Texte intégral
SALHIA BRAKHLIA
Bonjour Aurélien ROUSSEAU.
AURELIEN ROUSSEAU
Bonjour.
JEROME CHAPUIS
Bonjour.
SALHIA BRAKHLIA
Vous venez de dévoiler un vaste plan national contre le tabagisme, parmi les annonces le passage du prix du paquet de cigarettes de 11 à 12 euros en 2025, puis 13 euros en 2026, le président d'Alliance contre le tabac, Loïc JOSSERAN, vous dit « c'est bien, mais ce n'est pas assez », écoutez, il était l'invité de France Info Télé hier.
LOÏC JOSSERAN, PRESIDENT ALLIANCE CONTRE LE TABAC
Pour que cette mesure fiscale ait un effet il faudrait que nous arrivions à au moins 16 euros en 2027, des augmentations assez fréquentes et surtout efficaces, c'est-à-dire entre minimum 50 centimes, et surtout 1 euro, ce qui a été fait quand nous sommes arrivés au paquet à 10 euros, et là on a vu effectivement la consommation de tabac, en France, baisser. On ne fait plus les efforts, on n'a plus le courage politique.
SALHIA BRAKHLIA
« On ne fait plus les efforts, on n'a plus le courage politique », que rendez-vous Monsieur le ministre ?
AURELIEN ROUSSEAU
Je réponds que le tabac c'est d'abord 200 morts par jour, donc on doit réagir, et je réponds que j'ai annoncé hier une hausse d'1 euro dans un an et 1 euro ensuite l'année suivante, précisément…
SALHIA BRAKHLIA
Il dit « ce n'est pas suffisant. »
AURELIEN ROUSSEAU
Précisément toutes les études, mais Alliance contre le tabac le dit, montrent que c'est à 1 euro que ça fait basculer des comportements, donc là on va faire deux fois 1 euro, et je pense, je souhaite, et il n'y a pas que ça, parce que ce n'est pas… ça ne peut pas marcher si ce n'est que punitif, donc on a aussi, et c'est pour ça que j'ai fait le choix de l'annoncer un an avant, on a aussi tout un plan d'accompagnement pour que 2024 ce soit l'année où collectivement on essaie de s'arrêter de fumer, on va développer tous les outils qu'on peut pour accompagner les fumeurs, parce que ce n'est pas facile de s'arrêter de fumer.
JEROME CHAPUIS
Mais pourquoi vous dites que ça ne peut pas marcher si ce n'est que punitif, le prix ce n'est pas un facteur essentiel ?
AURELIEN ROUSSEAU
C'est un facteur essentiel, c'est pour ça qu'on va, on aura quand même, on a un paquet qui n'est pas encore à 11 euros aujourd'hui, et qui sera à 13 euros dans deux ans, deux ans et demi, donc…
JEROME CHAPUIS
Alliance contre le tabac dit il faudrait que ce soit 16 euros en 2027.
AURELIEN ROUSSEAU
Oui, j'entends, j'étais hier aux questions au gouvernement où je vois d'autres réactions, qui considèrent que c'est un pas vraiment trop important, voilà, moi mon sujet c'est qu'il y ait un vrai effet de santé publique, les addictologues, et évidemment je respecte tout à fait la position d'Alliance contre le tabac, les addictologue disent qu'à partir d'1 euro ça a un effet comportemental, là on annonce deux fois 1 euro, donc ça aura un effet comportemental, et en effet il faut qu'on bouge, on ne peut pas laisser 200 personnes par jour mourir, si à la fin de la mise en oeuvre de ce plan il y a 10, 20, 50, 100 personnes de moins par jour qui meurent des effets du tabac, ça aura été une réussite.
JEROME CHAPUIS
Mais vous l'entendez la critique, vous auriez peur des buralistes.
AURELIEN ROUSSEAU
Non, on n'a pas peur des buralistes, d'ailleurs, les buralistes ils ont eux-mêmes fait depuis de nombreuses années beaucoup d'adaptations, moi je le dis aussi, et je l'assume, ma crainte c'est que ça soit vu, et d'ailleurs il y a des réactions en ce sens partout, que ce soit vu juste comme une mesure fiscale, c'est une mesure de santé publique qui vise à faire réduire l'incidence du tabac et des maladies…
JEROME CHAPUIS
Mais la fiscalité ça peut être vertueux.
AURELIEN ROUSSEAU
Mais c'est vertueux…
SALHIA BRAKHLIA
C'est ce qui marche le mieux en matière de tabac !
AURELIEN ROUSSEAU
Absolument, mais quand vous augmentez le tabac… le paquet est aujourd'hui à moins de 11 euros, vous le passez à 12 et puis vous le passerez à 13, en pourcentage, si un seul produit augmentait autant aujourd'hui on hurlerait sur ce motif, c'est un vrai impact fiscalité, qu'on assume, qu'on va porter, et d'ailleurs on va devoir accompagner les buralistes parce que de plus en plus ils ne peuvent plus compter uniquement sur le tabac, parce que ça va faire réduire la consommation, c'est sûr. Et on a réussi d'autres étapes, c'est une grande étape, et puis par ailleurs il n'y a pas que l'effet prix qu'on attend, il y a aussi une mesure forte, enfin des mesures fortes sur la consommation du tabac dans l'espace public, et donc c'est un plan complet, mais il y a un troisième volet qui est l'accompagnement des fumeurs, parce que, je ne sais pas si vous l'avez vécu vous, mais beaucoup de gens témoignent, moi j'ai été frappé, de la difficulté à se sevrer seul, donc on va les accompagner.
SALHIA BRAKHLIA
Des espaces sans tabac, c'est l'autre signal de votre plan, aux abords des établissements, interdiction aux abords des établissements scolaires, sur les plages, les parcs publics, concrètement il y aura une police anti-fumeurs dans ces zones-là ?
AURELIEN ROUSSEAU
Non, mais enfin je crois vraiment qu'il faut revenir un peu au bon sens. Moi, mon sujet, c'est je trouve… et quand on va dans quelques pays, il n'y a pas forcément besoin d'aller très loin, il n'y a qu'en France qu'il y a encore des mégots qui jonchent le sol de nos rues, qu'on fume à côté de l'entrée des écoles, et donc moi mon sujet c'est on protège les plus fragiles il y a en ce moment, pour plein d'autres raisons, la pollution, plein de déterminants de santé, les enfants sont de plus en plus malades
JEROME CHAPUIS
Vous l'avez peut-être entendu ce matin sur France Info, il y avait une lycéenne qui disait « je ne sais pas si ça va changer grand-chose, on ira quelques mètres plus loin. »
AURELIEN ROUSSEAU
Oui, mais en attendant, et c'est ça en fait la prévention et la santé publique, c'est de rendre un peu plus compliqué, donc les gens y renoncent, donc auprès…
SALHIA BRAKHLIA
Mais il n'y aura pas d'amende ?
AURELIEN ROUSSEAU
Si, il y aura évidemment un système dans lequel, puisque ce sera interdit, il y aura un système contraventionnel, mais je peux le dire tranquillement, le but c'est d'abord le civisme. Je pense que quand les 7300 espaces non-fumeurs, les parcs et jardins aujourd'hui qu'il y a en France, où les maires d'eux-mêmes ont lancé ces initiatives, eh bien c'est très très largement respecté, simplement…
JEROME CHAPUIS
Juste pour reprendre la question de Salhia, c'est important, qui va faire appliquer cette mesure devant les établissements scolaires, est-ce que c'est la police, est-ce que c'est les chefs d'établissement ?
AURELIEN ROUSSEAU
Non, alors là c'est évidemment les forces de l'ordre, mais moi je crois vraiment que dans un premier temps c'est que, vous êtes dans un parc, vous êtes avec vos enfants, la personne juste à côté de vous fume, vous pouvez lui dire c'est interdit de fumer, il y a quand même…
SALHIA BRAKHLIA
Ça sera aux Français de faire la police entre eux, c'est ça ?
AURELIEN ROUSSEAU
Non, ce n'est pas aux Français, ça s'appelle…
JEROME CHAPUIS
C'est de rappeler la règle.
AURELIEN ROUSSEAU
Soit c'est la police entre eux, soit c'est le civisme, on le prend comme on veut, et puis on laissera aussi aux maires et aux préfets le soin, s'il y a besoin, à des endroits d'adapter, parce que tous les parcs et jardins ce ne sont pas la même chose, le parc de la Courneuve ce n'est pas pareil qu'un square dans Paris.
JEROME CHAPUIS
Il y en a qui sont plus grands que d'autres, bien sûr.
SALHIA BRAKHLIA
Vous appelez à la prévention, les puffs, ces vapoteuses jetables, dont les ados sont fans, vont être interdites, c'est un engagement de la Première ministre, une proposition de loi transpartisane est en ce moment en examen à l'Assemblée nationale, interdiction effective normalement à partir de l'année prochaine, c'est ce que vous avez dit, mais vous faites quoi pour la nicotine à chiquer, qui attire aussi les ados ?
AURELIEN ROUSSEAU
Alors le sujet, sur ça, c'est un peu le même, c'est qu'on a des produits où les fabricants de tabac, ou leurs séides, essaient d'attirer de nouveaux publics dans le tabac, et le puff, avec ses couleurs, c'est très ludique…
SALHIA BRAKHLIA
Très ludique en fait, des goûts différents.
AURELIEN ROUSSEAU
Très coloré, des goûts différents, il n'empêche que ça met le réflexe d'aspirer et de recracher de la fumée, donc on met un terme. Il y a eu cette proposition transpartisane, elle sera en séance le 7 décembre, après on a des allers-retours avec la Commission européenne parce qu'il y a un sujet évidemment d'interdiction d'un produit, donc d'atteinte à la concurrence si on veut, mais il n'y aura aucun problème…
JEROME CHAPUIS
Ça c'est les vapoteuses jetables.
AURELIEN ROUSSEAU
Ça c'est les vapoteuses jetables, et…
JEROME CHAPUIS
Mais le tabac à chiquer ?
SALHIA BRAKHLIA
Sur les sachets de nicotine.
AURELIEN ROUSSEAU
J'y viens, pardon de ce petit détour, c'est que les sachets de nicotine c'est la même chose, c'est-à-dire que c'est un moyen d'attirer de nouveaux publics vers la consommation, fût-elle différente, pour qu'à la fin ils en viennent à la cigarette. Après il y a deux sujets, moi, où je veux assumer la différenciation, il y a ces produits qui sont faits pour attirer de nouveaux publics, et puis je ne mets pas dans le même sac exactement les gens qui ont arrêté de fumer et qui en passent par la vapoteuse, qui doivent s'arrêter, donc là on va essayer aussi, c'est ce qu'on va faire, c'est de faire un paquet neutre sur la vapoteuse, ce n'est plus un objet de luxe, enfin quelquefois il y a des emballages vous croyez que vous offrez un bague de luxe, donc c'est débanalisé.
JEROME CHAPUIS
Ça doit être un objet pour sortir du tabac.
AURELIEN ROUSSEAU
On débanalise le tabac, le tabac ça tue 75.000 personnes dans notre pays chaque année.
JEROME CHAPUIS
Aurélien ROUSSEAU, ministre de la Santé et de la Prévention, vous êtes l'invité de France Info jusqu'à 9h, on vous retrouve juste après le Fil info.
(…)
SALHIA BRAKHLIA
Avec le ministre de la Santé, Aurélien ROUSSEAU. Vous avez dévoilé un plan contre le tabac et on a envie de vous demander : et l'alcool ? 8% des Français consomment 50% de l'alcool en France. Vous avez refusé de taxer davantage l'alcool. Une campagne a même été interdite contre l'alcool pendant le Mondial de rugby. Ça veut dire quoi ? Les lobbies sont trop forts ?
AURELIEN ROUSSEAU
Non, une campagne n'a pas été interdite. On a eu un vrai débat sur la nature de cette campagne. Et moi, j'ai souhaité qu'on centre sur les jeunes et la prévention des risques. Et en Santé publique, vous avez deux grandes écoles, deux grands choix : soit vous dites, comme par exemple sur la Sécurité routière, vous montrez un accident horrible et ça, ça peut marcher ; soit vous donnez des gestes de prévention. Et sur cette campagne, vis-à-vis des jeunes, quand on a 80% des jeunes de 17 ans qui ont déjà bu, leur dire juste « l'alcool, c'est mal », ça ne suffit pas. On a fait un choix de campagne de prévention des risques qui a été projeté pendant le mondial.
SALHIA BRAKHLIA
Mais pourquoi on n'a pas un plan contre l'alcool identique au plan contre le tabac que vous nous avez présenté ce matin ?
AURELIEN ROUSSEAU
Précisément parce que moi, d'abord, évidemment, on y travaille. Moi, je prends ce sujet de l'alcool un peu différemment. Il y aura cette année une campagne très forte. Moi, je veux m'engager très fortement sur un sujet qui est majeur et qui est encore trop peu connu dans ce pays, qui est celui de l'alcoolisation foetale pour protéger les enfants des conséquences de la consommation d'alcool par leur mère. Et puis, il y avait (pour être tout à fait transparent, parce que ça ne sert à rien de cacher les choses), on a un sujet de mener simultanément plusieurs grandes mesures de santé publique : tabac où certes, certains disent que ce n'est pas assez, mais beaucoup disent que c'est déjà beaucoup. Et aujourd'hui, la première cause de mortalité, ça reste le tabac. Je me suis attaqué au tabac.
SALHIA BRAKHLIA
A 45 000... 49 000 morts par an pour l'alcool. Sans compter les non-retours.
AURELIEN ROUSSEAU
Je ne relativise rien du tout, je ne relativise rien du tout. La consommation d'alcool et encore plus le combo alcool-tabac est un sujet de santé publique majeur. Et on a des actions sur ce sujet-là et on discutera à l'occasion du PLFSS prochain de mesures. Evidemment, on est dans une année particulière. C'est aussi pour ça que j'ai annoncé ces mesures un an à l'avance. Quand vous avez une inflation extrêmement forte, que les Français sont très préoccupés par leur pouvoir d'achat ; moi, je pense que c'est indispensable qu'ils comprennent que c'est de la santé publique, qu'on ne leur fait pas les poches. Et donc c'est de la santé publique…
SALHIA BRAKHLIA
Mais quand il s'agit de produits comme l'alcool ou le tabac, ça s'entend, parce que c'est pour la santé publique.
AURELIEN ROUSSEAU
Oui, ça s'entend pour une partie, pour une grande partie des gens. À la fin, on veut les empêcher de vivre normalement ou leur faire les poches. On l'entend beaucoup. Moi, j'assume le... Il y aura évidemment, et il y a des mesures tous les jours contre l'alcool, contre le tabac et on va préparer aussi un plan sur ce sujet-là.
JEROME CHAPUIS
Vous évoquiez, Aurélien ROUSSEAU, le PLFSS, le projet de loi de finances de la sécurité sociale, qui est toujours en discussion. Où en êtes-vous de votre volonté de doubler la franchise médicale, c'est-à-dire le reste à charge pour un patient quand il achète, par exemple, une boîte de médicaments ?
AURELIEN ROUSSEAU
On en est dans la situation où... que j'ai présentée aux parlementaires la semaine dernière. Cette mesure, elle a été instruite. Moi, je l'ai annoncée dès que j'ai été nommé comme une mesure possible.
JEROME CHAPUIS
Il n'y a pas de décision pour le moment ?
AURELIEN ROUSSEAU
Il n'y a pas de décision. Et j'ai d'ailleurs pris l'engagement de revenir devant les assemblées, même si c'est une mesure qui dépend uniquement du Gouvernement, le jour où une décision serait prise et qu'on lancerait les consultations. Pourquoi ? Là aussi il faut se dire les choses. Moi, mon mouvement, mon objectif de fond, c'est qu'on ait tous un comportement différent et tous (je me mets dedans) avec le médicament. Le médicament, ce n'est pas un produit de consommation comme les autres. Si c'est juste vu comme une mesure qui atteint le pouvoir d'achat des Français, on va à nouveau, on va au risque de passer à côté du sens de cette mesure. Mais cette mesure, elle est prête. Et si on décide de la mettre en oeuvre, je reviendrai dans les chambres. Et puis, il y a quatre mois de consultations de différentes instances obligatoires. Mais je pense, moi, je suis prêt à la porter parce que ces ressources-là, elles serviront à financer des améliorations à l'hôpital sur le travail des médecins. Voilà, c'est quelque chose qui servira au système de santé, pas à d'autres mesures pour l'Etat, par exemple.
SALHIA BRAKHLIA
En parlant de l'hôpital, vous l'avez sans doute lu, monsieur le ministre, dans Le Monde, avant-hier, ce reportage à l'hôpital Necker-Enfants malades à Paris ; hôpital où exercent les meilleurs spécialistes du pays. C'est le premier centre de chirurgie cardiaque pédiatrique d'Europe. Mais un hôpital où un cinquième des lits est fermé comme ailleurs, par manque de personnel, avec parfois des conséquences dramatiques sur les enfants quand des opérations doivent être reportées. Quand la pénurie de personnel, Aurélien ROUSSEAU, touche aussi Necker ; c'est le symbole que le système hospitalier est totalement en craquage ?
AURELIEN ROUSSEAU
Alors c'est notre sujet aujourd'hui, vous avez raison et l'article du reste le montre bien, c'est la pénurie de personnel. Et moi, mon combat, mon seul combat si je puis dire, c'est de recruter et de fidéliser. C'est pourquoi la Première ministre a annoncé dès le mois d'août, sur ma proposition notamment, la revalorisation du travail de nuit et de 25% pour les infirmières, les aides-soignantes, la revalorisation du travail le samedi et le dimanche. Donc, il y avait un sujet de salaire. Je pense qu'il est en partie comblé aujourd'hui.
SALHIA BRAKHLIA
On voit que ce n'est pas suffisant. Quand vous lisez les témoignages du personnel.
AURELIEN ROUSSEAU
Exactement, mais j'y viens. Il y a un sujet qui est un cercle vicieux terrifiant, c'est que moins vous êtes nombreux, plus ceux qui sont là ont de boulot. Et puis par ailleurs, avoir un bloc fermé dans un hôpital de pointe ou pas de pointe, c'est déchirant, que ce soit pour l'infirmière ou pour le chirurgien. On a une bonne nouvelle dans ce paysage qui est extrêmement tendu, c'est qu'on a les meilleures campagnes de recrutement de personnels paramédicaux depuis dix ans. On rouvre des lits, on rouvre des lits, notamment à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris dans l'hôpital Necker.
JEROME CHAPUIS
Mais ça va prendre combien de temps ? Ça faits des années qu'on parle de ces pénuries.
AURELIEN ROUSSEAU
D'ici la fin de l'année, on va rouvrir 3 000 - 4000 lits. C'est un signal. Moi, je pense que c'est un signal positif. Et puis, à la fin, il y a aussi un sujet, mais comme partout dans tout le monde du travail, on a besoin... Et moi, j'ai été frappé, je suis frappé depuis que j'ai pris ses fonctions, les soignants, le sujet évidemment de la rémunération est là, même si le Ségur de la santé a annoncé en 2020 et les mesures annoncées par la Première ministre cet été ont compensé, ont rattrapé une partie, une grande partie de ce retard. Mais ils veulent aussi savoir quelles sont leurs perspectives professionnelles. Ils ne vont pas faire 40 ans le même boulot, donc ils veulent des évolutions, ils veulent avoir accès aux formations. Mais quand on est sur la corde raide en termes de ressources humaines, eh bien, on dit non aux formations, on ne laisse pas partir les soignants pour des mobilités. Et ça, ça va maintenant se jouer hôpital par hôpital pour qu'on gagne cette bataille où on fait beaucoup plus équipe, on revient au niveau de l'équipe. Moi, c'est un changement culturel. Si les soignants dans un service, ils ont décidé de s'organiser de telle ou telle manière, c'est eux qu'on va suivre. On se débrouillera - l'administration - pour les suivre, c'est comme ça. Il y a un vrai sujet qui traverse d'ailleurs tout le monde du travail, pas que l'hôpital. Dans l'industrie, aujourd'hui, on a beaucoup de mal à recruter des personnels pour travailler la nuit. Donc il faut qu'on se dise qu'on doit être à la hauteur des attentes de cette ressource, de la première ressource de l'hôpital et de l'hôpital public en particulier, ce sont les soignants.
JEROME CHAPUIS
Aurélien ROUSSEAU, le ministre de la Santé est l'invité du 8h30 France Info. On vous retrouve juste après le Fil info.
(…)
JEROME CHAPUIS
Toujours avec le ministre de la Santé, Aurélien ROUSSEAU. La bronchiolite est de retour cet hiver mais cette année, ça semble un petit peu moins violent que l'année dernière. Est-ce qu'on on dit merci au Beyfortus, ce traitement préventif contre la bronchiolite ?
AURELIEN ROUSSEAU
À ce stade, le point positif en effet, c'est qu'on a moins d'impact hospitalier. Moi je suis prudent sur les motifs, il peut y avoir des motifs climatiques, il peut y avoir des gestes barrières qui ont été mieux respectés. Et tant mieux si Beyfortus qu'on s'est démené pour déployer, pour obtenir plus de doses que ce qu'on avait au début - on est un des seuls, des quatre pays au monde à avoir le Beyfortus…
JEROME CHAPUIS
Les stocks seront suffisants pour cet hiver.
AURELIEN ROUSSEAU
On aura pour les maternités assez de stock pour tous les bébés qui naissent et pour tous les parents qui veulent faire vacciner – immuniser, pardon, ce n'est un vaccin - leur bébé jusqu'à la fin de l'hiver, on aura assez de stock. Ç'a été une bagarre mais on a aujourd'hui les disponibilités.
SALHIA BRAKHLIA
Dans les maternités comme dans les pharmacies.
AURELIEN ROUSSEAU
Alors dans les pharmacies, non, on n'est pas au même niveau. Mais je le dis, le risque de bronchiolite grave et sévère est essentiellement sur les tout petits, sur les plus petits, les nourrissons. Donc depuis le départ effectivement, c'est ces doses à 50 milligrammes pour les pharmacies - sur les maternités - qu'on priorise.
JEROME CHAPUIS
Aurélien ROUSSEAU, est-ce que vous êtes inquiet de ce qui se passe en Chine avec cette hausse des maladies respiratoires ?
AURELIEN ROUSSEAU
Alors moi, j'essaie de me tenir à un principe, c'est de ne pas être inquiet ni rassurant, mais de vérifier les éléments.
SALHIA BRAKHLIA
Du coup, on a peur là !
AURELIEN ROUSSEAU
Non mais j'ai le directeur général adjoint de l'OMS. On a un fait un point, on fait un point tous les jours. Ils ont les autorités chinoises. De ce qu'il ressort aujourd'hui avec toutes les vraies - il y a forcément des incertitudes - c'est qu'ils connaissent les rebonds d'une pneumopathie qui sont liés à une bactérie, à une bactérie qui s'appelle le mycoplasme. Cette bactérie, on la connaît bien donc c'est pour ça que je dis…
JEROME CHAPUIS
Ça n'a rien à voir avec la situation de décembre 2019, quand il y avait ce virus un peu inconnu qui commençait à arriver à Wuhan.
AURELIEN ROUSSEAU
Effectivement. Là tous les éléments qu'il nous donnent, c'est que c'est une bactérie qu'on connaît, ce n'est pas un virus. Et donc moi, mon job dans ce cas-là, c'est de vérifier que nos stocks d'antibiotiques, parce que c'est une bactérie qui répond très bien à des antibiotiques spécifiques, on les a sur le territoire national.
JEROME CHAPUIS
C'est le cas ?
AURELIEN ROUSSEAU
On a six mois de stock sur ces produits-là, mais on a aujourd'hui une augmentation, comme dans tous les pays d'Europe, s de ces bactéries à mycoplasmes comme on dit, qui donnent des pneumopathies un peu moins sur les tout petits bébés, mais dont on sent aujourd'hui l'impact, notamment sur les urgences pédiatriques.
SALHIA BRAKHLIA
Aurélien ROUSSEAU, on attend toujours le texte sur la fin de vie, projet de loi autorisant une aide active à mourir. Le texte devait être présenté en conseil des ministres courant décembre pour une discussion à l'Assemblée en janvier ou en février. Clairement, on n'y sera pas. On sent qu'Emmanuel MACRON hésite. Est-ce que c'est parce que les soignants résistent ?
AURELIEN ROUSSEAU
Je ne pense pas que ce soit le sujet principal. Je pense que le président de la République qui s'est engagé, et ce texte va venir, il n'y a absolument aucun doute, le Président souhaite vérifier - et il nous challenge et il a raison, Agnès FIRMIN LE BODO, la ministre déléguée qui pilote ce sujet et moi - sur la robustesse de notre plan sur les soins palliatifs, les soins d'accompagnement puisqu'il faut qu'on soit sûr, au moment où on va porter un texte sur la possibilité d'aide active à mourir, il faut qu'on soit sûr que la possibilité d'avoir accès aux soins palliatifs soit là partout sur le territoire, qu'on soit à Paris, des CSP+ autour de la table…
SALHIA BRAKHLIA
Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
AURELIEN ROUSSEAU
Et aujourd'hui, on a une stratégie, on renforce les moyens, on renforce la formation des soignants, donc le Président nous demande « je veux être sûr que ç'aura lieu partout ». Et on en parle beaucoup et on sera en capacité de structurer cette filière ; on y travaille et Agnès FIRMIN LE BODO notamment depuis un an maintenant, et on sera en capacité d'avoir un plan robuste dans les toutes prochaines semaines.
JEROME CHAPUIS
Et est-ce que l'hésitation ne tient pas aussi à ce que pointait d'ailleurs ici-même, à votre place, David LISNARD, le président de l'AMF, l'Association des maires de France ? Il dit « au fond, ce n'est sans doute pas une priorité pour les Français aujourd'hui » ?
AURELIEN ROUSSEAU
Moi, je pense que ça dépend beaucoup aussi de nos expériences intimes les uns et les autres. Moi, je n'ai jamais été confronté personnellement dans ma famille à ce sujet-là, mais je vois beaucoup de gens pour qui c'est aujourd'hui un sujet majeur. Ils attendent cette évolution de notre société, donc je me garderai d'avoir un jugement politique très vite. Ça touche à l'intime. C'est aussi pour ça que le texte qu'on écrit, on veut qu'il réponde à toutes les situations et que ce ne soit pas, j'allais dire, un ballon d'essai sur lequel après on se déchire dans des débats partisans qui qui ne mèneraient à rien.
SALHIA BRAKHLIA
Une dernière question Aurélien ROUSSEAU. La SNCF, tout comme Michel-Edouard LECLERC, le patron des magasins du même nom, souhaitent installer des espaces de téléconsultation. La SNCF, c'est dans 300 gares d'ici à 2028 pour favoriser l'accès aux soins, notamment dans les déserts médicaux. Vous en dites quoi ?
AURELIEN ROUSSEAU
J'en dis que tous ceux qui veulent se mobiliser contre les déserts médicaux en faveur de l'accès aux soins sont les bienvenus. J'en dis aussi que moi, mon sujet principal aujourd'hui, ce sont les médecins et tous les professionnels de santé qui sont en train de s'organiser pour répondre à ça. On a repris les négociations avec les médecins. Il y a beaucoup, vous l'avez vu dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, par exemple, la cystite et l'angine c'est 9 millions de consultations chez le médecin par an, peuvent être dépistées en pharmacie. Et mon sujet avec les cabines de téléconsultation, c'est que je pense que ça peut être un outil complémentaire mais que ça ne peut pas être un outil isolé du reste du parcours de soins. D'ailleurs on le voit bien, il faut qu'il y ait un professionnel de santé qui accompagne. Une cabine de téléconsultation, ce n'est pas un Photomaton donc du coup, il ne faut pas confondre l'accès aux soins et l'accès à un bien de consommation comme les autres. Donc si on peut avoir un travail, notamment avec la SNCF et son prestataire, pour dialoguer sur le parcours de soins et voir où est le médecin traitant dans tout ça, ce sera ce sera parfait, ce sera un plus. Mais je pense qu'aujourd'hui…
SALHIA BRAKHLIA
Mais pour LECLERC, c'est niet par exemple.
AURELIEN ROUSSEAU
Aujourd'hui c'est avec les médecins, avec les professionnels de santé que cette bataille de l'accès aux soins va se gagner.
JEROME CHAPUIS
Aurélien ROUSSEAU, Ministre de la Santé, vous étiez l'invité du 8.30 France Info.
AURELIEN ROUSSEAU
Merci.
JEROME CHAPUIS
Je vous dis à demain et je vous laisse en compagnie de Salhia BRAKHLIA, Les informés, dans cinq minutes.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 30 novembre 2023