Déclaration de M. Olivier Becht, ministre chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger, sur le soutien aux entrepreneurs français à l'étranger, au Sénat le 30 mai 2023.

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  • Olivier Becht - Ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger

Circonstance : Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié, au Sénat

Texte intégral

Madame la Présidente, Madame la présidente de la commission des affaires économiques, Monsieur le rapporteur, Mesdames, Messieurs les sénateurs, nos entrepreneurs français à l'étranger sont d'importants acteurs de notre rayonnement à l'international et de notre influence économique. Ils participent activement à la diffusion et à la promotion des produits et savoir-faire français.

Dans presque chacun des trente-cinq pays que j'ai visités depuis mon entrée au Gouvernement, il y a bientôt onze mois, j'ai rencontré des entrepreneurs français et j'ai pu mesurer leur contribution aux succès de notre pays. Ils méritent notre reconnaissance.

Je sais aussi que, par les travaux que vous avez consacrés au présent texte, notamment grâce aux interventions des sénateurs des Français de l'étranger, la chambre haute les connaît désormais mieux. Le Gouvernement accueille donc avec bienveillance l'esprit de cette proposition de loi.

À cet égard, je tiens à remercier Mme Évelyne Renaud-Garabedian, qui est à l'origine de cette proposition de loi, et M. Serge Babary, président de la délégation sénatoriale aux entreprises, qui en est le rapporteur.

Directement ou indirectement, les entrepreneurs français de l'étranger soutiennent notre balance commerciale, que ce soit en maintenant un lien fort avec les entreprises françaises qui les fournissent ou en valorisant les produits français. Ils contribuent ainsi à l'image et à l'attractivité de notre pays.

Certains d'entre eux jouent ce rôle par leurs mandats de conseillers du commerce extérieur de la France ou d'adhérents de nos chambres de commerce et d'industrie françaises à l'international.

Je le répète : le Gouvernement se réjouit de l'esprit qui anime le présent texte et salue son caractère largement transpartisan. Cette proposition de loi rejoint d'ailleurs celle que vos collègues députés des Français de l'étranger Anne Genetet et Stéphane Vojetta ont déposée à l'Assemblée nationale le 21 mars dernier, "visant à la reconnaissance des entrepreneurs français à l'étranger".

Madame Renaud-Garabedian, comme Mme Genetet et M. Vojetta, vous proposez d'identifier ces entrepreneurs, de définir des critères d'éligibilité et de créer un label afin de les valoriser.

Le sujet est évidemment complexe. S'il est important pour le Gouvernement de témoigner sa reconnaissance aux entrepreneurs français de l'étranger et de saluer leur grande contribution au rayonnement de la France, l'exercice peut se révéler délicat, reconnaissons-le. En effet, on ne saurait créer un dispositif risquant d'aboutir, à terme, à une confusion entre les entreprises de droit étranger et les entreprises françaises, soumises, elles, au cadre juridique et fiscal national.

Je sais que la complexité n'effraie pas le législateur : il prend même parfois plaisir à s'y attaquer pour mieux la dompter ensuite, fort de son appréhension fine des spécificités locales ou, en l'occurrence, nationales.

Nous souhaitons bien entendu valoriser les entrepreneurs français à l'étranger et mieux les identifier en élaborant une définition utile de leur statut ; mais nous n'oublions pas non plus les complexités qu'une telle législation peut soulever, qu'il s'agisse de dirigeants ou de détenteurs d'entreprises relevant d'un autre droit que le droit français. Là est, finalement, l'équilibre à trouver.

Le Gouvernement veut soutenir et accompagner les entrepreneurs français à l'étranger. À cette fin, il a d'ailleurs pris diverses mesures en leur faveur au cours des dernières années. Il les a ainsi aidés en tant que personnes tout au long de la crise sanitaire, via les aides sociales consulaires. Par ailleurs, nos ambassades et nos consulats les ont aidés en tant qu'entrepreneurs à accomplir les démarches pour bénéficier des plans de soutien dans les différents pays où ils étaient implantés.

De surcroît, le Gouvernement a répondu au souhait de nos entrepreneurs français de l'étranger de pouvoir disposer de jeunes volontaires internationaux en entreprise (VIE), en soutien aux équipes locales. Ainsi, avec l'appui de mes services, nous avons lancé en 2021 une expérimentation de portage de VIE par la structure française EFE International, créée par CCI France international et le Comité national des conseillers du commerce extérieur de la France (CNCCEF).

Une fois recrutés par EFE International, les VIE peuvent être envoyés en mission auprès des entrepreneurs français de l'étranger, indépendamment de leur statut relevant du droit étranger. Au total, vingt-six VIE sont ainsi partis à l'étranger via EFE International.

J'ajoute que les entrepreneurs français à l'étranger ont accès à certains dispositifs d'aide au développement ciblés sur le secteur privé. Je pense notamment à l'initiative Choose Africa, menée par Proparco, qui, dès l'origine, avait vocation à bénéficier aux entreprises fondées par des entrepreneurs français à l'étranger.

Le Gouvernement est très attaché à la valorisation des entrepreneurs français à l'étranger. À cet égard, je remercie les parlementaires de s'être saisis de la question, en particulier Mme Renaud-Garabedian, MM. Bansard et Babary. Ils ont, ensemble, rédigé un texte qui cible les entrepreneurs français à l'étranger ayant un lien économique suffisant avec la France, afin de pouvoir les recenser et les labelliser.

Le Gouvernement accueille avec enthousiasme cette initiative parlementaire. Il s'en remettra néanmoins à la sagesse de la Haute Assemblée, en rappelant que la création par la loi d'un label qui repose sur un critère de nationalité pose question au regard du droit de l'Union européenne.

Il existe en effet un risque non négligeable de non-conformité de ce label, dès lors que l'État jouerait un rôle dans sa mise en œuvre : j'y reviendrai lors de la discussion des articles concernés. Dans sa jurisprudence, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a en effet considéré l'octroi d'un label de marque du terroir allemand à des produits fabriqués en Allemagne comme une restriction aux échanges intracommunautaires imputable aux autorités étatiques.

Le Gouvernement tient aussi à le souligner : il importe de respecter la liberté de choix des entrepreneurs français à l'étranger de bénéficier ou non de ce label. De même, on ne saurait procéder à un recensement automatique : un tel procédé contreviendrait à la protection de leurs données personnelles. Cela étant, je ne doute pas que, lors de nos échanges de ce jour comme dans la suite de la navette parlementaire, vous saurez tenir compte de ces difficultés juridiques pour compléter et enrichir encore cette proposition de loi.


Source https://www.diplomatie.gouv.fr, le 8 juin 2023