Interview de M. Stanislas Guerini, ministre de la transformation et de la fonction publiques, à Public Sénat le 11 septembre 2023, sur le séisme au Maroc, l'inflation, la conférence sociale, le pouvoir d'achat des fonctionnaires, la vie politique, l'immigration, le recrutement des enseignants, le projet de loi de modernisation de la Fonction Publique et les élections européennes.

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Média : Public Sénat

Texte intégral

ORIANE MANCINI
Bonjour Stanislas GUERINI.

STANISLAS GUERINI
Bonjour.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'être notre premier invité de la saison. Merci d'être avec nous.

STANISLAS GUERINI
Merci de m'avoir invité.

ORIANE MANCINI
Ministre de la Transformation et de la Fonction publiques. On est ensemble pendant 20 minutes pour une interview en partenariat avec la presse régionale. Bonjour Fabrice VEYSSEYRE-REDON.

FABRICE VEYSSEYRE-REDON 
Bonjour Oriane, bonjour Stanislas GUERINI.

ORIANE MANCINI
Fabrice du groupe EBRA, tous les journaux régionaux de l'Est de la France. On va évidemment commencer par l'actualité au Maroc, Stanislas GUERINI. Plus de 2 000 morts dans ce séisme qui a touché le Maroc vendredi soir. Que va faire, que peut faire aujourd'hui la France pour aider le Maroc ? Alors qu'on a appris hier soir que la France ne figurait pas sur la liste des pays dont le Maroc sollicite l'aide.

STANISLAS GUERINI
D'abord, une pensée pour tous nos amis Marocains, pour nos concitoyens aussi français puisque quatre Français ont perdu la vie à cette heure, 200 blessés. C'est un drame d'une ampleur tragique évidemment. Et évidemment, la France est aux côtés, se tient prête aux côtés du Maroc. Dans les premières minutes, les autorités françaises l'ont indiqué, nous sommes prêts à venir aider. Beaucoup de forces, d'ailleurs de la société civile viennent aider, des sapeurs-pompiers volontaires l'ont fait immédiatement, des associations, des entreprises. Les autorités françaises sont prêtes. Le Maroc est souverain et c'est bien normal ainsi mais il faut avant tout penser à une catastrophe humanitaire et donc être prêt à venir en aide.

ORIANE MANCINI
Mais comment vous expliquez que le Maroc ne sollicite pas l'aide de la France ? La crise est si profonde entre les deux pays ?

STANISLAS GUERINI
Vous savez, je pense que d'abord ce n'est pas le temps pour ça. Vraiment très sincèrement, c'est une catastrophe humanitaire. La première priorité, c'est que le Maroc puisse organiser les secours, puisse venir prêter main forte aux disparus aussi parce que dans les moments où on est en train de parler, il y a encore ces opérations-là qu'ils sont en train de se passer. Je crois que ce n'est pas un moment pour parler de diplomatie internationale ; c'est un moment simplement pour être prêt à venir aider pour en tirer ensuite des conséquences. Vous savez, le peuple français est extrêmement proche du peuple marocain. Hier, j'étais à des forums des associations, on voit bien à quel point beaucoup de nos concitoyens sont parfois franco-marocains et avait le cœur au Maroc. Je crois que c'est le cas pour tous les responsables politiques.

ORIANE MANCINI
Justement, est-ce que ce n'est pas une claque pour la France que le Maroc refuse son aide ?

STANISLAS GUERINI
Non, le Maroc a décidé d'ouvrir à quatre pays pour l'instant ; je suis assez convaincu qu'ils continueront à ouvrir à d'autres pays pour venir aider tout simplement. La ministre des Affaires étrangères, Catherine COLONNA, aura l'occasion de s'exprimer ce matin. En tout cas, il n'y a pas d'ambiguïté ; la France, à la minute où le Maroc le souhaitera, sera à ses côtés pour pouvoir venir aider.

ORIANE MANCINI
De quelle manière précisément ? Est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur le dispositif qui est prêt ?

STANISLAS GUERINI
Avec tous les moyens et au fond, la science française pour savoir venir porter secours. Il y a des moyens qui sont extrêmement importants, qui sont toujours mobilisés au moment où nos voisins en ont besoin. Ce sera le cas à nouveau. Mais je pense que la ministre des Affaires étrangères donnera plus de précisions sur ces moyens-là.

ORIANE MANCINI
On va parler d'un autre sujet, c'est l'inflation qui touche évidemment les Français au porte-monnaie. Est-ce qu'il faut une aide pour les carburants, comme le demande hier François BAYROU dans les colonnes du Parisien ?

STANISLAS GUERINI
Vous savez, au fond on a fait le quoi qu'il en coûte de l'inflation ces derniers mois. Ça portait des résultats ; la France a eu un niveau d'inflation bien moindre que l'ensemble de ses voisins européens. Mais il faut maintenant aussi retrouver le chemin de finances publiques qui sont assainis puisque sinon on va tous payer ça demain et ce sont nos enfants qui paieront des décisions d'aujourd'hui. Donc il faut la responsabilité, il faut faire ce que fait Bruno LE MAIRE, ce que fait le Gouvernement auquel je participe c'est-à-dire mettre la pression.…

ORIANE MANCINI
Mais Bruno LE MAIRE ne dit pas la même chose que François BAYROU.

STANISLAS GUERINI
Mettre la pression sur les acteurs.

ORIANE MANCINI
Bruno LE MAIRE dit "pas d'aide supplémentaire de l'État."

STANISLAS GUERINI
Vous savez, depuis le début, nous avons à chaque fois mis la pression. J'entends parfois des responsables politiques qui disent qu'on vient faire la manche, mais tout ça, c'est parfaitement ridicule. Nous avons obtenu des résultats. On met la pression sur les acteurs industriels pour réussir à parvenir à maîtriser petit à petit l'inflation. Il faut faire la même chose sur les carburants ; c'est ce que nous faisons.

ORIANE MANCINI
Mais vous n'êtes pas d'accord avec François BAYROU. Ce n'est pas à l'État d'aider, c'est aux entreprises de faire un effort.

STANISLAS GUERINI
Je crois que dans le moment dans lequel nous sommes, c'est aux entreprises et c'est cet effort-là que nous leur demandons avec déjà des résultats. TOTAL a annoncé un effort ; il faut qu'il puisse le poursuivre. Je crois que c'est ça la bonne voie pour maîtriser l'inflation aujourd'hui.

ORIANE MANCINI
Fabrice, sur cette question de la hausse des prix et des salaires.

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Une conférence sociale qui est annoncée pour octobre ; est-ce qu'il faut s'attendre à une nouvelle hausse de salaire, notamment sur les bas salaires dans la fonction publique ?

STANISLAS GUERINI
Vous savez, je vais y venir mais la question qui est traitée par cette conférence sociale, c'est l'ensemble des branches qui sont au-dessous des minima sociaux. Et on sait qu'un certain nombre de manches ne jouent pas suffisamment le jeu. Et donc, je trouve extrêmement positif qu'on puisse, là aussi, demander aux acteurs de prendre leurs responsabilités. C'était un résultat immédiat sorti de la réunion du Président de la République, de la Première ministre, avec l'ensemble des forces politiques. C'était un point de consensus. Donc il y aura cette conférence sur les employeurs qui ne jouent pas le jeu. Ce n'est pas le cas de la fonction publique ; vous le savez, on a pris avant l'été des décisions importantes pour relever les salaires dans la fonction publique. Évidemment aujourd'hui, par un agent public, c'est bien normal, il est rémunéré en dessous du SMIC. Mais vous avez raison, la question de l'inflation telle qu'on l'avait aujourd'hui, elle frappe en particulier les plus basses rémunérations dans notre pays et c'est le cas aussi pour les fonctionnaires de notre pays. Donc c'est pour ça que moi, j'assume de faire porter des efforts supplémentaires, des efforts particuliers pour celles et ceux qui, dans la fonction publique, sont les moins bien rémunérés. C'est pour ça qu'on a concentré nos efforts sur les bas salaires. C'est la raison pour laquelle on versera au mois d'octobre une prime de pouvoir d'achat, une prime MACRON de la fonction publique. Ce sera de 800 euros brut à 300 euros brut jusqu'aux fonctionnaires qui gagnent 3 250 euros brut de rémunération ; c'est important. Elle sera versée en une fois pour les fonctionnaires d'État, pour les fonctionnaires de la fonction publique hospitalière dont 90% d'entre eux au mois d'octobre et 10% d'entre eux au mois de novembre en fonction des séparateurs.

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
On peut discuter salaire parce que là, on parle de prime ?

STANISLAS GUERINI
Moi, j'ai d'abord pris des décisions qui vont s'appliquer. Certaines se sont appliquées dès le mois de juillet, certaines (je vous le dis) sur la prime de pouvoir d'achat au mois d'octobre, d'autres et l'effort continuera puisqu'au mois de janvier 2024, il y aura à nouveau une augmentation de la rémunération fixe des fonctionnaires puisque nous donnerons des points d'indice supplémentaires c'est-à-dire qu'on augmentera la rémunération fixe des fonctionnaires. Et ça, ça sera d'application en janvier 2024. Mais tout ça a été annoncé et parfaitement lisible. Ce que nous faisons aussi (et c'est le rendez-vous que j'ai avec les organisations syndicales), c'est de mettre en place des conditions pour mieux discuter, pour mieux négocier les augmentations de salaires, les évolutions de rémunérations ; au fond mettre en place une forme de négociations annuelles obligatoires pour la fonction publique. C'est le rendez-vous que j'ai donné aux organisations syndicales. Pas d'ambiguïté, ce n'est pas pour remettre en cause les décisions qui ont été prises, annoncées et mises en pratique avant l'été mais c'est pour fixer un cadre de discussion. Et je crois que ça serait effectivement utile pour toute la fonction.

ORIANE MANCINI
Un mot sur cette prime ; vous le dites, elle sera versée au mois d'octobre et vous l'avez dit, pour les fonctionnaires d'État, pour les fonctionnaires dans l'hospitalière. Est-ce qu'il n'y a pas une injustice que les fonctions publiques territoriales n'en bénéficient pas ?

STANISLAS GUERINI
Alors, je ne crois pas. Une des demandes de la fonction publique territoriale, des employeurs territoriaux, c'est de garder des marges de manœuvre. Et vous avez déjà commenté avec moi le fait que quand on prend des décisions sur l'augmentation du point d'indice par exemple, il n'y a pas le choix pour tous les employeurs territoriaux et ça s'applique d'autorité, si je puis dire, à l'ensemble des employeurs. Donc ils nous ont demandé de faire différemment, que la part qui s'applique de façon automatique soit un peu moindre et qu'ils puissent avoir la main. Est-ce que ça veut dire que les employeurs territoriaux ne verseront pas de prime ? La réponse est non.

ORIANE MANCINI
Mais vous leur demandez de la verser ?

STANISLAS GUERINI
On leur a évidemment donné la possibilité de le faire en fonction des situations. Certains avaient déjà fait des efforts indemnitaires, plutôt de nature... des primes donc dans leurs collectivités par exemple. Et donc on n'a pas voulu imposer une décision d'en haut. Ce sera à chacune des collectivités de mener cette politique solennelle avec un peu plus de marge de manœuvre.

ORIANE MANCINI
Donc en totale autonomie ou il y aura un contrôle de votre part ?

STANISLAS GUERINI
Il y a un cadre qui est fixé. Il a été fixé ; les décrets ont été pris dès cet été. Donc les employeurs territoriaux sont absolument libres de verser cette prime mais ils le feront dans un esprit de confiance et de responsabilité. Vous savez, moi, l'ensemble des réformes, l'ensemble de ce que je souhaite porter pour la fonction publique, c'est aussi de redonner des marges de manœuvre, de redonner au fond un espace de responsabilité aux employeurs territoriaux. Je pense que c'est comme ça qu'on pourra avancer.

ORIANE MANCINI
On va revenir sur la fonction publique dans quelques instants mais vous avez parlé de cette rencontre entre Emmanuel MACRON et les chefs de partis politiques. Le chef de l'État qui avait donné jusqu'à hier aux chefs de partis politiques pour lui répondre. Éric CIOTTI a fait une réponse, on peut le dire, en forme d'ultimatum à Emmanuel MACRON. Il réclame des garanties sur quatre points : le pouvoir d'achat, l'insécurité, l'immigration, la liberté de la presse.

ORIANE MANCINI
Est-ce que vous avez d'autres choix que de répondre favorablement aux républicains et de céder à leurs injonctions ?

STANISLAS GUERINI
Vous savez, d'abord, je pense qu'on ne va pas avancer qu'avec des lignes rouges, il faut que chacun puisse effectivement trouver des voies pour faire émerger des compromis. C'est exactement le sens de la démarche du Président de la République. Elle est très sincère. Notre pays a vécu avant l'été une crise très profonde, une fissure dans l'unité nationale. Les émeutes urbaines, ce n'est pas quelque chose qui va se retourner comme ça, ça a marqué notre pays. Et donc notre responsabilité, c'est de tendre la main aux uns et aux autres, de le faire en franchise, de façon très sincère, et donc pour pouvoir faire émerger des…

ORIANE MANCINI
Mais Eric CIOTTI, il a saisi la main, il a répondu au chef de l'État, mais il répond de manière très ferme. Qu'est-ce que vous en pensez ?

STANISLAS GUERINI
Mais moi, je crois que c'est maintenant la responsabilité du Gouvernement, du chef de l'État, de mener des propositions, de faire des propositions. Il y a, me semble-t-il, je vais y venir…

ORIANE MANCINI
Mais là, il y en a, des propositions, sur la table de sa part. Est-ce que vous allez y répondre ? Est-ce que vous avez d'autres choix que d'y répondre favorablement ?

STANISLAS GUERINI
Mais bien entendu. Et les sujets qui sont abordés l'ont été par le chef de l'État d'abord. L'immigration notamment, une thématique qui me semble très importante et sur laquelle on peut trouver des voies de consensus qui est celle de l'efficacité de notre action locale. Comment faire, au fond, vous m'en parliez à l'instant, pour donner aux acteurs de terrain plus de marges de manœuvre pour pouvoir prendre des initiatives, faire… ? C'est l'objet aussi du Conseil national de refondation dans sa version territoriale, de ce qu'il peut se passer dans le champ de l'éducation, de ce qui peut se passer sur la santé. Je crois que ce champ-là d'action, c'est un champ sur la déconcentration, sur la décentralisation, où on peut trouver, y compris avec nos oppositions, des voix de consensus. Il a demandé… Le Président de la République a demandé à LA Première Ministre de faire des propositions précises sur cette thématique-là. Je pense qu'on pourra avancer, y compris avec nos oppositions.

ORIANE MANCINI
Mais ça veut dire que vous avancez sur vos thématiques, pas celles d'Éric CIOTTI. Je vais en citer quelques-unes des demandes d'Éric CIOTTI. Il y a la baisse des taxes sur les carburants, vous avez déjà un peu répondu ; la suppression des allocations aux parents d'élèves défaillants ; le rétablissement des peines planchers ; un plan d'urgence de construction de places de prison ; des plafonds migratoires votés par le Parlement. Est-ce que vous pourriez le suivre là-dessus ?

STANISLAS GUERINI
Sur tous ces sujets-là, nous avançons, et pas que dans les discours. Nous sommes le Gouvernement qui construit des places de prison, en l'occurrence, et ce n'est pas tout le temps facile de trouver les emplacements, y compris quand ce sont des maires d'opposition qui parfois, au niveau national, demandent des constructions de places de prison, de pouvoir avancer sur ces sujets-là. Donc aucun de ces sujets n'est tabou, nous allons faire des propositions, avancer ou continuer d'avancer.

ORIANE MANCINI
Et vous pouvez lui dire oui sur ces propositions ?

STANISLAS GUERINI
Ben le cas, par exemple, sur l'immigration. Et juste, nos concitoyens nous demandent de trouver des solutions, nous demandent d'avancer efficacement sans idéologie. Et donc bien sûr, nous continuerons à avancer là-dessus.

ORIANE MANCINI
Ils vous demandent un référendum sur l'immigration. Pour vous, c'est oui ?

STANISLAS GUERINI
Moi, personnellement, je crois que ce n'est pas le sujet qui est le plus pertinent à présenter en référendum. Il faut pouvoir, je le disais à l'instant, avancer efficacement, sans idéologie mal placée, si je puis dire, sur ces sujets-là, avec pragmatisme. Je ne crois pas que soit le sujet principal ou le sujet le plus pertinent.

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Pourquoi pas ? Ça fracture la société.

STANISLAS GUERINI
Trop clivant, c'est un sujet qui est complexe et qui crée effectivement un clivage important. Je crois que ce que nous demandent nos concitoyens, c'est de trouver des solutions immédiates, de l'efficacité dans l'action publique, que ça soit d'ailleurs pour faire appliquer la loi, que ce soit parfois pour des thématiques comme l'intégration de celles et ceux qui viennent dans notre pays, qui travaillent. Donc je crois que c'est plutôt par l'action, nous avons commencé à proposer un projet de loi, il a été adopté au Sénat, en commission. Il va falloir continuer à pouvoir avancer. Le Président de la République n'a pas fermé de porte, il a raison. Et c'est maintenant dans les prochaines semaines que nous pourrons faire des propositions plus concrètes et faire avancer ces sujets.

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Excusez-moi, ce n'est pas le meilleur sujet pour un référendum ? C'est quoi ? C'est la fin de vie, le meilleur sujet ?

STANISLAS GUERINI
Ça pourrait, par exemple, être un beau sujet de consultation, ce sont des thématiques d'engagements qui sont liées aussi à ce que notre pays a vécu. Mais il faut qu'on puisse pouvoir poursuivre cette discussion-là, c'est la proposition que le chef de l'État a faite aux différents partis politiques.

ORIANE MANCINI
Il y a une ligne rouge pour les Républicains, c'est la question de la régularisation des travailleurs dans les métiers en tension. Est-ce que pour vous, il est inconcevable que ce sujet ne figure pas dans le texte final ?

STANISLAS GUERINI
Moi, j'ai une conviction très forte, c'est que cette mesure, elle serait bonne pour notre pays, elle partirait du réel, au fond, de la situation telle qu'elle est. Je suis frappé de voir à quel point elle fait consensus d'ailleurs chez les acteurs qui sont au plus près du terrain. Le patronat est largement favorable à ce type de mesure, les employeurs qui voient bien que la situation, c'est qu'aujourd'hui, un certain nombre de personnes sont dans notre pays, travaillent, s'intègrent et sont dans des situations… Ils sont…

ORIANE MANCINI
Mais est-ce que vous soutiendriez, vous, un texte dans lequel cette mesure ne figure pas ?

STANISLAS GUERINI
Moi, je ne pense pas qu'on va commencer ce débat en mettant de côté nos convictions. Notre conviction, c'est que cette mesure, elle est bonne ; et donc moi, je souhaite qu'on puisse avancer et pouvoir la porter.

ORIANE MANCINI
Quitte à faire une croix sur un accord avec la Droite ?

STANISLAS GUERINI
Exactement, vous le voyez, ce n'est pas une question de référendum, c'est exactement le champ, la discussion parlementaire légitime que nous pourrons avoir. Mais moi, je crois que cette mesure, elle est utile, et donc je souhaite qu'on puisse continuer à la porter, oui.

ORIANE MANCINI
Il y a une initiative politique entre l'aile gauche de la Macronie et une partie des députés de Gauche, de la NUPES, sur ce sujet pour porter justement cette mesure. Est-ce que cette tribune, vous auriez pu la signer si vous étiez parlementaire ?

STANISLAS GUERINI
Moi, je ne suis pas parlementaire. En l'occurrence, je suis membre du Gouvernement. Et je vous dis sans ambiguïté que je suis favorable à cette mesure.

ORIANE MANCINI
Mais vous l'aurez signée ?

STANISLAS GUERINI
Enfin, c'est ça la clarté du débat politique.

ORIANE MANCINI
Mais vous vous seriez allié avec des députés de Gauche ?

STANISLAS GUERINI
La question, c'est de trouver surtout des alliances politiques pour voter. Moi, ce que je souhaite, c'est qu'on puisse trouver un équilibre qui permette de dégager une majorité pour pouvoir voter ce texte-là.

ORIANE MANCINI
Mais vous comprenez les députés macronistes qu'ils s'allient avec des députés de Gauche sur cette mesure ?

STANISLAS GUERINI
Je note encore une fois que ce travail politique de construire une majorité, il a été fait par Gérald DARMANIN. Puisqu'au Sénat, en commission, le texte que nous avons présenté qui contient cette mesure a été adopté. C'est donc quand on est un peu les lignes rouges de côté parfois. L'idéologie, côté… sur ces sujets-là et qu'on avance avec pragmatisme, on peut trouver des majorités. Et donc c'est mon souhait, à gauche comme à droite qu'on puisse, sur ce texte important, nécessaire, avancer et dégager des majorités.

ORIANE MANCINI
François BAYROU hier disait qu'il n'était pas, je le cite, pour qu'on fasse de l'immigration un sujet qui allume le feu. Il dit que c'est un texte utile mais pas essentiel. Vous êtes d'accord avec ça ?

STANISLAS GUERINI
Je dirais que c'est un texte nécessaire. Aujourd'hui, il ne faut pas faire semblant de se dire qu'il n'y a pas de sujet, que tout fonctionne très bien, que notre système d'intégration d'immigration, que notre capacité à faire appliquer la loi fonctionne, donc je crois que c'est un texte qui est vraiment très largement nécessaire.

ORIANE MANCINI
Au point d'utiliser le 49.3 pour le faire passer ?

STANISLAS GUERINI
Et c'est la raison pour laquelle je pense que notre responsabilité, c'est d'avancer de façon pragmatique, peut-être pas de passer tout un temps de débat. Je ne me perds pas dans les détails aujourd'hui avec vous sur les modalités du référendum sur l'immigration, mais on voit bien qu'elles seraient extrêmement complexes et peut-être qu'elles nous feraient perdre du temps sur un sujet sur lequel il est nécessaire d'avancer plutôt rapidement avec les instruments de la Constitution, le 49.3 en est un. Mais c'est toujours la même chose. Si on se dit par nature qu'on va forcément utiliser le 49.3, ou qu'on va forcément ne pas utiliser le 49.3, je crois qu'on fait une erreur.

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Il n'y a qu'une seule…

STANISLAS GUERINI
Il faut d'abord essayer de bâtir des majorités, et ensuite prendre nos responsabilités. Le 49.3, c'est ça, au fond, c'est d'engager sa responsabilité…

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Au Gouvernement, vous êtes sûr qu'il n'y a qu'une seule ligne, en matière d'immigration ? Il n'y a pas celle de Gérald DARMANIN, et puis celle de membres du Gouvernement plutôt de Gauche comme le cas… ?

STANISLAS GUERINI
Non, je ne crois pas. Et d'ailleurs, ce texte a été construit par plusieurs ministres, c'est une dimension de travail qui est très importante. Olivier DUSSOPT a pris une part importante dans la préparation de ce projet de loi. Il y a une ligne, une seule ligne, que celle de l'efficacité. Je pense qu'il ne faut pas se disperser dans des considérations trop idéologiques sur un sujet où c'est avant tout du pragmatisme et d'efficacité que nous demandent nos concitoyens.

ORIANE MANCINI
Fabrice, une question justement sur la fonction publique, on y revient.

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Oui, parce que vous êtes ministre de la Fonction Publique et la Transformation de la Fonction Publique. Pour commencer, déjà sur l'enseignement, une enquête ce matin indique qu'il manque encore un enseignant au minimum dans un établissement sur deux aujourd'hui en France. C'est le cas ? Vous le confirmez ?

STANISLAS GUERINI
Je confirme qu'il n'y a pas encore tous les enseignants puisque dans le nombre de places au concours, on n'a pas encore trouvé preneur absolument, mais que la situation s'améliore, c'était davantage le cas l'année dernière, il manquait plus d'enseignants, et que nos efforts sont absolument historiques pour redonner de l'attractivité au métier, sur les conditions de travail, sur des efforts salariaux qu'aucune majorité n'avait engagé auparavant. Et donc nous, notre responsabilité, c'est qu'il y ait des enseignants devant chaque classe. Et je veux saluer le personnel de l'Éducation nationale, enseignants, les chefs d'établissements qui, dans cette rentrée, ont trouvé toutes les solutions pour qu'il y ait effectivement un professeur devant chaque classe. Il n'y avait pas de classe où il n'y avait pas de professeur pour assurer la rentrée avec les élèves. Donc nous trouvons des solutions, nous recrutons. Je veux le dire d'ailleurs…

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Les recrutements, comment ça se passe ? L'année dernière, il vous manquait 6000 personnes, je crois, en 2022.

STANISLAS GUERINI
C'était un chiffre qui était bien inférieur cette année, je crois que c'était plutôt autour de 3000 enseignants manquants.

ORIANE MANCINI
3000.

STANISLAS GUERINI
Donc vous voyez bien que les efforts payent, il y a plus d'enseignants, que d'ailleurs, les enseignants qui sont recrutés de façon contractuelle était déjà, pour 90 % d'entre eux, il faut souligner ce chiffre, des enseignants qui étaient devant les classes l'année dernière. Donc quand j'entends parfois que ce sont des enseignants sans aucune expérience, sans aucune préparation, sans aucune formation qu'on fait venir devant des classes, il faut très largement relativiser ce chiffre. Ce sont des enseignants expérimentés, et nous avançons en confiance avec eux en redonnant l'attractivité au métier. C'est le cœur, moi, de mon combat pour la Fonction Publique de façon plus large. C'est vrai que c'était particulièrement visible sur les enseignants, mais il n'y a pas de fatalité. Moi, je crois qu'on peut redonner de l'attractivité au métier si on fait appel de la bonne des manières. C'est-à-dire, au fond, de travailler sur les enjeux de fiche de paie et de travailler aussi sur le sens au travail, sur les conditions dans lesquelles nos fonctionnaires, nos agents publics peuvent exercer leurs métiers.

ORIANE MANCINI
Et vous avez d'ailleurs annoncé un projet de loi de modernisation de la Fonction Publique. Il sera présenté quand ?

STANISLAS GUERINI
Mon objectif, c'est de le travailler et de le présenter d'ici la fin de l'année pour qu'ensuite, on puisse examiner et qu'il soit mis au calendrier parlementaire. Mais je veux le construire.

ORIANE MANCINI
Début 2024 au Parlement, c'est votre objectif ?

STANISLAS GUERINI
On verra pour le calendrier parlementaire mais je veux qu'en tout cas, il soit prêt à la discussion. Je veux le construire comme je le fais depuis le premier jour en discussion avec l'ensemble des parties prenantes, avec évidemment les organisations syndicales. Je les retrouverai dès le mois de septembre pour discuter de l'ensemble des sujets qui sont devant nous. On parlait des sujets salariaux.

ORIANE MANCINI
La semaine prochaine pour l'article ?

STANISLAS GUERINI
Et évidemment, j'aborderai avec eux les thématiques de transformation, de réformes. Parce que je crois qu'elles sont nécessaires. Je l'ai dit, il faut à la fois travailler à mieux protéger nos agents publics, mieux les rémunérer, répondre aux questions de pouvoir d'achat, répondre aux questions aussi de protection physique. Mais il faut continuer à réformer notre fonction publique pour davantage mettre en avant, récompenser les compétences, le mérite. Permettre davantage de mobilité dans la fonction publique, pour moi c'est le coeur du projet que je suis en train de travailler.

ORIANE MANCINI
Marine LE PEN a fait sa rentrée politique hier. Elle a fustigé la politique d'Emmanuel MACRON. Elle parle d'un effondrement généralisé du pays, d'une déliquescence des services publics. Et la politique d'Emmanuel MACRON, pour elle, est un mélange de marketing et de malhonnêteté. Que lui répondez-vous ?

STANISLAS GUERINI
Au fond, pas grand-chose parce que c'est toujours la même rengaine. Elle fait, depuis des années, la même rentrée politique avec exactement la même rengaine c'est-à-dire celle d'un défaitisme pour notre pays qui est absolument, pour moi, hallucinant. On a l'impression quand on écoute ces responsables politiques que tout est par terre, que rien ne va, que rien ne marche. Parfois je me demande même s'ils aiment notre pays. Le sport national pour eux c'est de le critiquer, c'est de pointer les difficultés. C'est leur seul fonds de commerce. Donc, je n'étais pas très surpris de voir une rentrée politique sous exactement la même rengaine, toujours et toujours, celle du défaitisme.

ORIANE MANCINI
Mais elle a tort sur tout ? Notamment sur les services publics, puisque c'est un sujet dont vous traitez particulièrement. Il n'y a pas de problème ?

STANISLAS GUERINI
Quand on voit des difficultés... Mais je n'ai jamais dit ça, jamais. Quand on pointe des difficultés, forcément on peut aussi mettre le doigt sur des points qui dysfonctionnent mais ça n'est pas à notre pays de croire que tout est noir, que rien ne fonctionne, que nos services publics sont à bas partout. Nous, nous ne commentons pas les choses, nous agissons pour les améliorer, pour rétablir ce qui mérite de l'être, pour remettre de l'humain aussi sur les territoires. C'est nous qui ouvrons 2 600 maisons France services. C'est nous qui revalorisons les professeurs du pays. C'est nous qui réinvestissons dans la Justice.

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Des sous-préfectures ?

STANISLAS GUERINI
Oui, bien sûr.

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Vous en avez ouvert six et vous allez continuer ?

STANISLAS GUERINI
Le président de la République a indiqué qu'il souhaitait encore amplifier ce mouvement-là. Nous réouvrons des services publics dans les sous-préfectures. J'irai dans quelques semaines inaugurer une Maison France service à Lannion dans une sous-préfecture. Vous voyez, cet investissement-là au-delà des discours de défaite, c'est nous qui sommes en train de le faire. Et je crois que ce n'est que ça qu'attendent nos concitoyens.

ORIANE MANCINI
Un dernier mot, elle fait des européennes une élection de mi-mandat ; est-ce que vous, en Renaissance, vous êtes prêt pour ces européennes ?

STANISLAS GUERINI
Oui bien sûr, c'est une élection qui est très importante.

ORIANE MANCINI
Avec qui ?

STANISLAS GUERINI
Pardon, pas pour en faire un rendez-vous de mi-mandat ou d'en faire un rendez-vous politique politicien si je puis dire ; c'est parce que c'est très important pour l'Europe et que nous, notre engagement pour l'Europe est depuis le premier jour infaillible et pas là d'une façon eurobéate pour pouvoir changer les choses au niveau européen. Nous avons le groupe le plus influent au niveau européen. Donc si les Français veulent continuer cette politique au niveau européen mais en changeant l'Europe, eh bien, ce rendez-vous sera très important.

ORIANE MANCINI
Mais avec qui pour porter cette campagne ?

STANISLAS GUERINI
Nous le verrons. Les partis politiques et la majorité présidentielle diront dans quelques semaines qui sera notre tête de liste.

ORIANE MANCINI
Vous souhaitez que ce soit qui, vous ?

STANISLAS GUERINI
Le plus important, c'est le projet aujourd'hui européen et donc nous choisirons les personnalités. Il y a beaucoup de personnalités, je ne me prononcerai pas avec vous ce matin. Il y a beaucoup de personnalités qui d'abord ont l'Europe au cœur, ont agi à tous les niveaux pour l'Europe. Et donc notre majorité ne manque pas de personnalités qui sont capables de porter notre projet européen.

ORIANE MANCINI
Merci Stanislas GUERINI.

STANISLAS GUERINI
Merci à vous.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'avoir été notre invité ce matin. Merci Fabrice VEYSSEYRE-REDON. À lundi prochain ?

FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Bonne semaine et à lundi prochain.

STANISLAS GUERINI
Et bonne rentrée à vous.

ORIANE MANCINI
Merci beaucoup, merci.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 20 septembre 2023