Texte intégral
JEFF WITTENBERG
Bonjour à tous, bonjour Olivier VERAN.
OLIVIER VERAN
Bonjour.
JEFF WITTENBERG
Toujours porte-parole comme cela vient d'être mentionné. Vous serez tout à l'heure au premier conseil des ministres de ce gouvernement Borne remanié. On a appris ce matin que le président de la République prendrait la parole au départ de ce conseil. Est-ce que confirmez cette information ?
OLIVIER VERAN
Je vous confirme qu'il y aura à la fois une prise image et que les Français pourront entendre les mots du président de la République en début du conseil des ministres. Alors je le dis tout de suite, je ne sais pas ce qu'il va dire et quelle sera la durée puisque je suis porte-parole et que je suis ministre et que je découvrirai cela avec les autres. Mais je pense que c'est important que le président de la République puisse poser lui-même des mots sur la séquence que nous venons de vivre, à la fois sur les 100 jours s'il l'aborde et sur la nouvelle composition de ce gouvernement qui est un gouvernement renforcé.
JEFF WITTENBERG
C'est-à-dire qu'il va donner un sens à ce que lui-même a appelé les ajustements ? Est-ce que ça veut dire qu'il va tracer un nouveau cap ?
OLIVIER VERAN
Je ne peux pas vous répondre par anticipation sur ce que dira le président de la République.
JEFF WITTENBERG
Il y aura d'autres expressions ou a priori c'est l'expression qui était prévue avant la fin du mois comme il l'avait dit ?
OLIVIER VERAN
De la même manière, c'est le président de la République qui décide comment et quand il s'exprime et je serai le porte-parole qui pourra vous dire aussi, et faire la lecture peut-être des choses.
JEFF WITTENBERG
Alors le porte-parole que vous êtes voit les commentaires de la presse, de l'opposition : gouvernement replié sur lui-même, beaucoup de bruit pour rien. J'imagine que vous les trouvez sévères ces commentaires, voire injustes. Vous, vous le définissez comment finalement ? Qu'est-ce qu'il faut retenir ? Ces ajustements étaient nécessaires pour corriger l'action du Gouvernement ?
OLIVIER VERAN
Certains parlent de remaniement, d'autres d'ajustements, moi je parlerais de renforcement. Renforcement parce que vous avez au sein du nouveau gouvernement des élus d'expérience, des élus aussi de terrain. Je pense au maire d'une ville industrielle du Nord, je pense à une députée de la deuxième ville de France, je pense à Fadila KHATTABI qui était la présidente de la Commission des affaires sociales, donc il y a aussi un retour du politique renforcé au sein de ce gouvernement.
JEFF WITTENBERG
Et donc un constat d'échec des ministres de la société civile, lorsque vous dites un retour du politique. L'expérience des ministres – on pense à Pap NDIAYE, on pense à François BRAUN, à d'autres – n'ont pas réussi finalement à s'imposer ? C'était une des clés d'ailleurs, une des marques d'Emmanuel MACRON depuis 2017.
OLIVIER VERAN
Plusieurs choses. D'abord moi, je leur rends hommage parce qu'ils ont fait du travail et qu'ils ont fait avancer les choses. Vous citiez l'éducation : à la rentrée scolaire pour la première fois, aucun prof ne gagnera moins de 2 000 euros. Vous parliez de santé : cet été, il y aura moins de tension dans les services d'urgence qu'il n'y en avait l'année dernière. Après Jeff WITTENBERG, il n'y a pas d'école le ministre et être ministre, c'est être capable de faire et de faire savoir, et c'est aussi pouvoir tenir le débat politique dans l'hémicycle.
JEFF WITTENBERG
Question inaudible
OLIVIER VERAN
Personne ne dit cela. Vous savez, d'abord le président de la République et la Première ministre sont fondés par définition à décider d'opérer des changements. Quant à la question de la société civile, c'est toujours une notion qu'à titre personnel je trouve un petit peu plus vague. Il y a 4 ans, j'étais médecin en blouse au CHU de Grenoble ; à quel moment est-ce que j'ai quitté les sphères de la société civile ?
JEFF WITTENBERG
Vous faisiez déjà de la politique. Vous étiez au Parti socialiste.
OLIVIER VERAN
Oui, vous pouvez faire de la politique, de l'action publique, de l'action associative en étant membre de la société civile. Ce qui est sûr, c'est que nous avons renforcé des segments fondamentaux, non seulement du Gouvernement mais pour la vie des Français. L'éducation et la santé sont quand même les deux sujets qui sont le plus au contact des Français et qui portent des priorités.
JEFF WITTENBERG
Et ce sont les deux ministères dont vous changez les têtes. À l'éducation, on y revient, dans son premier discours de ministre de l'Education nationale, Gabriel ATTAL a dit, je le cite, qu'il avait comme priorité la restauration de l'autorité et des savoirs. On a l'impression d'être revenu plutôt à l'ère de Jean-Michel BLANQUER. Est-ce que vous admettez qu'il y a une correction là encore, un changement de cap ; sinon, pourquoi l'a-t-il dit ?
OLIVIER VERAN
Ce que je peux vous dire, c'est qu'à l'Education nationale il y a énormément d'attente de la part des enseignants. Gabriel ATTAL l'a dit hier. C'est le plus beau métier du monde, il faut que chacun puisse à nouveau le percevoir comme tel, donc donner envie aux enseignants d'enseigner. Pourquoi ? Parce qu'on a besoin d'enseignants heureux pour bien enseigner et aussi parce qu'on a besoin d'enseignants heureux pour que les enfants soient heureux. C'est un mot qu'il a utilisé que j'ai bien aimé dans sa passation de pouvoir : que les enfants soient heureux. Par ailleurs, il y a le respect effectivement de l'autorité, des savoirs fondamentaux, donc c'est sa feuille de route qu'il a tracée. Vous le connaissez bien, c'est un politique expérimenté, un excellent communicant et surtout, il a fait le choix – et il l'a dit hier – de la proximité avec le milieu éducatif. Je retiens notamment l'idée d'aller 3 jours par mois dans un rectorat au contact des Français avec toutes les administrations centrales.
JEFF WITTENBERG
Le plus beau métier du monde disiez-vous, Olivier VERAN, alors pourquoi séduit-il si peu ? Il manquera 3 000 profs à la rentrée. Comment Gabriel ATTAL v-a-t-il résoudre la quadrature du cercle et trouver, comme il l'a dit, le fait que chaque élève aura un professeur face à lui chaque jour, alors qu'on sait qu'il y a des manques notamment sur les absences de courte durée ?
OLIVIER VERAN
À la demande du président de la République, le Gouvernement a déjà mis en place un dispositif qui incite, qui intéresse même financièrement les enseignants, parfois à effectuer des missions qu'ils effectuaient déjà par mobilisation personnelle et qui n'étaient pas forcément reconnues financièrement comme telles, parfois pour englober de nouvelles missions comme celle de davantage remplacer certains collègues. C'est ce travail-là qu'il faut être aussi capable de mettre en musique. Et puis il y a cette question de ce qu'on appelle les fameux CNR : les conseils nationaux de la refondation, qui donnent de l'autonomie…
JEFF WITTENBERG
Dont on n'a pas encore vraiment vu l'utilité, monsieur VERAN.
OLIVIER VERAN
On ne le voit pas à Paris, on ne le voit pas à Paris. Vous savez pourquoi ? Parce que c'est territorial, parce que c'est à l'échelle d'une école que les choses se décident, qu'elles changent et qu'elles bougent. Il faut que nous-mêmes, nous avons amorcé à la demande du président de la République un changement de logique. On fait davantage confiance aux acteurs de terrain, on enlève un peu des normes, on réduit des contraintes.
JEFF WITTENBERG
Pardon, excusez-moi, ce sont des mots. Est-ce qu'il y aura des professeurs…
OLIVIER VERAN
Les Français s'en rendent compte. Sur place, quand vous avez une école qui a investi avec de l'argent public pour changer la méthode d'enseigner, lorsque vous êtes capable de faire en sorte que les gamins aillent mieux, qu'ils n'aient plus la boule au ventre parce qu'on est capable de les faire travailler davantage ensemble à l'échelle d'une école, sur place on s'en rend compte. Et vous verrez que ça va faire des petits : il y a des milliers d'écoles qui sont rentrées dans ce dispositif, et qu'à la fin des fins on aura une vision nationale des changements qui auront été réalisés.
JEFF WITTENBERG
L'autre secteur qui change donc, c'est la santé que vous connaissez bien puisque vous avez été l'emblématique ministre de la Santé pendant la période du Covid. C'est un médecin comme vous, François BRAUN, qui cède la place à un haut fonctionnaire, Aurélien ROUSSEAU, l'ancien directeur de cabinet d'Élisabeth BORNE. Ça sera quoi sa première mission ? Désengorger le secteur des urgences qui n'arrivent plus à faire face dans de nombreux hôpitaux, ce que François BRAUN n'a pas réussi à faire ?
OLIVIER VERAN
Non. D'abord on ne peut pas, en quelques semaines ou en quelques mois ou en un an, transformer globalement l'accès aux soins. Par contre, on y travaille et on y travaille d'ailleurs depuis six ans : la suppression numerus clausus, l'augmentation de la télémédecine, de nouvelles missions pour les soignants paramédicaux. Aurélien ROUSSEAU connaît parfaitement ces sujet-là, je peux vous le dire, et c'est un accord de terrain puisqu'il a dirigé la plus grosse ARS de France en pleine crise Covid. C'est quelqu'un qui a aussi…
JEFF WITTENBERG
… les urgences débordées.
OLIVIER VERAN
Il insiste aussi sur les questions de solidarité et je l'ai vu lorsqu'il était à l'Arnaud ROUSSEAU, donc c'est quelqu'un qui aura – il va s'exprimer tout à l'heure lors de sa passation – mais il aura, j'en suis certain, à cœur de viser aussi la réduction des inégalités de santé, dont on a vu pendant la crise qu'elle entraînait des dégâts. Et donc sa feuille de route elle est claire : que les urgences tournent, que les tous les patients en affection longue durée aient accès à un soignant référent, et puis continuer de donner envie aux infirmières, aux aides-soignants de travailler dans les hôpitaux et en ville.
JEFF WITTENBERG
À propos d'Aurélien ROUSSEAU, vous avez vu une première polémique naître dès hier soir : l'épouse du nouveau ministre, Marguerite CAZENEUVE, est l'actuelle directrice déléguée de la Caisse nationale d'assurance maladie. Est-ce que ses fonctions sont compatibles avec celles désormais de son mari, ministre de la Santé ? Est-ce qu'on peut en quelque sorte diriger toutes ces institutions en famille ?
OLIVIER VERAN
D'abord moi à titre personnel, je ne considère pas qu'avoir partagé sa vie avec quelqu'un qui a la même passion professionnelle que vous et qui connaît très bien les politiques de santé soit un problème et une polémique. Les seules questions, elles portent sur le maintien des fonctions, et donc nous avons une autorité pour la transparence de la vie publique qui est une autorité indépendante, qui devra statuer. Marguerite CAZENEUVE connaît très bien les sujets effectivement de santé et de solidarité, elle travaille au service du public, elle n'est pas dans une entreprise privée donc il faudra regarder dans cette situation les décisions qu'il y a lieu de prendre.
JEFF WITTENBERG
Alors on le disait en début dans cette interview, le président de la République va s'exprimer au début du conseil des ministres tout à l'heure. Le cap des 100 jours est passé, c'est Emmanuel MACRON lui-même qui l'avait fixé. 100 jours d'apaisement, 100 jours au cours desquels la Première ministre avait pour mission d'élargir sa majorité. En toute franchise, est-ce que vous considérez – apaisement, élargissement de la majorité – que ces objectifs sont atteints ?
OLIVIER VERAN
Regardons deux secondes les faits. Moi, ça fait plus de 10 ans que je fais de la politique nationale. Je disais que j'étais société civile, vous l'aviez rappelé, j'avais un mandat aussi en 2012 de parlementaire. 49 textes de loi ont été adoptés par le Parlement en un an. 49 ! Je ne sais pas si vous imaginez ce que ça représente, ça fait un texte par semaine, une loi par semaine, dans un Parlement qu'on disait bloqué parce qu'on était en majorité relative. 49 textes, on n'est pas dans le record mais on n'est pas très loin.
JEFF WITTENBERG
Oui. On a plutôt entendu 49.3 que 49 textes, excusez-moi, de ce qu'on retient de cette première année.
OLIVIER VERAN
Vous avez peut-être beaucoup parlé de 49.3. Ce que je veux vous dire, c'est que beaucoup de textes ont été adoptés avec une majorité absolue, identifiée, dans un Parlement dans lequel nous n'avions qu'une majorité relative. Ça, c'est fondamental. Cette semaine, c'est un texte sur l'industrie verte. Ç'a été le vote à la majorité de la loi sur la justice. Ç'a été un vote quasi unanime sur la question…
JEFF WITTENBERG
Donc c'est la question de regarder les choses qui ne va pas selon vous.
OLIVIER VERAN
Je ne me permettrais pas de dire cela. Ce que je veux vous dire c'est que, alors que les conditions qui sont les conditions qu'ont choisies les Français, que nous respectons, ce sont celles d'une majorité relative, c'est-à-dire qu'on ne peut pas normalement adopter de loi à nous seuls, eh bien nous sommes capables d'aller à chaque fois identifier des majorités avec la gauche et avec la droite, et ce une fois par semaine depuis le début du quinquennat.
JEFF WITTENBERG
Une toute dernière question monsieur VERAN. Pourquoi le président est-il si économe de paroles et d'hommages à l'égard de sa Première ministre ? Il va rectifier le tir aujourd'hui ? Elle a été reconduite, on l'a appris par l'entourage du président ; lorsqu'il s'est exprimé cette semaine devant les députés, il n'a pas prononcé son nom une seule fois. Va-t-il en faire un petit peu plus que ce service minimum qu'on a observé ?
OLIVIER VERAN
Le président de la République, il a conforté sa Première ministre.
JEFF WITTENBERG
Il l'a conforté.
OLIVIER VERAN
Ça ne vous a pas échappé. Il a reconduit dans ses fonctions la Première ministre à l'issue des 100 jours et il a avec elle bâtit un gouvernement renforcé, c'est-à-dire qu'on est capable de se projeter vers l'avant et de regarder. Lorsque vous avez un nouveau ministre pour la Santé, un nouveau ministre pour l'Éducation, c'est que vous regardez les choses loin. Donc nous verrons encore une fois ce qu'aura à dire le président. Moi je suis très content de pouvoir continuer la mission et je remercie le président et la Première ministre pour leur confiance.
JEFF WITTENBERG
Merci beaucoup Olivier VERAN, porte-parole du Gouvernement. On vous entendra tout à l'heure pour ce premier compte-rendu du nouveau conseil des ministres.
OLIVIER VERAN
C'est vrai.
JEFF WITTENBERG
Bonne journée.
OLIVIER VERAN
À tout à l'heure.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 24 juillet 2023