Déclaration de Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé, sur les besoins de santé de la population, l'organisation du système de soins et des professionnels de santé et les modalités et techniques de prise en charge, Paris le 16 juin 2023.

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Intervenant(s) : 
  • Agnès Firmin Le Bodo - Ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Circonstance : Congrès des 60 ans de la Fédération française des masseurs-kinésithérapeutes rééducateurs (FFMKR)

Texte intégral

Monsieur le président de la FFMKR, cher Sébastien, 
Mesdames et Messieurs les masseurs-kinésithérapeutes,

Cher Sébastien, je tenais d'abord à vous remercier de m'accueillir ce matin pour ce congrès que je sais particulier puisqu'il marque LE 60EME ANNIVERSAIRE DE LA NAISSANCE DE LA FFMKR. Ce n'est pas rien ! Et je suis sincèrement ravie d'être à vos côtés pour souffler ces bougies.

En 60 ans, c'est peu dire que les besoins de santé de la population, l'organisation du système de soins et des professionnels de santé, les modalités et techniques de prise en charge ont changé ! Les transformations qu'a connu notre système ont été majeures, c'est un fait. Mais les défis qui sont devant nous LE SONT CERTAINEMENT ENCORE PLUS !

Impacts de la crise climatique, développement du numérique et de la donnée, impacts de la sédentarité… je ne vous ferai pas l'affront d'une liste à la Prévert de ces enjeux. Vous les connaissez tous et les vivez au quotidien. Le plus grand de tous ces défis est certainement le vieillissement de notre population et le développement des maladies chroniques.

Vous l'avez justement rappelé dans votre propos introductif.

C'est un fait connu de tous aujourd'hui, mais je pense que collectivement nous NE PRENONS PAS ENCORE complètement la mesure de ces transformations. La prise en charge des patients âgés, dépendants, polypathologiques va devenir un pan largement majoritaire de l'exercice de tous les professionnels de santé, et d'autant plus pour les masseurs-kinésithérapeutes.

Vous constituez un maillon essentiel de la prise en charge des patients et cette place va être de plus en plus importante.

Alors comment fait-on face à ces changements immenses ? En anticipant et en s'organisant au mieux pour répondre collectivement aux besoins actuels et futurs de nos concitoyens. C'est une responsabilité que nous partageons tous : Etat et Assurance Maladie, professionnels de santé de ville, professionnels hospitaliers, collectivités, usagers du système de santé, …

C'est tous ensemble, territoire par territoire, que nous trouverons les réponses adaptées à ces défis. J'ai déjà eu l'occasion de le dire à maintes reprises : il n'y a pas de baguette magique, il n'y a pas de solution unique qui nous permettra d'un coup d'un seul de répondre aux difficultés que nous connaissons déjà.

Ce ne sont pas des éléments de langage creux, c'est une CONVICTION PROFONDE !

Et c'est le sens de la REFONDATION du système de santé qu'a appelé de ses voeux le Président de la République. C'est aussi le sens de la création de mon Ministère : construire à partir des TERRITOIRES, AVEC les professionnels de santé, POUR les professionnels de santé et TOUS les professionnels de santé.

Nous ne partons pas de rien pour cela ! Depuis 2017, nous avons engagé des transformations profondes et importantes, qui ont des effets tangibles. Je crois que vous avez dit que « l'intendance », c'est-à-dire l'organisation des soins, a pris un retard considérable ! C'est vrai qu'il y a des choses qui pourraient avancer plus vite. J'entends les critiques. Mais permettez-moi d'être plus modérée et un peu plus optimiste.

J'ai fait plus de 100 déplacements depuis ma prise de fonction, il y a bientôt un an. Et croyez-moi, j'ai rencontré, en ville comme à l'hôpital, DES CENTAINES DE PROFESSIONNELS DE SANTÉ MOBILISÉS, qui se saisissent de tous les outils que nous mettons à disposition pour conduire cette transformation du système.

La suppression du numerus clausus, les investissements inédits de plusieurs dizaines de milliards du Ségur, la création des CPTS, des assistants médicaux, du SAS, le développement des protocoles de coopération et des délégations de tâches et à présent les nouvelles avancées telles que l'accès direct sont AUTANT DE SOLUTIONS QUI SE DEPLOIENT CONCRETEMENT dans les territoires.

Encore lundi, j'ai eu l'occasion d'annoncer UN PLAN « 4 000 MSP » qui doit nous permettre d'ouvrir près de 430 nouvelles MSP par an d'ici 2027. C'est en moyenne 260 000 patients vus en plus chaque année ! La coopération et la coordination entre les professionnels de santé, cela marche ! Vous l'avez vous-même souligné, seulement 10 % des kinés exercent en maisons de santé ou en centres de santé ou sont membres d'une CPTS. Je ne peux que VOUS ENCOURAGER A ALLER BEAUCOUP PLUS LOIN en matière de coopération inter-professionnelles.

J'annoncerai d'ailleurs bientôt de nouvelles mesures en faveur de la généralisation et du renforcement des CPTS suite aux conclusions du Tour de France des CPTS. C'est un très beau dispositif dont il nous faut collectivement nous emparer.

Vous savez par ailleurs mon engagement total en faveur du développement des partages de tâches et de compétences entre les professionnels. Et là encore, nous avançons ! Depuis 18 mois, ce sont plus de 20 nouvelles mesures de partages de compétences qui ont été adoptées. Et nous allons continuer dans ce sens. Même si je sais que vous souhaiteriez que cela aille plus loin et plus vite, ce sont de véritables avancées qu'il nous faut déployer, sans laisser personne de côté. VOUS NOUS APPELLEZ A DEPASSER LES CORPORATISMES, C'EST CE QUE NOUS FAISONS !

Si je suis résolument optimiste, je ne suis pas non plus angélique. Je constate tous les jours les difficultés que rencontrent les professionnels. Je sais qu'ils sont nombreux à souffrir, qu'un certain nombre d'entre eux vivent une véritable perte de sens. Oui, à de multiples égards, notre système va mal. Cette crise des vocations est préoccupante et problématique.

En particulier, je sais que votre profession souffre. Et l'absence de revalorisation financière cela y contribue de façon significative, en particulier en période d'inflation.

Je ne peux que regretter une nouvelle fois que les discussions autour de l'avenant 7 n'aient pu aboutir.

CET AVENANT AURAIT PU, ET AURAIT DU, CONSTITUER UNE VERITABLE AVANCEE ET UNE VERITABLE REVALORISATION pour la profession. C'était plus de 500 M€ qui étaient mis sur la table… Au regard de la pression de plus en plus forte sur nos finances publiques, j'ai eu l'occasion de le dire, il aurait été bienvenu d'accepter cette enveloppe inédite. Être ici, à vos côtés, me permet de saluer le travail très constructif et la position courageuse qui a été celle de la FFMKR à l'occasion de ces négociations.

L'impossibilité de faire aboutir ces négociations ne doit pas masquer les questions structurelles essentielles qui se posent pour votre profession et auxquelles nous devons collectivement apporter des réponses.

Nous le savons, vous le savez, nous devons apporter des réponses aux enjeux :

  • De démographie des kinés et de bonne répartition des professionnels
  • De la présence des kinés à l'hôpital qui est une problématique absolument majeure
  • Ou encore de la capacité d'intervention des kinés au domicile des patients

Si ces questions sont lourdes et complexes, nous ne pouvions toutefois pas laisser les kinés subir l'inflation sans réagir et c'est pour cela que nous avons demandé au Directeur Général de l'Assurance Maladie de rouvrir dans un calendrier resserré pour aboutir rapidement à des mesures en faveur du pouvoir d'achat des kinés. Je pense que vous aurez l'occasion d'en discuter.

En parallèle, d'autres travaux avancent et vont dans le sens des recommandations que vous avez formulées. Sans reprendre les 7 recommandations je tiens à vous dire a minima que :

  • Nous avançons sur le volet des prescriptions par les kinés, notamment sur le sujet des attelles qui me paraît évident.
  • Nous avons par ailleurs lancé de gros travaux de refonte de la définition des métiers et des décrets d'actes associés en commençant par celui des infirmiers. Notre objectif est d'enclencher par la suite toutes les professions.
  • Nous avançons aussi sur le sujet des ESCAP puisqu'une expérimentation va être lancée avec l'Assurance Maladie.
  • Je suis aussi de près les travaux engagés autour de la rénovation de la nomenclature, travaux dans lesquels vous êtes particulièrement investis

Je pourrais continuer comme cela encore longtemps mais j'ai déjà parlé trop longtemps. Et je ne vais pas transformer le tête-à-tête prévu avec vous, cher Sébastien, en un discours trop long et solo, où je ferai seule les questions et les réponses.

Je vous remercie pour votre accueil et je suis à votre disposition pour cet échange.


Source https://www.ffmkr.org, le 24 juillet 2023