Texte intégral
Madame la Présidente,
Monsieur le Président de la commission des finances,
Monsieur le Rapporteur général du budget,
Monsieur le Ministre, cher Gabriel Attal,
Mesdames et Messieurs les Députés,
Je suis très heureux de vous retrouver pour ce débat d’orientation des finances publiques qui va être l’occasion de dresser un état des lieux de nos finances publiques.
Regardez d'où nous venons et regardez surtout quelle est la stratégie qu'avec le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, nous vous proposons pour les 4 années qui viennent.
En 2018, je veux le rappeler à notre majorité, notre majorité a rétabli les comptes publics. Nous sommes sortis de la procédure pour déficit excessif, nous avons baissé le niveau d'endettement et nous sommes revenus sous les 3% de déficit public qui devrait être, je le rappelle, la normale partout en Europe.
Nous avons ensuite connu trois crises successives. La crise des gilets-jaunes où beaucoup de citoyens ont demandé à juste titre, une meilleure rémunération de leur travail. La crise du Covid, qui, on l'a oublié, a été la crise économique la plus violente depuis 1929, avec un effondrement de notre produit intérieur brut, puis la crise inflationniste, troisième crise marquée par le choc énergétique le plus violent depuis le choc pétrolier de 1973. Face à ces trois chocs, le choix du président de la République, le choix de la majorité a été de protéger nos compatriotes comme nos entreprises.
Nous avons évité une vague de faillites qui aurait mis le pays à genoux et nous avons évité une explosion du chômage qui nous aurait empêché de redémarrer ensuite faute de compétences, faute de qualifications, faute de savoir-faire. La conséquence de ce choix, c'est une dette qui a progressé de 16 points entre 2019 et 2021, année de ces crises de 97 à 113%. Mais cette augmentation, je veux le rappeler, se situe dans la moyenne des autres nations européennes. Sur la même période, l'Allemagne a augmenté sa dette de 10 points, l'Italie de 16 points, exactement comme nous, et l'Espagne de 20 points. Nous sortons maintenant de cette succession de crises.
La crise du Covid est derrière nous. L'inflation devrait commencer à refluer à l'été et nous sommes donc à un moment de vérité. Nous sommes au moment où nous devons assumer nos choix en matière de finances publiques. Est-ce que nous continuons à dépenser plus ? Ou est-ce que nous rétablissons nos finances publiques ?
Notre choix, le choix de la majorité, le choix du président de la République est clair, nous voulons rétablir fermement nos finances publiques d'ici 2027. L'autre branche de l'alternative, c'est de retrouver cette très ancienne et très regrettable inclination française vers toujours plus de dépenses publiques. Cette inclination à toujours plus de dépenses publiques, elle plonge très loin dans notre histoire. Elle repose sur cette illusion que je veux dénoncer : que la dépense publique serait une solution à tout, que tous nos problèmes, toutes les difficultés s'évanouiraient à mesure que nous déverserions de l'argent public sur ces difficultés. Je ne crois absolument pas que ce soit le cas. La dépense publique est évidemment indispensable pour certains secteurs comme la santé, comme l'éducation, comme la sécurité pour nos grands services publics.
Mais, sur d'autres volets et sur d'autres secteurs, elle peut être inutile, voire dangereuse parce qu'elle alimente la spirale de la dette. Et je voudrais que chacun se rappelle ici que dans notre histoire, les moments d'instabilité politique ont toujours été précédés de grandes difficultés financières et que c'est un engrenage infernal et implacable dans lequel les Gouvernements du passé se sont parfois enfermés. Toujours plus de dépenses publiques, toujours plus de dette publique.
Et puis, à un moment donné, l'obligation d'augmenter les impôts qui nourrit la révolte fiscale, qui elle-même nourrit la révolte politique. C'est exactement cet engrenage-là que nous voulons éviter. Avec le président de la République, avec la majorité, nous refusons cet engrenage pour la France. Nous faisons au contraire le choix volontariste déterminé de rétablissement de nos finances publiques dans les années qui viennent.
Pour cela, il faut une stratégie. Notre stratégie a le mérite de la lisibilité et de la clarté. On peut ne pas être d’accord avec elle. Elle est claire, elle est lisible et surtout, elle sera méthodiquement appliquée.
Le premier pilier de cette stratégie, c'est la croissance et c'est ce qui fait la singularité du choix de la majorité. Nous ne voulons pas d'austérité, nous ne voulons pas réduire la dépense publique davantage que notre richesse nationale. Nous voulons simplement dépenser moins que nous ne produisons de richesses et pour cela, nous voulons augmenter la croissance française et augmenter la production de richesse. La meilleure façon de réduire la part de la dette dans le PIB, c’est d'abord d'augmenter le volume du produit intérieur brut et d'augmenter le volume de richesse, le volume de production que crée aujourd'hui la France. Cela suppose évidemment d'augmenter notre volume de travail. D'où la réforme des retraites et la réforme de l'assurance chômage. Je rappelle que la seule réforme des retraites rapportera 0,7 point de PIB supplémentaire à horizon 2027. C'est plus de richesses à investir, plus de richesse disponible pour nos compatriotes.
Et je voudrais profiter de cette présentation pour m'adresser à tous ceux qui soutiennent ici une proposition de loi le 8 juin prochain visant à revenir à 62 ans, voire certains à 60 ans. J’ai une seule question alors à poser : quelles sont vos solutions pour sauver le régime de retraite par répartition ? Comment le financez-vous ? Comment évitez-vous la ruine du système de retraite par répartition ?
Mais les masques tombent, monsieur le député. Soit vous assumez le déficit, soit vous assumez l'appauvrissement des Français. Nous n’assumons ni l'un ni l'autre. Nous, nous assumons la prospérité, le redressement des comptes publics et l'équilibre du régime de retraite par répartition à horizon 2030. J'ai vu vos propositions. Certaines proposent de baisser les pensions des retraités en estimant que les retraités sont trop riches. Nous n’estimons pas que les retraités sont trop riches face à l'inflation et nous refusons catégoriquement de baisser les pensions des retraités français. Et nous continuerons à tenir cette ligne.
D'autres nous disent : il n'y a qu'à supprimer la défiscalisation des heures supplémentaires des ouvriers, des salariés. Mais quelle injustice ! Et comment peut-on se réclamer de la justice et priver un ouvrier du fruit de son travail en revenant sur la défiscalisation des heures supplémentaires ? Nous maintiendrons la défiscalisation des heures supplémentaires.
D'autres nous disent encore : il n’y a qu’à assumer vos propositions. mesdames et messieurs les députés de la NUPES, vous proposez de supprimer la défiscalisation des heures supplémentaires. Allez le dire aux ouvriers français, allez le dire aux salariés, allez le dire aux salariés modestes qui ont déjà du mal à boucler les fins de mois. Vous verrez comment vous serez reçus par tous ceux qui bénéficient aujourd'hui de la défiscalisation des heures supplémentaires.
D'autres nous disent encore : les cotisations sont trop faibles. Il faut augmenter le montant des cotisations. Mais parler plus clairement, dites que vous voulez baisser les salaires de nos compatriotes. Augmenter les cotisations, c'est baisser les salaires de nos compatriotes. En période d'inflation, on connaît la meilleure manière de protéger le pouvoir d'achat des Français. Nous refusons de baisser le salaire des Français.
Il reste la dernière solution miracle une fois qu'on a épuisé ces solutions qui appauvrissent soit les salariés, soit les ouvriers, soit les retraités. La solution miracle, c'est de taxer les super superprofits et de taxer toujours plus les riches.
S'agissant de la taxation des superprofits, je veux juste vous dire que la taxation des surprofits, elle est faite sur les énergéticiens. Elle nous rapporte plusieurs milliards d'euros par an et elle nous permet déjà de financer le gel sur les prix du gaz et le plafonnement des prix de l'électricité. C'est chose faite. C'est justice faite car cela permet de financer la protection de nos compatriotes contre l'augmentation des prix et contre l'inflation.
S'agissant de l'augmentation de la fiscalité sur les riches, Gabriel Attal l’a très bien rappelé il y a quelques jours, nous sommes un pays où le niveau de prélèvement obligatoire est le plus élevé de tous les pays de l’OCDE. Nous sommes un pays où 10% des contribuables paient 70% de l’impôt sur le revenu. Nous sommes un pays où nous avons déjà instauré une surtaxe. Cette surtaxe devait être provisoire, elle est devenue permanente. Elle devait être exceptionnelle, elle est rentrée désormais dans l'ordre des choses et je pense que pas grand monde va y toucher. Par conséquent, j'estime qu’aujourd'hui, ça n'est pas une voie praticable pour financer le régime de retraite par répartition.
Certains me disent : nous n'avons qu'à le faire qu'une année ou deux. Très bien, mais dans ce cas-là, je ne vois pas comment, dans les décennies qui viennent, nous pourrons, sur un prélèvement d'une année ou deux, financer les déficits des régimes de retraite. C'est pour ça que je souhaite que le 8 juin prochain, la proposition de loi visant à retourner à l'âge légal de la retraite à 62 ans soit écartée pour que le courage l'emporte, pour que la lucidité l'emporte, pour que la réalité l'emporte sur les illusions que certains vendent à nos compatriotes. Soyons sérieux ! Ayons le courage d'affronter la réalité plutôt que de vendre des illusions à nos compatriotes ! Nous, nous voulons tout simplement que les classes moyennes soient récompensées de leurs efforts et nous refusons de les taxer davantage, c'est peut-être ce qui sépare la majorité d'autres députés sur les bancs de cette Assemblée.
Le deuxième pilier, c'est la sortie du bouclier sur l'énergie et la fin de la politique des chèques exceptionnels. Si nous voulons revenir à la normale, il faut que nous tenions compte du fait que les prix du gaz aujourd'hui sont revenus à ce qu'ils étaient avant la crise, de l'ordre de 50 euros le mégawattheure. Et donc, dès lors qu'ils sont revenus au prix d'avant la crise, il est légitime que nous supprimions dans les mois qui viennent le bouclier sur le gaz et que d'ici fin 2024, nous supprimions également le bouclier sur les prix de l'électricité. Le retour à la normale doit se traduire par la fin des dispositifs exceptionnels bouclier ou chèque, c'est une condition du rétablissement de nos finances publiques et cela permettra d'économiser 30 milliards d'euros à horizon 2025.
Le troisième pilier, il a été rappelé à juste titre, il y avait eu beaucoup de force par le ministre des Comptes publics, c'est la lutte contre la fraude fiscale et demain la lutte contre la fraude sociale. Nos compatriotes ne comprendraient tout simplement pas que les efforts qui leur sont demandés pour réduire les dépenses, y compris en ciblant mieux les aides comme je viens de l'indiquer, y compris en retirant les dispositifs de protection exceptionnels, ne soient pas accompagnés d'une intensification de notre action contre la fraude afin d'augmenter les recettes, c'est tout le sens du plan qui a été présenté par Gabriel Attal.
Le quatrième pilier, qui n'est pas le plus simple, c'est le refroidissement de la dépense publique. La dépense publique de l'Etat, la dépense publique des collectivités locales augmentera moins vite que l'inflation. Pour l'Etat, le ralentissement sera de 0,8% en moyenne en volume par an. Et comme l'a rappelé le rapporteur général du budget il n'y a pas très longtemps, c'est un effort plus important que ce que nous avions prévu à l'origine et plus important que ce que nous demandons aux collectivités locales qui, elles, devront accomplir un effort de réduction de leurs dépenses en moyenne en volume par an, de 0,5%. C'est donc un effort partagé, un effort collectif mais dans lequel l'Etat prend toute sa part et même plus sa part que ne le feront les collectivités locales.
Cet effort s'accompagnera de deux éléments. L'austérité, mesdames et messieurs les députés de la NUPES, c'est ce à quoi nous arriverons tout droit si nous suivons votre politique de dépenses publiques inconsidérées. C'est ce à quoi nous conduirons tout droit si nous laissons la dette publique exploser. La réalité financière se rappellera à vous et elle sera cruelle. Je comprends parfaitement que vous fassiez le pari du désordre politique et de la révolte parce que les conditions financières ne seront pas réunies, mais nous, nous continuerons à faire le choix de l'ordre, de la responsabilité et du rétablissement de nos finances publiques. C'est ce qui différencie la majorité de la NUPES et des oppositions. La lettre de cadrage signée par la Première ministre a été adressée à tous les ministres, sans exception. Cette lettre va leur demander d'identifier 5 % de marges de manoeuvre sur leur budget pour financer la transition écologique, financer les priorités du président de la République et permettre de faire des économies, personne ne doit échapper à cet effort de 5 % sur son budget pour garantir des financements, notamment de la transition écologique, cela permettra de dégager 7 milliards d’euros de marge de manoeuvre pour les investissements écologiques ou pour les réductions de nos dépenses.
La revue des dépenses publiques portera, elle, sur une dizaine d'objets. Elle aura lieu chaque année jusqu'en 2027. Elle permettra de réduire une à une les dépenses inefficaces et permettra d'économiser plusieurs milliards d'euros dès le projet de loi de finances 2024 : 30 milliards d'euros à horizon 25 sur le bouclier énergie, 7 milliards d'euros sur les 5% qui ont été demandés par la Première ministre sur les marges de manoeuvre des ministères, plusieurs milliards d'euros d'économies dans le PLF 2024 sur les revenus des dépenses publiques, voilà ce qui nous permet d'engager avec résolution le rétablissement des finances publiques françaises.
Nous voulons montrer qu'il est possible d'obtenir de meilleurs résultats dans les politiques publiques avec moins de dépenses publiques, comme nous l'avons déjà fait. Et je m'adresse ici aux députés de la majorité qui ont eu le courage de voter le prélèvement à la source et de garantir aux contribuables un meilleur service rendu avec moins de dépenses publiques. Je veux saluer le courage des députés de la majorité qui ont mis fin aux emplois aidés qui souvent étaient des voies de garage et qui ont préféré, plutôt que d'investir ces emplois aidés dont ils ont supprimé les aides.
Vous avez investi sur l'apprentissage, vous avez investi sur les lycées professionnels, vous avez même investi sur la meilleure qualification des jeunes. Le résultat, c'est que vous avez aujourd'hui le taux de chômage des jeunes le plus faible depuis 20 ans. C'est vos décisions avec moins de dépenses publiques qui ont garanti ce résultat. La preuve est faite que la dépense publique n'est pas la réponse à toutes les difficultés de la France et qu'on peut avoir le courage de rétablir les finances publiques et d'obtenir des meilleurs résultats sur le front de l'emploi, sur le front de la croissance et sur le fond de la prospérité nationale.
La conclusion de tout cela, c'est que notre stratégie donne des résultats et qu'elle devra continuer à être appliquée avec résolution et détermination.
Quelle est dans le fond, ce à quoi la France doit inspirer ? Quelle est dans le fond ce qui va permettre à la France de rester une des grandes nations économiques de la planète ? Cette nation qui accomplit l'exploit, avec 67 millions d'habitants, de rester parmi les 10 plus grandes nations économiques de la planète. Cette nation française qui arrive à rester la nation la plus attractive pour les investissements étrangers.
Depuis maintenant plusieurs années, cette nation qui innove, qui invente, qui ouvre des usines, qui ouvre des entreprises qui continuent à s'enrichir, créent de la prospérité tout en accélérant sa transition climatique. Elle doit suivre un cap simple et clair qui tient en 3 mots : produire mieux, investir plus, dépenser moins.
Produire mieux, parce que c'est en ayant des produits de meilleure qualité. Et c'est en investissant dans la décarbonation que nous arriverons à redresser notre balance commerciale extérieure que nous arriverons à produire plus d'électricité décarbonée et rester une grande nation de production, investir plus parce que face au défi de l'intelligence artificielle, du calcul quantique, de l'énergie décarbonée, de l'hydrogène vert, il est indispensable que nous préservions des marges de manoeuvre d'investissement dans l'innovation, comme nous le faisons avec les 54 milliards d'euros de France 2030 et dépenser moins, parce que nous refusons de jeter l'argent par les fenêtres en accumulant des déficits et en dépensant de l'argent pour la charge de la dette dont sont privés, ensuite nos services publics, nos entreprises ou nos capacités productives.
Voilà les propositions que nous vous faisons. Je laisse aux oppositions qui préfèrent dépenser plus et toujours plus le triste souvenir de 1981, quand on avait fait les nationalisations, quand on avait dépensé toujours plus, quand on était revenu à la retraite à 60 ans et quand il avait fallu, en 1983, lancer le tournant de la rigueur parce que le Parti socialiste et le pouvoir en place n'avaient pas été responsables. Nous refusons cette voie et nous choisissons la voie de la responsabilité.
Je vous remercie.
Source https://www.economie.gouv.fr, le 23 mai 2023