Texte intégral
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bonjour à toutes et à tous. Vous voulez savoir ? Eh bien, " Parlons vrai " ce matin avec Patrice VERGRIETE, ministre des Transports. Bonjour.
PATRICE VERGRIETE
Bonjour Jean-Jacques BOURDIN.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être avec nous. Et je vais commencer avec le Pass rail. Dès cet été, 49 € - on est bien d'accord ? - pendant deux mois, c'est bien ça, Patrice VERGRIETE ? Juillet-août pour les moins de 27 ans. Pourquoi pour les moins de 27 ans seulement ?
PATRICE VERGRIETE
Alors d'abord, je rappelle comment est née cette idée. C'était une interview sur le thème de la jeunesse avec « HugoDécrypte », du président de la République. Il s'était engagé effectivement auprès de « HugoDécrypte » à examiner si les régions en étaient d'accord, ce Passe rail, c'est-à-dire cet abonnement à 49 € pour les jeunes. Et donc je me suis dit qu'effectivement, pour répondre au mieux à cet engagement du président de la République, cibler la jeunesse, ça pouvait être une option. En plus, la difficulté qu'on a vue en Allemagne quand ils ont installé le Pass rail pour tous, c'est que les trains ont été très vite saturés parce qu'en fait on peut avoir des problèmes d'offres, derrière. Quand vous augmentez la demande, derrière, l'offre peut ne pas suivre. Et c'était vraiment aussi le risque qu'on avait en France que si on partait trop fort, trop vite, on risquait simplement de saturer les flux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Ça existe en Allemagne et en Autriche, le Pass rail illimité, quel que soit l'âge, à 49 €. 49 € donc, deux mois, moins de 27 ans. A partir de quand pourrai-je m'abonner ?
PATRICE VERGRIETE
Alors on est en train de regarder les choses. Le but du jeu, c'est que ça puisse être opérationnel pour les mois de juillet-août. Donc on va essayer de faire ça pour le début du mois de juin. Théoriquement, au début du mois de juin, on devrait pouvoir avoir accès au Pass rail.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc début des abonnements début juin.
PATRICE VERGRIETE
Oui, théoriquement, c'est la date qu'on essaie d'évaluer parce que maintenant, on vient d'avoir l'accord, on travaille avec la SNCF pour pouvoir le faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
J'imagine. Donc début juin où pourrai-je me procurer ce Pass rail ?
PATRICE VERGRIETE
Il y aura forcément un site internet qui devrait pouvoir le permettre, peut-être les guichets de la SNCF ou sur le site de la SNCF. Là, c'est ce qu'on est en train d'examiner maintenant. Comme je l'ai dit, on vient d'avoir l'accord avec les régions. Donc là, on est en train de travailler sur le dispositif technique.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et sur des sites concurrents de SNCF ?
PATRICE VERGRIETE
Ce sera un billet émis par la SNCF. Donc ce sera sur les sites de la SNCF.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Uniquement SNCF.
PATRICE VERGRIETE
Oui, SNCF, tout à fait.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Expérimentation donc… c'est une expérimentation ?!
PATRICE VERGRIETE
Oui, j'ai voulu reprendre le terme « expérimentation » parce que l'idée, c'est peut-être d'aller plus loin. C'est-à-dire qu'on commence par les moins de 27 ans l'été, on peut-être essayer d'étendre. Il y a déjà l'idée de l'extension à l'Ile-de-France qui peut être envisagée pour 2025…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui parce que l'Ile-de-France n'est pas…
PATRICE VERGRIETE
Alors pourquoi l'Ile-de-France n'est pas dedans ? C'est une question technique, ce n'est pas une question politique, c'est une question technique. C'est qu'en fait, en Île-de-France, on n'a pas une distinction entre les abonnements train et les abonnements métro et RER. Or, dans les autres villes de province, le ticket de bus n'est pas lié au ticket de train. Et donc on aurait dû distinguer des billetteries séparées pour le métro d'un côté et le train et on ne pouvait pas faire ça dans le délai pour 2024. Donc c'est assez complexe finalement. Il faut aussi que la RATP puisse reconnaître un titre émis par la SNCF en Ile-de-France. Donc il y a des problèmes techniques tout simplement, qui ne permettent pas de le faire en 2024. On va regarder pour 2025. Puis je peux vous annoncer aussi autre chose, c'est qu'hier j'ai rencontré mon homologue allemand et on est en train de réfléchir aussi, peut-être pour 2025, à un Pass rail franco-allemande qui permettrait effectivement de pouvoir voyager à la fois en France et en Allemagne.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Au même prix ? Avec un abonnement de 49 € ?
PATRICE VERGRIETE
Oui, c'est une piste qu'on a évoquée hier avec le ministre allemand. Alors ce n'est pas une annonce puisqu'on va travailler. Mais l'idée, vous voyez, c'est de partir d'un projet socle. On part d'un socle, les moins de 27 ans, juillet-août et on voit comment on va pouvoir améliorer les choses petit à petit et essayer d'aller le plus loin possible pour permettre à la jeunesse de pouvoir voyager librement, se déplacer librement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Utiliser les trains Intercités, les TER et les trains de nuit ? On est d'accord ?
PATRICE VERGRIETE
Oui, tout à fait, Intercités, TER et trains de nuit.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais comment je fais si j'habite Paris ou la région parisienne ?
PATRICE VERGRIETE
Il n'y a pas de problème. Imaginons que vous habitez Lille ou vous habitez Rennes, l'Intercités ou le TER qui vous permet d'arriver à Paris, il est dans le dispositif, il n'y a pas de problème. Et pour repartir de Paris, il est dans le dispositif. C'est simplement à l'intérieur de l'Ile-de-France… les Transilien en fait… les Transilien ne sont pas dedans. En plus il y a le pass Navigo, donc c'était aussi assez complexe.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et est-ce qu'on peut imaginer un Pass rail à l'année ?
PATRICE VERGRIETE
Ça fait partie des options qu'on peut imaginer pour les années qui viennent. Mais encore une fois, je le dis, ce n'est pas que l'Etat, il y a les régions puisque les TER, c'est les régions, les Intercités, c'est l'Etat, donc il faut qu'on se mette d'accord. Là, on s'est mis d'accord avec la région, ça n'a pas été facile. Mais je remercie à la fois Carole DELGA, la présidente des régions de France, qui s'est vraiment battue pour convaincre l'ensemble de ses homologues ; je remercie tous les présidents de région qui finalement ont joué le jeu. C'est une très bonne nouvelle. Il faut continuer à travailler ensemble. Je veux jouer partenaire avec les régions et on va essayer de construire ce dispositif ensemble.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Patrice VERGRIETE, au Sénat, en commission des lois, a été adoptée mercredi, avant-hier, une proposition de loi encadrant le droit de grève dans les transports. Plusieurs mesures : la possibilité pour le gouvernement de neutraliser 30 jours par an durant lesquels la grève serait interdite aux heures de pointe. Vous souscrivez ? Vous soutenez ce texte ?
PATRICE VERGRIETE
Non, non. Le gouvernement affiche une position contre pour plusieurs raisons. D'abord, il y a un problème de constitutionnalité - le droit de grève est quand même un droit constitutionnel - et puis ensuite, j'ai envie de dire des éléments complémentaires… Choisir des jours, oui, mais lesquels ? Privilégier les vacances ?…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vacances scolaires, jours fériés, jour d'élections, jour de référendum, c'est ce que propose le texte.
PATRICE VERGRIETE
Tout le monde dans notre pays, malheureusement, ne prend pas de vacances. Et alors ça voudrait dire négliger la mobilité du quotidien qui est aussi un de mes soucis et peut-être aussi l'une de mes priorités. Donc ce n'est pas facile de choisir entre des gens qui prennent des vacances et ceux qui peut-être galèrent au quotidien pour pouvoir se déplacer. Donc je ne vois pas pourquoi on privilégierait une catégorie de Français à aux autres. Donc vous voyez, ça pose d'autres questions derrière, mais surtout un problème de constitutionnalité. Donc le gouvernement sera contre.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc on n'encadre pas le droit de grève, on est bien d'accord, même pendant les Jeux olympiques ?
PATRICE VERGRIETE
Moi, je fais totalement confiance aux syndicats et aux directions des grands groupes de transport…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Même si des préavis de grève ont été déposés…
PATRICE VERGRIETE
Il y a des discussions en amont entre les syndicats et la direction, notamment pour la gratification de ceux qui vont se mobiliser pendant les Jeux olympiques, ce qui est normal. C'est pendant les vacances, il y a un certain nombre de salariés qui vont devoir faire une croix sur leurs vacances parce qu'ils devront être mobilisés à fond pour les J.O. Et le reste de l'année, comme c'est la mobilité du quotidien, on doit se mobiliser aussi. Qu'il y ait une discussion entre les syndicats et la direction sur la gratification du personnel qui va être mobilisé pour les J.O., c'est normal ; que cette discussion soit parfois difficile, c'est le sens du dialogue social, mais le tout, c'est que le dialogue social se fasse bien. Et je l'ai dit à la SNCF notamment mais c'est vrai pour tous les autres, on a des joyaux en France, des grands groupes de transport, d'ailleurs qui connaissent des succès, même à l'étranger, eh bien que les syndicats et la direction mènent un dialogue social de qualité, c'est ma demande en tant que ministre et je leur fais confiance…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Avec des primes… il y a des discussions… des primes, on parle de 1.500 €, c'est ça ?
PATRICE VERGRIETE
Peu importe, ce n'est pas à moi…
JEAN-JACQUES BOURDIN
1.900 pour les policiers, 1.500 dans les transports, c'est à peu près ça.
PATRICE VERGRIETE
Mais ce n'est pas au ministre de définir ça, c'est le dialogue social à l'intérieur des entreprises.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais si jamais il y a grève, vous faites quoi ?
PATRICE VERGRIETE
Mais je ne pense pas un seul instant qu'il y aura grève…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous vous engagez, vous pensez qu'il n'y aura pas de grève…
PATRICE VERGRIETE
Ce n'est pas une question d'engagement. Je fais confiance, je fais confiance aux partenaires sociaux, je fais confiance aux directions de ces grands groupes de transport…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Travailler est un devoir parfois ?
PATRICE VERGRIETE
Travailler aujourd'hui… En tout cas, le droit de grève ne doit être utilisé qu'en dernier recours.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Travailler est un devoir parfois.
PATRICE VERGRIETE
Je vous ai répondu très clairement…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui… c'est difficile à dire, c'est difficile à dire. Ça peut choquer. Travailler est un devoir.
PATRICE VERGRIETE
Travailler pendant les Jeux olympiques, c'est engager l'image de la France, c'est engager l'image de son entreprise. Et je pense qu'à un moment donné, il y a quelque chose qui est au-dessus. Il y a un intérêt supérieur et que directions et syndicats doivent entendre. Et donc on pourrait considérer que travailler est un devoir pour son pays à ce moment-là, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Est-ce que la ligne 14 sera prête pour les Jeux ?
PATRICE VERGRIETE
Oui, tout à fait. Elle sera inaugurée en juin. Aujourd'hui, nous inaugurons le tramway T3 B. Dans un mois, nous inaugurerons le prolongement du RER E Eole et en juin, nous inaugurerons le prolongement de la ligne 14, à la fois vers Saint-Denis Pleyel et vers Orly. Donc oui, tout sera prêt pour les Jeux, tout ce qu'on avait identifié comme évolution des transports.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Avec un ticket à 4 € pour que personne n'en achète… Vous avez compris ce que ça voulait dire ? Pour que personne n'en achète… moi je n'ai pas très bien compris.
PATRICE VERGRIETE
La tarification en Ile-de-France dépend de la région, donc ça ne dépend pas de l'Etat, mais néanmoins, ce que voulait dire Valérie PECRESSE, c'était que les tarifs du Pass Navigo ne changeront pas, si on achète son billet en amont, ça n'aura pas d'impact, simplement ceux qui vont acheter leurs billets en arrivant ici… Bref, si je résume ce que voulait dire Valérie PECRESSE, c'est qu'elle fait tout pour que les Franciliens ne payent pas plus cher le métro pendant la période des Jeux, mais que ceux qui viendront, les touristes qui viendront aux Jeux olympiques payent plus cher et quelque part apportent une contribution aussi au financement des Jeux.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous venez à son secours…
PATRICE VERGRIETE
Non, ce n'est pas à son secours… c'est pour expliquer sa position et on travaille bien ensemble pour préparer les Jeux olympiques avec l'ensemble des collectivités locales.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Tant mieux. Les RER métropolitains, c'était une promesse d'Emmanuel MACRON. Combien de villes concernées ?
PATRICE VERGRIETE
Il y a beaucoup de candidats aujourd'hui qui arrivent. On verra, j'ai envie de dire, à la fin ; le président de la République avait parlé de dix-quinze métropolitains, on verra si on fait plus ou pas. C'est très important, ça risque d'être l'année du RER métropolitain. On va là bientôt, à mi-avril envoyer à l'ensemble des territoires qui peuvent être intéressés une sorte de cahier des charges pour obtenir d'abord une labellisation pour pouvoir être examiné. Fin juin, on devrait avoir les premières labellisations, ça veut dire un périmètre défini, un système de gouvernance prédéfini, les grandes orientations du projet. Et puis ensuite, on va commencer à engager une discussion avec ces collectivités qui auront été labellisées, pour avoir un arrêté définitif…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Quelles sont les premières villes qui seront concernées, vous pensez ?
PATRICE VERGRIETE
Ecoutez, je vais attendre les dossiers qui vont arriver d'ici mi-juin pour vous répondre, mais je pense que l'année 2024 sera marquée par d'abord les premières labellisations et les premiers arrêtés probablement à la fin de l'année, pour lancer ces projets de RER métropolitain qui sont très importants. Je veux insister parce que c'est la mobilité du quotidien. Je parlais tout à l'heure de priorité. Je pense que là, on est dans la priorité. Deux objectifs, si vous me permettez de préciser le RER métropolitain : d'abord, réussir à développer les réseaux et les services de transports collectifs dans les régions métropolitaines. Donc vous avez une métropole, vous avez les villes moyennes qui sont autour et les petites villes qui sont autour, c'est ça le périmètre des RER métropolitains. Et donc c'est comment on réussit à développer le transport collectif performant, express entre ces villes moyennes et la métropole, pour justement permettre aux populations au quotidien de pouvoir privilégier les transports collectifs et donc un report modal de la voiture vers ces transports collectifs. Transports collectifs, ça veut dire train, mais pas seulement, ça peut être car express. Voilà. Ensuite, ce qui est très important, c'est justement peut-être de revoir l'aménagement du territoire, c'est-à-dire comment une métropole s'articule mieux avec les villes moyennes et les petites villes qui sont autour ? Comment on réussit finalement à rééquilibrer les choses entre une métropole qui a fini par concentrer les emplois et les populations et des villes moyennes qui se sont vidées ? Et donc aujourd'hui, le RER métropolitain doit permettre de mieux équilibrer ces régions métropolitaines.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Patrice VERGRIETE, avant de passer à la route, je termine avec le train. Les Ouigo lents, je crois que ça va se développer. On est sur Lyon, on est sur Nantes, Rennes et d'autres villes bientôt.
PATRICE VERGRIETE
Oui, les Ouigo se développent. Oui, tout à fait, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Les Ouigo lents.
PATRICE VERGRIETE
Oui, les Ouigo lents et les Ouigo d'une manière générale se développent bien, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bon, d'accord. Voitures électriques, ventes décevantes, vous avez vu ça. Ventes décevantes. J'ai vu aussi que les voitures hybrides consommaient quatre fois plus que ce qu'indiquent les constructeurs. Ça m'a paru curieux, mais bon, je ne sais pas. Est-ce qu'il y a tromperie ?
PATRICE VERGRIETE
D'abord la voiture électrique est absolument indispensable parce que demain, toutes les mobilités ne pourront pas se faire en transport collectif. Quand vous habitez un village de 1 000 habitants ou 500 habitants, il ne faut pas imaginer demain qu'il y aura un bus pour venir desservir un village.
JEAN-JACQUES BOURDIN
On ne revient pas sur la date de 2035.
PATRICE VERGRIETE
Non, non. D'abord, pourquoi la voiture électrique est essentielle ? On ne va pas mettre tout le monde dans le transport collectif demain et probablement encore une majorité des déplacements se feront en voiture demain.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui.
PATRICE VERGRIETE
Et donc du coup, décarboner la route y compris les camions, c'est un enjeu essentiel donc il faut réussir la conversion vers la voiture électrique. Quel est le problème principal aujourd'hui ? Le modèle économique, ça reste cher. C'est pour ça que le leasing social a été un succès extraordinaire. Le gouvernement cherche à accompagner effectivement l'accès à cette voiture électrique qui reste encore chère. Il y a la question des bornes, des bornes de recharge. Finalement, recharger sa voiture électrique dans son garage quand on habite dans le périurbain ou dans le rural, c'est plutôt économique. Le faire sur l'espace public quand on est un urbain et qu'on n'a pas de garage, c'est beaucoup plus compliqué et beaucoup plus cher. Donc on voit qu'il reste des problèmes. C'est ce qu'on essaie de gérer parce qu'il va falloir réussir quand même cette mutation vers la voiture électrique. Donc on travaille avec les constructeurs effectivement pour pouvoir avoir des modèles moins chers demain. On devra réussir à accompagner, probablement par des subventions comme le leasing social, l'accès à ces voitures électriques notamment pour les plus démunis. Donc il y a un enjeu effectivement, là, qui est un enjeu économique considérable mais il faut y arriver.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et il y aura un utilitaire tout électrique en 2026. Des mégas camions sur nos routes ou pas ? Est-ce que vous allez vous opposer ? Est-ce que la France va interdire la circulation des méga-camions ? La France s'oppose à la circulation des méga-camions ?
PATRICE VERGRIETE
La France s'oppose à la circulation des méga-camions mais on s'oppose même à la directive européenne aujourd'hui qui est sur la table pour plusieurs raisons. D'abord parce qu'on est en train de faire des efforts pour le fret ferroviaire et pour le transport fluvial de marchandises. On est en train d'injecter 4 milliards d'euros sur l'infrastructure de fret ferroviaire d'ici 2032 pour pouvoir améliorer le fret ferroviaire. On ne va pas faire des méga-camions qui vont aller exactement à l'inverse de ce qu'on est en train de faire, donc c'est non. Deuxièmement, je discutais hier avec mon homologue allemand. Ils sont en train de refaire, ils doivent faire 400 ponts en Allemagne. Aujourd'hui, 44 tonnes, ce n'est pas possible sur les ponts allemands. Donc on va laisser des 44 tonnes circuler mais ils ne peuvent pas circuler sur les ponts. Ils ne vont pas circuler à beaucoup d'endroits ces méga-camions. Aujourd'hui, nos infrastructures ne sont pas adaptées à des poids de cette nature, conc aujourd'hui ça coûterait une fortune pour adapter nos infrastructures aujourd'hui à ce type de méga-camions. Donc la réponse de la France, c'est non.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et les projets d'autoroute en France ? Il y avait huit projets, je crois. Certains vont être abandonnés, vous confirmez ?
PATRICE VERGRIETE
Alors moi, je suis un adepte du cas par cas. C'est-à-dire, je pense qu'il n'y a pas d'idéologie à avoir. Je suis un élu local alors vous comprenez aisément…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Il y a donc des projets qui vont être abandonnés.
PATRICE VERGRIETE
Il y a des projets qui seront sans doute abandonnés s'il n'y a pas de pertinence au niveau local à le faire. Il y a des projets qui ont du sens et donc il faut continuer à faire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Lesquels ?
PATRICE VERGRIETE
Justement, on va regarder au cas par cas. Là, l'A69 est lancée. Elle a été soutenue par l'ensemble des élus locaux de la région jusqu'à l'ensemble des territoires. Elle a fait l'objet d'un processus démocratique normal. Il est légitime qu'elle se fasse parce que c'est dans l'intérêt général. Mais il y a d'autres autoroutes ou routes aujourd'hui qui doivent être développées, il ne s'agit pas d'être anti-routes. Il ne s'agit pas d'être anti-routes demain, on aura encore besoin de la route demain. Mais il faut le faire avec intelligence et il faut le faire là où il n'y a pas d'alternative par exemple. Si on peut développer des alternatives par le fret ferroviaire, par le déplacement du transport collectif pour les voyageurs, faisons-le en priorité. Donc la priorité, c'est le report modal, mais ce n'est pas possible partout. Tout à l'heure, je vous parlais de villages de 1 500 habitants, il ne faut pas rêver. Donc à un moment donné, il faut être pragmatique et c'est absolument essentiel. Quand on est élu local, on est pragmatique. Il faut trouver la bonne réponse, celle qui évidemment sera en réponse à la lutte contre le changement climatique, mais aussi celle qui est réaliste.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Patrice VERGRIETE, la taxe sur les rentes dont nous parle le Premier ministre Gabriel ATTAL, est-ce que le gouvernement va reconduire la taxe sur les sociétés d'autoroutes et les aéroports ?
PATRICE VERGRIETE
D'abord, c'est lancé.
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est lancé pour 2024, oui.
PATRICE VERGRIETE
Le débat sur les autoroutes, il se situe ailleurs, en fait, en réalité aujourd'hui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
4,6 % du chiffre d'affaires.
PATRICE VERGRIETE
Oui. Non mais c'est lancé et on va continuer. Pourquoi on arrêterait ? Mais le débat sur les autoroutes, il est ailleurs. C'est qu'après 2030, 2031, 2032, nous avons la fin des premières concessions d'autoroutes. Et donc la question aujourd'hui, c'est quid après 2031, 2032 ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
Renouvellement ou pas ?
PATRICE VERGRIETE
C'est justement la discussion qui est sur la table et c'est cette question-là aujourd'hui…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous êtes favorable à un renouvellement ou pas ?
PATRICE VERGRIETE
Je suis favorable pour qu'on puisse en débattre. J'ai même dit que je pense que le citoyen devrait avoir son mot à dire sur ces questions-là. Je pense que ce serait intéressant de l'associer à cette réflexion.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Comment ?
PATRICE VERGRIETE
Justement, on est en train de réfléchir au comment.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Associer le citoyen, lui demander s'il faut ou pas renouveler les concessions.
PATRICE VERGRIETE
Alors, il y a d'autres formules que les concessions parce que la concession, elle correspond à un investissement pour faire l'autoroute.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, je comprends.
PATRICE VERGRIETE
Donc là, l'autoroute, elle est faite.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Elle est faite.
PATRICE VERGRIETE
Bon, il y a toujours des coûts demain parce qu'il faudra…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui. L'investissement est remboursé, pardon.
PATRICE VERGRIETE
L'investissement de base, mais je vous donne un autre exemple. Par exemple, il faudra mettre des bornes de recharge demain sur les autoroutes, ça va coûter cher. Donc, il y a aussi des investissements. Il y a l'entretien, la maintenance des autoroutes.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Mais est-ce qu'on peut imaginer que l'Etat redevienne en partie actionnaire des autoroutes ?
PATRICE VERGRIETE
C'est justement parmi les hypothèses sur la table et je pense que le débat qui va venir - on est en 2024, on a quand même quelques années devant nous – le débat qui est devant nous, là, dans les années qui viennent et je veux m'en saisir, c'est justement quid de l'avenir des concessions d'autoroutes ? C'est cette question-là sur les autoroutes, et comment on peut utiliser finalement cette manne des péages pour justement être le plus efficace possible pour développer notre réseau de transports ? Y compris ferroviaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et améliorer l'état de nos routes.
PATRICE VERGRIETE
Améliorer l'état de nos routes et peut-être aussi de notre réseau ferroviaire. Donc là quand même, l'enjeu du financement des autoroutes, demain des péages, ce qu'on en fera est absolument déterminant pour l'avenir.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous n'excluez pas une présence de l'Etat dans…
PATRICE VERGRIETE
Je n'exclus rien à ce stade. Ça doit justement être une discussion des deux années qui viennent là.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous ouvrez cette discussion, vous allez ouvrir cette discussion.
PATRICE VERGRIETE
Oui, tout à fait. C'est la question centrale à mon avis pour les autoroutes aujourd'hui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Et sur la taxe, est-ce que vous allez reconduire la taxe sur les sociétés d'autoroutes ?
PATRICE VERGRIETE
Oui. On continue, oui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
2024, pour 2025 aussi ?
PATRICE VERGRIETE
Oui, on continue.
JEAN-JACQUES BOURDIN
2025 aussi ?
PATRICE VERGRIETE
Oui. Pourquoi on arrêterait ?
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est l'une des rentes. C'est l'une des rentes. Eh bien si. J'imagine que Gabriel ATTAL pensait à ça, c'est l'une des rentes.
PATRICE VERGRIETE
L'ex Première ministre, Elisabeth BORNE, parlait de 100 milliards par exemple pour le ferroviaire, demain, c'est le besoin du ferroviaire.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Oui, on a besoin. Oui.
PATRICE VERGRIETE
On pourrait parler des routes, on pourrait parler de…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Bien sûr.
PATRICE VERGRIETE
Aujourd'hui, on a un besoin d'investissements dans nos infrastructures de transports, sur notre réseau, qui est considérable, y compris sur le matériel. Donc, parce que pendant très longtemps, on a mis l'investissement sur le tout TGV et qu'on a négligé notre réseau ferroviaire en France. Et donc aujourd'hui, on a du retard. On n'est pas les seuls en Europe, mais on a du retard. Et donc il faut investir massivement aujourd'hui sur notre réseau ferroviaire, fret comme voyageurs. Regardez les difficultés qu'on a parfois sur la mobilité du quotidien, les trains en retards, les difficultés sur le Paris – Clermont qui ont été identifiés, sur le Paris – Limoges, etc. On est en retard, parce qu'on a surinvesti sur le TGV…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Certaines lignes abandonnées, d'ailleurs, mais enfin.
PATRICE VERGRIETE
Donc aujourd'hui, on doit rattraper ce retard. Donc, évidemment, on aura besoin de financements sur l'ensemble des…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc prolongement de la taxe sur les sociétés d'autoroutes et les aéroports pour 2025.
PATRICE VERGRIETE
On continue.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Vous continuez. Bien. Un mot quand même, vous êtes ministre du gouvernement qui prépare une réforme de l'Assurance chômage. Vous êtes favorable à une baisse de la durée d'indemnisation ou pas ? Franchement.
PATRICE VERGRIETE
Aujourd'hui, il y a un problème dans notre pays, au niveau de, j'ai envie de dire, au niveau de l'emploi, c'est-à-dire indéniablement, aujourd'hui, un certain nombre d'entreprises, je l'ai chez moi à Dunkerque, cherchent aujourd'hui des personnes à employer, et j'ai encore un taux de chômage qui est à un point demi supérieur à la moyenne nationale chez moi à Dunkerque. Et donc, toutes les solutions qui permettront objectivement d'améliorer la situation de l'emploi…
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous dites oui.
PATRICE VERGRIETE
D'augmentation du taux d'emploi, sont à trouver aujourd'hui.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Donc vous dites oui, vous n'avez pas de réserve.
PATRICE VERGRIETE
Mais c'est ça que dit aujourd'hui le Premier ministre. Le Premier ministre dit aujourd'hui : on doit améliorer le taux d'emploi dans notre pays. C'est ce qui permettra d'ailleurs aussi de rééquilibrer les comptes de la Nation. C'est ce que dit le Premier ministre aujourd'hui tout simplement.
JEAN-JACQUES BOURDIN
La CGPME, j'avais le président de la CGPME il y a huit jours à votre place, demande 12 mois de durée d'indemnisation. 12 mois. On est à 18 aujourd'hui. 12 mois, ça vous va ?
PATRICE VERGRIETE
Les discussions se font actuellement, on verra.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Silence.
PATRICE VERGRIETE
Non, on verra, on verra. Je pense qu'il faut laisser la discussion s'opérer et nous verrons les choses. Et je retiens l'objectif…
JEAN-JACQUES BOURDIN
C'est un bon chiffre 12 mois ?
PATRICE VERGRIETE
L'objectif pour moi, c'est de pouvoir trouver les moyens d'augmenter le taux d'emploi de notre pays. On a connu un chômage de masse pendant une trentaine d'années dans notre pays. Ça a changé, ça a changé le rapport au travail, ça a changé effectivement les systèmes de protection et c'était légitime. Aujourd'hui, on retourne vers le plein emploi progressivement, on le voit. Donc il faut sans doute aussi réadapter nos dispositifs qui ont été mis en place pour un chômage de masse. Donc c'est cette discussion qui doit avoir lieu aujourd'hui et qui doit évoluer dans les années qui viennent.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci Patrice VERGRIETE.
PATRICE VERGRIETE
Merci à vous.
JEAN-JACQUES BOURDIN
Merci d'être venu nous voir ce matin sur l'antenne de Sud Radio.
Source : Service d'information du Gouvernement, le 9 avril 2024