Texte intégral
ORIANE MANCINI
Notre invité politique ce matin, c'est Olivier DUSSOPT. Bonjour.
OLIVIER DUSSOPT
Bonjour.
ORIANE MANCINI
Merci beaucoup d'être avec nous. Ministre du Travail, du Plein-emploi et de l'Insertion. On est ensemble pendant 20 minutes, pour une interview en partenariat avec la Presse régionale, représentée par Fabrice VEYSSEYRE-REDON du groupe EBRA, les journaux régionaux de l'Est de la France. Bonjour Fabrice.
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Bonjour Oriane, bonjour Olivier DUSSOPT.
OLIVIER DUSSOPT
Bonjour.
ORIANE MANCINI
Il y a évidemment beaucoup de dossiers à voir avec vous, Olivier DUSSOPT, mais d'abord, l'actualité c'est évidemment Israël et ces attaques terroristes du Hamas qui ont fait plus de 1 000 morts. Une Française a été tuée, c'est ce qu'a annoncé le Quai d'Orsay, donc sont portés disparus. Est-ce que le gouvernement ce matin a plus d'informations sur ces Français ?
OLIVIER DUSSOPT
Non, et ce n'est pas à moi de le dire il de commenter. Il faut imaginer que des familles attendent, des familles attendent des nouvelles de proches, n'en ont pas, et quand on est face à un tel désespoir, une telle angoisse tellement légitime, il faut être très très précautionneux. Donc le ministère des Affaires étrangères, ma collègue et Catherine COLONNA, donne les informations dont le gouvernement dispose, et nous devons, par respect pour les familles, faire attention à ne nourrir aucune confusion. Mais, ce qui s'est passé ce week-end est dramatique, et quand on voit les réactions ici ou là, heureusement très convergentes à l'exception de la France insoumise et de l'extrême gauche, il faut d'abord rappeler les choses et montrer qu'il n'y a pas de confusion justement. Israël est agressé et le Hamas est l'agresseur. Et il faut dire les choses comme cela, parce que ça évite toute forme de relativisme qui est absolument insupportable.
ORIANE MANCINI
Ce qu'a fait la France insoumise.
OLIVIER DUSSOPT
Bien évidemment.
ORIANE MANCINI
Ils relativisent.
OLIVIER DUSSOPT
Bien évidemment, bien évidemment. Et j'ai même vu des déclarations d'autres groupuscules d'extrême gauche expliquer soutenir, y compris le choix, le choix de la violence et le choix de la lutte armée. C'est…
ORIANE MANCINI
Notamment le NPA.
OLIVIER DUSSOPT
Bien sûr. C'est au-delà de…
ORIANE MANCINI
Il faut des sanctions, pour vous ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est au-delà de l'insupportable, c'est une forme de dégoût qui m'ont saisi en réalité.
ORIANE MANCINI
Il faut des sanctions ? Est-ce que c'est de l'apologie du terrorisme ou pas ?
OLIVIER DUSSOPT
Ce n'est pas à moi de qualifier les choses. Ce n'est pas à moi de porter ces qualifications. Ce que je dis c'est que c'était à la fois écoeurant et inacceptable.
ORIANE MANCINI
Sur la France insoumise, est-ce qu'il y a une forme d'antisémitisme dans cette réaction ou pas ?
OLIVIER DUSSOPT
Parfois on se demande si, et la Première ministre l'a dit hier, on se demande ce qui se cache derrière un antisionisme revendiqué, n'est pas une forme d'antisémitisme. On peut se poser la question. Ce que je vois surtout, c'est qu'à chaque fois qu'il y a violence, à chaque fois qu'il y a blessure, à chaque fois qu'il y a utilisation de la violence comme outil politique, il y a une ambiguïté de la France insoumise.
ORIANE MANCINI
Vous connaissez, vous connaissez bien Jean-Luc MELENCHON, vous venez du Parti socialiste…
OLIVIER DUSSOPT
Je ne le connais pas très bien, parce que je ne l'ai pas beaucoup côtoyé au Parti socialiste…
ORIANE MANCINI
... comme lui. Est-ce que vous comprenez ses réactions ?
OLIVIER DUSSOPT
Je ne comprends aucune des positions qui légitime les actions armées, aucune.
ORIANE MANCINI
Un dernier mot là-dessus, puisque Gérald DARMANIN a annoncé la sécurisation des lieux de la communauté juive, est-ce que vous craignez une importation du conflit dans notre pays ?
OLIVIER DUSSOPT
Le ministère de l'Intérieur et le ministre en particulier sont mobilisés pour éviter cela, et évidemment qu'il faut veiller à ce qu'il n'y ait aucune forme d'importation, aucune forme de contagion, de violence des territoires…
ORIANE MANCINI
Est-ce que ça vous inquiète ?
OLIVIER DUSSOPT
... des territoires israéliens vers d'autres territoires en France, comme ailleurs.
ORIANE MANCINI
Vous le redoutez ?
OLIVIER DUSSOPT
Il faut toujours être très vigilant. Il faut être vigilant et c'est une bonne mesure que de garantir la sécurité de nos concitoyens de confession juive et de garantir les lieux, la sécurité des lieux de culte juifs.
ORIANE MANCINI
Vous nous avez parlé de la réaction du NPA, vous dites que ce n'est pas à vous de qualifier l'apologie du terrorisme, mais est-ce qu'il faut dissoudre le NPA ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est, vraiment, enfin, je vous redis mon écoeurement et mon dégoût de ce type de de position, et je pense qu'il faut toujours être extrêmement vigilant quand on est sur ces terrains-là. Les questions de dissolution de mouvements, d'associations, sont des questions qui sont instruites de manière contradictoire par le ministère de l'Intérieur, en Conseil des ministres, ce n'est pas à un ministre pris isolément, si je puis dire, d'apporter une réponse définitive que ça.
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Et qu'on a vu que ce n'était pas si simple que ça avec les Soulèvements de la Terre. On pouvait vouloir et ne pas pouvoir.
OLIVIER DUSSOPT
Oui, puisque là on parlait d'un réseau plus que d'un mouvement parfaitement constitué.
ORIANE MANCINI
Allez, on va parler de vos dossiers, ils sont nombreux, on commence par le projet de loi immigration que vous portez avec Gérald DARMANIN, il sera examiné dans un mois ici au Sénat ; Gérald DARMANIN qui hier dans le Parisien s'est dit à titre personnel se ranger à la position des Républicains et des Centristes, qui veulent transformer l'AME en AMU, en Aide Médicale d'Urgence, et il le dira devant les sénateurs, c'est ce qu'il a dit. C'est un problème pour vous ?
OLIVIER DUSSOPT
Non, ce n'est pas un problème, parce que ça nourrit le débat, mais il a aussi dit que c'était une position personnelle, et la Première ministre a dit hier que sur cette question de l'AME elle souhaitait qu'un bilan, que des propositions d'amélioration soient faites, et en confiant une mission à deux hommes très connus, très respectés, si je puis dire, chacun dans leur camp politique, Claude EVIN et monsieur STEFANINI.
ORIANE MANCINI
Ce n'est pas une manière de ne pas trancher, ça, de la part d'Elisabeth BORNE ?
OLIVIER DUSSOPT
Non, je ne crois pas, je pense que c'est bien d'avoir des avis et de pouvoir éclairer un débat. Alors on a, dans l'AME on a des questions de santé publique, on a des questions d'humanité sur le fait que quand quelqu'un est malade, quand quelqu'un est blessé on le soigne. On sait aussi, et c'est un débat récurrent à l'occasion de chaque projet de loi de financement de la Sécurité sociale, que des questions sont parfois posées sur ce qu'on appelle le panier de soins, qui relève de l'AME, c'est-à-dire la nature des soins qui sont apportés à toute personne sur le territoire, quelle que soit sa situation. Et donc je j'attends une forme d'impatience…
ORIANE MANCINI
Mais vous, quelle est votre position ?
OLIVIER DUSSOPT
Je pense qu'il faut réussir à conjuguer à la fois l'intérêt de santé publique, c'est-à-dire la prévention des épidémies, le fait aussi d'être dans un pays qui a un devoir d'humanité, on soigne les gens qui sont malades et qui sont blessés, et veiller aussi à ce qu'il n'y ait aucun mauvais usage de cette question de l'AME. On a eu de longs débats…
ORIANE MANCINI
Mais, est-ce que de la transformer en AMU, ce n'est pas trouver cet équilibre ?
OLIVIER DUSSOPT
Je ne sais pas, ça dépend ce qu'on met derrière l'AMU. Laissons la mission de messieurs EVIN et STEFANINI aller au bout de son travail.
ORIANE MANCINI
Mais vous, vous souhaitez qu'on y revienne ou pas ? Et si jamais, eux, ils concluent qu'il faut transformer l'AME en AMU, vous soutiendrez cette position ?
OLIVIER DUSSOPT
Attendez. D'abord on va peut-être voir quelles sont les conclusions, avant de dire si on les soutient. C'est peut-être un bon principe en termes de temporalité.
ORIANE MANCINI
Mais ça vous a surpris cette interview de Gérald DARMANIN ?
OLIVIER DUSSOPT
Non, pas véritablement.
ORIANE MANCINI
Il vous en avait parlé avant ?
OLIVIER DUSSOPT
Nous nous connaissons bien tous les deux, je connais ses positions, il connaît les miennes aussi, et nous en avons beaucoup que nous partageons notamment sur les questions de régularisation par le travail, sur la place de…
ORIANE MANCINI
Oui, ça on va y revenir, mais se désolidariser de la position du gouvernement à un mois de l'examen du texte, pour vous ce n'est pas un problème ?
OLIVIER DUSSOPT
Il a dit que c'était une position personnelle, et c'est bien comme ça.
ORIANE MANCINI
Mais il l'a dit quand même.
OLIVIER DUSSOPT
Il l'a dit quand même.
ORIANE MANCINI
Et donc, qu'est-ce qui va se passer quand vous serez tous les deux dans l'hémicycle ?
OLIVIER DUSSOPT
Il a plutôt l'habitude de dire les choses. L'hémicycle…
ORIANE MANCINI
Ça va être chacun sa position ?
OLIVIER DUSSOPT
L'hémicycle c'est dans un mois. Donc ça nous laisse le temps des concertations et ça nous laisse le temps de la mission de messieurs EVIN et STEFANINI.
ORIANE MANCINI
Sur les métiers en tension, Fabrice.
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Oui. Vous défendez le titre de séjour métiers en tension, dans le cadre de la loi immigration, vous estimez qu'il faudra en délivrer combien pour que l'économie tourne avec fluidité, et dans quels domaines plus particulièrement ?
OLIVIER DUSSOPT
Aujourd'hui, on a déjà quelques chiffres que nous connaissons. Il existe la fameuse circulaire Valls, circulaire de 2012, et qui autorise les préfets lorsqu'ils le jugent utile, fondé, à délivrer des admissions exceptionnelles au séjour, soit pour des motifs familiaux et sociaux, soit pour des motifs économiques et professionnels. La délivrance d'admissions exceptionnelles au séjour pour des motifs économiques et professionnels, sur les 10, 12 dernières années, c'est en moyenne 8 à 8 500 par an.
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Et ça n'a pas bougé en 12 ans ?
OLIVIER DUSSOPT
Ça a un petit peu augmenté à la sortie de la crise Covid, lorsqu'il y a eu une très forte reprise d'activité économique, mais on est autour de 8 à 8 500…
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Avec des domaines plus particuliers ?
OLIVIER DUSSOPT
Non, parce que la circulaire prise par Manuel VALLS en 2012, ne cible pas les métiers en tension ou les métiers qui ne le seraient pas, et c'est aux préfets de juger, en opportunité, de manière discrétionnelle.
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
D'accord. Aujourd'hui, vous avez une photographie ?
OLIVIER DUSSOPT
Aujourd'hui, nous savons quels seront les métiers en tension, et nous savons les métiers dans lesquels la part des étrangers, non communautaires, parce qu'on parle d'étrangers non communautaires, puisqu'au sein de la Communauté européenne, de l'Union européenne, il y a une liberté de circulation et une liberté de travail. La part des étrangers non communautaires c'est un peu moins de 3 % de l'emploi total en France. Et puis il y a quelques métiers où c'est beaucoup plus important, je pense par exemple aux commis de cuisine, je pense aux femmes et aux hommes de ménage, beaucoup des femmes, nous le savons, où on peut atteindre 24 à 25 % d'étrangers non communautaires dans ces secteurs-là. Nous, ce que nous proposons, avec cet article 3, c'est de dire que des hommes et des femmes qui sont sur notre territoire depuis plus de 3 ans, c'est ainsi que le texte est écrit, et peut-être qu'il sera amendé par le Sénat, nous verrons le débat, mais que des hommes et des femmes sur notre territoire depuis plus de 3 ans, qui travaillent légalement, c'est important de le préciser, qui ont un contrat de travail et qui travaillent dans des métiers en tension où nous avons besoin de main d'oeuvre, puissent avoir accès à une régularisation. Il va y avoir un débat au Sénat, je connais la position du groupe LR, qui est défavorable à cet article, j'ai entendu…
ORIANE MANCINI
Mais c'est pire que défavorable, ils disent que c'est la ligne rouge.
OLIVIER DUSSOPT
J'ai entendu que d'autres groupes, à gauche et au centre, évidemment le groupe de la majorité présidentielle, y sont favorables, donc il faut que le débat puisse avoir lieu. J'ai toujours dit que je restais ouvert à toutes les solutions, mais que je souhaitais qu'on puisse trouver une solution pour régulariser la situation d'hommes et de femmes qui sont essentiels à notre économie, qui sont sur notre territoire et qui travaillent, quand bien même ils n'ont pas de titre de séjour.
ORIANE MANCINI
Mais, est-ce qu'une de ces solutions ça peut être de faire passer cette mesure via une circulaire ?
OLIVIER DUSSOPT
Une circulaire, un décret, c'est ce qu'on appelle la partie réglementaire plutôt que législative. J'ai dit que je ne fermais aucune porte, je pense que le titre que nous proposons, le titre de séjour que nous proposons, a l'immense avantage de confier au Parlement la définition des critères et la possibilité d'un contrôle d'une évaluation et de décider année après année si ce titre doit être reconduit ou pas. Ça donne au Parlement plus de visibilité, plus de pouvoir de contrôle. Mais j'insiste sur le fait que nous parlons là de travailleurs qui sont d'un travail légal, dans un contrat de travail. Bien souvent, ce sont des gens qui ont signé un contrat de travail quand ils avaient un titre de séjour, et puis ont changé de catégorie, ils avaient un titre de séjour pour vie étudiante et puis ils ont demandé un titre de séjour pour des motifs économiques, qu'ils n'ont pas eu, ou alors ils n'ont pas pensé à faire le renouvellement. Il y a 1 000 situations différentes, et ça peut arriver à tous les employeurs. Donc derrière cette volonté de donner un droit au séjour, je le répète, pour des personnes qui sont là depuis longtemps, qui travaillent, il y a à la fois la volonté de sécuriser la situation de ces travailleurs, mais il y a aussi la volonté de sécuriser la situation de leur employeur. Parce qu'employer quelqu'un qui est en situation... avec un contrat de travail, je ne parle pas de travail dissimulé, mais employer quelqu'un en situation irrégulière, ce n'est pas autorisé.
ORIANE MANCINI
Et la circulaire, cela peut être le bon compromis.
OLIVIER DUSSOPT
Je ne sais pas si c'est ce compromis-là qui se dessinera, j'ai dit que je restais ouvert à toutes les portes. Je répète…
ORIANE MANCINI
Mais quelles sont les autres portes ?
OLIVIER DUSSOPT
Je répète que le titre de séjour que nous proposons et cet article 3, permet au Parlement de déterminer les critères et donc de garantir une application égale de la règle sur tout le territoire, avec un contrôle parlementaire.
ORIANE MANCINI
Ça on a bien compris, mais quelles sont les autres portes, parce que les LR ne veulent pas de cet article dans le texte.
OLIVIER DUSSOPT
Il y aura un débat au Sénat et il ne vous a pas échappé, à moi non plus, qu'il n'y a pas que le groupe LR au Sénat et que d'autres groupes, y compris dans la majorité sénatoriale, ont des positions qui peuvent être différentes…
ORIANE MANCINI
Donc vous espérez que les LR soient mis en minorité sur cet article ?
OLIVIER DUSSOPT
Mais, il y a un mois devant nous, un mois. En politique, c'est long un mois, vous le savez, et donc ça laisse le temps à la discussion, et ça laisse le temps à des concertations.
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Vous ne lâcherez pas, on sent bien que sur ce sujet vous ne lâcherez pas, vous avez besoin de cette immigration, là concrètement, vous ne lâcherez pas.
OLIVIER DUSSOPT
La majorité présidentielle y est attachée, les groupes de l'Assemblée...
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Mais vous, en tant que ministre du Travail ?
OLIVIER DUSSOPT
Mais bien sûr, et ce n'est pas une question de, pardon mais ce n'est pas une question de besoin, c'est une réalité. C'est une réalité et on parle d'hommes et de femmes qui travaillent aujourd'hui. Il n'y a pas d'appel d'air, ce ne sont pas des nouveaux arrivants, ce sont des hommes et des femmes qui sont là depuis longtemps sur le territoire…
ORIANE MANCINI
Oui mais les LR disent qu'il va y avoir un appel d'air parce que cela va pousser d'autres gens à venir.
OLIVIER DUSSOPT
Non, il ne peut pas y avoir d'appel d'air, parce que, enfin pardon, mais c'est un peu technique, mais il faut quand même rappeler ce que c'est. Pour qu'il y ait appel d'air, il faudrait que quelqu'un qui n'habite pas dans l'Union européenne, qui habite en Asie, en Afrique, en Amérique du Sud, vienne en France, en connaissant le dispositif, se dise « je vais passer sur le territoire 3 ans, peut-être plus si le texte est amendé, en situation clandestine, et 8 mois avant la fin je trouverai un emploi dans un secteur en tension, sachant que la liste des métiers en tension est révisée tous les 2 ou 3 ans », ça fait quand même beaucoup de paris, beaucoup de projections, beaucoup de prévisions, ça ne peut pas être un appel d'air. Et le texte prévoit aussi…
ORIANE MANCINI
Donc c'est quoi ? C'est une position politique de la part des LR pour vous ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est évidemment une position politique, et la politique c'est très bien, c'est noble, et chacun a ses positions. Ce n'est pas une question de de crédit ou de discrédit. Mais nous avons un mois devant nous…
ORIANE MANCINI
Mais c'est quoi, de la surenchère pour ne pas voter le texte sans rien, sans contrepartie ?
OLIVIER DUSSOPT
Laissons le débat se dérouler. Laissons le débat se dérouler, et c'est aussi le sens du Parlement. Le texte a été examiné par la Commission des lois du Sénat, qui a fait le choix de ne pas supprimer cet article 3, et donc il y aura un débat en séance.
ORIANE MANCINI
Mais est-ce que l'AMU, pour le coup on y revient, c'est dans la balance ? Est-ce que Gérald DARMANIN dit : allez, on vous donne le point sur l'AMU, mais en échange, vous lâchez sur les métiers en tension ?
OLIVIER DUSSOPT
Si les négociations, si les compromis en politique se réduisaient à « je te donne un point, tu me donne un point », ça se saurait et la vie est bien plus compliqué que ça.
ORIANE MANCINI
On va parler de la Conférence sociale. Vous allez recevoir avec Elisabeth BORNE, syndicats et patronat. Hier on a vu dans La Tribune Dimanche, Marylise LEON pour la CFDT et Sophie BINET pour la CGT, côte-à-côte. Est-ce que cette unité syndicale qui perdure après la réforme des retraites, c'est une mauvaise nouvelle pour le gouvernement ?
OLIVIER DUSSOPT
Non, c'est un état de fait, c'est une situation, et l'unité peut aussi, sur des sujets comme ceux de la Conférence sociale, peut être faite malgré des positions du différentes.
ORIANE MANCINI
Ça ne les met pas en position de force par rapport à vous ?
OLIVIER DUSSOPT
Ça n'est pas, par exemple trahir un secret que de dire que la CGT revendique une indexation générale les salaires sur l'inflation et que la CFDT considère que ça relève du dialogue social dans les branches et les entreprises. Et donc c'est la démonstration que ces expressions parfois unies de l'intersyndicale en l'occurrence de deux syndicats importants, ce sont les deux premiers, la CFDT et la CGT, ça ne veut pas dire unité des positions. Donc nous allons aller vers cette Conférence sociale. Avec Elisabeth BORNE nous commençons à recevoir les partenaires sociaux à partir de cette mi-journée et tout au long de la semaine, pour chacun les voir dans des réunions dites bilatérales, pour préparer, voir quelles sont leurs volontés, ce qu'ils attendent de cette Conférence sociale en termes de point de sortie de débouchés…
ORIANE MANCINI
Comment ça va se passer, ce sera de l'écoute ou vous allez donner des pistes vous aussi ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est un dialogue, donc c'est à la fois de l'écoute de positions et de propositions, c'est de dire comment nous on voit les choses. On souhaite avec, et nous souhaitons avec la Première ministre que cette Conférence puisse s'articuler dans son travail autour de trois grands thèmes, à la fois la question de l'évolution des salaires et de tout ce qui concerne le dialogue social, à la fois sur le dialogue de branches, sur ce qu'on appelle les classifications, parce que bien souvent dans les conventions collectives le dialogue a lieu pour permettre aux conventions d'être en conformité avec le droit, c'est-à-dire de ne pas avoir des niveaux inférieurs au Smic. Au 1e mai, quand nous avons revalorisé le Smic, sur les 170 conventions observées, 145 se sont retrouvées avec un niveau conventionnel inférieur au Smic. Ça ne veut pas dire que les gens qui sont payés moins que le Smic, le Smic est obligatoire et c'est très bien, par contre depuis le 1e mai les branches négocient pour revoir leur niveau de rémunération, et à l'heure où nous parlons il reste 60 branches sur 570, qui sont en non-conformité. C'est beaucoup, mais ça veut dire qu'il y en a 85 qui ont fait le travail depuis le 1e mai.
ORIANE MANCINI
Mais qu'est-ce que vous allez faire avec ces 60 ? Parce que les syndicats vous demandent de les sanctionner, ces branches, de ces entreprises qui ne sont pas au niveau du Smic.
OLIVIER DUSSOPT
L'essentiel des 60 a ouvert des négociations, et d'ailleurs il y a un point qui est assez contre-intuitif, on parle beaucoup de ce dialogue social de branches, quand on regarde les 15, 20 dernières années, on s'aperçoit que grosso modo, c'est une moyenne, il y a entre 15 et 20 branches qui ont un niveau conventionnel inférieur au Smic, donc qui sont en non-conformité depuis plus de 18 mois, c'est-à-dire durablement. Aujourd'hui vous allez 7 ou 8 branches seulement, c'est toujours trop, et tant qu'il y en aura une c'est une de trop, mais vous avez 7 ou 8 branches seulement qui sont dans cette situation que plus de 18 mois, et d'ailleurs le Parlement, en juillet 202, a voté des outils pour nous aider à accélérer l'ouverture des négociations, on est passé de 90 à 45 jours. Donc on va travailler sur ce qui va...
ORIANE MANCINI
Mais sinon, qu'est-ce que vous faites, vous attendez que ça se fasse et que et qu'elle négocie où il va y avoir des pressions ? Par exemple la CFDT dit qu'il faut qu'il y ait plus d'exonérations de cotisations sociales…
OLIVIER DUSSOPT
Alors, c'est un débat que nous avons avec la CFDT, et moi je peux comprendre leur argument, et sauf que j'ai déjà dit et je ne suis pas le premier, ce n'est pas moi qui l'ai dit comme ministre du Travail pour la première fois, tous mes prédécesseurs l'ont dit avant moi. Dire qu'on supprime les exonérations de cotisations dans les branches pour les entreprises qui appartiennent à une branche, en non-conformité, ça pose deux problèmes : un problème de droit, parce qu'on on a une décision du Conseil constitutionnel de la deuxième moitié des années 2000, de 2009 je crois, qui dit qu'une entreprise ne peut pas être sanctionnée pour la faute de quelqu'un d'autre, et en l'occurrence lorsque vous êtes une entreprise, vous respectez la convention collective, vous pouvez même payer plus cher, mieux payer vos salariés que ce que prévoit la convention collective, pourquoi est-ce qu'on vous retirerait le bénéfice d'exonérations, parce que la branche à laquelle vous appartenez, et les représentants de la branche n'ont pas mené la négociation ? C'est la branche qui est en non-conformité, et vous entreprise, à titre individuel, vous seriez sanctionnée à cause d'un défaut de la branche. Ça ne tient pas en droit.
ORIANE MANCINI
Donc non.
OLIVIER DUSSOPT
Donc la seule solution c'est de regarder entreprise par entreprise, et là que techniquement ça devient extrêmement plus compliqué. Donc je sais que la CFDT va porter ce débat dans la Conférence sociale et que nous en reparlerons, mais ce que j'ai dit…
ORIANE MANCINI
Donc, pour vous, ce n'est pas tenable.
OLIVIER DUSSOPT
J'ai déjà eu l'occasion de dire que juridiquement et techniquement c'était très compliqué. Il y a d'autres sujets que nous allons aborder dans la Conférence sociale, parce que j'évoquais le dialogue social et la question de la conformité et de déclassification, mais nous voulons aussi pouvoir aborder les effets d'un certain nombre d'outils qui sont des outils très utiles, vous avez évoqué les exonérations, c'est utile pour la compétitivité. Il y a la prime d'activité qui a beaucoup progressé depuis 15 ans et qui représente aujourd'hui pour un salarié célibataire, sans enfant, au Smic, environ 220 €, c'est 16 % du revenu, c'est une forme de socialisation…
ORIANE MANCINI
Donc là-dessus vous ne touchez rien ou est-ce qu'il faut revoir le cumul bas salaires primes d'activité ?
OLIVIER DUSSOPT
Ah, il faut voir comment rendre toujours plus attractif, un, la reprise d'emploi, et deux, permettre aussi à des salariés, soit on en bas de grille, c'est-à-dire plutôt au niveau du Smic, soit autour de 1,6 Smic, c'est-à-dire la sortie des exonérations, que ce soit avantageux pour l'entreprise et pour les salariés de pouvoir progresser dans sa carrière.
ORIANE MANCINI
Donc vous allez revoir des choses sur la prime d'activité, et sur ce cumul.
OLIVIER DUSSOPT
Nous sommes ouverts à ce que des améliorations soient apportées, et je crois que les partenaires sociaux le sont aussi, mais ne préemptons pas, ne préjugeons pas de la fin du débat. Et puis il y a un troisième point que nous voulons voir examiner, qui est la question du temps partiel subi. Parce que les bas salaires c'est à la fois le taux horaire, le salaire horaire que votre employeur vous verse, mais c'est aussi le nombre d'heures que vous travaillez. Et il y a des temps partiels subis, souvent des femmes, et je dis cela, parce que ces trois ateliers, la question du dialogue social et des classifications qui renvoient à la nature des branches, sur la question des exonérations, sur la question du temps partiel subi, à chaque fois, c'est très transversal aux trois points, il y a la question de l'égalité entre les femmes et les hommes d'un point de vue salarial, qui est tout à fait essentiel, et que nous voulons voir traiter en chacun des trois ateliers.
ORIANE MANCINI
Alors justement, sur l'égalité salariale hommes/femmes, est-ce que là vous allez prendre des mesures, est-ce que par exemple vous allez accélérer la transposition de la directive européenne, qui impose la transparence salariale ?
OLIVIER DUSSOPT
Alors, nous avons déjà un index, vous le savez, qui marche bien, qui est évidemment perfectible, et la directive que vous évoquiez, que nous devons transposer, prévoit encore plus de transparence, prévoit des critères un peu plus forts, un peu plus denses que ceux qui sont prévus dans…
ORIANE MANCINI
Mais vous allez la transposer quand ?
OLIVIER DUSSOPT
Le calendrier n'est pas arrêté, pour dire les choses très tranquillement, très directement.
ORIANE MANCINI
Il y a jusqu'à juin 2026, ça pourrait être avant ?
OLIVIER DUSSOPT
Et nous donnons jusqu'à juin 2026, j'espère que ça sera avant, bien sûr…
ORIANE MANCINI
Mais avant quand ? Ça pourrait être début 2024 ?
OLIVIER DUSSOPT
Si nous avons la possibilité de le faire avec le Parlement, il faudra le faire, évidemment.
ORIANE MANCINI
Plus tôt, c'est votre souhait.
OLIVIER DUSSOPT
Bien sûr. Oui, bien sûr.
ORIANE MANCINI
On va parler…
OLIVIER DUSSOPT
Mais vous savez, je veille aussi et je fais dans la suite de ma prédécesseure, Elisabeth BORNE, je veille à ce que d'autres textes puissent faire l'objet d'une adoption pleine et parfaite, je pense aux différentes conventions internationales, notamment sur les violences sexistes et les discrimination sexistes ou sexuelles, ou encore sur l'égalité salariale.
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Mais vous évoquiez la question du retour à l'emploi, je voudrais vous interroger sur le cas des Vosges avec NESTLE WATERS qui va licencier 170 personnes, du fait notamment de l'épuisement des sources. Aujourd'hui le bras de fer se poursuit entre les partenaires sociaux et NESTLE WATERS. Que peut faire l'Etat ? Est-ce que face à un géant comme celui-là vous pouvez intervenir ?
OLIVIER DUSSOPT
Alors, d'abord il faut, vous avez raison de dire « que peut faire l'Etat », parce que c'est souvent une question qui est posée sous une forme plutôt affirmative, en disant « l'Etat doit faire ». Mais il y a d'abord un contexte économique et là c'est l'épuisement d'une source naturelle, d'une forme de ressource naturelle, mais...
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Et il n'y a pas de reclassement possible…
OLIVIER DUSSOPT
Et il y a ensuite des aspects économiques qui peuvent parfois s'imposer, malheureusement, parce que la vie de l'économie est ainsi faite que les entreprises peuvent être mises à mal, avec des décisions qui socialement sont très fortes. Le rôle de l'Etat...
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
On n'est pas face à une PME là.
OLIVIER DUSSOPT
Le rôle de l'Etat c'est d'abord de veiller à ce que le droit soit respecté et que lorsqu'il y a défaillance d'entreprises, lorsqu'il y a soucis économiques, que les salariés soient les plus protégés possible. Ça passe à la fois par l'accompagnement des reprises quand il y a des possibilités de reprise et lorsque, malheureusement, il y a un plan social et des licenciements par les meilleures conditions possibles. Et ça passe aussi par le reclassement et par la reconversion. Cet exemple et au-delà du conflit social très fort que vous avez évoqué. Cet exemple est une des illustrations que notre économie doit se préparer et dont anticiper un certain nombre de transitions : des transitions numériques (je pense à l'intelligence artificielle mais pas que) et des transitions écologiques avec parfois des ressources naturelles qui peuvent s'épuiser et la nécessité d'accompagner cette transition écologique. Il faut qu'on fasse pivoter (pardon, c'est un peu techno de le dire comme ça) mais que tout notre appareil de formation initiale et continue, et en l'occurrence, c'est la formation continue qui compte, puisse pivoter pour former à cette transition. Ça permet des reclassements, ça permet d'accompagner les demandeurs d'emploi lorsqu'on est malheureusement demandeurs d'emploi. Ça peut permettre, et c'est l'objet de discussions où j'ai avec les régions dans le cadre des négociations autour d'une du nouveau plan d'investissement dans les compétences, de voir comment on peut faire pour additionner nos efforts et conjuguer nos efforts (régions et Etat) en matière de formation pour des salariés dont on sait que malheureusement, ils vont être licenciés et que l'on doit - pendant cette période-là – former pour qu'ils puissent occuper de nouveaux métiers et ainsi avoir une possibilité de reclassement éventuel.
ORIANE MANCINI
On a encore d'autres sujets à aborder et le temps fil. On va parler des retraites ; syndicats et patronat qui travaillent à une revalorisation des pensions de retraite complémentaires du privé de 4,9 %. Ils ont jusqu'à mercredi pour signer l'accord. Vous espérez qu'il ne soit pas signé ?
OLIVIER DUSSOPT
Alors, nous verrons. Les partenaires sociaux sont libres de cet accord. Je rappelle que c'est une négociation autonome. Nous avons dit avec la Première ministre, nous avons toujours dit et je rappelle qu'au mois de novembre pendant la concertation sur les retraites, nous avons dit de manière très explicite à tous les partenaires sociaux, en tout cas à tous ceux qui sont venus à ce troisième temps de concertation (la CGT avait fait le choix de ne pas y participer), que la réforme que nous avons menée est une réforme de retour à l'équilibre, tous régimes confondus. Et donc la réforme a des effets sur tous les régimes de retraite, des effets positifs financièrement et nous considérons qu'il y a une forme de solidarité des régimes.
ORIANE MANCINI
Ça veut dire que vous ponctionnez toujours l'AGIRC-ARRCO ? Vous ne revenez pas là-dessus ?
OLIVIER DUSSOPT
Nous estimons qu'à horizon 2026 (on ne parle pas de 2024 mais à horizon 2026) ; parmi le total des excédents de l'AGIRC-ARRCO, la retraite complémentaire, 1,2 milliard, c'est l'estimation du Gouvernement, l'AGIRC-ARRCO dit 1 milliard. Ce n'est pas si loin que ça. Que 1,2 milliard de ces excédents ou partie des excédents correspondant à 1,2 milliard n'existerait pas sans la réforme. Et donc nous jugeons légitime, que cette partie des excédents qui n'existe que par la réforme puisse être mobilisée pour à la fois participer au retour à l'équilibre.
ORIANE MANCINI
Donc vous prenez le milliard ? ça, vous ne revenez pas là-dessus ?
OLIVIER DUSSOPT
Chaque chose en son temps. Vous l'avez dit, l'accord qui est intervenu, qui a été proposé, est soumis à la signature. Nous verrons mercredi ce qu'il en est. Les partenaires sociaux ont fait un certain nombre de choix dans ce document d'accord, notamment la revalorisation des pensions. Un choix que je trouve opportun, c'est par exemple le fait de rendre contributif le cumul emploi retraite, ce que nous avons fait pour le régime général. Mais il n'y a pas, dans cet accord, de participation, de volonté d'accompagner le retour à l'équilibre général du système, parfois pour des positions de principe et parfois pour d'autres.
ORIANE MANCINI
Mais est-ce que c'est au privé d'accompagner ce retour ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est à tous les régimes. Je l'ai dit : la réforme que nous avons donnée et que beaucoup de ceux qui, aujourd'hui, veulent utiliser ou garder le résultat ont combattu parce qu'ils ont combattu la réforme et aujourd'hui, ils veulent en garder les résultats. Et dans l'accord, il est même écrit que certaines dispositions sont financées grâce aux recettes apportées par la réforme. C'est un état de fraude et ça montre que la réforme…
ORIANE MANCINI
Oui, mais ils disent aussi que, eux, ils ont bien géré le régime du privé et que du coup, ce n'est pas au privé de payer pour les régimes notamment des fonctionnaires et de l'Etat qui a été mal géré.
OLIVIER DUSSOPT
Je pense qu'il ne faut pas être si manichéen que ça. Il y a 42 régimes. Je confirme que le régime AGIRC-ARRCO a été bien géré. Et d'ailleurs, pourquoi est-ce qu'il est en excès aujourd'hui ? Parce que les mêmes partenaires sociaux, il y a quelques années, à une exception près, ont voté une décote. Ils ont voté une décote provisoire mais ils avaient voté une décote sur les pensions de ceux qui partaient à la retraite à l'âge légal mais sans avoir tous leurs trimestres. Ce sont les premiers à avoir voté une décote aussi importante. Ça leur a permis de ramener le système à l'équilibre et notre réforme permet d'augmenter les excédents. Et donc nous continuons, on va voir les partenaires sociaux toute cette journée.
ORIANE MANCINI
Mais c'est une ligne rouge pour eux. Est-ce que ce n'est pas une forme de hold-up que vous êtes en train de faire sur l'AGIRC-ARRCO ?
OLIVIER DUSSOPT
Pardon mais il faut peser les termes. Hold-up, braquage, enfin on parle d'une réforme qui a été adoptée et qui génère des excédents. Et les mêmes excédents qui seraient utilisés par les partenaires sociaux, y compris ceux qui ont combattu la réforme pour financer d'autres mesures. Donc soyons très prudents sur les termes.
ORIANE MANCINI
Donc vous restez sur la même ponction, 1 à 3 milliards ?
OLIVIER DUSSOPT
Chaque chose en son temps, je l'ai dit.
ORIANE MANCINI
Vous pourriez revenir sur le montant ?
OLIVIER DUSSOPT
Non mais attendez, quand vous dites 1 à 3 milliards ; ce que nous disons nous, c'est qu'en 2026, parmi le total des excédents, la partie de la réforme, c'est 1,2 milliard ; l'Agirc-Arrco dit plutôt 1 milliards. Et en 2030, nous estimons (en 2030, il y aura une nouvelle convention et des nouvelles estimations) que ça pourrait être jusqu'à 3 milliards.
ORIANE MANCINI
Une dernière question, Fabrice.
FABRICE VEYSSEYRE-REDON
Et vous incarnez la cause dans ce Gouvernement ? Oriane a rappelé tout à l'heure, vous étiez dans le sud-ouest notamment il y a quelques jours et vous avez fait le bilan sur le RSA sans conditions. Est-ce qu'on va, en France, vers un RSA accompagné d'une activité nécessaire ?
OLIVIER DUSSOPT
C'est ce que nous voulons. Et le texte de loi sur le plein emploi est adopté par le Sénat au mois de juillet ; il sera voté par l'Assemblée nationale demain. J'espère évidemment qu'il sera adopté. Mais nous avons mené les débats pendant les 15 derniers jours avec un texte qui, à l'issue de ces débats, me paraît être un bon texte. Et l'objectif que nous avons c'est celui que le Président de la République a rappelé pendant sa campagne. C'est de dire que nous avons la chance, en France, d'avoir un RSA qui est un revenu de subsistance, un revenu minimum pour les personnes qui n'ont plus de revenus. Et une fois qu'on en a fait valoir ce droit, nous disons que la priorité des priorités, c'est d'accompagner la sortie du RSA et le retour à l'emploi en pensant que personne n'est inemployable. Et pour cela nous pensons qu'il faut des activités d'insertion, de formation dans le cadre d'un contrat d'engagement réciproque élaboré à la fois par les des conseillers en charge du suivi social, professionnel et l'allocataire, avec des activités d'insertion et de formation. Il n'y a pas de travail gratuit, il n'y a pas de bénévolat obligatoire, mais nous savons que plus on accompagne les allocataires du RSA, plus on peut les aider à en sortir. Aujourd'hui, si on fait c'est parce que le bilan du RSA, le bilan global, ne peut pas être satisfaisant pour qui que ce soit. La Cour des comptes l'a montré, sept ans après une première inscription RSA, 42 % des allocataires sont soit de manière continue soit de manière intermittente encore au RSA. Nous avons un taux de retour à l'emploi qui est très bas. Et donc si on veut aller vers le plein emploi, si on veut donner de l'autonomie, donner de la dignité, donner une émancipation, ça passe par l'emploi. Et le chemin vers l'emploi, c'est la formation, l'insertion. Nous expérimentons avec 18 départements. Les premiers retours sont satisfaisants et favorables et évidemment la loi prévoit une généralisation à partir de 2025.
ORIANE MANCINI
Merci Olivier DUSSOPT, merci beaucoup d'avoir été notre invité. Merci Fabrice.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 10 octobre 2023