Texte intégral
SALHIA BRAKHLIA
Bonjour Christophe BECHU.
CHRISTOPHE BECHU
Bonjour Salhia BRAKHLIA.
SALHIA BRAKHLIA
Voilà plusieurs mois que le pays traverse une crise profonde de l'immobilier et en fin de semaine dernière un ministre délégué au Logement, Guillaume KASBARIAN a été nommé pour vous accompagner sur le dossier. Les professionnels parlent d'un marché totalement gelé et Guillaume KASBARIAN lui explique qu'il faut un choc de l'offre dans l'immobilier, expliquez-nous.
CHRISTOPHE BECHU
On a une crise de l'immobilier qui n'est pas propre à la France, qui touche l'Europe, qui touche la Chine, qui touche les Etats-Unis pour deux raisons simples, le prix de l'argent a augmenté avec les taux d'intérêt et le prix des matériaux de construction. Bilan, le pouvoir d'achat des gens a baissé, comment est-ce qu'on relance ce pouvoir d'achat immobilier ? C'est ça le choc de l'offre, c'est la façon dont on va à la fois aider à faire sortir des programmes dans des secteurs où on a des difficultés, où il faut massifier pour que ça coûte à la fin moins cher et comment on aide les gens à retrouver du pouvoir d‘achat immobilier ?
JEROME CHAPUIS
Ce n'est pas seulement l'offre donc, c'est aussi la demande alors ?
CHRISTOPHE BECHU
L'offre et la demande. Ce que je veux dire c'est qu'il y a une offre à relancer parce qu'on sait que si on est complet, il peut, il y a des allergies de la part de beaucoup de gens à avoir des voisins, il y a des pétitions contre le projet de résidence qui va s'implanter à côté de chez vous. Il y a des maires qui valorisent le fait qu'ils refusent des permis de construire pour garder la tranquillité de vie, pour garder un coin de nature à côté de chez eux. Et donc il faut à la fois qu'on joue sur ce qui freine la construction mais qu'on permette aussi à ceux qui veulent acheter de pouvoir le faire. Et ça c'est le choc d'offre.
SALHIA BRAKHLIA
Alors justement, pour ceux qui veulent devenir propriétaires, il y a un levier sur lequel vous actionner. Vous dites, nous devons redonner du pouvoir d'achat immobilier aux Français, les banques doivent fournir des efforts parce que concrètement, en fait, elles ne le font pas assez ?
CHRISTOPHE BECHU
On a aujourd'hui une contraction des crédits immobiliers qui est liée à ce que je viens d'indiquer et on est convaincu qu'il faut qu'on aille regarder dans des pays voisins ce que d'autres ont fait et en particulier on va s'intéresser la semaine prochaine, Guillaume KASBARIAN et moi avec le secteur bancaire a des dispositifs comme les crédits in fine, qui ont été lancés en Suisse dans des situations qui étaient comparables à celles que nous connaissons.
SALHIA BRAKHLIA
C'est quoi ?
CHRISTOPHE BECHU
Ça consiste en gros à dire au lieu d'acheter 100% de votre bien, vous emprunter pour en acheter 80% et les 20 %, les 20 derniers pour cent, vous allez là-dessus uniquement payer les intérêts. Vous ne paierez jamais cette partie-là qui sera revendue au moment où vous revendrai votre bien de manière à pouvoir acheter un peu plus grand avec le même budget. C'est exactement le souci qu'on a, c'est que la crise, elle a conduit à ce qu'avec le même budget, on ne puisse plus acheter aussi grand qu'avant et qu'on soit contraint d'acheter plus petit.
JEROME CHAPUIS
Pardon les 20%, ils correspondent à quoi ? C'est le foncier ?
CHRISTOPHE BECHU
Alors ça peut être le foncier ou c'est une part indéterminée de l'immeuble, c'est une fraction de manière à compenser une partie de la hausse des prix. On est aujourd'hui doublement bloqué. Vous avez d'une part le fait que vous ne pouvez pas emprunter plus de 30% de ce que vous gagnez, et donc ça vient caper votre capacité d'emprunt et de l'autre, la hausse des taux d'intérêt fait que, à salaire équivalent, vous pouvez acheter moins.
JEROME CHAPUIS
Juste une précision parce que les auditeurs qui nous écoutent, les 20% qui restent, qui en est le propriétaire ?
CHRISTOPHE BECHU
Les 20% qui restent, vous en êtes le propriétaire. De la même manière que le jour où vous achetez une maison, même si vous n'avez pas fini de la payer, vous en êtes propriétaire. C'est exactement…
JEROME CHAPUIS
Le banquier aussi un peu d'une certaine manière.
CHRISTOPHE BECHU
C'est vrai, mais ça l'est aussi aujourd'hui. Vous savez, c'est nouveau. On va avoir l'occasion de préciser tout ça…
JEROME CHAPUIS
Par contre ça ressemble à un tour de passe-passe, on découvre cette mesure avec vous ce matin, mais ça ressemble un peu à un tour de passe-passe.
CHRISTOPHE BECHU
Pas du tout. Est-ce que vous avez une bonne connaissance du bail réel solidaire ?
JEROME CHAPUIS
On a en tête ce type de mesure. Mais généraliser, c'est autre chose.
CHRISTOPHE BECHU
Généraliser avec ensuite un examen individuel de votre situation. Ce qu'on dit, c'est qu'on ne peut pas constater qu'on a une crise majeure qui touche tous les pays européens aujourd'hui et pensez qu'il ne faut pas qu'on regarde, y compris ce que d'autres autour de nous ont été capables d'apporter comme réponse.
SALHIA BRAKHLIA
Votre choc de l'offre, c'est donc d'essayer de mettre à disposition un maximum de logements pour les Français. Il y a un levier que vous souhaitez actionner, c'est celui du DPE, le diagnostic de performance énergétique, il faut clairement le simplifier.
CHRISTOPHE BECHU
Alors il y a deux choses. Il faut des logements neufs, c'est obligatoire et il faut qu'on accélère sur la rénovation et pour que certains biens reviennent en location. Et puis, pour faire en sorte de tenir compte de l'urgence climatique. Nous avons dans ce pays 1,5 million de passoires énergétiques qui sont louées, pour lesquelles on a une double ambition climatique et sociale. Le locataire d'une passoire énergétique, il perd moyenne deux fois plus que le locataire d'un bien qui n'est pas une passoire énergétique. Si on est sincèrement attaché et au social et à la planète, on voit qu'il faut bouger là-dessus. Pour ça, on a le DPE qui nous permet de regarder les logements par lesquels il faut commencer. Mais dans cela, on a réalisé qu'on avait environ 10 % de ces logements, les plus petits d'entre eux qui étaient pénalisés par les modes de calcul et on l'a corrigé hier, ce qui était un biais mathématique dans le calcul de ces dépenses.
SALHIA BRAKHLIA
Donc vous espérez sortir combien de logements de ces passoires énergétiques ?
CHRISTOPHE BECHU
Environ 10% pour lequel le calcul va de manière à ce qu'on ne pénalise pas les plus petites surfaces.
SALHIA BRAKHLIA
Mais là encore, est ce que ce n'est pas un moyen de contourner le calendrier d'interdiction de location des passoires énergétiques Parce que vous allez remettre environ 140 000 logements sur le marché de la location. Mais en fait absolument vous cassez Le thermomètre.
CHRISTOPHE BECHU
Pas du tout, le calendrier, il est maintenu, on le redit, on va regarder comment on continue à mieux accompagner les propriétaires. Mais en parallèle, quand vous avez une erreur dans le thermomètre, si vous corriger pas le thermomètre à la fin, la température ne veut plus rien dire. Or vous ne pouviez pas avoir un mode de calcul qui aboutisse à ce que 70% des plus petites surfaces soient considérées comme des passoires et seulement 10% des plus grandes. Il y avait un biais dans calcul qui désormais est corrigé, qui a été salué par l'ensemble des professionnels.
JEROME CHAPUIS
On a encore beaucoup de thèmes à voir avec vous. Peut-être dans la crise du logement, il y a aussi la crise de la construction. Vous en parliez. 30 000 nouveaux logements dans 20 territoires d'ici trois ans, c'est une promesse de Gabriel ATTAL dans son discours de politique générale, promesse qui avait déjà été faite il y a trois mois, en novembre dernier, par Elisabeth BORNE. Vous avez les 20 territoires qui sont concernés ?
CHRISTOPHE BECHU
On a 60 candidats, Jérôme CHAPUIS Donc, le sujet, ça va être quels sont les 20 qu'on choisit parmi les 60 et est ce qu'on ne va pas aller au-delà des 20 compte tenu du nombre de territoires qui sont candidats, on aura l'occasion dans les dix prochains jours de préciser quels sont les territoires sur lesquels ça va se passer.
JEROME CHAPUIS
Les choix ne sont pas encore faits.
SALHIA BRAKHLIA
2,6 millions de ménages sont toujours en attente d'un logement social Christophe BECHU, aujourd'hui, la loi SRU oblige les communes à construire 20 à 25% de HLM. En somme, on en est loin pour nombre d'entre elles. Gabriel ATTAL propose d'inclure les logements intermédiaires dans ce quota obligatoire de la loi SRU, prendre cette décision, ce n'est pas donner une prime aux communes qui n'ont fait aucun effort ?
CHRISTOPHE BECHU
Vous savez, le ministre que je suis est maire d'une ville qui a 37% de logements sociaux. Donc je peux vous assurer que c'est un sujet sur lequel non seulement je sais de quoi je parle, mais je suis convaincu que la mixité sociale, elle passe par le soutien au monde HLM. Mais on a aujourd'hui des parcours résidentiels et dans une vie, les 2 600 000 ménages dont vous parlez de Français qui sont en attente, on sait qu'à un moment vous pouvez entrer dans le logement social, à d'autres vous pouvez avoir besoin de logements abordables. Il faut qu'on pense le logement de manière globale, en regardant comment on décloisonne. L'ambition et l'enjeu, ce n'est pas de baisser l'ambition sociale, mais il faut qu'on regarde…
SALHIA BRAKHLIA
Quand on inclue des logements intermédiaires dans le quota obligatoire, forcément la part du logement social diminue.
CHRISTOPHE BECHU
On n'a pas précisé la manière dont les choses allaient se faire. Je peux vous assurer que notre ambition, c'est bien de soutenir le logement abordable, mais de conserver une ambition qui soit intacte sur le logement social. La preuve, il n'y a jamais eu autant de communes qui ont fait l'objet d'arrêté de carence et donc d'amendes de la part de l'Etat que cette année. C'est bien ce gouvernement qui l'a décidé.
SALHIA BRAKHLIA
Pardon mais c'est une question de juste de mathématiques. Si on inclut dans les 20 à 25% le logement intermédiaire, la part du logement social diminue.
CHRISTOPHE BECHU
Salhia BRAKHLIA, j'aurai l'occasion de revenir sur le sujet, y compris avec les bailleurs sociaux, avec la Fondation Abbé Pierre…
SALHIA BRAKHLIA
Vous entendez les inquiétudes ?
CHRISTOPHE BECHU Mais je l'entends, cette inquiétude, et on va évidemment faire en sorte d'y répondre en montrant comment, on est à la fois dans une approche globale et comment le logement ne peut pas être regardé comme un logement très social dans les calculs, dans la manière dont on intègre tout ça.
JEROME CHAPUIS
Christophe BECHU, on va parler d'automobile et d'agriculture avec vous juste après le fil info. Il est 8 h 41.
(…)
JEROME CHAPUIS
Toujours avec Christophe BECHU, ministre de la Transition écologique, de la Cohésion des territoires. Hier, sur France Info, ce matin encore, à l'instant, le président de la FNSEA, Arnaud ROUSSEAU, dit qu'il est prêt à repartir à l'action. Les agriculteurs s'inquiètent parce que dix jours après les annonces de Gabriel ATTAL, ils ne voient pas de concret arriver. Est ce qu'il est trop impatient ?
CHRISTOPHE BECHU
Dix jours, enfin, je veux dire, il le dit lui-même. Et il me semble que ce matin même, il est à nouveau reçu par le Premier ministre.
JÉRÔME CHAPUIS
Mais parce que le Salon de l'agriculture approche. C'est dans onze jours, là, pour le coup. Et vous aviez promis des annonces pour le Salon de l'agriculture.
CHRISTOPHE BECHU
Mais je peux vous assurer que non seulement, tous les ministères sont au travail, mais toute une partie des sujets qui ont été pointés par Arnaud ROUSSEAU ou par la FNSEA, ils ne datent pas d'il y a dix jours, d'il y a dix mois ou d'il y a dix ans. Ils remontent pour certains à 20 ou 30 ans de pratiques, d'empilement de textes qu'ils sont aujourd'hui en train de dénoncer. Donc je comprends une impatience qui exprime, j'allais dire, la souffrance de beaucoup d'agriculteurs, dans un contexte complexe pour leurs revenus et pour l'avenir de leur profession. Mais il ne faut pas confondre vitesse et précipitation.
JÉRÔME CHAPUIS
Alors, sur la question très concrète du plan Ecophyto, la réduction des produits phytosanitaires à horizon 2030, hier, qu'est-ce qui s'est passé précisément chez votre collègue du ministère de l'Agriculture ? 8 ONG de défense de l'environnement ont quitté la réunion sur ce sujet ?
CHRISTOPHE BECHU
Elles ne l'ont même pas rejointe, pour être précis, hier après-midi, il y avait ce qu'on appelle un COS Ecophyto, c'est-à-dire, une réunion consacrée à ce sujet, qui était prévue avant la crise, pour que les choses soient claires. Le mois de février avait été indiqué comme étant le moment où on devait avoir un temps de travail. Et hier, après-midi, on avait une séance de travail qui notamment portait sur quels indicateurs retenir pour l'avenir. C'est un sujet qui s'est invité sur les barricades, si j'ose dire…
SALHIA BRAKHLIA
L'indicateur qui mesure l'usage des molécules à risque…
CHRISTOPHE BECHU
Exactement, l'indicateur qui permet de mesurer si on est sur la bonne trajectoire de baisse des usages ou des risques par rapport à ces produits phytopharmaceutiques. Pour faire simple, on a un indicateur français. La FNSEA considère que ça n'est pas le bon indicateur parce qu'il ne permet pas de voir qu'on a considérablement diminué les phytos les plus à risques. Et c'est vrai, on a supprimé 98% au cours de ces six dernières années de ce qu'on appelle les CMR-1. Mais dans le même temps, le volume global de phytosanitaires utilisés dans le pays n'a pas baissé dans ces proportions. Et donc, il y a une demande de la part des agriculteurs de dire : changez d'indicateur. Il y a une demande de la part des ONG pour dire : gardez l'indicateur, et ce que, hier, nous avons fait avec Marc FESNEAU…
SALHIA BRAKHLIA
Alors, on fait quoi ?
CHRISTOPHE BECHU
C'est de dire, jusqu'à la fin de la semaine, pas seulement sur les deux indicateurs, l'Européen et le Français, mais sur trois ou quatre, voire sur un panel, on demande à toutes les parties prenantes de nous rendre pour la fin de la semaine leur avis. Ça vaut pour les agriculteurs, ça vaut pour des associations de défense de l'environnement, ça vaut…
SALHIA BRAKHLIA
Mais vous le connaissez l'avis de chacun, Christophe BECHU…
CHRISTOPHE BECHU
Pas complètement…
SALHIA BRAKHLIA
Votre avis à vous, c'est quoi ?
CHRISTOPHE BECHU
Salhia BRAKHLIA, entre le QSA, le HRI-1, le Nodu…
SALHIA BRAKHLIA
Ah, mais là…
JÉRÔME CHAPUIS
On a compris que c'était technique, mais…
SALHIA BRAKHLIA
Mais vous, vous le savez…
CHRISTOPHE BECHU
Mais pourquoi je vous dis ça, non, parce qu'on a, y compris dit : est-ce qu'il en faut un ? Est-ce qu'il faut un panel de plusieurs ? Est-ce qu'il faut une hybridation des critères ?
SALHIA BRAKHLIA
D'accord, la décision n'est pas prise.
CHRISTOPHE BECHU
Non, on se donne vraiment la semaine, et la semaine, ce n'est pas procrastiner. Donc, on sera avant le Salon en situation de pouvoir faire des annonces. Mais pour le moment…
JEROME CHAPUIS
… Une décision pour cet indicateur avant le Salon, ça, c'est sûr
CHRISTOPHE BECHU
Il est de toute façon indispensable qu'on ait un indicateur qui nous permette d'avancer…
SALHIA BRAKHLIA
Non, mais ça urge parce qu'en attendant, le plan Ecophyto, il a été mis en pause, mis en pause jusqu'à quand ?
CHRISTOPHE BECHU
En attendant, il y a une forme de procès d'intention qui consiste à dire, puisque vous avez dit que tout était sur pause, il ne se passe plus rien. Ça fait dix jours, et je me permets de dire que ce plan Ecophyto, on est censé le lancer cette année. On est au début de ce plan, donc il n'y a pas…
JEROME CHAPUIS
Attendez, le plan Ecophyto, on en parle depuis 2008 avec Nicolas SARKOZY, avec François HOLLANDE. Ça fait…
CHRISTOPHE BECHU
Jérôme CHAPUIS, votre mémoire est infaillible, mais c'est le troisième plan Ecophyto dont nous parlons, celui dont le début correspond à cette année 2024…
JEROME CHAPUIS
Avec des progrès qui pour l'instant sont jugés très largement insuffisants par les ONG…
CHRISTOPHE BECHU
Avec des progrès qui sont insuffisants, mais même par le gouvernement. Je dis juste qu'au cours de ces dernières années, le succès du dernier plan Ecophyto, ça a été la quasi-éradication des produits les plus dangereux pour la santé.
SALHIA BRAKHLIA
Mais alors le prochain, il est mis sur pause pendant combien de temps ?
CHRISTOPHE BECHU
Quelques jours ! On a toujours dit que c'était une pause de quelques jours. Il y a des sujets dont on ne discute pas. Ce sont des sujets de santé publique. Il y en a d'autres à l'intérieur sur les indicateurs, sur le travail par filière, sur le : pas d'interdiction sans solution et les 250 millions d'euros qui doivent être consacrés à la recherche. Bref, beaucoup de sujets sur lesquels on a vocation à avancer avec tout le monde.
SALHIA BRAKHLIA
Christophe BECHU, l'Elysée a décidé de mettre fin au leasing social des voitures électriques pour l'année 2024. Ce dispositif, qui doit permettre aux plus modestes d'accéder à une voiture électrique pour 100 € par mois, 90.000 demandes comptabilisées fin janvier, 50.000 demandes seront honorées finalement. Ce n'est pas fou de dire : on arrête parce que ça marche trop bien ?
CHRISTOPHE BECHU
D'abord, savourons-le quinze secondes. Ce que je veux dire, c'est que le Président la République avait dit : on va faire le leasing à 100 €. Il l'a fait. On a dit cette année, on va en faire 25.000. On a réussi à en faire le double et on a accompagné par un doublement de l'enveloppe le nombre de leasings qui ont été faits. Donc, il y aura une deuxième vague, peut-être une troisième, une quatrième vague plus tard, mais dans un premier temps…
SALHIA BRAKHLIA
C'est-à-dire dans l'année ?
JEROME CHAPUIS
Attendez…
CHRISTOPHE BECHU
Fin d'année, début d'année prochaine…
SALHIA BRAKHLIA
Parce que ce n'est pas ce que dit l'Elysée, là.
CHRISTOPHE BECHU
Non, ce qu'on dit, c'est qu'on avait prévu une première vague de 25.000. On a décidé de porter cette vague jusqu'à 50.000. Il y aura des nouveaux modèles qui sortiront en fin d'année. On veut se donner un peu de temps pour réfléchir aussi à la fois à ce qui a fonctionné dans le leasing, et à ce qu'on peut améliorer. Je me réjouis qu'on ait non seulement totalement rempli nos objectifs, qu'on les ait remplis en six semaines, et qu'on ait fait le double de ce qu'on avait dit qu'on ferait.
JEROME CHAPUIS
Il y a une question quand même, parce qu'il y avait eu entre 4 et 5 millions de personnes qui étaient potentiellement éligibles à ce dispositif. Il y a 50.000 chanceux qui l'ont obtenu. Qu'est-ce que vous dites aux autres ?
CHRISTOPHE BECHU
Eh bien, Jérôme CHAPUIS, le candidat à l'élection présidentielle, Emmanuel MACRON a dit : je ferai pendant mon quinquennat 100.000 leasings à 100 €. Dans ce contexte…
SALHIA BRAKHLIA
Eh bien, on est à 50.000, là…
CHRISTOPHE BECHU
Non, mais, on en a fait 50.000 en seulement six semaines…
JEROME CHAPUIS
Non, mais la question derrière, la question qui est derrière, c'est est-ce que c'était bien calibré…
CHRISTOPHE BECHU
Eh bien, on va prendre le temps…
JEROME CHAPUIS
Qu'il y ait 4 à 5 millions de personnes qui étaient éligibles au dispositif.
CHRISTOPHE BECHU
J'adore ce pays. Il y a quelques mois, on avait des critiques sur : ne vous ne faites rien, vous n'en faites pas assez, etc. Ensuite, on a pris la décision courageuse de dire : le leasing, on va le réserver à des voitures qui sont fabriquées en France et en Europe. Donc là, on a eu la critique en disant : il n'y aura pas assez de véhicules disponibles, on double la vague de leasing, et maintenant, on nous dit : pourquoi vous vous arrêtez si vite… ?
JEROME CHAPUIS
Non, mais ça pose, vous le comprenez bien, ça pose une question d'égalité, est-ce qu'il n'y a pas eu un peu d'arbitraire dans le choix des 50.000 personnes qui ont pu obtenir…
CHRISTOPHE BECHU
Pas du tout. Les critères étaient totalement transparents, c'était ouvert à la moitié des Français les plus modestes Et 50.000, ça correspond au nombre de ceux qui, à la minute où je vous parle, ont effectivement validé un dossier avec un constructeur.
JEROME CHAPUIS
Alors, l'automobile, c'est aussi cette information, cette nuit, les décrets concernant le bonus écologique ont été publiés. Il va diminuer pour les ménages les plus aisés. Les plus aisés, c'est quel niveau de revenus ?
CHRISTOPHE BECHU
Pour être extrêmement clair. Le leasing, il est destiné à la moitié de la population la plus modeste. Et aujourd'hui, il y a deux types d'aide pour les 50% les Français les plus modestes, le bonus en 2023 était de 7.000 €, il reste à 7.000 €.
SALHIA BRAKHLIA
Ça, ça ne bouge pas ?
CHRISTOPHE BECHU
Pour les 50% des Français les plus aisés, il était à 5000, il passe à 4000. L'objectif, c'est quoi ? C'est de continuer à rééquilibrer socialement le bonus, l'année dernière, sur un milliard et demi d'aide à l'électrification. Un quart de cette somme a été pour la moitié les plus modestes. Notre ambition cette année, entre le leasing, d'un côté, le maintien des aides pour les plus modestes, et le léger allégement pour les plus aisés, c'est d'être à 50-50. Et donc, c'est de rééquilibrer socialement le bonus en gardant la même ambition écologique dans un contexte où, certes, on rabote un peu les aides pour les plus aisés, mais le prix moyen des voitures électriques diminue…
JEROME CHAPUIS
Leasing social bonus écologique, est-ce qu'en fait, derrière tout ça, le sujet, c'est qu'il n'y a plus d'argent dans les caisses ?
CHRISTOPHE BECHU
Dire ça au moment où nous augmentons cette année de 10 milliards d'euros les budgets qui sont consacrés à la transition écologique ne me semble pas être une bonne manière de voir les choses. En revanche, si vous voulez me faire dire qu'on baisse les aides, y compris pour éviter une inflation budgétaire, oui, on ajuste le dispositif pour pouvoir aider davantage avec moins d'argent.
JEROME CHAPUIS
Christophe BECHU, on va parler des crues, on va parler de la sécheresse, on va parler de la neige dans quelques instants, juste après le Fil Info.
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SALHIA BRAKHLIA
Toujours avec Christophe BECHU, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Le Pas-de-Calais de nouveau les pieds dans l'eau, pour la troisième fois en quelques semaines. Vous étiez sur place avec Gabriel ATTAL en fin de semaine dernière. Vous avez ressenti de l'impuissance sur place ?
Christophe BECHU
Je ressens beaucoup d'exaspération. Je ressens évidemment une forme d'impuissance de la part d'élus qui constatent l'immense difficulté de répondre au désarroi de ceux qui sont dans cette situation, et en même temps une mobilisation, une solidarité qui sont exceptionnelles de la part de ces élus, de la part de ces anonymes, de la part de ces bénévoles. Vous savez…
SALHIA BRAKHLIA
L'impuissance, la vôtre aussi ?
CHRISTOPHE BECHU
L'impuissance relative, parce qu'évidemment on aimerait pouvoir faire beaucoup plus. Et en même temps, quand on regarde, en l'espace de quelques semaines, ce qui a été déployé, on est à plus de 500 millions d'euros, si on se dit les choses de manière très concrète, qui, à un titre ou à un autre, sont utilisés sur ce dispositif, on a une centaine de chantiers d'urgence qui sont en train d'avoir lieu pour débarrasser les embâcles, pour accélérer les travaux de curage. On a des centaines de personnes qui sont accompagnées dans des dispositifs de relogement. Il y a les experts qui commencent à passer pour être capables de pouvoir proposer des dispositifs de soutien de batardeaux. On met en place, dans le cadre du fonds Barnier, la possibilité de rachat des maisons pour ceux qui sont directement concernés. On accompagne les collectivités locales…
SALHIA BRAKHLIA
Donc, tout ce qui pouvait être fait, a été fait.
CHRISTOPHE BECHU
Vous ne m'entendrez jamais satisfait sur ce sujet. Tant qu'il y aura des gens qui seront dans des situations complexes... Il y a des urgences qui ne sont pas résolues mais pour autant, je veux vraiment saluer la mobilisation des collectivités locales et des services de l'Etat qui font le maximum, dans une situation qui est inédite, parce que se retrouver avec deux catastrophes naturelles coup sur coup, de cette manière, c'est compliqué, et avec des consignes très claires de la part du Premier ministre, pour qu'on puisse être vraiment au plus près de chaque situation. Moi, c'est un point tous les quinze jours sur le Pas-de-Calais, j'y étais la semaine dernière, j'y retournerai à nouveau dans quelques jours ou je réunirai à nouveau par visio, un point pour qu'on vérifie point par point que tout est suivi, les entreprises, les particuliers, le relogement, le rachat.
JEROME CHAPUIS
Et le curetage des canaux ? Parce que le président de la FNSEA disait que les règles n'étaient pas claires encore.
CHRISTOPHE BECHU
Elles ont changé le 1er février. J'ai pris un décret dans le cadre de la simplification, qui permet d'arrêter, on était globalement dans une situation où il fallait neuf mois avant de pouvoir faire le curage, désormais, c'est deux.
JEROME CHAPUIS
Les crues au Nord de la France, la sécheresse dans le Sud, dans les Pyrénées-Orientales principalement. Il y a de la vigilance, il y a aussi des mesures d'urgence ?
CHRISTOPHE BECHU
Alors, la situation dans les Pyrénées-Orientales, elle est très préoccupante. On est à 90% de déficit sur l'humidité des sols. Ça semble fou quand on voit effectivement la situation ailleurs dans le pays. Il y a beaucoup de mesures qui ont été prises l'année dernière, en particulier là aussi avec la connexion entre les services préfectoraux et les collectivités territoriales, avec des baisses considérables de consommation d'eau pendant l'été dernier, malgré la saison touristique où tout le monde a fait des efforts.
SALHIA BRAKHLIA
Beaucoup de restrictions.
CHRISTOPHE BECHU
Mais là, on voit bien qu'on est à nouveau dans une situation très compliquée. J'aurai l'occasion de retourner dans les Pyrénées-Orientales dans les prochaines semaines. On va participer au financement, par exemple, d'études pour un projet de réutilisation d'eaux usées. Il faut à la fois qu'on joue sur la sobriété, avec un guide préfectoral qui va continuer à préciser ce que sont les restrictions en termes d'usages, et en parallèle, qu'on regarde comment on peut être capable d'aller trouver d'autres sources d'eau ou d'économies.
SALHIA BRAKHLIA
C'est inquiétant ce que vous nous dites, parce qu'on est en hiver et qu'on est donc à quelques mois de l'été. La sécheresse s'installe aussi en été, on le sait, on l'a vu l'année dernière. Du coup, il va y avoir de nouvelles restrictions d'eau dans le Sud de la France.
CHRISTOPHE BECHU
On les dimensionne évidemment en fonction de la réalité de la situation. La particularité de l'eau, et on le voit particulièrement aujourd'hui, à la différence de l'énergie, c'est que chacun est dans une situation qui dépend du local, des cours d'eau, de la pluie, du territoire. Je ne parle pas de règle nationale…
SALHIA BRAKHLIA
Et là les nappes phréatiques sont vraiment…
CHRISTOPHE BECHU
... je parle bien de ce qui se passe dans les Pyrénées-Orientales où il n'a pas plu depuis tellement longtemps qu'on a des déficits d'humidité, qu'on a des niveaux de nappes qui sont extrêmement bas, qui sont extrêmement préoccupants. Plus on anticipe, moins on est, on se retrouve en face de décisions contraintes et plus on peut associer tout le monde à la décision. C'est ce à quoi travaille en ce moment même le préfet des Pyrénées-Orientales.
JEROME CHAPUIS
Dans les Pyrénées, comme d'ailleurs dans les Vosges, mais aussi dans les Alpes, il y a un déficit de neige en cette période de vacances d'hiver. Vous êtes doublement concerné comme ministre de la Transition écologique et de la Cohésion, c'est-à-dire de l'aménagement du territoire. Le modèle du ski, c'est fini pour certaines régions en France ?
CHRISTOPHE BECHU
Le dérèglement climatique, il amène une baisse forte de l'enneigement. Et dans la stratégie d'adaptation du pays qu'on prépare, à une France qui va vers les + 4°, s'il n'y a pas une réaction plus forte de la totalité des états. On sait que les stations qui sont à basse altitude, elles ne doivent pas miser sur l'avenir de remontées mécaniques, mais elles doivent s'interroger sur des modèles 4 saisons, elles doivent regarder en face une situation qui nécessite à la fois un accompagnement de l'Etat, mais une prise en compte de ce qui est en train de se passer. Il y a un rapport de la Cour des comptes...
CHRISTOPHE BECHU
Il y a un rapport de la Cour des comptes, récemment, voilà, qui a pointé l'insuffisance des politiques publiques sur le sujet.
CHRISTOPHE BECHU
Ce sera un chapitre entier de notre programme national d'adaptation au changement climatique que nous sommes en train de préparer, dont j'ai lancé le travail l'année dernière, en annonçant cette nécessité de se préparer à 4°, et qu'on veut avoir finalisé pour le début de l'été.
SALHIA BRAKHLIA
" Surprenante ", c'est ce que pense Edouard PHILIPPE, le président de votre parti Horizons, de la nouvelle composition du gouvernement. Dans sa bouche, ce n'est pas un compliment ?
CHRISTOPHE BECHU
Vous connaissez l'amour d'Edouard PHILIPPE pour les mots.
SALHIA BRAKHLIA
Oui…
CHRISTOPHE BECHU
Chaque mot a un sens, il est en soutien de ce gouvernement. Ce n'est pas une surprise négative qui s'accompagne, j'allais dire, des critiques des extrêmes. Il est en soutien du gouvernement. Il souhaite la réussite de Gabriel ATTAL…
SALHIA BRAKHLIA
Eh bien il dit quand même ne pas comprendre le choix de Rachida DATI à la Culture.
CHRISTOPHE BECHU
Il assume, sans langue de bois, qu'il y a quelques éléments de casting qui l'ont surpris. Vous reconnaîtrez que c'est plutôt sain au sein du débat politique que d'être capable de dire les choses.
JEROME CHAPUIS
Il aurait pu montrer un peu plus d'enthousiasme ?
CHRISTOPHE BECHU
Moi je l'ai trouvé, encore une fois, très en soutien du dispositif. Il aurait pu avoir des mots qui étaient plus euphémisants, je me réjouis qu'il en ait choisi un qui lui correspond assez bien.
SALHIA BRAKHLIA
Edouard PHILIPPE qui dit aussi ne pas avoir été consulté pour le remaniement. D'ailleurs, lui était pour le maintien d'Elisabeth BORNE. Ça ne devient pas un problème qu'Emmanuel MACRON n'écoute plus ses partenaires ? On l'a vu avec François BAYROU la semaine dernière, avec Edouard PHILIPPE maintenant.
CHRISTOPHE BECHU
Vous savez, ce qui se passe entre le président de la République et ses principaux partenaires, sincèrement, ça leur appartient, et la plupart ont la pudeur de…
SALHIA BRAKHLIA
Mais vous êtes un partenaire vous aussi, vous faites partie d'Horizons, a un moment, ça doit un peu vous toucher que le président de la République ne fait pas attention à votre formation politique.
CHRISTOPHE BECHU
On ne peut pas dire ça, parce que malgré, y compris la manière où la lecture journalistique qui en est faite, que mon parti Horizons, se retrouve aujourd'hui en charge de l'Ecologie, des Territoires et de la Santé, c'est plutôt une marque de respect qu'une absence de confiance.
SALHIA BRAKHLIA
Il n'y a pas un manque de considération ?
CHRISTOPHE BECHU
Ce ne sont pas des petits ministères, ce sont des ministères qui intéressent la vie des Français tous les jours. Horizons est un partenaire à part entière à l'Assemblée nationale, au sein du Parlement européen, au sein du gouvernement, avec sa sensibilité, avec son leader qui a cette loyauté, cette liberté dans le ton, mais avec en parallèle la nécessité de travailler ensemble pour régler à la fois tous les sujets qu'on a évoqué ce matin ensemble et puis tous les autres.
JEROME CHAPUIS
Christophe BECHU, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, merci d'avoir été avec nous ce matin sur France Info.
CHRISTOPHE BECHU
Merci à vous.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 14 février 2024