Texte intégral
Bonjour à tous,
Merci de votre accueil dans cette salle qui a été redécorée, redimensionnée pour l’occasion, c’est dire l’importance de ce Conseil national du commerce. En tout cas, c’est très réussi.
Je voudrais commencer par remercier Olivia Grégoire pour le travail exceptionnel qu’elle a fait depuis plusieurs mois sur la préparation de ce Conseil national du commerce. Et je voudrais, mais je pense que c’est le cas, que chacun mesure l’importance du moment que nous vivons aujourd’hui.
C’est la première fois dans l’histoire de notre économie que tous les acteurs du commerce travaillent ensemble. Cela nous a demandé des mois de discussion, des mois de dialogue pour que tous les acteurs, j’y reviendrai, soient présents dans ce Conseil national du commerce. Et c’est une manière de dire très clairement toute l’importance stratégique que nous accordons aux commerçants dans l’économie française.
C’est vrai que, si on est tout à fait honnête, il y a un Conseil national de l’industrie, on parle beaucoup d’industrie et c’est pour moi un enjeu absolument prioritaire. On parle beaucoup des nouvelles technologies, on parle beaucoup de la French Tech, on parle assez peu des commerçants. Et les commerçants, je le rappelle, c’est 700 000 entreprises, c’est 3,6 millions d’emplois, c’est un accès au travail, à un emploi pour des millions de nos compatriotes.
C’est un secteur dans lequel on peut se former, évoluer, commencer par mettre les produits en rayon et finir directeur d’un centre commercial. C’est des aventures personnelles qui sont exceptionnelles, on pourrait raconter l’aventure personnelle de la présidente, qui est présente ici, de Picard, qui est une magnifique aventure.
C’est parfois des aventures personnelles parce que c’est des commerces qui sont des commerces familiaux, des commerces de centre-ville. Et c’est tout cela que nous honorons aujourd’hui. Nous voulons honorer le commerce et les commerçants.
Alors quelle a été notre méthode avec Olivia Grégoire ? C’est la même que celle que j’applique en toutes circonstances, le dialogue, encore du dialogue et toujours du dialogue. Et rassembler les gens permet en règle générale d’y voir un peu plus clair sur la réalité des situations, sur la réalité des problèmes et sur les solutions qu’il faut apporter.
Nous avons organisé sur la question du bâtiment les Assises du bâtiment, elles ont été très utiles. Il y a aujourd’hui des difficultés sur le logement, nous rassemblerons aussi les acteurs pour voir quelles sont les réponses que nous pouvons apporter.
Mais si vous vous contentez de voir une partie et pas une autre, si vous vous contentez de voir des acteurs en ignorant certains. Vous n'apportez pas les bonnes solutions aux problèmes des Français. Et si on pouvait sortir notre côté querelleur pour nous rassembler, discuter et dialoguer, je pense que la France avancerait mieux et avancerait plus vite.
Donc depuis des mois, et là encore, j'en remercie Olivier Grégoire, nous avons échangé, nous avons confronté nos points de vue, nous avons discuté avec un seul objectif : faire entrer le commerce dans le XXIe siècle et garantir que cela reste une force économique majeure et déterminante pour notre pays.
Et vous me saurez gré pour ceux qui me connaissent depuis longtemps, je vois Michel-Edouard qui est présent, de reconnaître que quel que soit les fonctions que j’ai occupé, même comme ministre de l’Agriculture, je n’ai jamais tapé sur les commerçants. Et Dieu sait que lorsqu’on est ministre de l’Agriculture, il peut être tentant de taper sur la grande distribution.
Tout ça pour dire que cette méthode, elle a aujourd’hui donné des fruits, nous permet de créer pour la première fois de l’histoire de notre économie de Conseil national du commerce où l’on voit tous les acteurs qui sont présents. Et ça fait plaisir de voir dans cette salle le maire de Nevers et d'autres élus locaux, de voir la présidente de Picard, de voir Michel-Edouard Leclerc, de voir le patron de Système U qui est présent aussi, cher Dominique Schelcher, de voir Jacques Creyssel, le roi des petits commerçants, de voir Monsieur Palombi, de voir autant de personnes venues d'horizons aussi divers qui enfin travaillent ensemble et arrêtent de s'opposer.
Ça ne sert à rien d'opposer le petit commerce de centre-ville et la grande distribution, ça ne sert à rien d'opposer les TPE avec les PME ou les grands groupes. Nous sommes dans le même bateau et nous devons faire preuve de solidarité. La solidarité économique, ça a un sens et c'est un des éléments clés de la réussite économique de la France dans les décennies qui viennent.
Il n'y aura pas de réussite pour les PME si les grands groupes donneurs d'ordre ne travaillent pas main dans la main avec ces PME et si elles ne font pas preuve de solidarité face aux difficultés. Il n'y aura pas de solution pour le commerce, si on se dit que tout doit aller à la grande distribution et le commerce de centre-ville a disparu, ou si les commerçants de centre-ville se disent : Il faut absolument renforcer le commerce de centre-ville et affaiblir la grande distribution.
Je crois plus aux complémentarités qu'aux oppositions et je suis convaincu qu'il y a une place à trouver pour chacun et à construire pour chacun, c'est le sens de ce Conseil national du commerce. Merci aux entrepreneurs qui sont présents, merci aux fédérations, merci aux élus locaux, merci aux chambres consulaires.
Alors pour travailler bien, il faut aussi avoir une méthode et un calendrier. Notre méthode va être de séparer un certain nombre de sujets pour apporter à chaque fois les réponses qui soient les plus appropriées. Il ne faut pas tout traiter ensemble, sinon on va arriver à beaucoup de confusion.
Le premier enjeu, et je remercie le ministre de l'Environnement qui était présent tout à l'heure, Christophe Béchu, c'est comment est-ce que l'on accélère la décarbonation du commerce ? C'est très important à un moment où, évidemment, nos compatriotes nous disent l'empreinte carbone des grandes distributions, l'empreinte carbone des commerçants pose une difficulté, comment est-ce que l'on transforme cette empreinte ? Comment est-ce que l'on met des ombrières avec des panneaux solaires, comme ont commencé à le faire, sont de grands distributeurs sur les parkings pour économiser de l'énergie ? Comment est-ce que l'on traite la question des zones à faible émission qui, pour les commerçants de centre-ville, va poser une vraie difficulté si on n'emporte pas rapidement des réponses ? Comment est-ce qu'on associe ça à la réflexion qu'on a dans le Conseil national de l'industrie sur la décarbonation des véhicules utilitaires légers ? Vous voyez que les solutions sont globales et passent par de la solidarité et du dialogue.
J'y reviens quand je discute avec Luca De Meo, il y a quelques jours, pour savoir comment est-ce qu'à Sandouville, on peut créer une grande usine de véhicules utilitaires légers et électriques ? C'est aussi une réponse à la question du commerce et de sa décarbonation pour que le dernier kilomètre, celui qui est le plus coûteux en CO2, soit moins coûteux en CO2 parce qu'il y aura des véhicules utilitaires légers fabriqués en France par des ouvriers français dans une usine française, par un groupe français qui apporteront des solutions technologiques à la question de la réduction des émissions.
C'est cette approche globale qui permettra de trouver les vraies solutions. Et vraiment, je veux vous dire à quel point je ne crois plus du tout dans cette confrontation permanente des intérêts des uns et des autres, là où on peut construire un intérêt national. C'est ça le plus important. Et si nous y arrivons aujourd'hui dans ce Conseil national du commerce, nous aurons fait un grand pas en avant.
La deuxième thématique, c'est celle de la numérisation. Elle viendra quelques mois plus tard. Elle est absolument clé. Il n'y a plus de commerce possible sans digitalisation du commerce.
C'est le cas évidemment pour les grands groupes. Ça ne pose aucune difficulté. On en parle souvent avec Jacques Creyssel, mais pour les TPE, il n'y a que 20 % des petites entreprises de commerce qui ont un site Internet 20%. Autant vous dire que pendant la crise du Covid tous ceux qui n'avaient pas internet, tous ceux qui n’étaient pas numérisés ou digitalisés, c’est ceux qui ont le plus souffert.
Donc, il faut accélérer à marche forcée sur la numérisation des commerces de centre-ville et c’est là que le lien avec les collectivités locales est clé, parce que ce sont les maires qui en général apportent les solutions à cette numérisation des commerces en centre-ville qu’ils connaissent mieux que personne, je le dis comme ancien élu d’Evreux.
Enfin, le troisième thème sera l’emploi et la formation parce que vous représentez des millions d'emplois et que regarder la formation de la qualification, c'est évidemment un enjeu absolument décisif.
Comment est-ce que nous allons avancer ? L'idée d'avoir un CNC par trimestre, qu'à chaque Conseil national du commerce, Olivia assurera évidemment la permanence, mais qu’il y ait un membre du Gouvernement qui y participe.
Par exemple, la ministre des Universités pour l'Emploi et la Formation, le ministre du Travail, et que l'ensemble du Gouvernement soient à chaque fois associés pour montrer l'importance stratégique que nous accordons à cette activité.
Donc, vous le voyez, je suis enthousiaste parce que je suis comme n'importe lequel de nos compatriotes, je passe beaucoup de temps dans les commerces, sur les commerces de bouche, les commerces alimentaires, les commerces du centre-ville, commerce, habillement, un petit peu moins en ce moment, la grande distribution, beaucoup, chacun le sait.
Que ce soit à Paris ou quand je me rends au Pays basque, je suis un grand client de l'Intermarché de Saint-Pée-sur-Nivelle. Chacun le sait. Il y a un très bon Leclerc pas très loin non plus.
Il faut que je fasse attention à ce que je dis mais en tout cas, je suis une fois encore comme n'importe lequel de nos compatriotes, je fréquente les commerces et donc je considère qu'ils sont essentiels à notre vie en commun, notre vie en société.
Un tout dernier point, enfin, parce que je pense qu'il serait surprenant que le ministre de l'Economie et des Finances, parlant du Commerce, ne s'exprime pas sur la question de l'inflation.
Vous savez qu'avec le président de la République, avec la Première ministre, nous nous battons depuis maintenant près de deux ans, plus de deux ans pour contenir le niveau d'inflation de notre pays.
Nous avons mis en place des boucliers tarifaires. Nous avons eu pendant deux ans le niveau d'inflation le plus faible de la zone euro. Donc je pense que nous avons fait oeuvre utile, en tout cas, oeuvre plus utile qu'en retenant les suggestions de partis d'opposition qui seraient moins efficaces.
L'inflation continue de pénaliser durement beaucoup de nos compatriotes, les plus fragiles, les plus modestes, ceux qui ont les revenus les plus faibles et ceux qui ont des familles, ceux qui ont des enfants, ceux qui doivent dépenser beaucoup pour l'alimentaire, qui s'aperçoivent que le prix du paquet de céréales a explosé, que le prix du paquet de pâtes reste très élevé et qui se disent « Voilà, c'est une dépense contrainte, on ne peut pas faire autrement que se nourrir et ça pèse de plus en plus sur mon budget ».
Je veux redire à quel point je suis reconnaissant à la grande distribution de la manière dont elle a joué le jeu sur le trimestre anti-inflation. Le trimestre anti-inflation, ça marche. Les prix sont plus faibles de - 5% à - 7% par rapport à ce qu'ils étaient là où l'inflation aujourd'hui est à plus de 6%. Donc les distributeurs ont joué le jeu.
Une fois encore, c'est trop facile de prendre des boucs émissaires en disant que c'est trop cher à cause des uns ou des autres. Les distributeurs ont joué le jeu du trimestre anti-inflation, les résultats sont là et d'ailleurs, sous le contrôle des représentants de la grande distribution, les consommateurs ne s'y trompent pas, ils se précipitent sur ces produits. Preuve que ce trimestre a été efficace et que le travail qui a été fait par Olivia Grégoire a été remarquablement efficace.
Maintenant, comme tout bon ministre de l'Économie, je me lève le matin et je regarde un certain nombre de chiffres et d'indicateurs. Je regarde le niveau d'inflation, je regarde le prix du Brent chaque matin, le prix du pétrole, je regarde le prix du gaz, je regarde le prix de l'électricité, je regarde le prix du fret maritime, je regarde le prix du blé, de la tonne de blé. Et je m'aperçois que quasiment tous ces prix baissent. Donc je n'ai pas inventé le fil à couper le beurre. Mais je me dis, si les prix baissent sur le marché de gros à un moment donné, ça doit se voir sur les prix à la consommation. Or, ça ne se voit pas. En revanche, je peux vous garantir qu'il y a deux ans, quand ça a commencé à monter, bizarrement, là ça s'est vu tout de suite sur les prix à la consommation.
Donc je veux redire à quel point, nous serons intraitables sur la réouverture des négociations commerciales entre les grands distributeurs et les grands industriels. Je dis bien les grands industriels. Je sais bien que beaucoup de PME de l'industrie agroalimentaire peuvent avoir des difficultés encore, mais des grands industriels qui ont des marges solides et des marges confortables, quand les prix du gros baissent, doivent répercuter sans délai la baisse des prix sur les prix à la consommation.
Nous avons demandé cette réouverture des négociations commerciales. C'est quelque chose d'exceptionnel là aussi dans l'histoire économique récente. D'habitude, ça n'a lieu qu'une fois l'année.
Nous serons intraitables sur la réouverture de ces négociations commerciales pour que les distributeurs puissent répercuter la baisse des prix de gros sur les prix de détail, avec des prix des grands industriels qui doivent aller à la baisse pour que l'inflation soit moins pénalisante pour nos compatriotes et la vie plus facile pour tous.
Merci infiniment et longue vie au Conseil national du commerce.
Source https://www.economie.gouv.fr, le 3 mai 2023