Interview de Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, à Public Sénat le 13 juillet 2023, sur l'accès aux soins et les déserts médicaux.

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Média : Public Sénat

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Notre invitée politique ce matin, c’est Agnès FIRMIN LE BODO. Bonjour.

AGNES FIRMIN LE BODO
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Merci d’être avec nous. Ministre déléguée chargée de l‘Organisation territoriale et des professions de santé. Vous êtes également porte-parole d’Horizons, c’est le parti d’Edouard PHILIPPE. On est ensemble pendant 20 minutes pour une interview en partenariat avec la Presse régionale, représentée par Julien LECUYER de la Voix du Nord. Bonjour Julien.

JULIEN LECUYER
Bonjour Oriane. Bonjour Madame la Ministre.

AGNES FIRMIN -LE BODO
Bonjour.

ORIANE MANCINI
On va évidemment parler de l’accès aux soins, puisque c’est un sujet qui inquiète beaucoup de Français, mais d’abord, quelques mots d’actualité, on l’a entendu hier, Gérald DARMANIN, qui a donc annoncé un dispositif pour sécuriser les festivités du 14 juillet. 45.000 policiers et gendarmes déployés chaque soir pendant plusieurs soirs. Il y a une forte inquiétude au gouvernement sur la reprise des émeutes ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Il y a une inquiétude légitime, les violences que la France a subies, là, il y a quelques jours, ont montré à quel point il était important que nous puissions réagir fort et prévenir ces violences, les maires sont parfois inquiets, nos concitoyens aussi sont parfois inquiets, et le 14 juillet, c’est dans les villes et les villages l’occasion de faire nation autour de nos trois belles valeurs républicaines, je crois qu’il est important que, et c’est le rôle de l’Etat, d’assurer que cette fête puisse se passer dans de bonnes conditions. C’est pour ça que Gérald DARMANIN, hier, a annoncé un plan fort pour permettre à cette fête de se dérouler le 13 et le 14 juillet dans de bonnes conditions…

JULIEN LECUYER
Visiblement, ces assurances n’ont pas rassuré les communes, certaines ont annulé les festivités. Ça a choqué, Marine LE PEN, qui estime que c’est un aveu de la perte totale de la confiance en l’Etat, est-ce que l’ordre n’est plus garanti en France, c’est ce qui fait qu’on est obligé de constater que les communes doivent annuler les festivités ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Non, je crois qu’il faut d’abord saluer le travail des forces de l’ordre, et de toutes les forces de l’ordre aussi des pompiers, et aussi le travail des maires qui a été important pendant ces émeutes. Je crois qu’il faut aussi comprendre et entendre, c’est le sens des annonces qui ont été faites par Dominique FAURE, hier même ici, au Sénat, lors d’une question au gouvernement. Il va falloir travailler aux côtés des maires, avec les maires, mais là, je le redis, le 14 juillet, le 13 juillet, dans certaines communes, c’est le bal du 13 juillet pour certains villages, c’est l’occasion, je le dis, de refaire nation, et de faire nation autour de nos trois valeurs républicaines, le rôle de l’Etat, c’est d’assurer l’ordre et le maintien de l’ordre, c’est ce qu’a annoncé Gérald DARMANIN avec ces mesures fortes, et aussi ces mesures d’anticipation, avec la vente et l’interdiction de la vente et du transport des feux d’artifice chez les particuliers.

JULIEN LECUYER
Emmanuel MACRON a décidé de ne pas s’exprimer à l’occasion de ce 14 juillet, alors, il l’avait fait en 2020 et puis en 2022, mais c’est clair, ce n’est pas une habitude chez lui, est-ce qu’il n’est pas quand même urgent, malgré tout, de tirer les leçons de ces événements tragiques et de conclure la période des 100 jours ?

AGNES FIRMIN LE BODO
C’est ce qu’Emmanuel MACRON a dit qu’il ferait dans les prochains jours, il ne parle pas toujours le 14 juillet, vous l’avez dit vous-même, il a décidé de ne pas parler demain, il parlera dans les prochains jours….

JULIEN LECUYER
Mais est-ce qu’il ne risque pas de parler dans le vide, on le sait, la moitié de la France est partie en vacances, aura la tête bien ailleurs qu’à une déclaration présidentielle. Il n’y a pas un risque que, finalement, il parle dans le vide ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Un président de la République parle rarement dans le vide, enfin, en tout cas, je crois. Surtout en ce moment, et surtout après ces moments que vient de vivre la France.

ORIANE MANCINI
Julien, sur un autre sujet…

JULIEN LECUYER
Oui, en effet, et puis, une réaction de votre part, on a appris hier le décès du septuagénaire agressé quelques jours plus tôt à son domicile de Vieux-Condé dans le Nord, alors, par des jeunes, auxquels il demandait de faire moins de bruit. Ça vient après un autre fait divers, hélas aussi tragique dans le Nord, à Quesnoy-sur-Deûle, aussi une personne âgée qui avait été agressée et tuée pour les mêmes raisons. Est-ce qu’un palier n’a pas été franchi dans l’ultra-violence ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Les paliers sont franchis depuis de très nombreuses années, je crois que je fais partie de celles et ceux qui depuis longtemps dénoncent l’acceptation que, collectivement, nous avons eue face aux violences verbales, comme les violences verbales ne suffisent pas, on passe aux violences inacceptables, et là, on parle de la mort d’un homme, donc je pense qu’il faut vraiment être là-dessus très ferme, très ferme, d’abord, dans la réponse au niveau de la justice, sur ces jeunes qui ont tué un homme, il faut clairement le dire, et puis, les collèges sénateurs disaient juste auparavant qu’il fallait reprendre la base de l’éducation, en France, il y a des mots qu’on n’utilise presque plus souvent – courants – sur le bonjour, le merci, et puis, des mots comme tolérance, bienveillance et respect ne font sans doute malheureusement plus partie des valeurs, que nous employons au quotidien dans nos relations, on ne respecte plus le policier, on ne respecte plus l’agent d’accueil à la mairie, on ne respecte plus la secrétaire médicale, il n’y a plus de respect de la fonction, de l’uniforme, je crois qu’il faut vraiment…, et de la personne, tout simplement…

JULIEN LECUYER
La solution de cela, c’est appeler les parents à plus de responsabilité, on l’a entendu dans les mots d’Emmanuel MACRON qui envisage une amende dès le premier fait, est-ce que c’est par l’autorité qu’il faut repasser ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Je crois que c’est une partie de la réponse, l’autorité parentale, ça veut dire quelque chose, être parent, ça veut dire quelque chose. Donc la responsabilité des parents, elle est évidente, et puis, il faut aussi, comme c’est dit par presque tout le monde, reprendre peut-être les bases de l’éducation. Donc c’est un tout, et je crois qu’il est important, comme l’ont dit à la fois le président de la République et la Première ministre, de prendre le temps de l’analyse, de l’analyse de la situation, il faut répondre à l’urgence de ces violences, elles sont inacceptables, intolérables, mais il faut se poser les questions de pourquoi nous en sommes arrivés-là, je pense que c’est important de le faire, et de prendre le temps de l’analyse pour apporter les bonnes réponses.

ORIANE MANCINI
On va parler de l’accès aux soins, vous êtes en charge, on le disait, de l’organisation territoriale des professions de santé, une de vos missions, c’est de lutter contre les déserts médicaux, l’accès aux soins, c’est un sujet de préoccupation majeure pour les Français. Comment faire en sorte que chaque Français ait accès aux soins ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Eh bien écoutez, les Français, c’est la préoccupation numéro un de nos concitoyens, le remaniement, ils ne nous en parlent pas du tout, donc, mais, par contre, comment je vais pouvoir faire pour prendre un rendez-vous chez l’ophtalmo, est-ce que je vais trouver un dentiste ou je n’ai plus de médecin généraliste, c’est le quotidien de 6 millions de nos concitoyens, qui n’ont pas de médecin traitant. Donc depuis maintenant plus d’un an, nous avons construit… nous avons d’abord beaucoup écouté les territoires, les élus, les professionnels de santé, et j’ai, depuis le 12 juin, l’occasion de proposer quatre mesures pragmatiques, qui vont permettre de répondre, de façon concrète, c‘est libérer du temps médical, avec 10.000 assistants médicaux qui seront auprès des médecins, un assistant-médical, c’est deux consultations par jour de libérées par médecin.

JULIEN LECUYER
Il faut les recruter.

AGNES FIRMIN LE BODO
Donc nous sommes en train, et c’est le plan, il y en a actuellement 4 000 donc il nous en faut encore recruter 6 000 pour arriver aux 10 000 à fin 2024, donc là un grand plan a été annoncé aux côtés de la CNAM. J’étais hier à Fontainebleau avec Marguerite CAZENEUVE pour l’annoncer. Donc un plan avec la CNAM, les ARS et France Travail pour recruter ces 6 000 assistants médicaux auprès des médecins. Je le redis : un assistant médical, c’est deux consultations par jour.

JULIEN LECUYER
Et les médecins sont d’accord ?

ORIANE MANCINI
Oui, c’est ça. Ils n’ont pas du mal, les médecins, à accepter ces assistants médicaux ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Alors les médecins, c’est le rôle de la CNAM d’aller vers les médecins pour leur expliquer tout l’intérêt qu’ils avaient à embaucher un assistant médical. Hier, j’étais dans une maison de santé à Fontainebleau avec cinq médecins qui ont embauché depuis très longtemps un assistant médical. Ce qu’elles disent – c’étaient des femmes médecins – c’est que jamais elles ne feraient machine arrière. Donc le tout, c’est d’aller convaincre les médecins et puis aussi de lever les freins, donc on va les accompagner à l’embauche de cette assistance médicale. On va regarder avec les collectivités territoriales.

ORIANE MANCINI
Pour que ce ne soient pas les médecins qui soient obligés de chercher ces assistants médicaux. C’est l’Etat qui va leur donner la main ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Voilà, le package du bout en bout. On va les accompagner vraiment parce que nous pensons que c’est une réponse importante et c’est un moyen. Donc libérer du temps médical. J’ai annoncé le 12 juin à Sisteron un plan de 4 000 maisons de santé pluriprofessionnelles. Nous en avons actuellement 2 200 donc ça fait 400 par an à fin 2027 avec un effort financier de l’Etat pour accompagner les collectivités, accompagner les porteurs de projet qui sont parfois des professionnels à hauteur de 45 millions, mais aussi annoncer là aussi un package tout prêt, un accompagnement, un cahier des charges parce que l’exercice pluriprofessionnel, c’est ce que demandent les médecins. Et là aussi, un médecin qui travaille en maison de santé pluriprofessionnelle, il voit 160 patients par an de plus qu’un médecin qui travaille tout seul.

ORIANE MANCINI
Juste sur ces maisons de santé parce qu’il y avait aussi un engagement du gouvernement à ce que chaque Français ne se trouve pas à plus de 30 minutes d’une maison de santé. Est-ce qu’aujourd'hui c’est le cas ? Est-ce que les Français ont accès facilement à ces maisons de santé ? Parce que c’est aussi ça l’enjeu.

AGNES FIRMIN LE BODO
Oui. Alors après, 30 minutes, pour le coup maintenant que je parcours vraiment beaucoup la France, vous dire qu’à 30 minutes quand on est à Paris dans un bouchon, je ne suis pas sûre que le 30 minutes… Mais l’idée là aussi, ce ministère…

ORIANE MANCINI
L’idée, c’était de renforcer la proximité, c’était ça la promesse avec ces maisons de santé.

AGNES FIRMIN LE BODO
Voilà, c’est toujours ça l’objet. C’est de regarder, et je suis ministre de l’organisation territoriale, je ne l’oublie pas, c’est de regarder et c’est bien de faire du cousu main territoire par territoire. C’est vraiment la machine que nous sommes en train d’inverser depuis maintenant un an. C’est avec les territoires, pour les territoires et avec les professionnels de santé. Ces projets-là, lorsqu’ils sont pensés à l’échelle d’un territoire, c'est vraiment important. C’est aussi l’objet du pacte territorial sur lequel le président de la République nous a demandé de travailler pour justement réfléchir à ce que tous ces services soient bien répartis dans les territoires.

JULIEN LECUYER
Et est-ce qu’on aura les médecins en nombre suffisant pour justement alimenter ces maisons pluridisciplinaires ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Ces maisons, elles ne fonctionnent bien que lorsque le projet il est construit par les professionnels eux-mêmes. L’idée, c’est vraiment de les accompagner pour ça avec les collectivités territoriales. Les maires sont très demandeurs de ces maisons de santé mais ces maisons de santé, elles ne peuvent fonctionner que s’il y a des professionnels. Mais une maison de santé, j’étais dans le Puy-de-Dôme il y a quelques jours, une maison de santé dans une commune de 800 habitants avec 51 professionnels, donc ça marche. Ça veut dire que ça attire et à partir de cet endroit, on peut aller vers les communes aux alentours.

JULIEN LECUYER
Il y a des endroits où ça fonctionne. Il y a plein d’endroits, on est bien placé dans le Nord-Pas-de-Calais pour le savoir, où ça ne fonctionne pas. Les professionnels ne veulent pas s’installer pour diverses raisons. Vous n’avez pas souhaité aller plus loin que cela dans la régulation de l’installation des médecins. Pourquoi ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Parce que ça ne marche pas. Parce que tout simplement ça ne marche pas. Il suffit de regarder ce qui se passe dans les pays voisins qui ont appliqué ces mesures. J’étais à Budapest la semaine dernière sur une convention organisée par l’OMS Europe. La question numéro un que porte l’Organisation mondiale de la santé au niveau Europe, c’est la démographie médicale. Ce problème, il est le même dans tous les pays européens et j’ai pu en échanger avec mes collègues donc ceux qui ont été vers ces mesures ça ne marche pas mieux. Et par contre, on sait que l’effet serait inverse. 87 % de la France est un désert médical, on ne peut pas réguler lorsqu’il n’y a pas, j’allais dire, de matière à réguler très clairement. Et puis, je crois qu’il faut aussi écouter ce que nous disent les jeunes. Les jeunes nous disent : si vous nous obligez à aller quelque part où on ne souhaite pas aller, on arrête. Et la différence entre la génération d’avant et de maintenant, c’est que maintenant on voit des jeunes qui sont capables de faire dix ans d’études et de faire autre chose. Et ça, c'est une réalité qu’il nous faut prendre en compte. Par contre, je crois beaucoup à l’incitation et le donner à voir. Lorsqu’on invite les jeunes et qu’on leur donne la capacité d’aller faire un stage dans une commune plus rurale, parfois ils y trouvent un intérêt. Parfois ils y trouvent un intérêt. Donc c’est au cours du parcours de ces jeunes médecins ou de ces jeunes professionnels, il faut les inciter et donner les conditions pour aller faire les stages dans ces…

ORIANE MANCINI
Pourtant certains chez vous à Horizons poussaient pour qu’il y ait plus de coercition pour installer les médecins disant que le désert médical, les déserts médicaux, c’est un carburant pour le Rassemblement national.

AGNES FIRMIN LE BODO
La réponse au service public, c’est un carburant pour le… Mais le Rassemblement national n’apporte pas de réponses non plus sur ce sujet. N’apporte pas de réponses non plus sur ce sujet. C’est une mauvaise réponse et tout le monde le sait. La régulation, ça voudrait dire quoi ? Retirer un professionnel d’un territoire où il y aurait plus de professionnels pour le mettre dans un… Comment vous expliquez ça et comment vous gérez ça ? Ça n’est absolument pas possible et, en plus, ça ne marche pas et ç’aurait, je vous le redis, les effets contraires. Vraiment les effets contraires. Et ça, nous en sommes intimement convaincus pour avoir regardé ce qui se passe à l’étranger, pour avoir beaucoup échangé avec les professionnels. Et d’ailleurs, l’Assemblée nationale a rejeté cette idée plutôt massivement d’ailleurs.

ORIANE MANCINI
Parmi vos autres mesures, il y a la question des Médicobus, parce que vous travaillez aussi beaucoup sur le aller vers comme on dit maintenant.

AGNES FIRMIN LE BODO
Aller vers, oui.

ORIANE MANCINI
Il y a dix Médicobus qui sont en circulation, vous en visez cent, - c’est dans le plan ruralité de la Première ministre – d’ici fin 2024. Comment on passe de dix à cent ?

AGNES FIRMIN LE BODO
On va d’abord lancer un premier appel à projets en septembre avec l’objectif à fin mars 2024 de trente nouveaux Médicobus. Là aussi, c’est un travail partenarial avec les collectivités territoriales. Je connais des départements qui sont très intéressés pour développer ce dernier kilomètre : comment on va vers les citoyens. Dans le Gers, j’ai pu aller voir un Dentobus. Là, on avait un modèle intéressant : c’est un dentiste qui va dans les petits villages une fois par mois. C’est un dentiste retraité avec deux jeunes internes. Deux jeunes internes dentistes qui là aussi découvrent la France, en tout cas le Gers, grâce à ce Dentobus. Mais c’est le dernier kilomètre : comme à partir d’une maison de santé dans un territoire, les médecins peuvent aller faire des consultations.

JULIEN LECUYER
Comme vous dites, c’est un médecin retraité. Est-ce que vous allez trouver les professionnels en nombre suffisant là aussi pour équiper ces Médicobus ?

AGNES FIRMIN-LE BODO
C’est l’objet, c’est l’objet du travail, il y en a un dans l’Orne qui fonctionne très bien, qui est organisé par les professionnels de santé eux-mêmes d’ailleurs, qui gèrent…

JULIEN LECUYER
C’est quoi l’argument, comment vous leur vendez le projet ?

AGNES FIRMIN-LE BODO
Il y a des médecins qui sont…

JULIEN LECUYER
Allez découvrir le Gers ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Les territoires, la France est belle, moi je vous l’assure, ce n’est pas à vous que je vais le dire, vous le savez très bien…

JULIEN LECUYER
Dans le Pas-de-Calais en particulier.

AGNES FIRMIN LE BODO
La France est belle, je ne vais pas dire la Normandie, je vais dire la France est belle ; non, non, mais c’est un mode d’exercice complètement différent, on découvre des situations humaines, des pathologies, on accompagne des jeunes, moi j’ai trouvé que le modèle avec le médecin, le dentiste retraité, et ses étudiants, était assez extraordinaire en soi, c’était porté par la Croix Rouge ce projet.

ORIANE MANCINI
Vous êtes en charge d’un autre sujet, là aussi qui intéresse beaucoup les Français, c’est la fin de vie, est-ce que le texte sur la fin de vie sera présenté d’ici le 21 septembre ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Le président de la République le 3 avril dernier, suite aux travaux que la Convention citoyenne lui a remis, a été très clair, il a demandé au gouvernement de présenter un texte avant la fin de l’été, le 21 septembre, au conseil des ministres, ce texte nous sommes en train de l’écrire, de la coconstruire, avec un groupe de parlementaires, de continuer à écouter les soignants, il sera présenté sur le bureau du conseil des ministres avant la fin d’été.

ORIANE MANCINI
Avant le 21 septembre ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Avant la fin de l’été, oui.

JULIEN LECUYER
Pour un examen, difficile de le savoir pour l’instant ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Ça on va attendre, l’agenda parlementaire de la rentrée je ne l’ai pas en tête, en tout cas le travail d’écriture de ce texte, du projet de loi de la fin de vie, avec l’ouverture d’une aide active à mourir, des soins palliatif et tout un travail sur le droit des patients, sera bien déposé avant la fin de l’été.

ORIANE MANCINI
Juste, Emmanuel MACRON il a parlé, quand il a conclu la Convention citoyenne, d’un modèle français de la fin de vie, il est resté un peu vague, est-ce que dans ce texte figureront les termes de suicide assisté et d’euthanasie ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Je vous dis, nous sommes en train d’écrire ce texte, dans le modèle d’accompagnement français de la fin de vie, je l’ai dit lors de mes déplacements, aucun modèle - à l’étranger – aucun modèle n’est duplicable in extenso pour des tas de raisons, mais dans ce modèle d’accompagnement de la fin de vie je crois qu’il faut prendre tout ça dans sa globalité, avec la volonté de développer les soins palliatifs, ça, ça fait partie de l’accompagnement, et puis l’ouverture de ce nouveau droit sur lequel nous sommes en train de travailler

ORIANE MANCINI
Ça veut dire que vous n’inscrirez pas forcément ces mots dans le texte initial ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Je ne vais pas vous dire oui, je ne vais pas vous dire non, nous sommes en train d’y travailler et d’y réfléchir, et vous savez que j’ai aussi lancé le travail sur le poids des mots, parce qu’on sait que certains mots peuvent choquer, mais les mots ont un sens, et ce travail nous le menons aussi parce que je pense que c’est aussi important de le mener en même temps.

JULIEN LECUYER
Il y avait dans l’idée aussi d’avoir une loi avec quand même des restrictions, est-ce que vous pouvez nous rappeler lesquelles en particulier ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Le président de la République le 3 avril dernier a très clairement fixé des lignes rouges, la ligne rouge c’est pas les mineurs, les modalités d’accès à cette aide active à mourir c’est un pronostic vital engagé à moyen terme, et puis…

JULIEN LECUYER
Ce qui ne veut pas dire grand-chose moyen terme

AGNES FIRMIN LE BODO
Le court terme dans la loi Claeys-Leonetti était défini, le moyen terme c’est… en Oregon c’est six mois, voilà, les travaux…

JULIEN LECUYER
Ça pourrait être la même chose en France.

AGNES FIRMIN LE BODO
L’Oregon va aller jusqu’à 12 mois, c’est les travaux que nous menons.

ORIANE MANCINI
Vous allez forcément inscrire un terme dans la loi, pour que ce soit clair pour tout le monde

AGNES FIRMIN LE BODO
On écrira moyen terme et puis près la capacité de travailler par décrets et de réfléchir est importante, le court terme dans la loi Claeys-Leonetti, a été défini après, quelques jours à quelques semaines.

ORIANE MANCINI
Vous, vous souhaitez que ce soit quoi le moyen terme ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Regardons ce qu’a fait l’Oregon et je pense que ce sont les soignants qui sont les mieux placés pour dire ça veut dire quoi le moyen terme, l’échelle entre six et douze mois paraît quelque chose qui soit acceptable.

ORIANE MANCINI
François BRAUN, le ministre de la Santé, qui est votre ministre de tutelle, dit que c’est un problème de société, pas un problème médical, et que ce n’est pas le rôle de médecins de faire ce type de gestes, qu’est-ce que vous en dites ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Je dis que sur ce sujet chacun a le droit d’avoir son avis, c’est effectivement un sujet de société, ce sont les débats que nous avons et c’est pour ça que nous continuons à travailler et à écouter les soignants.

ORIANE MANCINI
C’est difficile, il y a des grosses réticences ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Il y a des positions, qui sont connues d’ailleurs, qui s’expriment, et c’est légitime…

ORIANE MANCINI
Mais est-ce que vous pouvez faire un texte pareil contre l’avis des soignants ?

AGNES FIRMIN LE BODO
On ne fait jamais un texte contre, on construit un texte, on écoute, et puis le gouvernement prendra sa responsabilité. Un seul professionnel peut dire que le pronostic vital est engagé, c’est le médecin, et la première des réponses à ça c’est, comme cela a été fait au moment des discussions sur l’IVG, c’est la clause de conscience spécifique, et là il n’y a aucun doute sur le fait que la clause de conscience spécifique fera partie du texte de loi, ça c’est évident.

JULIEN LECUYER
Vous soulevez le dossier de l’IVG, qui avait donné lieu à des affrontements assez violents à l’Assemblée nationale, on se souvient que les lois bioéthiques, souvent, sont le théâtre de débats animés, est-ce que vous vous attendez à un débat serein sur ce sujet ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Je pense qu’il n’y a pas eu d’affrontements, il y a eu des débats…

JULIEN LECUYER
Affrontements, le terme est imagé, à une bataille dans l’Assemblée ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Moi je me souviens très bien, puisque je présidais la commission spéciale des révisions de loi bioéthique lors de la dernière législature, que ces débats se sont passés de façon apaisée. Il y a des débats, c’est un sujet de société, et c’est normal. Je fais beaucoup de débats partout, j’étais à Strasbourg lundi soir, j’ai été vraiment très surprise par la teneur et la tenue des débats, les gens sont capables de s’écouter. Et puis le meilleur exemple c’est ce qu’ont fait les 184 citoyens de la Convention citoyenne, ils ont beaucoup travaillé, mais ils ont travaillé en s’écoutant et en se respectant. Moi je n’ai aucun doute sur le fait qu’il y aura des débats, mais que les débats se passeront, j’allais dire de façon…

JULIEN LECUYER
De grande qualité.

AGNES FIRMIN LE BODO
Et le texte, et le sujet le vaut, et le mérite.

ORIANE MANCINI
Une dernière question sur ce sujet Julien ?

JULIEN LECUYER
Oui, simplement pour rappeler, vous avez installé le 1er juin l’instance de réflexion stratégique sur le plan décennal pour les soins palliatifs, vous avez une réunion aujourd’hui même pour faire un premier bilan, est-ce que vous pouvez nous en dire quelques mots, est-ce qu’on tiendra les délais, est-ce qu’on va enfin pouvoir vraiment avancer sur cette question essentielle ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Là aussi, je le redis, la volonté du président de la République et de la Première ministre c’était d’abord de comprendre pourquoi, après plusieurs plans quinquennaux, nous n’arrivions pas à avancer plus sur les enjeux des soins palliatifs qui sont un véritable enjeu d’accompagnement de la fin de vie, nous avons fait le choix de travailler sur une stratégie…justement pour se projeter, parce que l’enjeu majeur c’est la formation, la formation des professionnels, de tous les professionnels, c’est de prendre en compte le domicile, on nous demande beaucoup d’aller à domicile, donc le développement des unités mobiles de soins palliatifs, de prendre en compte les soins palliatifs pédiatriques, ça ce sera une nouveauté par rapport à ce qui existait avant, et puis la première des réponses, c’est ce qu’attendent de nous la majeure partie de nos concitoyens, c’est l’égalité d’accès et donc faire en sorte que tous les départements français soient dotés d’une unité de soins palliatifs, mais il y aura bien d’autres mesures, je ne vais pas vous dire ce qu’ils vont me présenter dans quelques temps maintenant, je ne le sais pas.

ORIANE MANCINI
Une dernière question un peu plus politique, ce matin, dans une grande interview au Figaro, Laurent WAUQUIEZ tend la main à Emmanuel MACRON, il l’appelle à l’union sacrée, il demande au chef de l’Etat de faire une forme d’union sacrée. Il faut dépasser temporairement les divisions, il veut un accord sur les grands textes, est-ce qu’Emmanuel MACRON et Elisabeth BORNE doivent saisir cette main tendue ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Je crois qu’Elisabeth BORNE et le président de la République ont déjà tendu la main au début du quinquennat, qui a été refusée, et le travail a été fait texte par texte, Laurent WAUQUIEZ dit déjà temporairement, donc et j’ai vu le titre du journal, c’est les exigences, je pense que quand on souhaite discuter, on ne commence pas par avoir des exigences, et on ne parle pas de temporairement, si la volonté de discuter, elle est là, elle est bien réelle, je pense qu’on peut faire ça de façon un peu plus ouverte, et un peu plus souple, je le redis, la volonté de travailler avec les partis de l’Arc républicain, la main était tendue au début du quinquennat, elle a été refusée. Si certains souhaitent, vu la situation difficile dans laquelle nous sommes, travailler texte par texte, c’est ce qui a été fait, d’ailleurs, 43 voix…

ORIANE MANCINI
Et là, ce n’est pas ce que fait Laurent WAUQUIEZ, parce qu’il fait des propositions sur lesquelles vous pourriez vous mettre d’accord ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Mais je n’ai pas vu l’article, j’ai vu le titre, j’ai trouvé ça un peu… une façon cavalière de vouloir rentrer dans des discussions, mais je crois que d’abord, c’est au président de la République et à la Première ministre de travailler sur ces sujets. Mais on voit bien…

ORIANE MANCINI
Edouard PHILIPPE, il ne peut pas oeuvrer à un rapprochement entre Les Républicains et la majorité présidentielle ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Tout le monde peut faire un rapprochement avec les partis de l’Arc républicain, mais c’est nécessaire, et de toute façon, vous le savez très bien, dans le cadre d’une majorité relative, il est important de pouvoir trouver des majorités texte par texte. Mais c’est aussi bien de voter et de respecter ces engagements, je…

ORIANE MANCINI
Laurent WAUQUIEZ à Matignon, c’est une bonne idée ou pas ?

AGNES FIRMIN LE BODO
Je ne ferai pas de commentaire sur… et je vous dis, en fait, nos concitoyens en fait, je vous le dis, partout en France, ce n’est pas ce qui les… c’est la réponse à leurs besoins qui les interpelle, ce n’est pas le remaniement et ce n’est pas qui sera à Matignon demain ou après-demain. Et Elisabeth BORNE est là, et elle fait le travail…

JULIEN LECUYER
Est bien là…

ORIANE MANCINI
Merci Agnès FIRMIN LE BODO.


Source : Service d’information du Gouvernement, le 19 juillet 2023