Déclaration de Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la transition énergétique, sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre au sein de l'Union européenne, à Luxembourg le 16 octobre 2023.

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Circonstance : Conseil Environnement

Texte intégral

Mme Agnès Pannier-Runacher : "Bonjour à tous et à toutes, je suis très heureuse de participer aujourd'hui à ce Conseil des ministres de l'environnement. Le premier objectif, ce sera effectivement d'arrêter un mandat ambitieux pour la COP 28. Vous le savez, l'Union européenne est aujourd'hui le continent qui est le plus avancé sur sa trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre. Elle a un plan qui doit lui permettre de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 55% au moins d'ici 2030 et nous sommes également extrêmement engagés pour accompagner les pays en développement dans leur propre trajectoire de transformation de leur modèle énergétique, en souhaitant notamment le développement d'énergies renouvelables et l'accompagnement dans l'adaptation. Et la France prend sa part très largement avec 7,6 milliards d'euros qui sont consacrés à la finance climat pour 2022. Sur ces bases-là, nous pensons que nous devons tenir ses positions exigeantes vis-à-vis de l'ensemble des pays de la planète pour porter une véritable ambition à la COP 28. Cela suppose aussi de tenir compte d'abord de tous les leviers qui nous permettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Nous soutenons le triplement du renouvelable, nous soutenons le doublement de l'effort d'efficacité énergétique, nous pensons qu'il faut y ajouter, dans ce doublement ou à côté, la question des économies d'énergie par la sobriété et enfin, nous estimons que des technologies comme le nucléaire ont toutes leur place dans les technologies à soutenir pour la neutralité climatique. S'agissant de tout ce qui est capture carbone, nous pensons que ce sont des technologies intéressantes, mais qu'elles ne peuvent, toutes seules, prendre en charge l'essentiel des émissions de CO2 et, donc, il faut leur réserver une place pour ce qu'on ne sait pas décarboner autrement, mais ne pas leur assigner un rôle qu'elles ne seraient pas capable de tenir.

S'agissant du règlement des émissions sur les poids lourds, c'est évidemment un enjeu important. Il est important, parce que les émissions de poids lourds représentent 24% des émissions du transport routier et que nous souhaitons les réduire avec là aussi un texte ambitieux. Le point d'attention que nous aurons, c'est aussi d'être pragmatique et de tenir compte pour le bus des bonnes trajectoires. Vous le savez, aujourd'hui, beaucoup de collectivités locales ont investi dans des modes de transport qui baissent leurs émissions de CO2 mais qui reposent sur le biogaz et qui du coup doivent être alignés avec ce texte. Il serait contraire à nos objectifs de leur demander alors que ces bus ne sont pas complètement utilisés, amortis, de mettre tout ça à la casse et de racheter de nouvelles flottes : ça n'aurait pas une bonne empreinte pour le climat, donc ce sont les points que je porterai aujourd'hui au Conseil climat."

Q - [Sur le texte CO2 des poids lourds] Est-ce que vous avez bon espoir de convaincre vos partenaires de repousser la date limite pour les bus aujourd'hui ? Une deuxième question sur ce texte : la France est-elle prête à accepter une mesure qui soutiendrait un facteur, qui soutiendrait les carburants alternatifs dans leur ensemble ?

Mme Agnès Pannier-Runacher : Alors de manière générale, nous on privilégiera une position qui soit ambitieuse d'un point de vue climatique, et en tout cas lorsqu'on regarde nous la question des carburants alternatifs, on bute sur des notions de biomasse. Assez vite. C'est ce que nous montrent tous les travaux que nous avons menés de manière approfondie, faits ces derniers mois et ces dernières semaines pour préparer notre programmation pluriannuelle de l'énergie. S'agissant de l'objectif pour le transport urbain, je pense que l'ambition que nous avons collectivement, c'est de baisser nos émissions de CO2 et ce qui a été entamé en France permet de le faire pour le transport en commun et c'est pour ça que nous porterons cette position de tenir nos trajectoires avec une souplesse sur les technologies, mais pas sur les ambitions de baisse d'émissions de CO2.

Q - Sur le mandat de la COP 28 et les techniques de capture du carbone que vous évoquiez, est ce que la France, du coup s'oppose à la mention "unabated" dans le dans le texte, parce que ce mot effectivement fait beaucoup de débats parmi les États membres de l'UE ?

Mme Agnès Pannier-Runacher : Je pense qu'il faut surtout plus de débats au d'un point de vue international, et c'est bien l'enjeu que nous avons, c'est d'avoir un mandat de négociation où on a une position forte en entrée de négociation pour pouvoir obtenir des éléments concrets pour baisser les émissions sur le secteur pétrolier sur le charbon. Sur le financement public et privé de ces différentes technologies, on l'a obtenu sur le charbon, sur le financement public, mais on l'a pas encore sur le financement privé, donc derrière le "phasing out fossil fuels" et non "unabated fossil fuels", il y a toute une série d'engagements sur lesquels nous souhaitons pouvoir avancer.

Q - La France a priori, n'a pas encore remis à la Commission son plan national pour l'énergie du climat, alors que la deadline était fin juin. Pourquoi ce retard ? Est-ce que vous comptez rendre la copie française bientôt ?

Mme Agnès Pannier-Runacher : Alors ce retard il s'explique en fait par les travaux que nous avons menés, comme vous le savez, de manière très intense puisque notre stratégie française énergie-climat, nous y travaillons depuis 18 mois. Elle a fait l'objet d'un débat public qui, dont les conclusions ont été remises par la commission nationale du débat public en mars dernier avec, ensuite, des groupes de travail alliant élus locaux, parlementaires et l'ensemble des parties prenantes, organisations syndicales, fédération d'entreprises, association environnementale, association de consommateurs. Ils ont rendu leurs travaux en septembre dernier. Sur cette base-là, nous élaborerons un projet de loi énergie et un décret programmation pluriannuelle de l'énergie et ce sont ces éléments-là qui nous permettront de construire notre plan national. J'ai communiqué avec la Commission européenne qui est à l'aise avec le fait que nous leur donnons des éléments qui soient fondés sur tous ces travaux solides. Comme vous le savez, une loi, ça prend du temps à être adopté, donc nous aurons probablement une communication en deux phases sur la base des projets que nous allons mettre sur la table et ensuite, en complément, sur la base de ce qui sera effectivement voté par le Parlement, sachant qu'aujourd'hui nous avons un plan, un plan ambitieux et un plan qui repose sur un travail très en profondeur sur notre système énergétique. Je ne suis pas sûre que beaucoup de pays aient effectué ce travail avec le niveau de profondeur que nous avons aujourd'hui en France, avec RTE avec les simulations que nous avons fait aussi sur les biomasses et donc je suis assez confiante sur notre capacité à présenter quelque chose de très solide à la Commission européenne dans les semaines qui viennent. Merci beaucoup".


Source https://ue.delegfrance.org, le 17 octobre 2023