Déclaration de M. Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, en réponse à deux questions sur l'exportation des céréales françaises hors d'Europe, à l'Assemblée nationale le 11 avril 2023.

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Intervenant(s) : 
  • Marc Fesneau - Ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Circonstance : Questions au Gouvernement, en séance publique, à l'Assemblée nationale

Texte intégral

Je vous remercie de votre question, qui complète celles qui ont été posées sur le même sujet avant mon arrivée et auxquelles a répondu mon collègue Olivier Becht.

La France continuera d'exporter des céréales vers les pays tiers, même après le 25 avril. Elle le fera dans le cadre du droit, notamment européen, qui permet, en cas d'exportation, de déroger à l'interdiction d'utiliser de tels produits. Elle le fera en outre, je le rappelle, à la demande des pays d'importation. La France continuera à appliquer cette molécule sur les céréales, parce que les pays d'importation le réclament.

Elle le fera aussi au nom de sa vocation exportatrice, que vous avez rappelée, et au nom de nos exigences concernant la sécurité et la souveraineté alimentaires en Europe et dans le monde. Elle le fera, enfin, parce que l'Allemagne et la Bulgarie le font lorsqu'elles exportent vers l'Algérie, de même que la Roumanie lorsqu'elle exporte vers la Côte d'Ivoire. Il n'y a aucune raison que nous nous distinguions des autres pays européens en la matière.

À votre inquiétude, qui peut paraître légitime, je réponds que la France continuera bel et bien à exporter des céréales, dans le cadre réglementaire, en ayant un seul souci : répondre à l'exigence des pays d'importation, qui est de trouver, sur le marché mondial, des produits céréaliers leur permettant de couvrir leurs besoins alimentaires.


Merci de votre question qui me permettra de compléter la réponse que j'ai déjà apportée sur ce sujet de la phosphine et, globalement, à propos des produits phytosanitaires. Une autre question, je crois, me sera posée ensuite sur le même sujet. Je veux d'abord rappeler, comme je l'ai fait tout à l'heure, que sur ce type de sujets, il est bon de lire ce que dit le droit ; je vais donc le faire. À propos de la phosphine, le droit procède à la dérogation suivante : "Les limites maximales applicables aux résidus de pesticides établies conformément au présent règlement ne s'appliquent pas aux produits couverts par l'annexe I destinés à l'exportation vers des pays tiers et traités avant l'exportation, lorsqu'il a été prouvé [...] que le pays tiers de destination exige ou accepte ce traitement particulier afin de prévenir l'introduction d'organismes nuisibles sur son territoire." Ce dont nous parlons est strictement couvert par cette disposition, qui se trouve dans le troisième paragraphe de l'article 2 du règlement (CE)396/2005 du Parlement européen et du Conseil du 23 février 2005.

Si je le précise, c'est parce qu'il faut d'abord agir en droit, dans ces affaires-là : il faut donc rappeler l'état du droit européen, qui permet cette dérogation. C'est donc à bon droit que nous allons produire la dérogation en question, et je ne répéterai pas ce que j'ai dit tout à l'heure à propos de notre volonté d'encourager les exportations.

Ensuite - c'est le deuxième aspect de ma réponse -, le droit européen étant clair, il faut aussi que nous répondions aux besoins des pays vers lesquels nous exportons, je pense en particulier aux pays de la rive sud de la Méditerranée. Nous sommes dans une situation particulière qui exige de réfléchir aussi aux niveaux politique et géopolitique, et non seulement juridique : de ce point de vue, nous devons également assurer la sécurité alimentaire de nos voisins.

C'est la responsabilité et la vocation de la France : il est nécessaire, dans le moment particulier de la guerre en Ukraine, que nous faisions en sorte de couvrir les besoins de nos voisins, pour que ce ne soit pas d'autres - y compris ceux qui mènent la guerre sur le territoire européen - qui s'en chargent. Sans cela, nous aurions pu nous abstenir de procéder à ces exportations. Nous allons donc à la fois nous conformer au droit et nous adapter à la situation politique et géopolitique. C'est peut-être ce que vous appelez de vos vœux : quoi qu'il en soit - je le dis au nom du Gouvernement, car nous partageons tous cette volonté -, nous nous efforçons de tout faire pour que la France, dans ce domaine, retrouve son rang.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 17 avril 2023