia Miralles : Une brillante initiative d’un élu ! Celle d’Alexandre Grenot, maire des Gonds, en Charente-Maritime. Le 7 novembre dernier, en amont de la cérémonie officielle du 11 Novembre à l’Arc de Triomphe, il a organisé une cérémonie de ravivage de la flamme sur le stade municipal de sa commune. J’ai eu l’honneur de la présider. Environ 800 personnes étaient rassemblées, parmi lesquelles des autorités civiles et militaires, des anciens combattants, des porte-drapeaux mais aussi beaucoup de jeunes, issus du Service national universel ou du Service militaire volontaire, des lycéens, des collégiens, des primaires… Munis de lampes-tempête, certains d’entre eux ont remis symboliquement la flamme du Soldat inconnu aux maires de 50 communes de la région.

Voir la jeunesse actrice de la transmission de la mémoire fut un moment magnifique. De là est née mon idée d’étendre cette démarche à d’autres grandes cérémonies nationales, en étroite collaboration avec le « G12», c’est-à-dire les grandes associations représentatives du monde combattant. Le choix des cérémonies qui seront territorialisées est en cours d’étude : je peux déjà vous dire que le 30 avril se tiendra au camp du Struthof et le 8 juin au mémorial des guerres en Indochine de Fréjus.

Q : Quels sont les enjeux mémoriels de cette décentralisation ?

Nous avons établi un constat : les cérémonies dans leur format habituel, souvent parisien, peinent à rassembler autant que nous le souhaiterions. Pour réaffirmer le sens de nos commémorations et y impliquer nos jeunes, il faut aller au plus près des Français. S’ils ne peuvent pas venir à nous, c’est à nous d’aller à eux ! Reprocher à la jeunesse de ne pas connaître les moments clés de notre Histoire nationale est un peu facile. Il est de notre responsabilité de susciter l’intérêt des jeunes pour ces questions. Leur permettre d’assister à une cérémonie nationale, proche de chez eux, est un levier important. C’est ainsi que nous les sensibilisons au devoir de mémoire et aux valeurs républicaines. En cette période troublée, marquée par le retour de la guerre aux portes de l’Union européenne, ce travail de transmission me parait d’autant plus important.

Q : Ce dimanche, la journée nationale du souvenir et de recueillement à la mémoire des victimes civiles et militaires de la guerre d’Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc constituera donc la toute première cérémonie nationale organisée en dehors de la capitale. La présider revêt-il un sens particulier pour vous, en raison de votre histoire personnelle ?

Oui, bien sûr. Lorsque j’étais députée, j’ai porté la loi sur la reconnaissance et la réparation des harkis. Je me suis battue pour que la date controversée du 19 mars ne soit pas disqualifiée. Elle possède une signification historique forte, à savoir l’entrée en vigueur du cessez-le-feu au lendemain de la signature des accords d’Évian. C’est une date très importante, notamment pour tous les appelés. L’honorer, c’est leur témoigner notre reconnaissance.

Q : La commémoration se tiendra dans le Pas-de-Calais, à la nécropole nationale de Notre-Dame de Lorette. Pourquoi avoir choisi ce lieu ?

Parce que sa charge symbolique est forte. Depuis le 16 octobre 1977, la crypte abrite le corps du Soldat inconnu de la guerre d’Algérie. Par ailleurs, cette nécropole, la plus grande de France, ne laisse personne indifférent. Les 40 000 soldats des différents conflits qui y sont inhumés en font un lieu emblématique du fil qui relie plusieurs générations de combattants. Choisir d’y rassembler Françaises et Français à l’occasion du 19 mars, c’est une façon de poursuivre cette éducation à la mémoire, si importante pour notre jeunesse.


Source https://www.defense.gouv.fr, le 21 mars 2023