Texte intégral
LORRAIN SENECHAL
Bonjour Olivier VERAN.
OLIVIER VERAN
Bonjour.
LORRAIN SENECHAL
Dans une heure et demie maintenant, l'ensemble des partenaires sociaux seront reçus à Matignon par Elisabeth BORNE, la Première ministre. Quel va être le programme, sachant que Sophie BINET, de la CGT, a choisi d'y aller alors qu'elle n'a pas signé l'agenda social qui a été, en revanche, signé par tous les autres partenaires sociaux ?
OLIVIER VERAN
C'est un jour important dans l'histoire sociale, contemporaine de notre pays. C'est un jour où l'ensemble des forces syndicales et patronales réunies vont rencontrer la Première ministre et le ministre du Travail pour pouvoir parler de ce qui compte pour les Français, c'est-à-dire la qualité de leur vie au travail. Ce qui va se nouer, ce sont les prémices d'un véritable pacte de la vie au travail. Vont être abordés des sujets du quotidien et les Français qui nous écoutent en ce moment doivent le savoir. On va parler emploi des seniors, on va parler compte épargne temps, on va parler formation, on va parler reconversion professionnelle. L'heure est venue de pouvoir aborder de manière sereine, constructive, avec les forces sociales de notre pays des engagements qui ont été pris pendant la campagne par le président de la République et qui visent à atteindre non seulement le plein emploi mais le bon emploi. Faire en sorte que les Français soient plus satisfaits de se rendre au travail, qu'on tienne compte des évolutions de la société.
LORRAIN SENECHAL
Ça veut dire qu'il sera question de pénibilité par exemple ?
OLIVIER VERAN
Ça veut dire qu'il sera question de tout ce dont les syndicats souhaitent parler avec nous et qu'ils souhaitent faire avancer avec deux registres d'action. Le premier, ce sont des actions pour lesquelles les syndicats et le patronat sont susceptibles de se mettre d'accord les uns avec les autres directement et qui relèvent de leurs compétences. Ils l'ont fait il y a quelques mois par exemple avec ce qu'on appelle le partage de la valeur, et nous nous sommes engagés – et nous le faisons – à transcrire dans la loi fidèlement le résultat de leur accord parce que quand ils tombent d'accord, il faut pouvoir le respecter. Ainsi, tous les salariés des entreprises, desdits salariés, pourront toucher de l'argent lorsque leur entreprise gagnera de l'argent. Dans la même logique, ils vont être capables d'adopter un certain nombre de dispositions qui vont dans le bon sens. Et puis le deuxième registre d'action très rapidement, ce sont des actions qui nécessitent l'intervention directe de l'État et pour lequel il y a des négociations entre les organisations syndicales et patronales et le Gouvernement.
LORRAIN SENECHAL
Ça veut dire que le dialogue, il est revenu, le dialogue il est là.
OLIVIER VERAN
C'est pour ça que je parle de jour important. Moi j'estime que le dialogue n'a jamais été rompu. Il y a eu un désaccord profond sur un point important…
LORRAIN SENECHAL
Qui était la réforme des retraites et tout coûtera plus cher, vous prévenait la CFDT.
OLIVIER VERAN
Mais tout ce qui concerne encore une fois le rapport au travail, et on sait qu'il a changé dans une France post-Covid, les aspirations ne sont plus les mêmes, on le voit. Et puis au moment où on parle de plein emploi, parfois je me dis que quand on parle de plein emploi, pour des gens qui n'ont plus forcément peur du chômage de masse, parce que par définition ils ont eux-mêmes un emploi, il faut pouvoir expliquer ce qu'à l'échelle individuelle cela peut apporter. Quand la France connaît une situation de plein emploi, ça veut dire qu'il est plus facile de changer, de changer de métier.
LORRAIN SENECHAL
On n'y est pas encore.
OLIVIER VERAN
On y tend. Lorrain SENECHAL, nous y tendons. Et dans beaucoup de territoires, comme le mien par exemple à Grenoble, nous sommes en situation de plein emploi, et le gros enjeu est pour les entreprises d'arriver à trouver les salariés pour les postes. Je ne dis pas que tout le monde a pu trouver un travail, c'est pour ça d'ailleurs que nous formulons des réformes. Nous avons passé une réforme importante sur l'assurance chômage pour faire en sorte qu'il faille 18 mois au lieu de 24 pour trouver un emploi.
AGATHE LAMBRET
Alors justement, Olivier VERAN, sur ce point. Certains syndicats s'interrogent sur ces consultations, parce que souvent ils constatent que vous ne les écoutez pas. Ç'a été le cas sur les retraites et sur l'assurance chômage, sur la question des salaires, il y a de profonds désaccords aussi. Donc cette fois, vous dites : on va vous écouter.
OLIVIER VERAN
Il y a eu des accords qui ont été… Il y a eu un accord identifié avec plusieurs syndicats, ça ne veut pas dire qu'il y a un accord identifié avec tous les syndicats. La vie syndicale de notre pays, c'est d'arriver à identifier des majorités parmi les partenaires sociaux, et la Première ministre est engagée depuis le début du mandat qui lui a été confié pour s'inscrire sur la voie du dialogue social et pour avoir cette discussion productive pour les Français. Donc encore une fois, ce seront des avancées concrètes qui vont parler et qui vont améliorer la vie des gens.
AGATHE LAMBRET
Mais les syndicats réclamaient une rencontre avec le président de la République. Cette rencontre à Matignon avec Elisabeth BORNE, elle semble acter le fait que le chef de l'État ne souhaite pas, lui, renouer le contact tout de suite avec eux ?
OLIVIER VERAN
D'abord, l'un n'empêche pas l'autre et personne ne dit qu'il n'y aura pas, à un moment donné, de rencontre. Je n'ai pas la réponse mais ça ne veut pas dire que c'est quelque chose qui serait impossible. Ensuite, il est non seulement de tradition, de coutume, mais il est plutôt de bonne organisation que les syndicats rencontrent au sein de l'exécutif la cheffe du Gouvernement, puisque c'est le Gouvernement qui va être en action – sous la responsabilité du président de la République, bien sûr – pour pouvoir mener à bien les négociations et ensuite traduire dans la loi ce qui doit l'être. Donc vous voyez, d'ailleurs c'était un peu l'objet des 100 jours quand on a parlé d'un des quatre axes qui était celui du plein emploi et du travail, c'était d'atteindre effectivement le plein emploi mais c'était aussi de réformer, vous le savez, le RSA, créer France Travail, améliorer l'insertion des jeunes, améliorer la formation. Il nous reste des segments entiers à aborder, je le redis : l'emploi des seniors, le compte épargne temps. Tous ces points-là, nous avons besoin des syndicats, ils ont besoin de nous, et ça tombe bien puisqu'aujourd'hui les uns et les autres se rencontrent avec une ambition : d'avancer et de conclure.
LORRAIN SENECHAL
Est-ce que ça vient renforcer Elisabeth BORNE, le fait qu'elle soit toujours à Matignon alors qu'on parle énormément de remaniement et qu'elle reçoive tous les partenaires sociaux ? Pour vous, ce n'est pas un sujet, c'est-elle la Première ministre, elle va le rester ; vous le souhaitez ?
OLIVIER VERAN
Mais la Première ministre est au travail, elle est à sa tâche. Hier, elle a réuni l'ensemble des partenaires de la majorité et des ministres. Nous étions tous là et nous travaillons. Vous savez, il y a des questions qui peuvent se poser dans l'air du temps mais qui ne se posent pas lorsqu'on est en responsabilité, à la tête du pays.
LORRAIN SENECHAL
Simplement, ce serait bizarre qu'elle reçoive tous les partenaires sociaux pour ne plus être finalement à la manœuvre dans quelques jours.
OLIVIER VERAN
Ce que je vous dis, c'est qu'il y a une continuité de l'action de l'État et du Gouvernement et fort heureusement. Et je suis devant vous ce matin en tant que porte-parole d'un Gouvernement qui ne réfléchit pas à la question du remaniement, mais qui est là pour défendre l'action gouvernementale et aussi être à l'écoute des Français.
AGATHE LAMBRET
Mais vous souhaitez qu'elle reste, Elisabeth BORNE ?
OLIVIER VERAN
Je fais partie d'un collectif gouvernemental et je n'ai pas d'avis à donner sur la question, vous le savez.
AGATHE LAMBRET
Vous n'avez pas d'avis.
OLIVIER VERAN
Mais je n'ai pas d'avis à exprimer comme porte-parole du Gouvernement. Je suis un politique, j'ai aussi été un député. Je sais ce que je pense de la ligne politique que j'ai suivie, de cette capacité à dépasser les clivages traditionnels pour créer une majorité.
LORRAIN SENECHAL
Est-ce que vous seriez prêt à suivre une ligne politique de droite avec un Premier ministre comme Gérald DARMANIN par exemple, vous qui êtes issu de la gauche ?
OLIVIER VERAN
Je ne fais pas des plans sur la comète. Je vous dis, et Gérald DARMANIN fait partie d'un Gouvernement du dépassement, c'est-à-dire que lui aussi s'est inscrit dans cette logique présidentielle…
LORRAIN SENECHAL
Il est quand même classé très à droite, Olivier VERAN.
OLIVIER VERAN
Et qui fait que nous sommes capables au-delà des désaccords qu'on peut avoir les uns avec les autres, à la fin des fins d'arriver à travailler ensemble.
LORRAIN SENECHAL
C'est un homme de droite, Gérald DARMANIN.
OLIVIER VERAN
Est-ce qu'une fois vous nous avez pris en défaut, les uns les autres, d'être capables de travailler ensemble ? Il se trouve que moi, j'ai été député sous d'autres majorités, notamment dans le quinquennat Hollande, où les ministres bien que faisant partie du même parti – vous vous souvenez, on appelait ça le gouvernement des couacs – n'arrivaient pas à s'entendre et dès que l'un disait quelque chose, l'autre autre chose. Ce n'est pas le cas ici, on arrive à travailler, et de nos différences on fait une richesse pour le pays. Et c'est au fond le souhait numéro un des Français qui était il y a cinq ans de dire : ça suffit de dire que vous n'êtes pas capables de travailler ensemble, mettez-vous autour de la table. Cette logique du dépassement, elle nous a plutôt réussi et surtout elle a réussi à la France puisque nous n'avons pas à rougir du bilan. Nous avançons des textes même en majorité relative, je tiens quand même à le dire. À la fin de cette première année de mandat, 45 textes ont été intégralement adoptés au Parlement. 45 textes de loi, certains d'initiative parlementaire, d'autres gouvernementale, l'écrasante majorité sans recours au 49.3 – je le dis tout de suite – et donc on avance. Et notre pays, très loin d'être bloqué alors qu'on est dans une situation délicate d'un point de vue parlementaire, transforme les choses pour les Français.
LORRAIN SENECHAL
Olivier VERAN, porte-parole du Gouvernement, vous restez avec nous. (…)
AGATHE LAMBRET
Toujours avec Olivier VERAN, porte-parole du Gouvernement. La facture des émeutes s'élèvera à 650 millions d'euros pour les assureurs, un projet de loi justement doit accélérer la reconstruction. Il sera examiné demain en Conseil des ministres. Il autorisera notamment le Gouvernement à procéder par ordonnance pour faire quoi, précisément ?
OLIVIER VERAN
Pour permettre aux villes, aux villages qui ont été dégradés, démolis par des émeutiers de retrouver leur visage d'avant, vite, sans délai. Ça veut dire que le principe général, c'est de reconstruire à l'identique ce qui a été détruit, de réparer évidemment ce qui a été abîmé, voire de reconstruire avec des améliorations lorsque ça fait sens. Quand une école peut être construite avec davantage de développement durable, faisons-le, ça veut dire qu'on a passé d'abord une circulaire, c'est un texte qui n'est pas de l'ordre de la loi pour permettre d'accélérer des procédures, évité d'exiger des maires qu'ils repassent par des marchés particuliers pour reconstruire ce qu'ils avaient déjà construit auparavant et qu'il nous faut une loi pour aller un peu plus loin et faire en sorte que la totalité des situations soit couverte. Qu'on ne prenne pas par exemple six mois dans la vue parce qu'une école serait située dans une zone d'architectes des bâtiments de France etc.
LORRAIN SENECHAL
Et cette loi, elle sera votée avant l'été ?
OLIVIER VERAN
Oui.
LORRAIN SENECHAL
A l'Assemblée et au Sénat ?
OLIVIER VERAN
Bien sûr, parce que l'ensemble des parlementaires…
LORRAIN SENECHAL
Je veux dire, avant les vacances ?
OLIVIER VERAN
L'ensemble des parlementaires veulent aider les maires à reconstruire les ce qui a été détruit et l'engagement du Président, vous savez qu'il a reçu quand même pendant cinq heures plusieurs centaines de maires qui avaient connu des destructions et des émeutes ? Il avait pris l'engagement devant eux que la reconstruction serait garantie dans des délais extrêmement rapides, c'est un engagement qu'il a demandé au Gouvernement de tenir et que nous tiendrons.
AGATHE LAMBRET
Olivier VERAN, on a plus de 850 bâtiments publics ont été dégradés. Est-ce que vous redoutez aujourd'hui une résurgence des violences à l'approche du 14 juillet ce week-end en particulier ?
OLIVIER VERAN
Nous avons restauré l'ordre vite, grâce à la mobilisation exceptionnelle de 45 000 forces de sécurité intérieure mais aussi des élus du Gouvernement. Nous avons maintenu l'ordre nuit après nuit. La Première ministre a pris un arrêté important le 10 juillet par exemple pour interdire la vente de ces fameux mortiers pour les Français
LORRAIN SENECHAL
Non seulement la vente mais aussi l'usage ?
OLIVIER VERAN
Bien sûr. C'est important, on a vu que le mésusage qui était fait de ces mortiers évidemment imposait une réaction. Le ministre de l'Intérieur, Gérald DARMANIN, sera amené à faire une communication cet après-midi sur les dispositifs de sécurisation de nos villes pour les nuits du 13 et du 14 juillet. Vous avez vu, les Français ont constaté que lorsqu'il fallait restaurer l'ordre, nous n'avions pas la main qui tremblait. Nous aurons la même fermeté dans la restauration du maintien de l'ordre dans les nuits à venir, incluant évidemment la nuit du 14 juillet. Il y un a vrai besoin, une vraie volonté, une vraie attente des Français de restaurer la sécurité partout et de punir ceux qui ont mal agi, ce que nous faisons, je rappelle qu'il y a plus de plus de 4 000 personnes, beaucoup de jeunes d'ailleurs qui ont été arrêtés, qui ont été, qui sont ou qui sont retraduit devant un tribunal et condamné. La violence est insupportable pour les Français…
LORRAIN SENECHAL
Combien de policiers et de gendarmes vont être déployés pour le 14 juillet ?
OLIVIER VERAN
Ce sera le ministre de l'Intérieur qui détaillera cet après-midi dans son…
AGATHE LAMBRET
Mais ça veut dire que le climat est toujours éruptif ?
OLIVIER VERAN
En conférence de presse.
AGATHE LAMBRET
Vous constatez que le climat est toujours éruptif même si l'ordre est revenu ?
OLIVIER VERAN
Ça veut dire que nous n'avons pas terminé de lutter contre les violences qui peuvent prendre différentes formes. Mes pensées ce matin vont vers ce fleuriste qui s'appelle Philippe, cet homme…
LORRAIN SENECHAL
C'est un homme de 72 ans qui a été passé à tabac…
OLIVIER VERAN
Pas passé à tabac, tué avec les poings et des pieds par un mineur de 17 ans devant deux de ses copains de 14 et 17 ans.
LORRAIN SENECHAL
Il leur demandait de faire moins de bruit ?
OLIVIER VERAN
Parce qui leur a demandé de faire moins de bruit. Un homme qui était manifestement adoré dans son village, qui faisait partie intégrante de la société, pourquoi je parle de cela ? Parce qu'au-delà de la douleur qu'on ressent tous pour lui, ses proches, sa famille, ça atteste aussi de cette ultraviolence, de cette violence décomplexée contre laquelle nous devons lutter avec détermination et nous le faisons.
AGATHE LAMBRET
Est-ce que le Président doit prendre la parole le 14 juillet, comme c'est la tradition ? Même s'il ne s'y est pas toujours plié.
OLIVIER VERAN
Alors la tradition, c'est aussi que le porte-parole du Gouvernement ne commente pas les interventions du Président de la République.
AGATHE LAMBRET
Mais est-ce que vous savez si le Président va prendre la parole ?
OLIVIER VERAN
Ce que je pressens, c'est que d'ici à la fin du mois de juillet, le Président aura l'occasion de revenir, dans le format qu'il souhaite…
LORRAIN SENECHAL
Pas forcément le 14 juillet ?
OLIVIER VERAN
Dans les conditions qu'il souhaite, sur la feuille de route des 100 jours qu'il nous avait donnée, avec les quatre axes, la planification écologique, le plein emploi, l'ordre républicain, le progrès pour les Français dans le domaine de l'école et de la santé, pour pouvoir mettre en lumière tout ce que nous avons fait pendant ces 100 jours, et tout ce que nous allons faire pendant les centaines de jours du quinquennat.
AGATHE LAMBERT
C'est toujours d'actualité malgré les émeutes donc, de faire le bilan des 100 jours ?
OLIVIER VERAN
Mais c'est important de dire aux Français ce que nous faisons. Il y a les émeutes qui appellent encore une fois de la sécurité et de l'ordre, mais il y a aussi l'ensemble des réformes que nous portons pour les Français. La Première Ministre a annoncé, par exemple, dimanche 7 milliards de plus sur l'année prochaine, 7 milliards de plus pour la planification écologique. C'est-à-dire, 7 milliards de plus pour rénover nos maisons, donc c'est beaucoup de Français qui pourront faire de la rénovation ; 7 milliards pour décarboner notre industrie pour que nos entreprises produisent plus propre, pour qu'on atteigne cette neutralité carbone. C'est une somme qui est absolument considérable. Tout cela va dans le sens de la mission qui nous a été confiée par le Président de la République, faire en sorte que la France aille mieux après les 100 jours qu'avant.
AGATHE LAMBRET
A question des émeutes, la leçon que tire l'exécutif, notamment, c'est l'importance du rôle de l'éducation, l'école. Mais au-delà de sanctionner les parents, peu de mesures ont émergé. Est-ce que vous pouvez nous expliquer plus précisément de quoi il s'agit ?
OLIVIER VERAN
D'abord, on fait un constat. On fait un constat que quelque chose ne va pas. Quand un gamin de 12 ans sort avec un mortier à 1 h du matin dans la rue, sans ses parents évidemment.
LORRAIN SENECHAL
Un mortier d'artifice.
OLIVIER VERAN
Des sortes de petites fusées, il y a un truc qui ne va pas. Et la responsabilité des parents, elle est à interroger, voire à engager. Toutes les situations ne se ressemblent pas, il y a sans doute des parents qui sont complètement dépassés par leurs enfants et qui essayent. Il y a deux situations où les parents ne sont pas forcément dépassés, mais sont démissionnaires. Donc la loi qui existe aujourd'hui est là pour rappeler que quand on est parent, quand on a un enfant mineur, qui plus est un mineur de moins de 15 ans, on a charge d'éducation, et on est responsable.
AGATHE LAMBRET
Mais l'échec n'est pas partagé par l'Éducation nationale.
OLIVIER VERAN
Ça, c'est un point qui est important. Vous savez, on est surtout… Aujourd'hui, on a plutôt une responsabilité des missions qui fait que c'est la famille, la cellule familiale, qui éduque, et c'est l'école qui enseigne. Ça ne veut pas dire qu'on ne peut pas remettre…
LORRAIN SENECHAL
Mais ce n'est plus le ministère d'Instruction publique, c'est le ministère de l'Éducation nationale.
OLIVIER VERAN
Oui, de l'enseignement.
LORRAIN SENECHAL
Il y a un rôle aussi dans…
OLIVIER VERAN
Mais les enseignants, c'est un rôle formidable d'accompagnement des enfants, d'accompagnement des mineurs, et aussi par l'échange d'accompagnement des parents. Donc le Président de la République nous a demandé de faire un constat rapide, transparent, clair, lucide. Toutes les situations ne se ressemblent pas. J'étais à Grenoble la semaine dernière, j'ai vu les trentaines de commerces totalement dévastés, j'ai rencontré 200 agents de police, des pompiers, des gendarmes. Des pompiers qui vous expliquent que leur mission, c'est de protéger les gens qui sont attirés dans des guet-apens par des bandes de malfrats qui les font venir auprès d'un feu de poubelle pour pouvoir mieux les caillasser. Et quand on dit "caillasser", ce n'est pas des petits cailloux, ils m'ont montré des pierres qu'ils recevaient, ils sont blessés. Donc ça nécessite quoi ? Ça nécessite de se dire : "Mais comment de telles situations sont-elles possibles ?" Ça ne veut pas dire excuser, ça veut dire condamner, juger et faire ensuite évoluer le cadre pour faire en sorte que cela ne se reproduise plus. La question de la responsabilité parentale est engagée, mais pas que.
LORRAIN SENECHAL
Olivier VERAN, après ces émeutes, une manifestation a été plutôt calme, alors qu'elle était pourtant interdite. C'était la manifestation de soutien à Adama TRAORE. Les présidents de groupes de la majorité ont pourtant écrit à Yaël BRAUN-PIVET pour demander sanctions contre les députés Insoumis Ecologistes qui étaient présents. On voit, par exemple, Mathilde PANOT, la présidente du groupe Insoumis. Ça veut dire que c'est l'Assemblée qui fait en quelque sorte la… Il fait la loi, c'est-à-dire qu'il dit ce qui est autorisé et ce qui ne l'est pas. Donc par définition, excusez-moi, un député, il respecte les lois de la République. Quand vous avez un préfet qui estime que pour des raisons de sécurité, un évènement ne peut se tenir, et donc qu'il l'interdit, qu'il le rend illégal, le rôle d'un député n'est pas de s'y rendre, encore moins en portant l'écharpe tricolore qui lui confère, qui symbolise le fait qu'il fait la loi ; sinon, il se met lui-même en dehors de la loi, et c'est grave. Le deuxième point, il est moral. Comment un député de la nation, quelles que soient ses idées politiques, par ailleurs, peut accepter sans broncher de manifester au milieu de personnes qui scandent : "Tout le monde déteste la police". "Tout le monde déteste la police."
LORRAIN SENECHAL
Est-ce qu'il faut, pour autant, sanctionner à l'Assemblée nationale ces élus ?
OLIVIER VERAN
Vous rendez-vous compte du déshonneur, et je pèse mes mots, le déshonneur que cela représente ? Je vais vous dire, j'ai vu beaucoup de Français en me déplaçant, j'ai parlé de l'Isère tout à l'heure, mais je vais aussi évidemment ailleurs, beaucoup de Français que ça choque, pas que ça surprend, pas que ça divertit, que ça choque profondément.
LORRAIN SENECHAL
Mais au point où ils ont une responsabilité dans les évènements de ces derniers jours, et il faudrait donc les sanctionner ?
OLIVIER VERAN
Mais ils ont des responsabilités. Vous savez, le niveau de confiance… Je suis ministre en charge des questions démocratiques, le niveau de confiance des Français dans la classe politique aurait du mal à être plus faible. Le niveau de confiance des Français dans les institutions est loin d'être l'un des plus élevé d'Europe, et c'est un euphémisme. Quel message renvoient ces élus de la République aux Français qui s'interrogent sur notre capacité à faire société ? C'est un message qui est néfaste, il n'y a aucun sens politique à le faire. Et je le dis, parce que ce sont des députés de la France Insoumise, c'est aussi des députés écolos, et je connais aussi certains…
LORRAIN SENECHAL
Sandrine ROUSSEAU notamment, oui.
OLIVIER VERAN
Je connais aussi certains, et je connais même bien certains députés de la NUPES qui ne sont pas normalement des insoumis et qui sont profondément républicains. Ils doivent, sans délai, se détacher, se distinguer de ces élus-là qui, encore une fois, se déshonorent en participant à ce type de manifestation.
AGATHE LAMBRET
Et Sophie BINET, la patronne de la CGT aussi a dénoncé hier un racisme systémique dans la police. Qu'est-ce que vous lui répondez ?
LORRAIN SENECHAL
Rapidement, Olivier VERAN.
OLIVIER VERAN
Je dis que nous allons parler avec Sophie BINET de ce dont nous avons à parler avec madame… avec la patronne de la CGT, la présidente de la CGT, à savoir de tout ce qui peut améliorer la qualité de vie au travail des Français.
LORRAIN SENECHAL
Donc il n'est pas question de parler… ?
OLIVIER VERAN
Et c'est là sa mission, et c'est là la nôtre dans le dialogue social.
LORRAIN SENECHAL
Olivier VERAN, vous restez avec nous. Porte-parole du Gouvernement. (…)
AGATHE LAMBRET
Toujours avec Olivier VERAN, le porte-parole du Gouvernement. Olivier VERAN, le président a annoncé au sommet de l'OTAN que la France allait livrer des missiles, longue portée Scalp à l'Ukraine, des missiles qui théoriquement sont capables d'atteindre le sol russe. Pour Olivier MARLEIX, le patron des LR à l'Assemblée, c'est une mesure inquiétante qui participe à une escalade. Est-ce que c'est le cas ? Ça participe à une escalade ?
OLIVIER VERAN
Pas du tout. En fait il y a toujours trois règles que nous respectons lorsque nous équipons d'armes nos amis Ukrainiens pour faire face aux Russes. Je le dis dans un contexte où les Russes ont réalisé une frappe particulièrement atroce le 10 juillet sur un centre humanitaire en Ukraine qui a ému toute la planète, et à juste titre. Trois règles. Première règle : que ça participe à la défense de l'Ukraine. Deuxième règle : que ça n'entraîne pas d'escalade dans la participation des pays qui arment l'Ukraine au conflit.
LORRAIN SENECHAL
Olivier MARLEIX vous dit que ça va entraîner une escalade.
OLIVIER VERAN
Je vais y venir. Et troisièmement, évidemment que ça ne fragilise pas les capacités défensives françaises. Les trois règles sont ici réunies. On va permettre en équipant l'Ukraine de missiles Scalp, qui sont des missiles qui sont des missiles de 5 mètres, qui ont une portée de 250 kilomètres, qui peuvent être largués par avion, et qui peuvent rentrer en profondeur, donc qui doivent permettre…
LORRAIN SENECHAL
Et combien de missiles d'ailleurs, Olivier VERAN ?
OLIVIER VERAN
Le nombre n'est pas communiqué et heureusement, j'ai envie de vous dire.
LORRAIN SENECHAL
Quelques dizaines, oui, oui.
OLIVIER VERAN
Deuxièmement, l'Ukraine s'est engagée à n'utiliser ces missiles que sur son propre sol – que sur son propre sol. C'est une réponse à Olivier MARLEIX qui s'inquiétait. Et troisièmement, nous avons évidemment un stock qui est supérieur à nos besoins pour nos propres capacités défensives en matière de missiles Scalp. Les Anglais ont pris une initiative similaire à la nôtre avec, eux, ça s'appelle les missiles Storm Shadow, enfin peu importe, qui sont aussi des missiles à pénétration profonde d'usage défensif. Donc nous sommes aux côtés des Ukrainiens, le président de la République est déterminé dans l'accompagnement qu'il a de nos frères et voisins ukrainiens, et c'est encore une fois l'honneur de la France que d'être capable de le faire.
AGATHE LAMBRET
On s'éloigne tout de même un peu de la distinction faite au début entre arme défensive, arme offensive. Est-ce que c'est parce que la guerre dure, que la contre-offensive ukrainienne patine ?
OLIVIER VERAN
Je le redis, on parle là de missiles qui sont à utiliser sur le territoire ukrainien, ukrainien. Ça veut dire que, par définition, l'Ukraine défend son territoire sur son territoire, c'est donc une arme à usage défensif.
AGATHE LAMBRET
Hier, le président a aussi affiché son soutien à une adhésion rapide de l'Ukraine à l'OTAN. Pourtant il y a un an, Emmanuel MACRON lui-même refusait cette perspective. Il expliquait notamment que ce serait perçu par la Russie comme quelque chose de confrontationnel. Vous pouvez nous expliquer ce changement de pied du président ?
OLIVIER VERAN
Ce que le président a dit à l'OTAN hier, c'est d'abord nous devons envoyer un message de soutien à l'Ukraine, un message d'unité de l'OTAN et un message de détermination à ce que la Russie ne puisse, ne doive remporter cette guerre, et il a précisé : c'est la grammaire dans laquelle nous devons rester.
AGATHE LAMBRET
D'accord. Et d'idée aujourd'hui, enfin d'après ce qu'on comprend, c'est plutôt de faire pression sur POUTINE alors qu'au début de la guerre, il s'agissait plutôt de le ménager, non ? Emmanuel MACRON a essayé beaucoup de discuter avec lui. Il n'y a pas un changement un peu d'orientation ?
OLIVIER VERAN
Ce que vous appelez ménager, en fait ce n'est pas le cas, c'est du dialogue. Maintenir le dialogue avec l'ensemble des parties prenantes pour ne jamais rompre le dialogue, ce qui nous a permis d'obtenir des conditions de corridor humanitaire, de convois de céréales, donc c'est fondamental. Encore une fois, la France est l'un des pays qui a su très tôt, très vite coordonner autour de lui une réponse en soutien aux Ukrainiens qui en avaient besoin, et aujourd'hui vous voyez que la coalition internationale est unie.
LORRAIN SENECHAL
Olivier VERAN, Izïa HIGELIN sera tout à l'heure en concert aux Francofolies de La Rochelle pour la première fois depuis son appel en plein concert à organiser une piñata géante qui visait Emmanuel MACRON. Elle a expliqué qu'elle était dans un personnage entre deux chansons, qu'elle n'appelait pas du tout à la haine. Pourtant, un de ses concerts a été annulé à Marcq-en-Barœul par le maire Les Républicains qui, lui, a été choqué par ses propos. Est-ce que vous aussi vous appelez à ce qu'elle ne joue pas ce soir aux Francofolies de La Rochelle ?
OLIVIER VERAN
On a parlé tout à l'heure des violences, des émeutes, de la volonté de faire reculer la violence sous toutes ses formes. On a parlé aussi d'unité de la nation, du souhait d'aller de l'avant, d'être aussi fier d'appartenir à une belle nation comme la France. Je crois que tout ce qui vient entretenir l'idée que la violence serait justifiée parce qu'on n'est pas d'accord est dangereux. Je crois que c'est aussi démago, pardonnez-moi de le dire. Vous avez un succès d'estrade dans un moment qui n'a rien à voir avec un meeting politique, et quand bien même ç'aurait été dans un meeting politique, les mots qui ont été tenus sont des mots totalement inadaptés.
LORRAIN SENECHAL
Y compris quand c'est un artiste qui met en scène…
OLIVIER VERAN
Izïa HIGELIN a eu l'occasion de s'exprimer et de dire que ce n'est pas ce qu'elle avait voulu dire. Bon, eh bien écoutez, voilà. On ne va pas en faire non plus un fait politique en soi. Elle ne porte pas en soi de mandat. Maintenant, libre aux élus locaux qui avaient prévu de l'accueillir d'estimer que les conditions ne sont plus réunies pour le faire en la période. Je n'ai pas de commentaire à faire, ce n'est pas à moi qu'il revient de décider si oui ou non.
LORRAIN SENECHAL
Est-ce que le chapitre est clos ? Est-ce qu'elle peut continuer ses concerts comme avant ?
OLIVIER VERAN
Le mot qui me vient, c'est que c'était nul, inutile et dans le contexte assez inadapté.
LORRAIN SENECHAL
Est-ce que le chapitre est clos et est-ce qu'elle peut continuer ses concerts comme avant ?
OLIVIER VERAN
Ce n'est pas à moi de le décider encore une fois. On nous confie beaucoup de responsabilité quand on nous confie un mandat, pas celui d'aller choisir quel artiste a le droit de s'exprimer, de quelle manière et où, voilà. Mais je donne mon avis personnel sur ce qu'elle a pu dire et le contexte dans lequel elle l'a fait.
LORRAIN SENECHAL
Et en tant que porte-parole du Gouvernement. C'est pour ça que vous étiez là ce matin.
OLIVIER VERAN
Ça ne correspond pas aux attentes des Français, encore moins du moment.
LORRAIN SENECHAL
Merci Olivier VERAN
Source : Service d'information du Gouvernement, le 17 juillet 2023