Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
L'interview politique, 8h30/9h, les Français veulent savoir, parlons vrai ce matin avec Aurore BERGE, ministre des Solidarités et des Familles, Aurore BERGE bonjour.
AURORE BERGE
Bonjour.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous ce matin. Emmanuel MACRON a réuni tous les ténors de la majorité hier, l'Assemblée nationale sera-t-elle dissoute ?
AURORE BERGE
Je crois qu'il n'y a aucune raison aujourd'hui de dissoudre l'Assemblée nationale. On a, certes, une majorité relative, mais il n'y a pas de majorité alternative qui existe, la seule majorité alternative c'est une arithmétique, une addition, qui fait qu'il faut que toutes les oppositions s'allient, mais est-ce que ça veut dire qu'elles ont toutes le même projet à porter, je ne crois pas, je ne crois pas les électeurs, tant issus de Jean-Luc MELENCHON, que de Marine LE PEN, que des Républicains, du Parti socialiste, pensent ou veulent la même chose, donc il n'y a pas de majorité alternative, c'est aussi la démonstration de ces dernières heures.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous confirmez, pas de dissolution.
AURORE BERGE
Il n'y a aucune raison qu'il y ait une dissolution, il y a une majorité qui existe et la seule majorité cohérente qui existe c'est la majorité présidentielle.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aurore BERGE, pas de dissolution donc, le texte sur le projet de loi immigration va venir en commission mixte paritaire, Sénat, Assemblée, j'explique pour nos auditeurs, commission mixte paritaire, qui va proposer, sept députés, sept sénateurs, qui va proposer, travailler sur un nouveau texte, sans doute lundi, et le vote sans doute mardi. Le texte risque d'être durci.
AURORE BERGE
Mais c'est un débat qui va exister. Les commissions mixtes paritaires, pour que chacun comprenne, c'est la pratique habituelle, c'est-à-dire qu'après un examen à l'Assemblée et au Sénat, on tente toujours de trouver un compromis entre l'Assemblée et le Sénat, et donc sont représentés des députés et des sénateurs qui sont à proportion en fait, qui représentent les différents groupes politiques de l'Assemblée et du Sénat. La question c'est, est-ce que oui ou non il y aura un compromis, et si oui, quel compromis, puisque tout le monde a dit aussi, à la fois qu'on a des pas qu'on était prêt à faire, mais qu'il y a aussi des choses qui, pour la majorité, ne pouvaient pas rester dans ce texte, donc c'est ça qu'on doit faire, un compromis ça veut dire que chacun est prêt à faire un pas vers l'autre, sinon il n'y a pas de compromis possible.
JEAN-JACQUES BOURDIN
S'il n'y a pas de compromis, abandon du texte, pas de 49.3 ?
AURORE BERGE
De toute façon ce n'est pas possible, c'est-à-dire que si la commission mixte paritaire échoue, c'est-à-dire que les députés et les sénateurs n'arrivent pas à se mettre d'accord sur un texte, le parcours du projet de loi
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est terminé
AURORE BERGE
S'arrête à ce moment-là, ça ne veut pas dire qu'il y aura
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et le texte est abandonné
AURORE BERGE
Ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas un autre texte, qui pourra un jour exister sur les questions d'immigration…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, plus tard.
AURORE BERGE
Mais ça veut dire que si c'est un échec la semaine prochaine, alors oui, le texte s'arrêtera là.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, régularisation de travailleurs sans papiers, ligne rouge pour RN et LR, confondus…
AURORE BERGE
Ce n'est pas si clair que ça en vérité, parce que, au Sénat…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, c'est vrai.
AURORE BERGE
Au Sénat, les Républicains, la droite au Sénat, n'a pas tiré un trait sur le sujet de la capacité à régulariser, et, encore une fois, moi j'appelle à un minimum d'efficacité, de bon sens, d'honnêteté intellectuelle sur ce sujet, il n'y a pas un territoire, il n'y a pas un département, où on ne nous alerte pas sur des métiers en tension. Je suis ministre des Solidarités et des Familles, tous les métiers, qui sont les métiers du médico-social, les métiers de l'humain, de l'accompagnement, du soin, les aides à domicile par exemple, on ne sait pas faire aujourd'hui si on n'a pas une part de ces métiers qui est réalisée au quotidien par des personnes qui sont issues de de l'immigration ou qui sont des immigrés eux-mêmes. Donc, à un moment qu'est-ce qu'on veut, est-ce qu'on est prêt à assumer une ligne très claire qui est de dire que la régularisation par le travail, l'intégration par le travail, ça a du sens, mais que dans le même temps, il faut une fermeté absolue et renforcée vis-à-vis de ceux qui ne respectent pas nos règles ? C'est ça la base même de ce projet de loi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que vous êtes favorable à des quotas pour la régularisation des travailleurs dans les métiers en tension, comme le propose Edouard PHILIPPE ?
AURORE BERGE
Ça peut être une piste, moi je ne suis pas fermée dessus parce que je pense qu'il ne faut pas avoir de tabou en la matière…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes proche d'Edouard PHILIPPE.
AURORE BERGE
Je suis proche des membres de la majorité, Edouard PHILIPPE est une des composantes essentielles de la majorité, avec Horizons évidemment. Moi, ce que je dis juste, c'est que, en tout cas ce qui est certain c'est que de dire qu'on ne peut pas et qu'on ne doit pas régulariser, c'est une erreur, parce que les mêmes qui disent ça, parfois sur des plateaux de télévision, sont les premiers à nous dire que dans leur département, les chefs d'entreprise en ont besoin, parce que ce sont les chefs d'entreprise eux-mêmes qui nous disent qu'ils ne pourraient pas tourner s'il n'y avait pas aussi des personnes immigrées qui bossaient à leur côté, donc il faut juste un peu d'honnêteté intellectuelle sur le sujet, et ce n'est pas une vague qui va nous submerger parce qu'on va régulariser au cas par cas, en fonction des métiers en tension.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'à vos yeux la droite Eric CIOTTI a rejoint l'extrême droite de Marine LE PEN ?
AURORE BERGE
Non, je ne dirais pas ça parce que ce n'est pas le cas, ce n'est pas vrai, donc je pense qu'il ne faut pas non plus d'excès inverse, ce qui est certain c'est qu'il y a eu une alliance un peu baroque, a minima on peut dire ça, parce que quand vous voyez se lever dans le même mouvement l'extrême gauche et l'extrême droite, c'est-à-dire l'extrême droite se félicite d'un côté en disant « on a rejeté un texte qui permettait une invasion migratoire », et l'extrême gauche se lève de l'autre côté en disant « on a rejeté un texte qui durcissait toutes les règles en matière migratoire », donc, à un moment, soit ils n'ont pas lu le même texte, soit ils n'ont pas compris le même texte, soit tous les deux mentent à leurs électeurs, mais le fait que, et extrême gauche, et extrême droite, main dans la main, rejettent le texte, veut dire qu'il était sans doute un vrai texte de compromis et qu'il y a, je crois, des choses qui méritent d'être préservées.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous allons parler des familles, de la solidarité, évidemment, Aurore BERGE, mais j'ai une dernière question en marge de ce projet de loi, faut-il dénoncer l'accord franco-algérien de 1968 ?
AURORE BERGE
Mais la première ministre l'a dit elle-même en disant qu'il fallait…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comme le demande Edouard PHILIPPE, encore une fois, j'insiste, parce que vous venez de la même famille politique.
AURORE BERGE
Mais la première ministre l'a dit elle-même, le président de la République est ouvert à ce qu'on avance sur ce sujet-là. La seule chose qui a été dite, c'est que ce n'était pas à l'Assemblée de définir ce que devait être la politique étrangère de notre pays. C'est uniquement ça. Est ce qu'il y a des choses qui méritent d'être revues, je crois que tout le monde est lucide dessus et que ce travail, il est déjà engagé par le président de la République lui-même.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien, parmi les réponses aux émeutes de juin dernier, vous avez fait, pour répondre aux émeutes de juin dernier, vous avez fait des propositions, plusieurs propositions pour mieux gérer, notamment la parentalité. Vous avez commencé un Tour de France de la parentalité, je crois, vous allez continuer.
AURORE BERGE
Bien sûr.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dans plusieurs régions et vous avez fait des propositions, mise en place de la commission scientifique sur la parentalité. Bon, ça n'a pas très bien commencé, lundi avec trois démissions, notamment les démissions des sociologues Irène THERY et Claude MARTIN et de la chercheuse du CNRS Agnès MARTIAL, remplacés ?
AURORE BERGE
Alors moi ce que j'ai toujours dit, c'est déjà le premier point c'est qu'on ne parle des parents qu'en période de crise et que c'est un problème, on a besoin des parents dans une société pour faire société. Moi, ce que je veux, c'est déjà qu'on remette les parents au coeur du jeu, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, au coeur de nos politiques, ce qui n'est pas suffisamment le cas aujourd'hui et qu'on doit définir, ça veut dire quoi la parentalité ? Ça veut dire quoi accompagner et soutenir les parents, notamment celles et ceux qui nous disent qu'ils sont parfois dépassés, qu'ils sont déboussolés. On voit bien qu'ils subissent aussi des risques nouveaux pour nos enfants. Je pense à la question de la sédentarité, je pense à la question des écrans. Donc ça c'est le point de départ. Qu'on ne parle pas des parents qu'en période de crise. Pour ça, j'ai proposé plusieurs choses. J'ai émis des propositions sur les questions d'autorité.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On va, en parler.
AURORE BERGE
Parce que je qu'on en a besoin aussi.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On va en parler.
AURORE BERGE
Et j'ai dit je ne peux pas résoudre cette question à moi toute seule. On a besoin d'avoir…
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'une commission scientifique.
AURORE BERGE
Des personnalités engagées qui connaissent ce sujet, que soit des magistrats, soit des pédopsychiatres, des spécialistes des enjeux de la santé mentale de nos adolescents, comme Hélène ROQUES, comme Serge HEFEZ, des sociologues, des démographes. Certains ont dit ce que vous avez cité, écoutez, puisque vous avez fait des propositions qui pour nous, vont trop loin sur les enjeux d'autorité, on ne se sent pas à l'aise.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Nous regrettons…
AURORE BERGE
C'est leur totale liberté.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pardon Aurore BERGE, je vous coupe, nous regrettons que les travaux à venir soient placés sous l'égide de méthodes répressives. C'est ce qu'ont dit les démissionnaires.
AURORE BERGE
Ce ne sera pas le cas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est ce qu'ils ont dit.
AURORE BERGE
C'est ce qu'ils ont dit mais ce ne sera pas le cas.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aurore BERGE, est ce qu'ils vont être remplacés ? C'est un camouflet quand même, deux jours après, au lendemain, le jour même de la mise en place de votre commission, trois démissions.
AURORE BERGE
Oui, mais en vrai, moi mon seul sujet, c'est est ce que oui ou non, dans notre pays, on peut avoir une vraie politique publique qui va accompagner et qui va soutenir les parents. Moi c'est ça, mon sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On est d'accord, mais est-ce que vous avez mis la répression en avant tout de suite, trop vite ?
AURORE BERGE
Après ça, c'est une appréciation.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est le reproche que ces personnes vous font.
AURORE BERGE
C'est les Français qui jugeront.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ça c'est sûr.
AURORE BERGE
Oui mais c'est eux le juge de paix. A la fin, ce sont les Français qui disent est ce que oui ou non on peut marcher sur deux jambes et avoir à la fois des mesures d'autorité ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
AURORE BERGE
Et dans le même temps, des mesures de soutien et d'accompagnement pour les parents qui doivent aussi, et là, c'est, quels que soient les milieux sociaux, être accompagnés, etc… Donc, sur cette commission, ce que je dis, c'est qu'on a deux éminentes personnalités, Hélène ROQUES et Serge HEFEZ qui ont accepté de copréside cette commission. Ils sont libres de tout. Ils sont libres de finaliser la liste des membres de la Commission, de faire des propositions supplémentaires puisque trois membres ont souhaité ne pas y participer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui ces membres seront remplacés.
AURORE BERGE
Donc, c'est eux qui décideront en toute indépendance. Et moi, ce que je leur dis aussi parce que j'aurais pu faire un autre choix, ne pas créer de commission, ne prendre que des gens qui étaient proches de moi. Ce n'est pas ce que je fais. Je veux que soit une commission totalement libre, indépendante. Elle a le droit de critiquer le gouvernement, elle a le droit de critiquer mes propositions. Elle a surtout le droit évidemment de proposer pour qu'on puisse ensemble avancer sur le sujet.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aurore BERGE, regardons ce que vous proposez. Travaux d'intérêt général pour les parents défaillants, j'aimerais quelques explications. Comment estimer qu'un parent est défaillant ? Donnez-moi un exemple.
AURORE BERGE
Regardez typiquement ce qui s'est passé, je vous donne un exemple très clair, pendant les émeutes, vous avez eu parfois des parents qui encourageaient eux-mêmes leurs enfants à piller des commerces. Est-ce que vous pensez vraiment que c'est l'exemple, le cadre, le niveau de protection, de sécurité qu'un parent doit avoir au bénéfice de son enfant ou de son adolescent ? Et dans le même temps, dans ces émeutes là aussi, vous avez vu des mères de famille, surtout, parfois des pères mais surtout des mères, aller au contraire au milieu de la nuit, récupérer leurs enfants ou les mettre à l'abri et pour les protéger. Donc, vous voyez bien, là, dans ces deux exemples qui sont si divers, si opposés à la fois le parent qui quelque part donne l'exemple, qui montre à un moment ce que veut dire, pas juste l'autorité, mais être parent, accompagner, protéger, sécuriser et le parent qui….
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui va déterminer si un parent est défaillant ou pas ?
AURORE BERGE
. Mais c'est la liberté du juge.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est le juge.
AURORE BERGE
La force dans notre pays, c'est que nous sommes dans une démocratie.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lorsque le juge aura l'enfant délinquant devant lui, il va pouvoir déterminer si le parent de cet enfant est défaillant ou pas.
AURORE BERGE
Il n'y a pas dans une démocratie de peines automatiques, c'est toujours à la libre appréciation du juge. Et donc ça veut dire que moi je considère et ce sont des propositions que j'ai faites, on verra si elles sont définitivement inscrites, retenues, on y travaille notamment avec le garde des Sceaux, sous l'autorité de la Première ministre. Ce que je dis, c'est est ce qu'on peut avoir un panel de peines éventuelles qui puissent être prononcées ? Est ce qu'on trouverait ça aberrant, encore une fois, que ce parent qui a mis en danger son enfant, son adolescent qu'il a encouragé à piller, et nous avons vu malheureusement aussi ces images-là de violences, d'émeutes, eh bien, il n'aurait pas intérêt à faire des travaux d'intérêt général ? Est-ce que c'est seulement l'adolescent qui doit être dans ces cas-là, sanctionner ou est-ce que le parent peut être également sanctionner dans ces cas extrêmes ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Travaux d'intérêt général et paiement d'une contribution financière.
AURORE BERGE
Moi je crois que c'est du bon sens. Aux associations de victimes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aux associations de victimes.
AURORE BERGE
Ca je pense que c'est très important.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour les parents défaillants donc.
AURORE BERGE
Je pense que c'est très important de dire que l'amende éventuelle qui pourrait être payée, elle n'est pas là pour être payée, j'allais dire à l'Etat, mais parce qu'on a eu des victimes dans ces violences. On a des élus locaux qui ont été attaqués, on a des services publics qui ont été attaqués, on a des artisans, des commerçants qui parfois ont perdu leur outil de travail, on a donc des victimes et le fait de reconnaître et de soutenir ces victimes y compris parfois par une contribution financière, excusez-moi est-ce que vraiment c'est de l'autoritarisme ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les parents sont responsables civilement ?
AURORE BERGE
Bien sûr.
JEAN-JACQUES BOURDIN
De leur enfant mineur, on est bien d'accord, donc ils seront responsables aussi autrement des dégâts.
AURORE BERGE
Mais c'est déjà le cas. Jean-Jacques BOURDIN, quand vous inscrivez même votre enfant à l'école vous prenez une assurance de responsabilité civile.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais oui c'est ce que je ne comprends pas, mais évidemment.
AURORE BERGE
Si jamais parfois contre son gré un enfant peut commettre, parfois faire des bêtises etc., donc c'est déjà le cas. Moi, ce que je veux, c'est juste dire qu'on doit marcher sur deux jambes dans notre société, d'abord en remettant les parents au coeur de la vie de notre pays, de notre société, parce qu'on ne peut pas faire sans les parents, on ne peut pas faire société sans les parents, mais que ça veut dire à la fois qu'enfin on doit avoir une véritable politique d'accompagnement et de soutien des parents, et dans ces mêmes propositions que je fais, mais évidemment, elles ont été moins commentées, je dis aussi qu'il faut augmenter de manière très significative, de 30 %, les moyens de toutes les CAF, Caisses d'allocations familiales dans notre pays, pourquoi ? Parce que c'est elles qui financent tous les projets de soutien, d'accompagnement des parents, d'accompagnement à la parentalité. Dans le tour de France que vous avez mentionné, il y avait une salle comble avec, des parents, des associations, des magistrats, des médecins qui étaient là, des enseignants, pour parler de l'avenir de nos enfants et pour parler des parents, par exemple on m'a parlé, je donne juste un exemple, pour les familles monoparentales, la question du répit parental. Quand vous êtes seul, quand vous êtes seul à élever votre enfant, eh bien on a des femmes qui n'ont même pas le temps parfois d'être à l'hôpital pendant deux jours parce qu'elles ne peuvent plus prendre soin d'elles, parce qu'en fait elles ont toutes la charge qui pèse sur elles, donc elles m'ont parlé de cette idée d'arriver à développer aussi le répit parental, parce que toutes les familles n'ont pas…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire, le répit parental, expliquez.
AURORE BERGE
Eh bien typiquement de permettre que le parent puisse un minimum souffler, que son enfant puisse être pris en charge…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais comment concrètement ?
AURORE BERGE
Pris en charge dans une structure qui va pouvoir permettre que pendant un week-end…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pendant un week-end l'enfant est pris en charge dans une structure ?
AURORE BERGE
Mais, est-ce que ce serait aberrent, quand vous êtes une femme seule…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Non, mais je…
AURORE BERGE
Et quand vous accompagnez…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça vous allez le mettre en place ?
AURORE BERGE
Mais pourquoi pas, c'est des propositions. Typiquement, le tour de France de la parentalité, c'est quoi ? C'est justement d'écouter ce que les Français ont à nous dire et les propositions qu'ils formulent, et je pense notamment à ces parents qui font face, parfois seuls, à toute la charge, et pas juste la charge financière, la question n'est pas juste là…
JEAN-JACQUES BOURDIN
D'ailleurs ça pose la question du rôle des pères, au passage !
AURORE BERGE
Ah mais c'est la question que j'ai posée aussi, c'est la question que j'ai posée aussi sur les pères qui sont parfois absents ou trop absents, et en effet je ne veux pas qu'on laisse les femmes seules et qu'on accepte l'idée que finalement ce n'est pas très grave, que les femmes elles n'ont qu'à faire toutes seules, que les mères elles n'ont qu'à faire toutes seules, ce n'est pas bon pour les mères, je crois que ce n'est pas bon pour les enfants, et donc ça pose évidemment cette question-là qui est fondamentale.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et la suspension des allocations familiales, un temps évoquée, vous l'avez écartée ?
AURORE BERGE
Moi je ne l'ai pas mise sur la table.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pas vous, non, mais ça a été évoqué, vous l'avez écartée ?
AURORE BERGE
Je l'ai écartée, en tout cas je pense que ce n'est pas la mesure qui est prioritaire, je ne suis pas sûre que ce soit celle qui porte immédiatement ses fruits. Ce que je veux c'est juste qu'on assume de dire que le rôle de parent est évidemment aussi celui de l'autorité, parce que c'est un enjeu de protection pour nos enfants, c'est aussi un enjeu de projection, de comment on est dans la société, et comment on est ensemble dans la société, mais que ça suppose d'abord d'accompagner et de soutenir les parents.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Des femmes enceintes, des mères avec des nouveaux nés, qui vivent dans la rue en France ça existe, c'est insupportable, inadmissible, inadmissible…
AURORE BERGE
C'est inadmissible et…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes ministre des Solidarités.
AURORE BERGE
On y travaille avec le ministre du Logement en particulier, on a un enjeu majeur, c'est pour ça qu'on a protégé ce qu'on appelle l'hébergement d'urgence. On n'a jamais eu autant de places d'hébergement d'urgence, ce n'est pas un succès de dire ça, mais ça veut dire qu'on a créé les conditions aussi pour pouvoir accueillir et pour pouvoir protéger. Et en priorité, la priorité absolue que j'ai mise sur la question de la lutte contre la pauvreté, c'est quoi ? C'est la lutte contre la précarité des enfants, et donc aussi évidemment la lutte contre la précarité, notamment des femmes, pour garantir qu'à leur sortie de maternité, pour celles qui parfois accouchent et ne savent pas où aller au lendemain de cet accouchement, puissent être immédiatement accompagnées et prises en charge, parce que sinon quelles sont les chances qu'on donne à cet enfant si la seule condition de la sortie de la maternité est le retour à la rue, donc on a protégé le nombre de places d'hébergement d'urgence en priorité, évidemment, pour les familles les plus fragiles, et donc évidemment pour ces mères avec leurs tout petits.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Aurore BERGE, le collège d'Issou, dans les Yvelines, procédure disciplinaire ouverte à l'endroit de trois élèves de ce collège qui se sont plaints parce que leur professeur avait montré un tableau du 17e siècle avec des femmes nues, intransigeance indispensable, et les parents qui eux aussi se plaignent, et se sont plaints, que risquent-ils, rien ?
AURORE BERGE
Ah bah il y a des procédures, dans ces cas-là, qui sont aussi des procédures judiciaires, parce qu'il y a vraisemblablement une mise en danger de ces professeurs, parce que ces professeurs ont été harcelés, ont été menacés, à tort évidemment, et qu'à un moment, encore une fois, quand on est au coeur de l'école de la République on se soumet à l'autorité qui est l'autorité de la République et qui est l'autorité de l'enseignant, et on ne remet pas en cause des savoirs, on ne remet pas en cause le fait qu'un enseignant puisse quoi…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc intransigeance.
AURORE BERGE
Puisse un savoir, puisse diffuser une oeuvre d'art ? dans ces cas-là il y a beaucoup d'oeuvres d'art qu'on ne pourrait plus montrer, beaucoup de films qu'on ne pourrait plus projeter, beaucoup de poèmes qu'on ne pourrait plus dire ou lire, donc évidemment il faut une intransigeance, qui est une intransigeance républicaine et qui garantit que tous nos enfants, quel que soit leur territoire, quelle que soit leur ville, quelle que soit leur famille, aient accès au même savoir, ou alors ça veut dire qu'on accepte des écarts énormes entre ceux qui auront accès au savoir et ceux pour lesquels, parce qu'on aurait peur de je ne sais quelle offense qui leur serait faite, eh bien on n'instruirait plus. L'école doit instruire et donc être libre évidemment de cette instruction.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Alors, projet de loi inscrivant l'IVG dans la Constitution, vous devez être très heureuse, puisque je sais que vous vous êtes beaucoup battue sur la question, le Parlement entérinera, enfin devra l'entériner, vote des 3/5e des parlementaires, je crois que ce sera le 24 janvier, d'après mes informations, vous confirmez, c'est bien le 24 janvier ?
AURORE BERGE
L'idée c'est que le Congrès soit convoqué le 5 mars prochain.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Le 5 mars, d'accord.
AURORE BERGE
Le Président de la République nous l'a dit hier en Conseil des ministres, 5 mars prochain pour le Congrès.
JEAN-JACQUES BOURDIN
5 mars prochain, Ok. Aucun parti politique ne menace l'IVG aujourd'hui, en revanche, dans certaines régions il y a des problèmes d'accès à l'IVG.
AURORE BERGE
Il y a deux choses, déjà dire qu'aucun parti politique ne menace…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous pensez qu'il y a des partis politiques qui menacent l'IVG ?
AURORE BERGE
Moi je dis que quand on a une majorité qui garantit qu'on puisse inscrire l'IVG dans la Constitution, on le fait et on n'attend pas que ce ne soit plus le cas, parce que si dans cinq ans, dans dix ans ou dans quinze ans, les majorités changent et que ces majorités, alors, veulent attaquer les droits des femmes, veulent dérembourser l'IVG, veulent limiter les droits d'accès, veulent réduire le délai dans lequel vous pouvez avoir recours à l'IVG, eh bien ce sera trop tard pour pleurer, donc moi je ne veux pas qu'on ait à pleurer dans quinze ans, je veux qu'on agisse aujourd'hui. C'est pour ça que j'ai déposé, quand j'étais présidente de groupe, la première proposition que j'avais faite avec mon groupe c'était justement une proposition de loi constitutionnelle pour mettre l'IVG dans la Constitution, et à l'époque tout le monde disait « tu verras, ça n'aboutira jamais. » Evidemment je l'avais fait avec le soutien du Président de la République, et il a démontré sa détermination puisqu'il a dit que ce serait un projet de loi constitutionnelle, qu'il allait donc réunir le Congrès, c'est-à-dire l'Assemblée et le Sénat, pour qu'on puisse l'entériner.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La loi de programmation grand âge, début de l'année 2024 prévu, il y a des enquêtes sur le fonctionnement des EHPAD privés du groupe EMERA, vous avez vu cela, vous avez regardé cela ?
AURORE BERGE
J'ai vu, mais j'ai surtout répondu.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce qu'il y aura une saisine de l'Inspection générale des Affaires sociales ?
AURORE BERGE
Alors, sur ce sujet parce que j'ai été saisie par la CGT…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui.
AURORE BERGE
Par Sophie BINET.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, j'ai vu Sophie BINET.
AURORE BERGE
Donc j'ai répondu évidemment à Sophie BINET, parce que moi je ne veux pas qu'on jette en pâture comme ça le nom d'un établissement et avec le nom d'un établissement, l'ensemble des professionnels qui y travaillent. En l'occurrence c'est un groupe qui a 40 EHPAD., donc, étant saisie, j'ai demandé, parce qu'on a des outils de contrôle, je vais faire en sorte qu'il y ait un plan de contrôle sur l'ensemble des EHPAD, ce qui fait qu'avant en moyenne les EHPAD ils étaient contrôlés une fois tous les 20 ans, c'est-à-dire pas de contrôles, là, en deux ans, tous les EHPAD de notre pays auront été contrôlés, là on est pile à la moitié. Le groupe EMERA il a été contrôlé à près de 70 % de ses EHPAD, je n'ai eu aucune remontée inquiétante sur les contrôles qui ont été réalisés, je n'ai eu aucun signalement fait au procureur de la République, donc il n'y a aucun élément aujourd'hui à ma disposition qui permette de jeter de cette manière-là le discrédit sur le groupe. Le défi du grand âge il est majeur. En 2030, donc c'est demain, un Français sur trois aura plus de 60 ans, donc le vieillissement de la population, il est devant nous, ça doit être une opportunité de se dire qu'on va vieillir plus longtemps, vieillir plus longtemps en bonne santé…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Que contiendra d'ailleurs ce texte de loi ?
AURORE BERGE
Notre objectif…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quel est l'objectif ?
AURORE BERGE
C'est de trouver une trajectoire, parce qu'encore une fois…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est-à-dire une trajectoire ?
AURORE BERGE
On va avoir des besoins qui vont augmenter, donc il va falloir avoir des moyens…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, oui, 63 % des postes vacants dans les EHPAD aujourd'hui
AURORE BERGE
On a des besoins qui vont augmenter parce que la population vieillit, parce que les typologies aussi de maladies éventuelles ont profondément changé, les maladies neurodégénératives, il y a 20 ou 30 ans, ce n'était pas la première cause pour laquelle vous alliez dans un EHPAD, aujourd'hui, parce que vous pouvez souffrir d'Alzheimer, de ce type de maladies neurodégénératives, vous êtes plus enclin à aller dans ce type d'établissements, donc on a un défi démographique majeur. Donc moi je dis, face à des nouveaux besoins, il faut des nouvelles offres, et donc il va falloir aussi déterminer quels sont les moyens, y compris financiers, pour y parvenir, c'est ça une loi de programmation, c'est garantir qu'on ait les moyens pour faire face aux besoins, et s'en donner les moyens aujourd'hui, pour préparer.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Combien, vous avez évalué le coût ?
AURORE BERGE
Eh bien c'est ça qu'on va faire, c'est ce travail-là que j'engage à partir de janvier avec tous les groupes politiques représentés à l'Assemblée, au Sénat, tous, sans exception…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Sur quelle base, vous avez une petite idée un peu de… ?
AURORE BERGE
On a des travaux très documentés qui existent déjà.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Je sais, c'est pour ça.
AURORE BERGE
On va continuer à avoir ces travaux pour affiner évidemment les besoins…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais il faut engager combien ?
AURORE BERGE
C'est la loi qui va le définir. Moi je ne peux pas dire que j'ai une nouvelle méthode et que je travaille avec tout le monde…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, non mais d'accord, mais enfin, vous savez à peu près les besoins, vous connaissez à peu près les besoins.
AURORE BERGE
Oui non mais, je ne peux pas dire que je vais travailler avec l'ensemble des forces politiques et en même temps la loi est déjà écrite, la loi on va l'écrire ensemble.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Indépendants et travailleurs non-salariés, je recevais l'autre jour la ministre des PME, qui me parlait de ça, des quotas de places en crèche pour ces indépendants et ces travailleurs non-salariés, qui sont nombreux dans notre pays, il y aura des quotas ?
AURORE BERGE
Alors, on travaille sur ce sujet avec Olivia GREGOIRE, donc qui est la ministre en charge des TPE, des PME notamment, parce qu'aujourd'hui on voit bien que la question du mode de garde…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il y aura des quotas de places en crèche ?
AURORE BERGE
On est en train d'y travailler…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ah bon, parce qu'elle était plus avancée que vous !
AURORE BERGE
Non, non, parce qu'on y travaille totalement conjointement et on va réunir justement l'ensemble des fédérations et des groupes de crèches pour voir comment faire pour concrètement, que ce soit des agriculteurs, que ce soit des indépendants, que ce soit des professions libérales, comment garantir que ces personnes aient aussi accès à un mode de garde…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et à un congé maternité aussi.
AURORE BERGE
Alors ça c'est fait, ça c'est fait et on l'a renforcé parce que, typiquement, sur les professions libérales, ce n'était pas le cas avant, on l'a garanti, je pense aussi à nos agricultrices, pourquoi elles ne le prenaient pas, parce qu'elles n'avaient pas la capacité à être remplacées, on l'a fait, sur le congé paternité récemment, on l'a même renforcé là encore, pour les agriculteurs, parce que le congé paternité aujourd'hui, en moyenne, il est pris à 70 % par les hommes, par les pères, le problème c'est qu'il y a d'énormes écarts. En gros, plus vous êtes cadre, plus vous avez facilement accès au congé paternité, par contre quand vous êtes plutôt employé, ouvrier, vous n'y avez pas accès, donc il faut que tous les pères qui le souhaitent puissent avoir accès à un congé paternité et donc passer ses premiers jours, ses premières semaines, avec leurs enfants, et on veut aller plus loin avec le congé familial dont j'ai parlé, l'idée étant que dès 2025 il y a un nouveau congé, un nouveau droit pour les parents, après les congés paternité et maternité.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Dernière question. Mathias VICHERAT, qui est directeur de Sciences Po, entendu, comme sa compagne, pour violences conjugales, doit-il selon vous démissionner ? il a été mis en retrait, il s'est mis en retrait, mais ça a été voté, accepté, sa mise en retrait…
AURORE BERGE
Je pense que les conditions de son maintien sont compliquées, pour le dire pudiquement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Pour vous il ne peut plus diriger Sciences Po ?
AURORE BERGE
A minima je pense que pendant la durée pendant laquelle il est mis en cause, puisqu'aujourd'hui, moi je ne suis pas dans l'intimité de ce couple, donc je ne sais pas ce qui s'est passé…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Qui n'a pas porté plainte, ni lui, ni elle.
AURORE BERGE
Les deux ont été entendus, et je pense que pendant la durée des investigations, d'une enquête, avant qu'on ne puisse savoir judiciairement quelle est la vérité des faits, et ça c'est la justice qui doit le dire, je pense que c'est très compliqué pour lui de se maintenir à son poste, d'autant plus que je comprends que, que ce soit les étudiants, que ce soit les enseignants eux-mêmes, vraisemblablement ne le souhaitent pas, donc quand vous n'avez pas la confiance de celles et ceux pour lesquels vous voulez travailler…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc il ne peut pas être maintenu à son poste ?
AURORE BERGE
Je crois que c'est compliqué.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est compliqué, donc il devra démissionner.
AURORE BERGE
Je pense, a minima, qu'il y ait un retrait pendant toute la période pendant laquelle…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il devra démissionner.
AURORE BERGE
C'est des choses qui peuvent qui peuvent se déterminer, est-ce que c'est une démission, est-ce que c'est une mise en retrait, en tout cas, tant qu'on ne sait pas quelle est la vérité judiciaire, et pour lui, et pour cette institution qui est éminente, je crois que c'est bien qu'il soit en retrait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Aurore BERGE
source : Service d'information du Gouvernement, le 14 décembre 2023