Texte intégral
Merci beaucoup, Monsieur le premier ministre, cher Ulf.
Mesdames et Messieurs,
Je veux d'abord remercier Monsieur le premier ministre et les autorités suédoises pour l'accueil qu'elles nous ont faite à mon épouse et moi-même, ainsi qu'aux ministres et parlementaires et membres de la délégation qui nous accompagnent.
Monsieur le Premier ministre, nous allons signer un partenariat stratégique d'innovation pour des sociétés durables, numériques et résilientes qui ouvrent en effet un nouveau chapitre de la relation bilatérale en renouvelant et en élargissant le partenariat stratégique d'innovation que nous avions signé en 2017 à Göteborg et qui ont posé les premières bases. Cette nouvelle étape, c'est véritablement un approfondissement de notre coopération économique et industrielle, ceci au service de nos deux pays et plus largement de notre Europe.
Alors, nous avons - vous l'avez rappelé - des échanges de biens et de services qui atteignent des niveaux historiques, autour de 22 milliards d'euros. Et c'est extrêmement considérable, bien plus, par exemple, qu'avec l'Inde où je viens de me rendre, ce qui montre aussi à quel point l'interpénétration de nos pays européens est forte, et en particulier de la Suède et de la France. Nos investissements croisés sont également en croissance et nos entreprises auront l'occasion demain, lors du forum que nous tiendrons, de montrer la force de ces liens, qui se traduit aussi par les emplois que vous avez rappelés, de part et d'autre.
Ce renforcement va, en particulier, nous permettre d'avancer dans l'énergie nucléaire civile. Nous avons déjà décidé plusieurs axes, mais nous décidons maintenant de renforcer notre coopération pour relancer et accélérer nos programmes nucléaires pour réduire justement nos émissions et produire une électricité bas-carbone. Nous lançons une coopération en matière de recherche nucléaire, ce qui est indispensable, on le sait, pour à la fois avoir de la production d'électricité faiblement carbonée et pilotable. Nous aurons l'occasion d'y revenir demain à Lund lors du déplacement sur ce sujet, comme sur plusieurs autres.
Nous avons également des partenariats de recherche inédits que nous allons lancer. Nos universités sont impliquées dans plusieurs universités européennes, projet que nous avions lancé en 2017 justement à la Sorbonne et qui a vraiment été marqué par un plébiscite franco-suédois, mais nous aurons l'occasion, en effet, dans plusieurs domaines, de signer demain des partenariats de recherche qui viennent précisément déployer la coopération et le partenariat stratégique que nous signons ensemble aujourd'hui.
L'espace est évidemment aussi un sujet important pour nous deux et pour l'Europe. Et avec nos centres spatiaux, nous sommes des acteurs majeurs de la souveraineté européenne pour l'accès à l'espace. Nous faisons partie des rares pays qui ont chacun un centre spatial permettant les tirs. Nous avons décidé de renforcer notre coopération dans le secteur des satellites, de la surveillance du changement climatique et des lanceurs. Et c'est ce que, justement, le CNES et l'Agence spatiale nationale suédoise vont là aussi déployer.
La forêt est un troisième secteur extrêmement important, vous l'avez mentionnée. La ressource forestière et la bioéconomie sont des éléments essentiels de lutte contre le changement climatique, des dérèglements climatiques et pour la préservation de la biodiversité. Nous sommes deux grands pays forestiers. Nous avons beaucoup à apprendre d'ailleurs de vous qui avez su déployer des filières extrêmement efficaces en la matière. Et nous avons décidé de nous engager pour promouvoir la gestion durable des forêts, le rôle stratégique de la sylviculture en Europe.
Et puis vous l'avez dit, les industries de défense sont au cœur aussi de ce partenariat bilatéral. Nos deux pays possèdent une forte tradition en la matière et nous assumons d'être concurrents sur certains produits, mais nous voulons aussi déterminer plusieurs projets sur lesquels nous voulons faire ensemble et produire ensemble dans le cadre en particulier de la base industrielle et technologique de défense européenne. C'est le cas tout particulièrement de la trame antichars et des missiles anti-aériens sur lesquels nous allons signer des textes importants.
Je ne serai pas ici exhaustif mais tout ça s'inscrit au fond dans un esprit qui est de renforcer la coopération bilatérale, mais aussi de servir l'agenda de Versailles que nous avions défini en mars 2022, qui consiste à réduire les dépendances stratégiques de notre Europe et définir un modèle européen de croissance et d'investissement pour la décennie, qui repose sur les partenariats intra-européens et sur les solutions souveraines pour notre Europe. C'est cet engagement au service d'une souveraineté européenne que nous servons à travers cet accord mais aussi nos coopérations.
Et je veux ici dire un mot en termes justement de défense, de sécurité et de stratégie internationale. Nous avons une très bonne coopération entre nos forces armées - j'aurai l'occasion d'y revenir devant l'Académie militaire suédoise tout à l'heure - et nous avons en effet, ces dernières années, renforcée celle-ci, tout particulièrement du fait que la Suède fait partie des membres de l'Initiative européenne d'intervention, que vous vous êtes joints à nos côtés en Afrique sur plusieurs opérations, comme Takuba. Et nous avons aussi développé des liens inédits pour lutter contre la criminalité organisée et nous allons d'ailleurs demander à nos ministres en charge de l'Intérieur de conclure un accord bilatéral sur la coopération policière et sécurité en la matière pour aller encore plus loin contre la criminalité organisée et la radicalisation. C'est pourquoi le contexte géostratégique et l'agression russe en Ukraine ont conduit de manière très logique la Suède à demander à rejoindre l'OTAN et la France à soutenir totalement ce choix historique. La situation, en effet, l'impliquait et l'imposait. Et je veux ici saluer, à la fois l'esprit de consensus et la clarté stratégique dont vous avez fait preuve, vous redire tout notre soutien.
Les choses, ces derniers jours, ont évolué dans le bon sens et je souhaite que nos derniers partenaires européens respectent les engagements qu'ils avaient pris, je n'en doute pas une seule seconde et je pense que c'est un élément important qui vient compléter aussi toutes nos coopérations et nos partenariats au sein de l'Union européenne. La multiplication des crises impose de renforcer ces liens. C'est le cas au Proche-Orient, évidemment, depuis l'attaque terroriste perpétrée par le Hamas contre Israël le 7 octobre dernier, mais aussi en Ukraine, avec la guerre d'agression menée par la Russie depuis le 24 février 2022. Et là aussi, nous agissons avec méthode, concertation, mais une véritable unité et une efficacité. Sur tous ces sujets - nous y reviendrons dans notre entretien - mais notre volonté d'agir dans la durée et en particulier le soutien que nous apportons à l'Ukraine, nous aurons l'occasion de le réaffirmer ensemble, là, mais de le redire aussi jeudi au Conseil européen, se fera dans la durée.
Nous nous retrouverons, en effet, vous l'avez dit, au Conseil européen extraordinaire qui se tiendra ce jeudi. La facilité Ukraine permettra de participer à la fois à la reconstruction du pays, mais aussi aux réformes nécessaires pour préparer l'adhésion. Et plus largement, nous allons évidemment revenir sur les sujets financiers, le cadre financier pluriannuel européen qui doit être revu à mi-parcours et poursuivre en effet ce soutien à l'Ukraine en même temps que notre action résolue et concertée en matière de migration.
En tous cas, laissez-moi vous dire, monsieur le Premier ministre, cher Ulf, combien j'apprécie aussi le partenariat qui est le nôtre. Vous avez été un pays et vous êtes un pays souvent inspirant en matière de politique, d'innovation, de capacité à moderniser l'économie et à tenir les équilibres sociaux. Et nous continuons, je crois, de cheminer sur ce chemin avec de plus en plus de champions européens qui ont des liens dans nos deux pays, avec justement une modernisation de nos sociétés et de nos économies que nous souhaitons faire et qui soient à la fois vertes, justes et digitales.
Il n'y a qu'une chose qui peut nous opposer parfois, c'est le sport. Et la demi-finale de handball a tranché cette fois-ci. Et donc, j'arrive un peu plus soulagé, mais il y a bien des fois où c'était vous qui avez gagné, donc je sais que ce n'est que partie remise. En tout cas, nous étions heureux d'être à vos côtés, il y a quelques jours, si je puis dire, en tout cas de part et d'autre du terrain. Et je souhaite que vos athlètes, perchistes ou autres, puissent justement venir exceller en France lors des Jeux Olympiques et Paralympiques à l'été prochain. Vous y serez attendus, comme à chaque fois, comme les amis que vous êtes.
Merci en tout cas Monsieur le Premier ministre, cher Ulf, pour l'accueil qui nous ait fait.
Journalise
Bonjour Florian TARDIF pour CNews.
Monsieur le Président, un peu partout en Europe, les agriculteurs manifestent leur mécontentement et mettent l'Union européenne. Vous en avez parlé au défi de réagir pour les protéger notamment de ces accords de libre-échange que vous avez en partie défendu aux agriculteurs qui vous écoutent. Que leur répondez-vous aujourd'hui, et après 7 ans passés à la tête de l'État, est-ce que cette crise qui frappe l'Europe, mais qui touche également notre pays, ne vous pousse pas à mettre une forme d'échec de votre politique en France comme en Europe, en matière de politique agricole ?
Emmanuel MACRON
Écoutez, sans politique agricole commune, nos agriculteurs n'auraient pas de revenus ; pour beaucoup d'entre eux, ils ne pourraient pas vivre. Et donc, j'entends beaucoup de choses mais il faut restaurer la vérité.
Nous avons une politique européenne forte qui permet d'ailleurs et qui est un soutien très important au revenu de nos agriculteurs. Nous avons beaucoup œuvré ces dernières années au niveau français, européen pour améliorer ce revenu. Et si on regarde les chiffres en moyenne d'ailleurs, prenez les années 2021-2022, il s'est beaucoup amélioré. Simplement, des filières sont en difficulté et des inégalités se sont accrues au sein des filières. Et donc, c'est ça qu'il faut travailler.
Et quand on regarde les choses, les fruits et légumes, le maraîchage, la viticulture dans certaines régions, je pense en particulier l'Hérault, le Gard, l'élevage, la volaille ont connu des difficultés ces derniers mois, mais je pense que ce serait de la facilité de tout mettre sur le dos de l'Europe. Ces difficultés, elles sont parfois conjoncturelles, d'autres fois structurelles. Pour ce qui est de la volaille, c'est en effet l'arrivée en particulier d'une volaille qui était beaucoup moins chère venant d'Ukraine. C'est des choses dont on va discuter après-demain et qu'on va chercher à réguler. Pour ce qui est de la viticulture, c'est aussi, on le sait, des volumes très importants pour certaines catégories qui créent de l'abondance et qui mettent certains de nos producteurs en difficulté malgré tous les efforts qu'ils ont faits et on sait aussi qu'il y a les aléas climatiques qui peuvent toucher tel ou tel.
Donc quelle est la réponse ? 1. De continuer à appliquer les lois que nous avons faites en France. EGalim 1, EGalim 2 c'est-à-dire d'avoir des négociations commerciales beaucoup mieux surveillées, qui font que nos distributeurs - qui sont beaucoup moins nombreux - ne tirent pas toute la valeur ajoutée. Et que d'ailleurs, dans ce moment où je me félicite qu'on redécouvre l'importance de notre agriculture - moi qui n'ai cessé de la défendre - y compris dans les moments de crise que nous avions vécus, crise sanitaire que derrière ce que nous mangeons, il y a un travail et donc il y a un prix et une valeur. Il faut accepter de la payer. Et donc, 1. nous, nous allons continuer le travail pour vérifier et utiliser nos lois pleinement, pour protéger les agriculteurs, les transformateurs aussi, et faire que tout cela soit juste dans les négociations.
Il faudra aussi que ce soit un débat européen, car il ne vous a pas échappé que certains de nos distributeurs ont organisé par des grandes centrales européennes le contournement de la loi française. La solution, ce n'est pas moins d'Europe, c'est parfois plus d'Europe. Une Europe en tout cas moins tatillonne pour embêter ceux qui travaillent au quotidien et plus claire pour réguler les intérêts qui se constituent.
Ensuite, on a besoin de continuer à protéger le revenu européen par une PAC que nous avons négocié d'ailleurs lors du dernier cadre financier et qui nous permet d'accompagner aussi les transitions. Il faut donner de la visibilité à nos agriculteurs. Mais la PAC, la Politique Agricole Commune, est très importante pour leur revenu. Il faut qu'on soit aussi collectivement efficace pour que tout ce qui doit aller vers nos agriculteurs soit payé le plus rapidement possible. Et souvent, c'est ça, c'est de la simplification administrative au niveau européen comme au niveau national. Et donc il faut, comme l'a fait le Gouvernement, beaucoup de pragmatisme pour simplifier les choses.
Et puis enfin, il y a les transitions et ça, on le fait depuis 2017, vers lesquels on amène nos agriculteurs. Et est-ce qu'il faut renoncer à cette transition ? Non, parce que vous-même, à juste titre, quand il y a des problèmes qui arrivent avec tels produits phytosanitaires ou autres, vous êtes les premiers à dire ça ne va plus. Il faut simplement ne pas tomber dans l'agribashing que j'ai plusieurs fois dénoncé. Mais il ne faut pas non plus tomber dans une forme d'irréalisme qui consisterait à dire qu'on pourrait faire comme avant parce que l'agriculture européenne a développé un modèle historique qui a été très dépendant de la chimie. On est en train de sortir de ce modèle par des nouvelles pratiques, par un énorme travail. C'est une révolution qu'ont menée nos agriculteurs et il faut les remercier pour cela. On doit continuer de les accompagner, mais simplement, il faut maintenant leur donner de la visibilité avec des aides qui durent avec pour ceux qui décident d'aller vers le bio, ceux qui décident en tout cas de moderniser leur filière, de les accompagner dans la durée. Et là, l'Europe comme la France ont un rôle clé. Mais il faut qu'on s'améliore en termes d'efficacité, de lisibilité de ces aides.
Beaucoup de choses ont déjà été faites et on a beaucoup de filières qui ont vécu une petite révolution ces dernières années, qui fait que d'ailleurs ils gagnent mieux leur vie et qu'ils vivent mieux de leur travail. Maintenant, ce n'est pas terminé et là où il y a un vrai sujet au niveau européen - je l'évoquais encore tout à l'heure au Parlement - c'est la politique commerciale. Moi, j'ai toujours eu le même discours. J'ai eu, dès le discours de la Sorbonne - qu'évoquait Monsieur le premier ministre, c'était à l'automne 2017 - sur la politique commerciale européenne, elle doit être cohérente. Et donc nous, ce que nous défendons, c'est une Europe ouverte, qui commerce.
Mais on ne peut pas dire qu'on fait du commerce comme si on ne faisait pas de réformes chez nous. Et donc, quand on demande des efforts à nos industriels, à nos agriculteurs, sur leur production, eh bien on doit importer des produits venant de pays qui font le même type d'effort. Sinon vous créez une distorsion et une concurrence déloyale. C'est ce qui a fait que d'ailleurs, la France a très substantiellement renforcé le contrat avec le Canada qui avait été signé quand j'ai été élu en 2017 et ce qui fait que cela a été renforcé, structuré et qu'aujourd'hui il est bon pour notre agriculture. Les chiffres sont là pour le montrer. C'est ce qui fait que nous avons, par exemple, quand on a finalisé nos négociations avec la Nouvelle-Zélande ou avec le Chili, mis ce qu'on appelle des clauses miroir, qui fait qu'on a demandé à ces pays les mêmes règles que chez nous et que ce sont des accords qui ne sont pas mauvais ni pour le climat, ni pour notre agriculture.
Et c'est ce qui fait qu'aujourd'hui, tel que l'accord est en train d'être négocié avec le MERCOSUR, la France s'y oppose parce que c'est un accord qui date d'il y a plusieurs années et qui n'impose pas aux agriculteurs comme aux industriels du MERCOSUR des règles qui sont homogènes avec les nôtres. Ce qui fait d'ailleurs que la France n'a pas attendu cette crise pour le faire : on a pris, nous, un décret en 2022, interdisant les antibiotiques pour les poulets parce qu'on nous disait encore on va signer le MERCOSUR, etc. et il y a certains pays de cette région qui utilisent l'antibiotique simplement pour faire croître plus rapidement leurs poulets. C'est ce que l'on a interdit à nos agriculteurs. Donc on a mis une clause miroir, nous, dans notre droit. C'est ça ce qu'on veut au niveau européen. Donc voilà, on va continuer le travail.
Mais je tiens ici à dire qu'on a fait beaucoup de choses depuis 7 ans, que ce qui a été fait, a permis de nous améliorer collectivement. Et la situation serait bien pire si nous n'avions pas pris tout cela, qu'on doit continuer d'être extrêmement vigilant et rigoureux sur l'application des accords, des négociations commerciales dans notre pays, qu'on doit continuer de simplifier les choses. C'est tout l'objet des discussions en ce moment, c'est-à-dire simplifier les règles, faciliter, mieux accompagner le monde agricole, filière par filière, au niveau national et européen. Et en effet, on doit au niveau européen avoir une politique qui est cohérente avec cette souveraineté alimentaire que nous défendons.
C'est aussi pour ça que je verrais la Présidente de la Commission jeudi parce qu'on a demandé des choses très concrètes pour nos agriculteurs. 1. d'avoir des mesures claires sur les importations venant d'Ukraine, car on a aujourd'hui, en volume et en qualité des choses qui déstabilisent le marché européen, qu'il s'agisse des poulets comme des céréales. 2. d'avoir une clarté sur le MERCOSUR. Nous demandons à ce que l'accord là, tel qu'il est en place, ne soit pas signé. Et 3. d'avoir aussi des souplesses. Je ne veux pas rentrer ici dans la technique, mais sur la question des jachères, des prairies qui sont très importantes, on a besoin de produire plus dans un contexte de guerre en Europe et parce que nous voulons cette souveraineté alimentaire. Et donc on veut aussi de la souplesse sur certaines règles qu'il y a dans cette PAC qui sont un casse-tête pour beaucoup de nos agriculteurs.
Donc, comme depuis le premier jour, moi je continuerai à être aux côtés de notre agriculture, mais pas en opposant ou en désignant l'Europe comme le coupable, mais comme une structure dont on doit continuer, une institution dont on doit continuer de réformer la politique pour qu'elle soit cohérente avec nos ambitions. C'est possible, nous l'avons déjà fait, nous continuerons de le faire, mais je veux redire ici évidemment à nos agriculteurs tout le soutien du Gouvernement et de moi-même et le fait que nous trouverons des réponses aux difficultés que dans plusieurs filières et dans plusieurs types d'exploitation, ils sont en train de rencontrer.
Journaliste
TT News Agency, une question. Bonjour, il y a maintenant une grande incertitude quand il s'agit du soutien continu des États-Unis à l'Ukraine. Que pouvez-vous et la France faire pour que l'Europe prenne une responsabilité plus grande pour la sécurité européenne ?
Emmanuel MACRON
Merci infiniment de votre question en français d'abord, Madame.
Je pense depuis le début que l'OTAN joue un rôle majeur et les États-Unis évidemment en son sein, mais nous, Européens, avons fait à peu près la moitié de l'effort. L'Union européenne, c'est à peu près le même taux d'effort que les États-Unis. Nous devons nous mettre en situation de rester aux côtés des Ukrainiens dans la durée. Et donc, ça fait partie des décisions que nous aurons à prendre jeudi lors de la révision justement de nos engagements budgétaires. C'est que nous, Européens, nous devons continuer à accompagner le peuple ukrainien sur le plan économique et financier, sur le plan militaire, sur le plan de l'équipement, sur le plan de la formation parce que nous avons un objectif stratégique : la Russie ne peut pas gagner.
Et donc, c'est une chance pour nous aujourd'hui d'avoir un allié américain qui est si engagé. Notre souhait est qu'il le reste à nos côtés. Mais en effet, nous devons nous organiser de telle manière que si les États-Unis venaient à faire le choix souverain d'arrêter cette aide ou de la réduire, ça ne devrait pas avoir d'impact sur le terrain. C'est ce qui nous impose de rentrer et d'intensifier nos efforts en termes de production. C'est cette fameuse économie de guerre en matière de défense. Nous le faisons chez nous. Nous souhaitons le faire ensemble dans plusieurs domaines qui sont importants pour nos armées mais aussi pour l'effort de guerre à l'égard de l'Ukraine. C'est ce qui fait que nous allons devoir intensifier nos efforts de formation et que nous aurons dans les prochaines semaines et les prochains mois des décisions importantes à prendre pour renforcer et donner de la visibilité à l'Ukraine.
Je suis convaincu que les prochains mois sont décisifs et que même si nous avons eu la chance et si nous avons encore la chance d'avoir un soutien américain fort, c'est d'abord et avant tout notre problème. L'Ukraine est sur le sol européen, c'est un pays européen et si nous voulons une Europe en paix et stable nous avons besoin d'être crédible sur le plan de notre propre sécurité et défense vis-à-vis de tous nos voisins. Et donc, c'est aussi pour cela que je n'ai jamais opposé l'Europe de la défense à l'OTAN. Je vous ai toujours dit que l'Europe de la défense était une composante essentielle de l'OTAN. C'est peut-être ce que les prochains mois nous amèneront à démontrer in vivo. Mais nous serons là.