Interview de M. Franck Riester, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, à RMC le 29 mars 2023, sur l'échange entre Élisabeth Borne et les syndicats sur la réforme des retraites et la mobilisation contre cette réforme.

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Média : RMC

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Et notre invité politique ce matin, c’est Franck RIESTER. Merci beaucoup d’être avec nous 

FRANCK RIESTER
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Bonjour – et d’avoir accepté notre invitation. Ministre chargé des Relations avec le Parlement. On est ensemble pendant un peu plus de 20 minutes pour une interview en partenariat avec la presse régionale, représentée par Christelle BERTRAND, du groupe La Dépêche. Bonjour Christelle.

CHRISTELLE BERTRAND
Bonjour Oriane. Bonjour Franck RIESTER.

FRANCK RIESTER
Bonjour.

ORIANE MANCINI
On va évidemment parler de la réforme des retraites, au lendemain de cette 10ème journée de mobilisation. Elisabeth BORNE, hier soir, a invité les syndicats à Matignon la semaine prochaine, est-ce qu’elle est prête à rediscuter de cette réforme des retraites ?

FRANCK RIESTER
Vous savez, d’abord, le fil n’a jamais été rompu avec les syndicats, et je crois que c’est une bonne chose qu’elle puisse échanger avec les syndicats, sur tous les sujets qu’ils souhaiteront échanger…

CHRISTELLE BERTRAND
Et aussi sur la réforme des retraites ?

FRANCK RIESTER
Sur tous les sujets, évidemment, notamment sur les sujets qui ont été évoqués ou qui ont été mis en lumière à travers cette réforme des retraites, sur le travail, la qualité au travail, la pénibilité, les reconversions, mais aussi tous les sujets qui seront amenés à être discutés…

CHRISTELLE BERTRAND
C’est-à-dire, y compris l’âge de départ ?

FRANCK RIESTER
Vous savez, dans un dialogue, si vous… non, vous savez, ce point-là, c’est le coeur de la réforme, sur lequel depuis le départ, il n’y a pas d’accord, je veux dire, dans la vie, il y a des moments où il faut savoir reconnaître qu’il y a aussi des sujets où on n’est pas d’accord, donc il faut se parler sur les sujets sur lesquels on est d’accord, et pas se focaliser sur les sujets où on n’est pas d’accord…

ORIANE MANCINI
Donc, ça, ça ne sera pas remis sur la table ?

FRANCK RIESTER
C’est le coeur de la réforme.

CHRISTELLE BERTRAND
Mais ce que demandent les manifestants aujourd’hui, c’est justement de rediscuter de cette mesure d’âge, donc ça, ce n’est pas le sujet ?

FRANCK RIESTER
Oui, mais je vous rappelle qu’il y a eu un processus parlementaire, il y a eu une présentation d’un texte, une discussion de texte, des votes, une loi adoptée, et donc maintenant, ce qu’il faut voir, c’est de quelle manière, sur cette loi, on peut travailler dans le cadre d’un agenda social, avec les organisations syndicales, avec toutes et ceux qui ont envie d’améliorer un certain nombre de choses dans le monde du travail, qui permet justement à nos compatriotes de mieux travailler, d’être dans des conditions de travail meilleures, de mieux peut-être tenir compte de la pénibilité, de regarder de manière très concrète comment sera mise en oeuvre cette réforme, et notamment…

CHRISTELLE BERTRAND
Donc vous allez discuter…

FRANCK RIESTER
Vous savez qu’il y a une loi, et ensuite, il y a des décrets d'application, discuter beaucoup de ces éléments-là avec les organisations syndicales, en tout cas, je pense que c'est bien de pouvoir se parler, discuter, échanger.

CHRISTELLE BERTRAND
Donc vous allez plutôt discuter de la loi Travail à venir que de la réforme des retraites actuelle ?

FRANCK RIESTER
Mais, vous verrez ce que fera la Première ministre avec les organisations syndicales. Ce n'est pas moi qui vais, là, vous dire, pendant une demi-heure, elle va parler de ça…

ORIANE MANCINI
Non, mais Laurent BERGER…

FRANCK RIESTER
Pendant une heure, ils vont parler de ça, simplement, le dialogue, la discussion, l'échange, la rencontre, le fil n'a jamais été rompu, mais je pense que c'est bien dans ce moment particulier de le faire.

ORIANE MANCINI
Laurent BERGER dit qu'il va reparler de sa proposition de médiation qu’il a faite hier, pour lui, c'est une solution pour sortir de la crise, est-ce que vous n'avez pas fermé la porte un peu trop tôt ?

FRANCK RIESTER
Mais une médiation, c'est utile quand il n’y a pas de dialogue, mais quand il y a un dialogue et des discussions, il n’y a pas besoin de médiation, là, il y a un dialogue, il y a des discussions, et donc…

ORIANE MANCINI
Oui, mais pas sur la même chose, puisque vous dites, on ne va pas dialoguer du coeur de la réforme, Laurent BERGER, et l'intersyndicale, veut dialoguer de la question du report de l'âge, donc est-ce qu’il faut une médiation là-dessus ?

FRANCK RIESTER
Ne tentons pas de mettre une pression sur les uns et sur les autres sur leur position supputative, laissons discuter la Première ministre avec les organisations syndicales, moi, vous m'interrogez sur les 64 ans, je vous dis que c'est le coeur de la réforme, et que c’est l’élément qui permet le retour à l'équilibre, s'il n’y a plus de 64 ans, il n’y a plus de retour à l'équilibre, et donc, il n’y a plus de réforme. En revanche… et franchement, il y a des moments dans le dialogue social, dans le dialogue parlementaire, dans la vie, où il y a des choses sur lesquelles on n’est pas d'accord, bon, voilà, dont acte, parlons de tout ce sur quoi on pourrait être d’accord, ce sur quoi on peut avancer, ce sur quoi on peut améliorer notamment la qualité de travail de nos compatriotes.

CHRISTELLE BERTRAND
Vous dites que le dialogue n'est pas rompu avec Elisabeth BORNE, en effet, il va y avoir cette réunion. En revanche, le président de la République, lui, n'a pas souhaité recevoir les syndicats, est-ce que le dialogue est rompu entre Emmanuel MACRON et les syndicats ?

FRANCK RIESTER
Le dialogue n'est absolument pas rompu avec l'exécutif dans son ensemble, là, Elisabeth BORNE recevra les organisations syndicales, et, franchement, on est dans un état d’esprit…

CHRISTELLE BERTRAND
Mais pourquoi avoir refusé de les recevoir, il y a une dizaine de jours, et les recevoir aujourd’hui ?

FRANCK RIESTER
Ecoutez, vous savez, une chose après l’autre, là, il y a un moment d'échanges très important, entre les organisations syndicales et la Première ministre, laissons se passer ce moment-là, et n'essayons pas de trop… vous savez, vous êtes dans votre rôle, vous voulez essayer de décrypter, de comprendre, de savoir la petite phrase…

CHRISTELLE BERTRAND
Les Français ont été étonnés que le président de la République n’ait pas souhaité recevoir les syndicats, il y a une dizaine de jours…

FRANCK RIESTER
Mais les Françaises et les Français, ils vont aussi…

CHRISTELLE BERTRAND
On l’a entendu dans les manifestations…

FRANCK RIESTER
Ils comprennent ce qui se passe, vous savez, il ne faut pas les prendre pour ce qu’ils ne sont pas, ils comprennent ce qui se passe, ils voient qu’il y a une volonté de discussion, de dialogue avec les organisations syndicales, de l'exécutif, et ce qui est démontré avec cette rencontre avec les organisations syndicales. Et n’y voyez pas plus malice que ça…

ORIANE MANCINI
Ils ne comprennent peut-être pas qu’on ne rediscute pas de la réforme des retraites à laquelle ils sont opposés…

FRANCK RIESTER
Mais, ils comprennent très bien que dans une grande démocratie comme la nôtre, il y a des institutions, et qu'il faut respecter les institutions, et ces institutions, notamment, elles permettent qu4un texte proposé par l'exécutif, par le gouvernement, soit débattu au Parlement, il y a eu 175 heures de débat, il y a eu un vote du texte d'abord en première lecture au Sénat, il y a eu ensuite un compromis en CMP, c'est un texte issu du Parlement, avec beaucoup de modifications du texte par rapport à ce qui était au départ l'idée du gouvernement, ce texte a été ensuite… ce compromis a été voté au Sénat, et vu l'incertitude, nous avons pris nos responsabilités, nous avons fait adopter ce texte, voilà. Il y a un processus, maintenant, c’est au Conseil constitutionnel, et les Français, ils ne veulent pas qu'on réécrive l'histoire et qu'on revienne au début de ce processus-là.

ORIANE MANCINI
Un dernier mot sur la médiation, puisque le MoDem, alors, Olivier VERAN, on l'a dit, a claqué la porte assez vite, mais le MoDem, lui, s'est dit favorable à cette médiation, est-ce que la majorité est en train de se diviser ?

FRANCK RIESTER
Non, mais j’étais, vous savez, je déjeunais avec Jean-Paul MATTEI, pour vous dire les choses, hier midi…

ORIANE MANCINI
Président du groupe à l’Assemblée…

FRANCK RIESTER
Exactement, et les choses sont très claires, ils veulent aussi du dialogue, et c'est très bien, ça tombe bien, la Première ministre reçoit les organisations syndicales en début de semaine pour discuter et dialoguer.

CHRISTELLE BERTRAND
Alors, hier, une nouvelle journée de manifestation en France, la mobilisation est en baisse, est-ce que ça vous donne de l'espoir pour la suite des choses ?

FRANCK RIESTER
Non, mais écoutez, vous savez, il y a plusieurs manifestations, manifestement, il y en aura une jeudi prochain, nous, on ne regarde pas, comme certains de mes collègues disent, la météo des manifestations et la météo de la mobilisation. Nous, on se concentre sur une chose, c'est d'abord faire en sorte de reconnaître qu’il y a un certain nombre de manifestations qui se déroulent dans le calme et le respect, notamment grâce au travail des organisations syndicales, et il y a malheureusement un certain nombre d'éléments ultraviolents qui, depuis un certain temps, viennent se joindre dans ces manifestations, créent les conditions de violences, sont violents avec les forces de police et de gendarmerie, et cassent pour simplement vouloir mettre une pression inadmissible dans une grande démocratie comme la nôtre. Je rappelle qu'il y a eu 175 blessés chez les forces de police et de gendarmerie hier, lors de la manifestation, ce n'est pas acceptable. Vous savez, je crois que dans une démocratie comme la nôtre, on doit pouvoir manifester dans le calme, sans que des éléments perturbateurs viennent mettre la pression sur les manifestations, et sans que des forces politiques cautionnent ces violences. Moi, j’ai été très choqué de voir les députés LFI, pardon, mais c'est important de le dire, à Sainte-Soline, ce qui s'est passé à Sainte-Soline le week-end dernier, comme je suis très choqué de voir que beaucoup de responsables, notamment de La France Insoumise, ne disent rien, ne dénoncent pas, ne condamnent pas ces violences, et ainsi, créent les conditions d'une acceptation de la violence…

CHRISTELLE BERTRAND
Jean-Luc MELENCHON et Mathilde PANOT, hier, ont appelé au calme dans les manifestations quand même.

FRANCK RIESTER
Oui, enfin, on n’appelle pas au calme quand on va soutenir des manifestations illégales et dans lesquelles, c’était évident, ça avait été dit, il allait y avoir des casseurs, ce n’est pas comme ça qu’on…

ORIANE MANCINI
Vous souhaitez des sanctions pour les parlementaires qui étaient présents à Sainte-Soline ?

FRANCK RIESTER
Ce n’est pas des sanctions, je dis très clairement, politiquement, c'est inacceptable que des élus de la République aillent dans des manifestations illégales dans lesquelles on sait pertinemment qu'il va y avoir des violences qui mettent en danger la vie de toutes celles et ceux, 1°) : qui protègent nos compatriotes, c'est-à-dire les forces de police et de gendarmerie, et éventuellement, même les manifestants eux-mêmes.

CHRISTELLE BERTRAND
J’allais dire tout à l’heure, ce qu’on entend beaucoup dans les manifestations aujourd'hui, c'est des gens dire : on a manifesté calmement pendant des semaines, et le gouvernement n'a pas voulu amender son texte, aujourd'hui qu'il y a des violences, les syndicats sont reçus à Matignon, est-ce que ce n'est pas ça qu'il faut faire, j’imagine que vous ne partagez pas ce point de vue, mais est-ce qu’il y a une concomitance en effet entre la montée de ces violences et le fait que le gouvernement renoue le dialogue ?

FRANCK RIESTER
Non, mais, d’abord, je ne dis pas, on ne renoue pas le dialogue, pardon, ça, je ne peux pas laisser passer ça, on a toujours eu un fil de dialogue, d'échanges et de discussions, vous savez, dans la préparation du texte, Olivier DUSSOPT, la Première ministre ont passé des heures et des heures à recevoir les organisations syndicales, ils ont tenu compte de ces rendez-vous pour modifier le texte par rapport à ce qu'était l'idée au départ, quand on a présenté le texte, c’était un texte qui a tenu notamment compte de ces échanges, et pendant tout le débat parlementaire, la porte, on l'a dit, moi, je l'ai dit sans arrêt, nous l'avons dit sans arrêt, la porte d'Olivier DUSSOPT, de la Première ministre, est ouverte, le fil n’a jamais été rompu. Donc ne disons pas qu’on renoue le dialogue, simplement, il y a un moment, il y a des étapes, là, on a une étape où il faut aussi préparer l'avenir, le président de la République a demandé à la Première ministre de réfléchir à la façon dont on allait proposer un plan d'action, une feuille de route avec les priorités fixées par le président de la République, en travaillant avec les forces politiques, les forces syndicales, avec les élus locaux, avec les Français pour voir comment…

CHRISTELLE BERTRAND
On va y venir…

FRANCK RIESTER
Oui, oui, on va y venir, mais, donc, et notamment, eh bien, sur ces questions de plein emploi, sur ces questions de travail, sur ces questions de mise en oeuvre de la réforme des retraites, tout ça doit pouvoir être discuté avec les organisations syndicales.

CHRISTELLE BERTRAND
On va y venir, mais pour finir sur les violences, vous parliez des violences des manifestants, il y a eu aussi un certain nombre de violences de la part des forces de l'ordre, une pétition a déjà recueilli 100.000 signataires pour dissoudre la BRAV-M. Est-ce qu'elle pourra être débattue dans l'hémicycle à l'Assemblée nationale ?

FRANCK RIESTER
Ça, nous verrons, mais ce qui est clair en tout cas…

CHRISTELLE BERTRAND
Vous verrez quoi, par exemple, ça dépendra de quels critères ?

FRANCK RIESTER
Eh bien, on verra la façon dont les choses évoluent, mais ce qui est certain, c'est que s’il y a des actes qui sont répréhensibles de la part des forces de police et de gendarmerie, l'IGPN est saisie, et il peut y avoir des suites administratives ou éventuellement judiciaires, mais n'inversons pas les choses , je veux dire, on ne peut pas dire, comme vous le disiez, manifestations parfois pacifiques, oui, parfois, non, quand vous avez des gens qui viennent avec des boules de pétanque, avec des barres de fer, avec des masses, et qui lancent des projectiles, comme on l'a vu sur les images, soit de Sainte-Soline, soit, parfois encore dans les manifestations, les dernières manifestations parisiennes, c'est inacceptable, et il faut dire et remercier et saluer le courage, l'abnégation et l'engagement de ces forces de police et de gendarmerie pour protéger nos compatriotes…

CHRISTELLE BERTRAND
100.000 signataires…

FRANCK RIESTER
Qui sont autour des manifestations, et y compris ceux qui sont dans les manifestations…

CHRISTELLE BERTRAND
100.000 signataires, ce n’est pas suffisant pour débattre d'une pétition à l'Assemblée nationale ?

FRANCK RIESTER
Ça, on regardera d’une façon très précise des choses, mais, vous savez, le débat, il est en permanence dans les QAG…

ORIANE MANCINI
Mais ça veut dire quoi, ça veut dire que vous attendez les 500.0000 ?

FRANCK RIESTER
Vous savez, Madame, dans les QAG, on a… d’abord, il y a des règles pour un certain nombre de procédures à l'Assemblée nationale et au Sénat, on va respecter les règles. En même temps, le débat est ouvert, on est dans un pays, dans une grande démocratie, où tous les sujets peuvent être abordés, celui-là en particulier…

ORIANE MANCINI
La gauche demande une commission d'enquête parlementaire sur cette question du maintien de l'ordre, c'est une bonne chose ?

FRANCK RIESTER
Et La France Insoumise qui a déjà manifestement eu déjà un droit de tirage sur la commission d'enquête, bon, elle verra si elle peut, pour l’avenir, en faire une, chaque groupe peut le faire…

ORIANE MANCINI
Le PS est prêt à le faire, c’est une bonne chose ?

FRANCK RIESTER
Mais ce n’est pas une question de bonne chose, moi, je n’ai pas à juger la décision des groupes politiques dans leur commission d'enquête.

ORIANE MANCINI
Sur le plan législatif justement, Elisabeth BORNE a rencontré hier Gérard LARCHER et Yaël BRAUN-PIVET, que s'est-il dit pendant cette rencontre ?

FRANCK RIESTER
Ecoutez, il y a eu des discussions entre eux, et je n’ai pas l’habitude de…

ORIANE MANCINI
Sur une méthode, sur un calendrier législatif, sur des textes à venir ?

FRANCK RIESTER
D’abord, je n’étais pas avec le président…

ORIANE MANCINI
On imagine que vous avez eu le retour de la discussion avec le président de la chambre parlementaire…

FRANCK RIESTER
On va laisser les discussions entre la Première ministre et le président du Sénat et la présidente de l’Assemblée nationale de côté, ce qui est certain, c'est la volonté de dialogue, de discuter, d'échanger, de voir comment on peut organiser le travail parlementaire sur les priorités que la Première ministre donnera, pour faire en sorte que le travail soit le plus facile possible, pour que les parlementaires aient le plus de temps possible pour travailler en amont du passage des textes dans l'hémicycle, qu'il puisse y avoir peut-être des textes plus courts sur lesquels ils puissent mieux contribuer que sur des fois des grands textes cathédrales, qui sont compliqués à travailler, surtout, s’il n'y a pas suffisamment de temps pour le faire. Vous savez…

ORIANE MANCINI
Et de majorité pour les voter…

FRANCK RIESTER
Alors, majorité pour les voter, oui, bien sûr, et c'est tout le travail d'ailleurs qui est en partie le mien, mais le travail du gouvernement de faire en sorte, avec la majorité, de trouver des partenaires à l'Assemblée nationale, au-delà de la majorité présidentielle, pour voter les textes, mais je rappelle que sur…

CHRISTELLE BERTRAND
Est-ce que la question de la dissolution par exemple a été évoquée ?

FRANCK RIESTER
Attendez, on va parler de la dissolution après, mais je voudrais finir sur cette question de trouver des majorités. Parce que depuis… mais oui, mais vous avez pu constater que depuis le début du quinquennat, il y a eu 23 textes d'adoptés, que ce soit d'origine parlementaire ou d'origine du gouvernement, sur ces 23 textes, 20 ont été adoptés en ayant une majorité plus large que la majorité présidentielle, donc vous voyez bien qu'on peut agir, même si à l'Assemblée nationale, nous avons une majorité que relative, nous sommes à 40 députés de la majorité absolue, eh bien, depuis le début du quinquennat, 20 textes ont été adoptés en allant chercher des députés d'autres groupes que les groupes de la majorité présidentielle. Et c'est dans cet état d'esprit que nous allons continuer à travailler et à oeuvrer, et d'ailleurs, une fois la procédure parlementaire sur la réforme des retraites, il y a eu un vote sur les Jeux olympiques, avec le projet de loi JO, dans la foulée, comme le vote sur le nucléaire, vous voyez que ça – je crois – ne change pas fondamentalement la méthode de ce point de vue-là, qui vise à aller chercher des majorités plus larges. Et puis, en ce qui concerne la dissolution, c'est dans les mains du président de la République, si le moment venu, il estime que c'est nécessaire, eh bien, il prendra cette décision-là.

ORIANE MANCINI
Ça, ça serait la solution pour vous ?

FRANCK RIESTER
Mais, solution à quoi ?

ORIANE MANCINI
A une sortie de crise.

FRANCK RIESTER
Mais le processus de politique pour trouver des majorités n'est pas bloqué, je vous le rappelle, je viens de vous dire qu'on a un projet de loi JO, un projet de loi nucléaire qui a été voté, donc il n’y a pas un blocage de l'Assemblée nationale ou du Sénat.

CHRISTELLE BERTRAND
C’est une des missions que le président de la République a donnée à Elisabeth BORNE, de tenter d'élargir la majorité, on se demande un petit peu vers qui l'élargir, quelques personnalités des LR, à gauche, ça a l’air bloqué, comment vous imaginez les choses aujourd'hui, comment… est-ce que ça va continuer à se faire par des négociations de personne à personne, sur chaque texte ?

FRANCK RIESTER
Mais vous savez, on a une méthode qui a fonctionné sur la plupart des textes, si on peut aller plus loin dans une structuration avec des partenaires, eh bien, nous le ferons, et puis, sinon, on continuera projet par projet à essayer, projet de loi par projet de loi, texte par texte, de trouver les majorités, voilà…

CHRISTELLE BERTRAND
Est-ce que ça peut passer par un remaniement par exemple qui intégrerait certaines personnalités des LR, à gauche, et qui permette d'élargir et d'asseoir cette…

FRANCK RIESTER
Mais, vous imaginez bien que ce n’est pas moi qui vais vous parler du remaniement, c’est la responsabilité du président de la République et de la Première ministre.

ORIANE MANCINI
Non, mais alors sur la manière de faire les textes, puisque l'ordre du jour de la séance au Sénat est vide, cette semaine, il devait y avoir le texte immigration, il a été retiré, Emmanuel MACRON a dit qu’il y aurait sans doute plusieurs textes et qu'ils arriveront dans les prochaines semaines, est-ce que là-dessus, vous pouvez nous en dire plus ?

ORIANE MANCINI
Ce que je peux vous dire, c’est que la Première ministre, en lien avec les chambres, en lien avec les groupes politiques, elle en a rencontré certains de l'Assemblée nationale lundi, il y aura toute une séquence et une séance de rencontres avec les groupes politiques, avec les différents acteurs du Parlement pour – et puis, bien sûr, avec les membres du gouvernement – pour définir une feuille de route avec un certain nombre de priorités qui, ces priorités, se traduiront à la fois par des actions dans le cadre de la politique publique qui est menée par les administrations, par les ministères, en lien avec les collectivités territoriales, en lien avec les administrations déconcentrées de l’Etat. Et puis, il y aura une partie aussi liée à l'actualité parlementaire ; c’est-à-dire, l'action publique du gouvernement et de l'Etat ne se résume pas à l'action parlementaire, bien évidemment. Et donc là, il y aura…

ORIANE MANCINI
Est-ce que l’immigration fait encore partie des priorités du calendrier législatif ?

FRANCK RIESTER
Il y aura donc un certain nombre de priorités qui seront définies avec un calendrier de textes, qui sera présenté, et notamment, les priorités à court terme, ce qui est certain, c'est que l'immigration est – et notamment le texte qui était dans les tuyaux – une priorité, on voit bien qu'il y a un besoin de répondre à un certain nombre de problématiques, de simplification de démarches, de facilitation de procédures. Et donc, c'est évidemment, ça fait partie…

ORIANE MANCINI
Donc il y aura un texte au Parlement avant l’été ?

FRANCK RIESTER
Non, mais je ne vais pas vous dire quel est le calendrier parlementaire avant que…

ORIANE MANCINI
Mais vous me dites, c’est une priorité à court terme…

FRANCK RIESTER
Non, je n’ai pas dit à court terme, j’ai dit que c’était une priorité…

ORIANE MANCINI
Ah, donc pas forcément avant l’été…

FRANCK RIESTER
Mais attendez, vous voulez des réponses alors même que le processus de consultation pour pouvoir définir ce calendrier n’est pas fini, vous voulez ce qu'on appelle mettre la charrue avant les boeufs, donc, laissons la Première ministre finir ses consultations, il y aura ensuite une feuille de route qui sera présentée, en lien avec le président de la République, et dans cette feuille de route, il y aura une partie parlementaire dans laquelle il y aura un agenda qui sera fixé donc pour les semaines qui viennent.

CHRISTELLE BERTRAND
Ce texte, il va être scindé en deux, comme le président de la République l’a suggéré ?

FRANCK RIESTER
Ce n’est absolument décidé, et on ne s’est pas décidé sur le calendrier, ce n’est pas décidé sur ce que sera le contenu de ce processus législatif…

CHRISTELLE BERTRAND
Quand est-ce que vous allez annoncer le calendrier, vous avez fixé une deadline ?

FRANCK RIESTER
Dans les semaines que viennent.

ORIANE MANCINI
Non, mais, juste sur le texte immigration, parce que le Sénat ne veut pas d’un texte saucissonné, avec une partie DARMANIN, une partie DUSSOPT, pour schématiser un peu, est-ce que c'était l'objectif du fait de reporter ce texte, de le saucissonner, de faire une partie gauche, une partie droite ?

ORIANE MANCINI
Non, mais il n’y a pas de volonté de saucissonner, il y a simplement la volonté de dire : prenons le temps de réfléchir, de discuter, d'échanger et de voir quelles sont les priorités à court, moyen et long terme, et de voir de quelle manière ça se traduit d'un point de vue législatif, donc en ce qui concerne l'immigration, on verra… vous savez, on ne peut pas nous dire, d’un côté : il faut faire des textes plus courts, c'est trop compliqué, on n’y arrive pas, et en même temps, éventuellement, reprocher de faire des textes plus courts, tout en gardant évidemment une cohérence d'ensemble. Moi, j'entends le message du Sénat qui dit : attention, on ne peut pas sur des sujets aussi importants perdre une cohérence d'ensemble, pour une compréhension globale de sujet, mais ça, je le comprends très, très bien, après, comment ça se traduit en termes de textes de loi, de contribution des parlementaires, à travers des propositions de loi, tout ça n’est pas encore définitif, évidemment.

CHRISTELLE BERTRAND
Le président de la République a suggéré l'idée de moins passer par le Parlement pour faire des textes, comment est-ce que vous pouvez faire ?

FRANCK RIESTER
Alors, faire des textes sans le Parlement, ça, ce n'est pas possible…

CHRISTELLE BERTRAND
Pas forcément des textes de loi…

FRANCK RIESTER
Non, mais il faut expliquer à nos compatriotes, qui le comprennent très bien, que l'action publique de l'Etat, en particulier, de l'exécutif et du gouvernement, ce n'est pas simplement faire passer des projets de loi au Parlement, ce qui ne veut pas dire contourner le Parlement, ça veut dire : bien expliquer à nos compatriotes que l'action de l'Etat, c'est aussi ce que font les administrations dans les départements, dans les régions, comment on peut mieux mettre en avant, expliquer, mieux peut-être coordonner, rendre plus efficace l'action de l'Etat dans ses missions hors du Parlement. Mais ce qui ne veut pas dire…

ORIANE MANCINI
Donc quand le chef de l’Etat dit : tout ne passe pas par la loi, pour vous, ce n’est pas un contournement du Parlement ?

FRANCK RIESTER
Mais pas du tout, c’est la vérité, je veux dire, l’action publique de l’Etat ne passe pas tout le temps et spécifiquement sur la loi, heureusement. Quand il y a, je ne sais pas, trois ou quatre projets de loi dans une année ou dans un semestre au Parlement, heureusement qu'on continue de travailler sur tous les autres sujets. Et c'est peut-être là où il faut qu'on améliore les choses pour rendre plus visible, plus efficace l'action publique, avec des attentes de nos compatriotes en matière de santé, en matière d'éducation, en matière de transition écologique, en matière d'ordre, en matière de de réindustrialisation, et qui passe, évidemment, éventuellement par des lois, mais aussi par une action publique déterminée, en lien avec les administrations, en lien avec les collectivités territoriales, et tous les acteurs de la vie publique.

CHRISTELLE BERTRAND
Et faire passer plus de réformes de cette manière-là que par le Parlement, on voit que, finalement, les choses s'enlisent quand même souvent assez longtemps.

FRANCK RIESTER
Oui, enfin, moi, je suis moins sévère que vous sur l'action du Parlement, ça ne s’enlise pas, les textes ont depuis le début du quinquennat, dans une configuration politique inédite, c’est la première fois depuis le début de la 5ème République qu’il y a une majorité relative avec 40 députés de la majorité absolue, pourtant, on voit bien qu'il n’y a pas de majorité alternative. On l'a bien vu, c’est le rassemblement des contraires entre La France Insoumise et le Rassemblement national, ça ne peut pas gouverner le pays.

CHRISTELLE BERTRAND
On voit bien que…

FRANCK RIESTER
Donc il faut bien continuer d'agir, et d'agir, on l'a vu depuis le début du quinquennat, c'est possible, et cette action, elle doit continuer d'être au Parlement, mais elle doit être aussi peut-être mieux mise en valeur et plus efficace dans l'action des administrations, l'action des ministères, sur le terrain dans les départements.

ORIANE MANCINI
Il y a un accord qui a été trouvé, il y a quelques semaines entre les partenaires sociaux sur le partage de la valeur, est-ce qu'il y aura prochainement un projet de loi, une proposition de loi sur ce sujet ?

FRANCK RIESTER
Il y a une volonté effectivement de transcrire rapidement dans la loi cet accord…

ORIANE MANCINI
De quelle manière ?

FRANCK RIESTER
La Première ministre l’a très clairement dit, eh bien, c'est ce qu'on doit regarder dans les jours qui viennent…

ORIANE MANCINI
Ce n’est pas calé en fait…

FRANCK RIESTER
Vous avez vu qu’un certain nombre de députés de groupes à l’Assemblée nationale auditionnent en ce moment les organisations syndicales. C'est très bien, ça permettra de contribuer à la réflexion sur le texte la Première, en lien avec la majorité et en lien aussi avec les autres forces politiques d'opposition constructive, la meilleure façon de transcrire cet accord qui est important dans la loi.

ORIANE MANCINI
Un mot sur le 49.3 puisqu’Elisabeth BORNE a annoncé qu'il n’y aurait plus de 49.3 hors textes financiers. Est-ce que c'est quelque chose qu'il faut inscrire de manière pérenne dans la Constitution selon vous ?

FRANCK RIESTER
Ce qui est certain, ce que nous voulons, notre méthode c’est d’aller chercher des majorités. Et on a bien vu sur les textes financiers, notamment sur le projet de loi de finances, avant même que commence le processus parlementaire de construction de la loi, certaines oppositions ont dit : on ne votera pas le texte. On comprend. Voter un projet de loi de finances, un budget c'est un marqueur d’appartenance ou pas à l'opposition ou à la majorité. Pour autant, il faut bien donner un budget au pays, et donc c'est pour ça qu’on utilise le 49.3.

ORIANE MANCINI
Et donc il faut inscrire cette méthode ou c'est que pour ce quinquennat ?

FRANCK RIESTER
On verra bien. On verra bien s’il y a une réforme le moment venu des institutions et si ce point-là mérite d'être pris en compte.

ORIANE MANCINI
Ça veut dire qu’elle n’est pas actée la réforme des institutions ?

FRANCK RIESTER
Vous savez, cette constitution elle a été faite par ses rédacteurs pour prendre en compte notamment une partie de ce qui avait été constatée sous la IVème République, c'est-à-dire l'incapacité pour le pays d'agir, de se réformer faute de stabilité parlementaire. Eh bien il y a un moment donné où la Constitution permet un certain nombre de choses et notamment le 49.3, d’adopter des textes tout en prenant une responsabilité : celle de faire tomber son gouvernement. Je rappelle que quand même Elisabeth BORNE, elle a pris sa responsabilité vu l'importance du texte d’éventuellement être démissionnée ou renversée s'il y avait eu une majorité de députés pour le faire. Il n’y a pas eu de majorité pour le faire.

CHRISTELLE BERTRAND
Dernière question : vous évoquiez ce qui s'est passé à Sainte-Soline ce week-end. Un plan eau va être annoncé demain par le gouvernement. Est-ce que la construction de nouvelles méga-bassines fait partie de ce plan eau ? Est-ce qu'il va y avoir un moratoire sur ce sujet ?

FRANCK RIESTER
Vous verrez demain quelles seront les annonces sur le plan eau du gouvernement.

CHRISTELLE BERTRAND
Vous ne pouvez pas nous en dire plus ?

FRANCK RIESTER
Vous voulez à nouveau mettre la charrue avec les boeufs. Je suis désolé, je n’ai pas de scoop pour aujourd'hui sur le plan eau.

ORIANE MANCINI
Merci Franck RIESTER.

FRANCK RIESTER
Merci à vous.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 31 mars 2023