Texte intégral
ALEXANDRE LE MER
Bonjour Clément BEAUNE.
CLEMENT BEAUNE
Bonjour.
ALEXANDRE LE MER
Nouveau mantra d’Emmanuel MACRON : de l’ordre, de l’ordre, de l’ordre. C’est qu’il en manque à ce point de l’ordre dans ce pays ?
CLEMENT BEAUNE
Non, mais vous savez, nous avons vécu une période qui a été évidemment extrêmement choquante, difficile, avec ces violences urbaines, ces émeutes dans certains cas. Et le Président a rappelé, en soutien d'ailleurs à nos forces de police, à nos sapeurs-pompiers, à nos policiers municipaux, à tous ceux qui ont contribué à lutter contre ces pillages ou ces violences, qu'il fallait tout simplement défendre un ordre républicain et juste, indispensable. Et puis, le Président a complété évidemment par un certain nombre d'autres chantiers sur l'école, sur les politiques que nous menons dans les quartiers, de rénovation urbaine, de lutte contre les discriminations. Ça ne résume pas tout, mais c'est un principe et un socle fondamental qui est aussi, tout simplement, celui de la vie commune. Et je rappelle à chaque fois parce qu'on oppose parfois et injustement les uns aux autres, que les premières victimes du désordre ou de la casse, je l'ai vu dans les transports publics, dans ces services publics essentiels qui ont été parfois saccagés dans certains quartiers ; ce sont les habitants des quartiers difficiles eux-mêmes et en premier. Donc l'ordre, ce n'est pas les uns contre les autres, c'est la condition de la vie ensemble et le Président l'a simplement rappelé, et dans la table, qu'on a vécu. C'était nécessaire.
ALEXANDRE LE MER
On peut douter de la portée du message d'Emmanuel MACRON si l'on en juge par les réactions de l'opposition. " Les mots n'impriment plus face à la gravité de la situation ". Voilà ce que dit Eric CIOTTI, président des Républicains. " Le Président, à côté de la plaque dans ses réponses aux révoltes. " Ça, c'est pour Manuel BOMPARD à La France insoumise, Clément BEAUNE.
CLEMENT BEAUNE
Oui, vous savez, je pense que ces phrases, elles auraient pu être écrites à l'avance. Parce que c'est le jeu, malheureusement, politique de dire " Ça ne va jamais. Les mots ne sont pas à la hauteur. Les réponses ne sont pas satisfaisantes. " Regardons les faits ; le Président l'a rappelé au-delà des mots. Il y a eu 45 000 forces de sécurité qui ont été mobilisées pour rétablir justement cet ordre. Il y a une politique d'investissement dans la rénovation urbaine de nos quartiers aussi qui est inédite et qui est indispensable et qu'il faut continuer. Donc si certains ne sont pas satisfaits par tel ou tel mot, qu'ils regardent les actes et qu'ils participent aussi à ce débat. On va avoir un budget qui a voté des crédits exceptionnels pour toutes ces politiques prioritaires. On a voté des lois pour donner les moyens à notre police d'agir. Il faut aussi, au-delà des petites phrases (qui je pense lassent un peu tous les Français y compris en vacances) avoir un peu de sens des responsabilités et un esprit constructif.
ALEXANDRE LE MER
Il passera au 49.3, le budget ?
CLEMENT BEAUNE
Ecoutez, je n’en sais rien. Je vois que les oppositions ont déjà dit…
ALEXANDRE LE MER
Emmanuel MACRON laisse la porte ouverte. Ce n'est pas terminé
visiblement.
CLEMENT BEAUNE
Mais c'est la porte ouverte par notre Constitution par définition. Et on sait que l'an dernier, cela était nécessaire (pas toujours d'ailleurs) pour adopter certains textes financiers ; pas tous. Et je le rappelle aussi parce qu'on a tendance à simplifier ou caricaturer, que l'essentiel des lois - presque 50 - qui ont été votées en un an de législature, plus que dans le mandat précédent en un an, ont été votées évidemment sans le recours à cet article 49.3. Mais il existe notamment pour les textes financiers. Moi, je ne suis pas en charge de ces textes directement, mais je souhaiterais qu'il soit adopté par une majorité sans besoin de cette procédure ; mais si on a besoin, c'est ainsi. En tout cas, la France aura besoin d'un budget le 31 décembre prochain, c’est un fait.
ALEXANDRE LE MER
De l'ordre, trois fois ; de l'ordre donc message contredit sinon a minima parasité par cette polémique. Clément BEAUNE, depuis hier, les propos du patron de la police nationale - Frédéric VEAUX - jugeant qu'un policier n'a pas sa place en prison avant un procès. Donc il prend la défense de ce policier en détention provisoire de la Bac de Marseille. On s'étonne quand même de la réponse en sourdine d'Emmanuel MACRON. Ça sème forcément le trouble, des propos pareils de la part du directeur de la police nationale dans la majorité.
CLEMENT BEAUNE
Mais le Président a rappelé, à juste titre, des principes.
ALEXANDRE LE MER
Nul n'est au-dessus de la loi.
CLEMENT BEAUNE
Oui, c'est essentiel et c'est son rôle d'ailleurs de garant des institutions. Et vous savez, quand il y a des moments d'émotion de tension, il faut rappeler des principes républicains très simples. D'abord la présomption d'innocence qui s'applique à tous, y compris évidemment au policier ou à ce policier de Marseille en particulier. Et puis, l'indépendance de la Justice qui doit travailler de manière sereine, sans pression, sans commentaires. Et je pense que c'est essentiel, a fortiori, quand on est un responsable politique (comme je le suis) de respecter ce principe de séparation des pouvoirs. Il ne faut pas dans ces moments, là aussi, de gravité, opposer dangereusement la police et la Justice. On a besoin... Ce sont les deux visages de la même République, des deux ensemble, de ces principes qui fonctionnent ensemble ; l'ordre que feront appliquer nos policiers et le respect des règles que garantit la Justice pour tous. Je pense que quand on s'astreint à cette discipline et à ce rappel des principes, on fait oeuvre utile.
ALEXANDRE LE MER
Le Président et la Première ministre, Clément BEAUNE, vous ont renouvelé leur confiance dans ce Gouvernement remanié. Vous allez en faire quoi, de cette confiance ?
CLEMENT BEAUNE
D'abord, vous avez raison de le rappeler parce que c'est un honneur, un privilège puisqu’on gagne cette confiance, j'espère. Mais je suis très honoré que le Président la République et la Première ministre... Maintenant ça fait trois ans que je suis membre du Gouvernement et un an pour les Transports. Je vais en faire d'abord un investissement essentiel au service de la lutte contre le changement climatique. Les transports, c'est 30% de nos émissions de gaz à effet de serre.
ALEXANDRE LE MER
Un tiers, oui, pour la France.
CLEMENT BEAUNE
C’est le premier secteur, c'est un tiers de notre consommation d'énergie. On investit dans les nouvelles mobilités, le vélo et d'autres, quand on peut. Eh bien, on raterait le coche si on ne faisait pas cela, de la transition écologique. Donc ma feuille de route, c'est très simple, c'est de participer à cette transition écologique, faire en sorte que – on le voit dans nos débats du quotidien - les transports, c'est sans doute le seul service public que tous les Français de tous âges utilisent plusieurs fois par jour, qu’il faut plus de moyens pour les transports publics, qu’il faut plus de moyens pour les trains.
ALEXANDRE LE MER
Les trains du quotidien ?
CLEMENT BEAUNE
Les trains du quotidien. Parfois on a manqué d’investissement ces dernières années, on a redressé la barre depuis maintenant un quinquennat, mais la Première ministre a annoncé par exemple cent milliards d’euros d’investissement dans le train, ça paraît énorme et très abstrait. Concrètement, ça veut dire faire baisser les prix du train cet été quand c’est encore trop cher pour beaucoup de nos concitoyens, ça veut dire acheter des TGV pour qu’il y ait beaucoup plus de places et que ce soit moins cher pour les familles les étés qui suivent. Ça veut dire mettre en place un Pass pour les jeunes l’été prochain qui permet, là aussi, d’avoir des trains moins chers.
ALEXANDRE LE MER
C’est trop cher et les Français le disent, le répètent, Clément BEAUNE, les prix du billet de train, il y a encore du travail pour faire préférer le train. Je voyais cette étude de Greenpeace, voyager depuis la France vers une métropole européenne, ça coûte toujours deux fois plus cher en train qu’en avion ?
CLEMENT BEAUNE
Oui. Alors, les lignes qui sont prises en compte sont parfois des lignes qui n'existent même pas en train. Donc, évidemment, c'est beaucoup plus cher quand vous faites Marseille-Londres, donc vous voulez échanger deux ou trois fois de train que quand vous prenez l'avion. Mais c'est un fait que je veux dire, malheureusement, l'avion coûte assez peu d'argent parce que d'abord, il nécessite assez peu d'infrastructures, une ligne de grande vitesse, c'est dix à vingt millions d'euros du kilomètre à construire. Donc, c'est extrêmement cher et c'est d'ailleurs pour ça que nous subventionnons le train. Il faut faire payer sans doute un peu plus le juste prix environnemental à l’avion.
ALEXANDRE LE MER
On taxe le kérosène davantage ?
CLEMENT BEAUNE
Oui. Par exemple, vous savez, c'est une discussion que nous avons lancée, nous, la France, au niveau européen qui est en cours. J'espère que dans les prochains mois il pourrait y avoir effectivement une sorte de juste taxe environnementale qui fait payer le kérosène à l'avion. Et puis, il ne s'agit pas d'opposer les uns aux autres, il s'agit surtout de faire en sorte que le train soit moins cher.
ALEXANDRE LE MER
Une taxe progressive peut-être aussi pour les grands voyageurs ? Plus on prend l’avion, plus on paye ?
CLEMENT BEAUNE
Alors, il ne faut pas des choses trop compliquées, parce qu’à la fin, vous savez, ça ne marche pas. Mais, en revanche, je lui ai dit, il ne faut pas par exemple que les billets d'avion soient davantage taxés, pas pour le plaisir de la taxe, mais pour financer justement l'investissement dans notre système ferroviaire, si on veut plus de lignes à grande vitesse dans quelques endroits, en France où aujourd'hui, il n’y a que l'avion, il faut investir. Je suis d’ailleurs surpris parfois que les écologistes soient à la fois contre l'avion et contre les lignes à grande vitesse. Nous, on assume les lignes à grande vitesse, on ferme certaines lignes aériennes quand il y a une alternative en train. Et puis, surtout, c'est très simple et très basique, si vous voulez que le train soit moins cher, il faut qu'il y ait plus de trains en circulation. Ça veut dire qu’à la SNCF, on l'aide à le faire avec des milliards d'euros d'investissement, on va acheter plus de trains.
ALEXANDRE LE MER
Oui parce qu’elle a fait rouler moins de TGV qu'il y a dix ans, la SNCF ?
CLEMENT BEAUNE
Oui parce qu’il y a eu la crise Covid, parce qu'on a commandé des trains à des grands industriels français comme ALSTOM ou européen et que ces trains sont parfois livrés un peu en retard. Et donc, à partir de l'année prochaine, il y aura plusieurs dizaines de trains nouveaux qui vont arriver, notamment les TGV. Je l'assume aussi, sur certains cas, dans certains cas, il faut de la concurrence parce que ça fait rouler plus de trains, plus de places en circulation, c'est donc des prix moins élevés. On le voit sur la ligne Paris-Lyon et un mode de transport plus écologique. Et puis, il faut des offres plus compétitives, notamment pour les jeunes.
ALEXANDRE LE MER
Alors, vous avez une bonne nouvelle pour les jeunes voyageurs, Clément BEAUNE ?
CLEMENT BEAUNE
Oui. On a commencé cet été, je l'ai dit, on a par exemple encore plus de 100 000 billets Intercités qui sont à 19 euros, qui sont accessibles à tous. Et puis, on a lancé, pour les jeunes, c'était une expérience qui a très bien marché, le Pass franco-allemand qui permet à des jeunes de moins de 27 ans de voyager gratuitement pendant tout l'été. Il y a encore 5 000 Pass qu'on remet en jeu aujourd'hui pour que des jeunes apprentis, des jeunes étudiants boursiers qui n’ont souvent pas les moyens, puissent voyager en Europe pour que ça ne doit pas être un privilège réservé à quelques-uns cet été. Et on continuera ses aventures, si je peux dire et ces aides européennes pour les jeunes l'été prochain et les étés qui suivent et on va continuer aussi, je le disais avec un Pass qui facilite la vie notamment les jeunes pour circuler partout sur nos trains régionaux ou sur nos trains nationaux comme les Intercités, l'été prochain. Tout ça, c'est du pouvoir d'achat et c'est de l'écologie concrète.
ALEXANDRE LE MER
En quelques mots, Clément BEAUNE, vous avez été heurté par certains propos tenus après la nomination de votre collègue, Gabriel ATTAL, à l'Education nationale pour prendre la suite de Pap NDIAYE.
CLEMENT BEAUNE
Oui. On a eu des propos et malheureusement relayés par d'anciens responsables politiques, je ne les citerai même pas, ils sont tout simplement dégueulasses, abjects, qui ont visé Gabriel ATTAL à qui j'apporte tout mon soutien et qui visent. J'en ai parfois moi-même été victime beaucoup de responsables politiques, à raison de l'orientation sexuelle, de leur religion, leur couleur, de peau…
ALEXANDRE LE MER
Philippe de VILLIERS ?
CLEMENT BEAUNE
Philippe de VILLIERS, vous avez raison de le dire…
ALEXANDRE LE MER
Qui a tweet de dire, " c’est le passage du woke au LGBT ".
CLEMENT BEAUNE
Oui. C'est insupportable parce que ça résume les gens à une forme d'identité qui ne l'ont pas revendiqué. Ça donnerait l'impression que quand on a une caractéristique, orientation sexuelle, religion, origine, quelle qu'elle soit, on est enfermé dans une forme de communauté. On peut défendre des droits et défendre l'égalité, c'est mon combat absolu quand j'étais ministre des Affaires européennes, je l’ai mené parfois difficilement en Europe, je le mènerai toujours dans la vie politique et ces propos doivent être condamnés par tous : c'est insupportable, abject, dégoûtant, ça n'a pas sa place en politique.
ALEXANDRE LE MER
Merci Clément BEAUNE.
CLEMENT BEAUNE
Merci beaucoup.
Source : Service d’information du Gouvernement, le 26 juillet 2023