Interview de M. Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la santé et de la prévention à France info le 8 avril 2024, sur la "taxe lapin", l'accès aux soins, la revalorisation des médecins et le retour de l'obligation de garde.

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Média : France Info

Texte intégral

SALHIA BRAKHLIA
Bonjour Frédéric VALLETOUX.

FREDERIC VALLETOUX
Bonjour.

SALHIA BRAKHLIA
On va évidemment parler avec vous des annonces faites par le Premier ministre ce week-end sur la politique de santé, mais avant avez-vous des nouvelles du brancardier violemment agressé avant-hier aux urgences de Challans en Vendée ?

FREDERIC VALLETOUX
Oui, j'ai quelques nouvelles, d'abord que son état s'est amélioré, légèrement amélioré, mais en tout cas il y a du mieux, première chose…

SALHIA BRAKHLIA
Il est en soins intensifs.

FREDERIC VALLETOUX
Il est en soins intensifs, bien sûr, il a été sévèrement attaqué, je pense à lui, sa famille, et je voudrais vraiment dire la lâcheté de cette violence qui s'est déchaînée, la lâcheté de cet acte, parce que c'est une situation où les urgences n'étaient pas du tout en état de tension, on est sur une pure affaire de délinquance, et d'ailleurs la bonne nouvelle c'est que le système de vidéosurveillance a permis aux enquêteurs d'ores et déjà d'identifier le ou les fautifs de cette affaire, qui, de ce que je sais, mais mes informations datent d'hier soir, n'étaient pas arrêtés, mais néanmoins en tout cas ils ont été identifiés grâce au déploiement de la vidéosurveillance. La vidéosurveillance qui se déploie c'est un fait de plus en plus vrai dans les hôpitaux, et notamment dans les services d'urgences, ça faisait partie d'ailleurs d'un des éléments du plan de sécurisation des hôpitaux, et notamment des services d'urgences, qui avait été présenté il y a quelques mois, et donc on voit que ça a un effet, mais néanmoins il n'empêche pas que ce déchaînement de violence, dans un établissement comme un hôpital, où les gens sont là pour soigner, pas pour se protéger, là je parle des soignants, ils sont là pour prendre en charge les plus faibles bien sûr, c'est inacceptable.

SALHIA BRAKHLIA
Plus de caméras de surveillance parce que les faits de violences se multiplient dans les enceintes même des hôpitaux ?

FREDERIC VALLETOUX
La société est comme ça. Pendant longtemps on a sans doute beaucoup plus respecté l'hôpital et les hospitaliers, aujourd'hui la violence s'est invitée aussi dans les services hospitaliers, les urgences, mais pas simplement, et donc il faut prendre ça en compte, ce n'est pas non plus un phénomène nouveau, il faut prendre ça en compte et souvent les caméras sont aux abords des établissements, pas forcément dans les services, mais en tout cas surveillent, permettent de surveiller les allées et venues dans les services hospitaliers.

JEROME CHAPUIS
Frédéric VALLETOUX, c'est l'une des annonces faites par Gabriel ATTAL ce week-end, il va falloir payer 5 euros pour un rendez-vous médical non-honoré, à partir du 1er janvier 2025, très concrètement, comment vous allez faire ?

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien on va faire que simplement les patients, lorsqu'ils vont prendre rendez-vous, vont laisser leurs coordonnées de carte, par exemple, notamment lorsqu'ils le font par des plateformes…

SALHIA BRAKHLIA
Une empreinte bancaire à chaque réservation de rendez-vous ?

FREDERIC VALLETOUX
Oui, mais aujourd'hui la moitié des rendez-vous sont pris via des plateformes bancaires, donc on voit… des plateformes, pardon, de réservation…

SALHIA BRAKHLIA
Comme Doctolib.

FREDERIC VALLETOUX
Voilà, de réservation, Doctolib et tant d'autres, et donc en agissant avec eux, en plus c'est des propositions d'ailleurs qui viennent de cette profession, c'est techniquement tout à fait faisable. L'objectif, c'est quoi ? Ce n'est d'aller chercher toujours plus de revenus, c'est juste qu'on respecte les rendez-vous médicaux. Aujourd'hui, on est en état de tension, il y a des Français qui n'ont pas accès, ou plus difficilement, à des rendez-vous chez le médecin, les médecins se plaignent que parfois c'est deux, trois, comme ça « lapins » qu'on leur pose par jour, eh bien évidemment que mis bout à bout c'est des millions de rendez-vous qui chaque année sont perdus, et perdus pour qui, pour les patients, pas simplement pour la rémunération des médecins, et donc il faut arriver à responsabiliser les patients. On peut très bien annuler un rendez-vous chez le médecin et on peut même l'annuler jusqu'à la veille, mais ne pas honorer un rendez-vous qu'on a pris, eh bien c'est prendre la place… enfin en l'occurrence c'est bloquer l'accès à quelqu'un d'autre qui en aurait eu besoin.

SALHIA BRAKHLIA
Mais quand même, Frédéric VALLETOUX, il y a des questions techniques sur l'annonce de 5 euros…

FREDERIC VALLETOUX
Bien sûr qu'il y a des questions techniques…

SALHIA BRAKHLIA
On ne comprend pas trop comment vous allez faire. Vous l'avez dit, si on passe par Doctolib, imaginons que je prenne un rendez-vous pour un proche, sur Doctolib, si le proche en question ne se rend pas à ce rendez-vous, c'est moi qui vais être débitée des 5 euros ?

FREDERIC VALLETOUX
La personne qui prendra rendez-vous laissera les coordonnées bancaires, j'imagine, de la personne pour qui le rendez-vous est pris.

JEROME CHAPUIS
Et pourquoi ne pas faire payer les plateforme ?

FREDERIC VALLETOUX
Mais parce que les plateformes ne sont, j'allais dire, ne sont pas responsables de savoir si les gens qui prennent trois, quatre rendez-vous, puis qui tout d'un coup, deux jours avant, trouvent un créneau qui s'est libéré plus près de chez eux, reprennent un rendez-vous pour le lendemain et abandonnent sans les annuler les trois, quatre rendez-vous qu'ils ont déjà pris, je veux ce n'est pas… ce n'est pas acceptable, et donc les plateformes ont facilité l'accès aux soins, et tant mieux, mais néanmoins ça ne doit pas être… il doit y avoir un réflexe de responsabilité, je le redis.

SALHIA BRAKHLIA
Mais si je prends rendez-vous par téléphone par exemple, là aussi je vais devoir laisser mes coordonnées bancaires à la secrétaire ou au secrétaire du médecin ?

FREDERIC VALLETOUX
Ça sera la libre possibilité des médecins, les médecins qui le souhaitent, et ils sont nombreux à se plaindre de ce phénomène, auront la possibilité effectivement de demander les coordonnées bancaires aux patients qui téléphonent pour des rendez-vous, et les secrétaires de les enregistrer…

JEROME CHAPUIS
Mais ça ne va pas tendre la relation entre les médecins et leurs patients ?

FREDERIC VALLETOUX
Pourquoi tendre la relation ? Est-ce que quand vous réservez, je ne sais pas moi, dans des restaurants, dans des hôtels, pour énormément de services aujourd'hui, ça ne tend pas la relation avec l'hôtelier, le restaurateur, parce qu'on vous a demandé un empreinte bancaire, enfin, il y a un phénomène de responsabilisation. Alors maintenant, ne me posez pas trop de questions précises puisque le principe est posé, le calendrier est posé et le Premier ministre a eu raison de rappeler tout ça, maintenant nous allons y travailler, avec les syndicats de médecins, avec les plateformes, avec les associations de patients aussi, c'est très important…

SALHIA BRAKHLIA
On entend l'intention, sauf que vous le savez aussi Monsieur le ministre, il y a beaucoup de patients qui détiennent la CMU et donc ils ne payent pas leurs consultations.

FREDERIC VALLETOUX
Justement, il faut regarder, évidemment que cette règle il y aura des exceptions, comme à toutes règles, et donc on va dessiner tous ensemble les contours d'application de cette règle, qui ça concerne, quel type de patients, dans quel type de relation, on va faire en sorte que les choses se passent bien. Vous comprenez que le fond, je le redis, c'est qu'on libère du temps médical, et surtout que les gens respectent des rendez-vous médicaux, on sait que les plateformes ont facilité le fait de prendre des rendez-vous comme ça, d'en réserver plusieurs, et puis d'aller à celui qui vous paraît finalement le plus opportun…

SALHIA BRAKHLIA
Et donc ce sera au médecin de dire si la raison invoquée est valable ou pas ?

FREDERIC VALLETOUX
Ça sera au médecin de dire s'il souhaite, ou pas, percevoir ces 5 euros, il aura la possibilité de le faire.

JEROME CHAPUIS
Frédéric VALLETOUX, autre sujet, pour que chaque Français ait toujours un médecin de garde à moins de 30 minutes de chez lui vous souhaitez augmenter le nombre de médecins de garde les soirs et les week-ends, comment vous allez vous y prendre, comment vous allez les inciter ?

FREDERIC VALLETOUX
On va s'y prendre par la discussion, et tous les sujets qui ont été posés par le Premier ministre vous vont avancer grâce à la discussion…

JEROME CHAPUIS
Pour l'instant la discussion elle est un peu en…

FREDERIC VALLETOUX
Bah, la discussion, les annonces c'était il y a 24h !

JEROME CHAPUIS
Oui, mais les syndicats…

FREDERIC VALLETOUX
Hier on était dimanche.

JEROME CHAPUIS
Les syndicats, jeudi dernier, ont dit qu'ils n'étaient pas prêts à discuter.

FREDERIC VALLETOUX
No, mais jeudi dernier, vous parlez des syndicats des…

JEROME CHAPUIS
Des médecins libéraux.

FREDERIC VALLETOUX
Des spécialistes libéraux, qui, sur un autre sujet, et on pourra en parler, sur la campagne tarifaire, regrettent de ne pas avoir un accompagnement financier plus soutenu, mais ça je pourrai y revenir parce que j'ai des choses à leur dire.

SALHIA BRAKHLIA
Oui, on va y revenir.

FREDERIC VALLETOUX
Mais, néanmoins, sur la question de l'accès aux soins et effectivement de la garde du soir, il faut qu'on progresse sur ce sujet, il faut qu'on progresse par la concertation, je l'ai dit, il faut qu'on progresse en travaillant bassin de vie par bassin de vie, parce que c'est au plus près du terrain qu'on peut travailler, améliorer la situation, et effectivement il faut qu'on améliore l'engagement des professionnels. Aujourd'hui il y a 40 % de médecins généralistes qui participent à la permanence de soins, donc on ne part pas de zéro, il y a déjà une masse très importante de médecins, un nombre très important, pardon, de médecins, qui participent, qui prennent en charge cela…

SALHIA BRAKHLIA
Il y aura donc une incitation financière pour qu'ils multiplient les gardes ?

FREDERIC VALLETOUX
Bien sûr, il y a une incitation financière, toute heure travaillée est une heure payée, une heure travaillée le soir et le week-end est une heure qui est à payer en conséquence du moment où elle se réalise, c'est-à-dire à des moments où effectivement, comme on le dit, en dehors des heures ouvrables, donc à des moments où effectivement il y a une pénibilité, donc bien sûr que c'est financé, c'est reconnu, on a augmenté les heures travaillées à l'hôpital pour les heures de nuit et les heures de week-end, évidemment que ce sont des heures qui sont mieux payées.

JEROME CHAPUIS
D'un mot, 40 % aujourd'hui, de médecins…

FREDERIC VALLETOUX
40 %, on verra…

JEROME CHAPUIS
L'objectif c'est quoi ?

FREDERIC VALLETOUX
L'objectif c'est d'éviter d'obliger les gens à rentrer dans des systèmes, mais par contre l'objectif c'est par l'incitation, par la discussion, par la négociation, qu'on puisse améliorer effectivement l'engagement de tous pour la permanence de soins.

JEROME CHAPUIS
Je vous demande un objectif chiffré de nombre de médecins qui seraient mobilisés, est-ce que vous l'avez ?

FREDERIC VALLETOUX
Je ne sais pas le chiffrer, ça va dépendre, on va regarder la situation territoire par territoire, là encore je le redis, mais l'objectif c'est qu'aucun Français ne vive sur un territoire où il n'y a pas de permanence des soins qui soit garantie et assurée, à nous maintenant d'y travailler, et si - je le redis quand même malgré tout, que je ne vous donne pas l'impression de noyer le poisson – et si vraiment, effectivement, il faut aller vers des solutions plus contraintes, nous n'hésiterons pas à y aller.

SALHIA BRAKHLIA
Mais attendez, ça veut dire quoi du coup ça ?

FREDERIC VALLETOUX
Ça veut dire que là où effectivement on constatera que dans un territoire, si par hasard, par malheur, il n'y avait pas d'engagement du tout des médecins pour porter et participer à la permanence des soins, eh bien l'Etat, via les agences régionales de santé, via les réquisitions, ont tout à fait la possibilité de mettre en oeuvre des systèmes, mais c'est le stade ultime, c'est le stade dernier, c'est en cas d'échec de discussions…

SALHIA BRAKHLIA
Une obligation de garde pour les médecins.

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien nous poserons, nous n'hésiterons pas à poser l'obligation de garde là où c'est nécessaire et là où effectivement il y aurait une absence de prise en charge par le collectif.

JEROME CHAPUIS
Vous avez parlé tout à l'heure des tarifs, on va en parler juste après le Fil info Frédéric VALLETOUX.

(…)

SALHIA BRAKHLIA
Toujours avec Frédéric VALLETOUX, ministre délégué à la Santé et à la Prévention. Est-ce que vous entendez certains syndicats qui sont en colère parce que Gabriel ATTAL, le Premier ministre, a annoncé ce week-end qu'il sera possible d'avoir accès directement à des psychologues, à 50 euros la consultation remboursée, alors qu'eux, ça fait des mois qu'ils négocient, qu'ils cherchent à vous convaincre pour que les consultations passent à 30 euros pour les généralistes. Vous entendez cette colère-là ?

FREDERIC VALLETOUX
Alors, vous faites référence à un dispositif qui s'appelle « Mon soutien psy », qui va être revu, et qui doit permettre effectivement de faciliter l'accès des Français à des consultations en santé mentale, et de mieux prendre en charge la population, parce qu'on sait malheureusement que depuis le Covid, il y a un besoin qui est plus fort. L'accès direct aux psychologues à travers « Mon parcours psy », il va être mis en place dans les prochaines semaines, et il va effectivement permettre aussi, par l'élargissement du nombre de séances qui vont être financées par ce dispositif, on passera de 8 séances à 12 séances, pour mieux prendre en charge les Français…

SALHIA BRAKHLIA
Et mieux rembourser, passant de 30 à 50 ?

FREDERIC VALLETOUX
De toute façon, l'accès direct est une question qui doit être posée sans tabou. Aujourd'hui, on sait que la principale tension dans le système de santé, c'est une question des effectifs, des effectifs de soignants, et donc, il faut, pour faciliter à la fois l'accès des Français aux soins, puisque c'est le premier, je ne veux pas dire le seul engagement qu'on poursuit, mais c'est l'engagement principal que l'on poursuit, améliorer l'accès aux soins des Français, mais en le faisant avec les professionnels, et donc, en travaillant avec eux pour permettre là où c'est possible, ça a été, et ça va être fait, le Premier ministre l'a dit, pour les kinés, et c'est déjà fait pour les lunettes aujourd'hui…

SALHIA BRAKHLIA
Mais vous voyez le signal qui est envoyé, Frédéric VALLETOUX…

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien, le signal…

SALHIA BRAKHLIA
On court-circuite les médecins généralistes…

FREDERIC VALLETOUX
Mais on ne court-circuite personne…

SALHIA BRAKHLIA
Et en plus, on ne veut pas augmenter le tarif de leurs consultations.

FREDERIC VALLETOUX
Non, non, l'augmentation du tarif des consultations, elle est posée sur la table, elle est en discussion en ce moment. L'importance du médecin traitant, elle est essentielle, notre système est bâti autour de ça. On ne peut faire monter en compétence des autres professionnels que si on assure et on reconnaît le rôle du médecin traitant. Parce que le rôle du médecin traitant, c'est la tour de contrôle, le médecin traitant, qui garantit effectivement la qualité du parcours de soins. Après, que, pour des lunettes, pour, parce qu'on a une angine, on va chez le pharmacien, pour un vaccin, on va chez l'infirmière ou encore chez le pharmacien, etc. Qu'on libère, j'allais dire, qu'on permette à d'autres acteurs…

JEROME CHAPUIS
Mais si c'est aussi le cas pour le kiné, si c'est le cas pour le psy, en fait, qu'est-ce qu'il contrôle au bout du compte, le médecin traitant ?

FREDERIC VALLETOUX
Ah, mais attendez, c'est essentiel. Enfin, le médecin généraliste aujourd'hui est le seul soignant qui a une vue globale sur le patient, qui vous connaît parce qu'il est votre médecin traitant, qui vous a vu grandir, qui vous a connu dans vos maladies, si ça fait des années qu'il est à vos côtés, et qui sait exactement, j'allais dire, qui garantit la bonne prise en charge et l'intervention de l'ensemble des soignants. Ce n'est pas un pharmacien qui va avoir ce regard global, ce n'est pas le kiné bien sûr, ce n'est pas sa compétence ; on ne confond pas les rôles, on libère simplement du temps médical, on permet aux soignants…

SALHIA BRAKHLIA
S'ils sont aussi importants, justement ces médecins généralistes, pourquoi ne pas accéder…

FREDERIC VALLETOUX
Ils sont majeurs…

SALHIA BRAKHLIA
Pourquoi ne pas accéder à leurs demandes, c'est-à-dire une consultation à 30 euros ?

FREDERIC VALLETOUX
C'est en cours de discussion. Et moi, je souhaite sincèrement que ces discussions organisées par l'Assurance-maladie sur la convention médicale, c'est-à-dire que c'est les règles financières qui vont régir les liens entre l'Assurance-maladie et les médecins pendant cinq ans. Eh bien, que ces discussions permettent d'avancer, et ces discussions montrent…

SALHIA BRAKHLIA
Elles sont au point mort, là, ces négociations…

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien, elles ne sont pas au point mort, il y a eu des discussions…

SALHIA BRAKHLIA
Ils ont quitté la table…

FREDERIC VALLETOUX
Qui étaient qualifiées, il y a encore quelques jours, par les uns et par les autres, d'avancées constructives, de possibilités effectivement de voir un terme à ces discussions et d'aboutir. Donc aujourd'hui, moi, je suis plutôt positif, j'appelle à l'état d'esprit de responsabilité de chacun. Aujourd'hui, les Français nous regardent. Ils ont besoin d'un système de santé qui effectivement fasse face aux difficultés, puisse faire face aux difficultés et permette en même temps d'améliorer la prise en charge. Pour ça, effectivement, il y a des éléments qui ont été posés à la fois par les syndicats, mais aussi par l'Assurance-maladie, pour que, finalement, la hausse de la consultation puisqu'il s'agit de ça, en secteur 1, passage à 30 euros, soit accompagnée d'engagements réciproques, qui permettent de dire : sur les patients, les Français qui n'ont pas de médecin traitant et notamment ceux qui sont touchés par des affections de longue durée. Comment on fait ? Et donc, des propositions ont été faites pour que les médecins puissent mieux prendre en charge ces patients. Comment on organise, vous en parliez tout à l'heure, la permanence des soins le soir, le week-end, comment on organise mieux la permanence des soins ?

SALHIA BRAKHLIA
Donc vous leur demandez des contreparties…

FREDERIC VALLETOUX
C'est des engagements réciproques. A partir du moment où la nation met plus d'argent. Eh bien, elle attend aussi d'autres choses. Et je pense qu'on est sur la bonne voie. Maintenant, effectivement il faut indiquer qu'il n'est pas question de chambouler le système de santé. Il n'est pas question de le renverser et de le mettre cul par-dessus-tête. Le médecin traitant reste au coeur de, j'allais dire, au coeur de la prise en charge des Français, parce que, je vous le dis, c'est la tour de contrôle du patient…

SALHIA BRAKHLIA
Donc vous allez les appeler pour qu'ils reviennent tous autour de la table, ne serait-ce que…

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien, je ne les ai pas vu partir, pour l'instant, ils se posent des questions…

SALHIA BRAKHLIA
Les libéraux, mais aussi les cliniques privées…

FREDERIC VALLETOUX
Parce que, comme chaque fois qu'il y a des annonces, l'explication peut-être n'a pas été faite, et le Premier ministre a eu raison de poser des chantiers qui sont des chantiers ambitieux, parce qu'aujourd'hui, on ne peut plus attendre effectivement, et on doit trouver des solutions, j'allais dire, immédiates pour les prochains mois…

SALHIA BRAKHLIA
Non, mais vous allez les appeler, Monsieur le Ministre ?

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien, je les ai eus ce week-end, je les ai eus avant ce week-end. Je les aurai cette semaine…

JEROME CHAPUIS
Oui, depuis, le dialogue est normalement, oui, rompu…

FREDERIC VALLETOUX
Non, il n'est pas rompu, il est permanent. Je vois les cliniques encore aujourd'hui et demain. J'ai vu les spécialistes libéraux avant les annonces de Gabriel ATTAL, sans connaître ce qui allait être dit, parce que sur un autre sujet qui était le sujet de la campagne tarifaire, c'est en permanence. Vous savez, moi, mon rôle, c'est d'être en permanence à discuter avec les uns et les autres. Et c'est en plus, mon état d'esprit…

JEROME CHAPUIS
Il y a une autre discussion d'ailleurs, c'est celle que vous devez avoir avec les professionnels du transport médical. Les taxis conventionnés manifestaient il y a quelques jours parce qu'ils considèrent que la prise en charge n'est pas suffisante, l'inflation étant passée par-là. Or, ça fait précisément partie, le transport médical, des pistes d'économies voulues par Bercy. Qu'est-ce que vous leur répondez ?

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien, ils doivent, là aussi, faire des propositions pour que tout le monde participe effectivement à… ce n'est pas tellement des pistes d'économies, c'est la maîtrise des dépenses à deux chiffres. Les transports sanitaires, c'est 6 milliards d'euros, ce qui n'est pas une mince affaire, qui a augmenté l'année dernière de 7 %. Donc il faut aussi qu'on arrive avec les professionnels concernés à trouver des solutions pour contenir. Je ne parle même pas, là, voyez d'économies, je parle d'arriver déjà à contenir l'envolée, l'emballement de certaines dépenses…

SALHIA BRAKHLIA
Là encore, ils disent que l'inflation est passée par-là…

JEROME CHAPUIS
Ça veut dire quoi ? Deux patients dans un taxi par exemple ?

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien, pourquoi pas, d'ailleurs, ça serait possible. En tout cas, il ne faut pas s'interdire ça. Alors, évidemment, vous n'allez pas me dire, quels types de patients, évidemment, bon, des patients légers, c'est programmé, bon, mais si vous voulez, en tout cas, il faut qu'on travaille. C'est là aussi l'esprit de responsabilité qui doit nous guider. Il faut qu'on travaille à des pistes de propositions. On ne peut pas laisser voir un tel emballement de ce type de dépenses.

SALHIA BRAKHLIA
Mais pour que ce soit clair pour les auditeurs qui nous écoutent…

FREDERIC VALLETOUX
Mais pour moi, c'est très clair…

SALHIA BRAKHLIA
Et les téléspectateurs, il est hors de question de ne plus prendre en charge le transport pour certains malades ?

FREDERIC VALLETOUX
Ah, pas du tout ! Ah, mais pas du tout ! Mais attendez, on ne passe pas de 6 milliards à 0 milliards, non, non, je n'ai jamais dit ça…

SALHIA BRAKHLIA
Non, mais de savoir qui parmi les patients, c'est la question qui se pose aussi…

FREDERIC VALLETOUX
Mais ce n'est pas un tri parmi les patients, c'est de trouver des solutions, et puis, c'est d'appeler aussi tout le monde effectivement à être raisonnable, pour certaines consultations, on peut prendre les transports publics lorsqu'on habite en métropole, pas très loin de l'établissement, et qu'on est en forme parce que tout le monde n'arrive pas en civière à l'hôpital ou à sa consultation. Et il est évident que ceux qui ont besoin de transports sanitaires adaptés, parce qu'ils sont dans des cas lourds, évidemment, évidemment qu'on ne va pas toucher à ces cas-là. Mais vous voyez bien que, dans le dispositif général, je le redis, 6 milliards d'euros, on doit trouver des moyens de contenir l'emballement de ces dépenses.

JEROME CHAPUIS
Un sujet, on ne va pas rentrer dans le détail, mais sur l'aide médicale d'Etat qui avait été évoquée…

FREDERIC VALLETOUX
Sujet important…

JEROME CHAPUIS
Voilà, sujet important dans le cadre de la loi immigration notamment, elle avait été évoquée. La réforme est pour quand ?

FREDERIC VALLETOUX
La réforme est d'ici l'été, puisque c'est le calendrier qui avait été annoncé par le Premier ministre. Et quand je dis réforme, c'est l'ajustement du fonctionnement de l'AME, en tirant les leçons du rapport qui avait été fait par messieurs STEFANINI et EVIN, et qui effectivement démontraient qu'il y avait des ajustements opérés pour rendre, là aussi, plus efficace…

SALHIA BRAKHLIA
Mais ils disaient qu'il n'y avait pas d'abus dans le rapport…

FREDERIC VALLETOUX
Ils disaient qu'il n'y avait pas d'abus, et c'est pour ça que la décision a été prise par le Président de la République et par le Premier ministre de ne pas toucher à l'essentiel, au coeur de l'AME.

SALHIA BRAKHLIA
Donc vous avez touché à quoi ?

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien, on touche par exemple aux conditions d'accès. C'est-à-dire quelqu'un, bénéficiaire de l'AME qui vit avec un conjoint qui a des revenus suffisants pour lui permettre…, eh bien, doit pouvoir sortir de l'AME, parce qu'on prend en compte les revenus du couple ou de la famille…

SALHIA BRAKHLIA
C'est déjà le cas…

FREDERIC VALLETOUX
Non, ce n'est pas le cas. Ah, non, ce n'est pas le cas…

SALHIA BRAKHLIA
On fait en fonction des revenus ?

FREDERIC VALLETOUX
Des revenus de la personne uniquement, mais pas des revenus du conjoint. Donc vous voyez, c'est des choses, on est dans le micro-détail, mais, soyons précis…

JEROME CHAPUIS
Donc cette réforme…

FREDERIC VALLETOUX
Ce sont des ajustements, c'est pour ça que je parle d'ajustements. Mais par contre, philosophiquement, il n'est pas question de toucher à l'AME qui a été effectivement, et ça a été très bien démontré, qui n'est pas du tout ce que certains nous disent : de gabegie, d'un dispositif inutile. Il est utile en termes de santé publique.

JEROME CHAPUIS
Frédéric VALLETOUX, ministre délégué en charge de la Santé. On vous retrouve juste après le Fil Info.

(…)

JEROME CHAPUIS
Le ministre délégué en charge de la Santé, Frédéric VALLETOUX. Après demain, en Conseil des ministres, arrive la loi sur la fin de vie. Un volet aide à mourir, un volet soins palliatifs. Sur ce point, seuls 30 % des mineurs et 50 % des adultes qui ont besoin de soins palliatifs y ont accès, c'est ce que disait encore tout récemment Catherine Vautrin, votre ministre de tutelle. Comment est-ce que vous pourriez réaliser en quelques mois ce qui n'a pas été en 8 ans depuis l'adoption de la dernière loi sur le sujet ?

FREDERIC VALLETOUX
Alors, c'est une accélération qui va prendre plusieurs années, mais c'est une accélération du déploiement des services de soins palliatifs ou de l'offre de soins palliatifs dans les territoires. D'abord, dans les 20 départements où aujourd'hui il n'y a aucuns lits de soins palliatifs qui vont être prioritaires. Mais c'est aussi un déploiement dans les services hospitaliers, 300 lits qui, progressivement vont être créés dans les services de soins palliatifs en plus des 1 500 qui existent aujourd'hui. Et puis aussi, c'est un déploiement des soins palliatifs à domicile. On en parle souvent peu, on parle beaucoup des unités hospitalières, mais il y a beaucoup de soins palliatifs à domicile. Aujourd'hui, il y a un peu plus de 50 000 places. On va vers 20 000 places en plus à terme, c'est-à-dire d'ici 3 ou 4 ans, de manière à ajuster et de montée en charge effectivement…

SALHIA BRAKHLIA
Mais vous parlez sur plusieurs années. Or, si la loi passe…

FREDERIC VALLETOUX
Eh bien oui, on parle sur plusieurs années, vous savez que les soins palliatifs…

SALHIA BRAKHLIA
Sur la fin de vie…

FREDERIC VALLETOUX
Pardon, mais ce n'est pas des lits qu'on ouvre comme ça. Il y a beaucoup de... Il y a un tôt d'ailleurs de personnel dans les services en soins palliatifs qui est assez élevé. Il faut former des gens et il faut aussi que les soins palliatifs prennent une place, j'allais dire, nouvelle dans la formation des médecins. Aujourd'hui, l'enseignement en soins palliatifs n'est pas majeur, on va dire ça, comme ça…

SALHIA BRAKHLIA
Mais donc…

JEROME CHAPUIS
Oui, parce que le sens de la question, c'est que, si on vous écoute bien, au moment où l'aide à mourir entrera en vigueur, il y aura encore des départements qui ne seront pas équipés en unités de soins palliatifs.

FREDERIC VALLETOUX
Alors, la loi, elle, ne va pas arriver dès cette année. Il y a une discussion au Parlement qui va être longue, mais, effectivement, la montée en charge des soins palliatifs va être concomitante, parallèle à effectivement la mise en place de ce dispositif d'accompagnement à la fin de vie. Et je le redis, les soins palliatifs, c'est plus de médecins formés, c'est plus de personnel formé. C'est des services hospitaliers, c'est aussi du déploiement d'offres à domicile, et donc c'est tout un dispositif important. Mais je crois que le signal, ce qui est important à plus d'un milliard d'euros donnés pour effectivement ces dix prochaines années, une manière de déployer ces soins palliatifs, c'est-à-dire que l'Etat s'engage dans un effort qui va être certes long, progressif, mais qui est…

SALHIA BRAKHLIA
Et sauf que…

JEROME CHAPUIS
Mais quel sens ça a, de vous engager sur 10 ans. Alors que, je dirais, au mieux pour vous, dans 3 ans, vous n'êtes plus là.

FREDERIC VALLETOUX
Non mais heureusement, quand Jacques CHIRAC a lancé le Plan cancer qui continue « aujourd'hui en 2004 » (sic) et qui a permis à la France d'être un acteur majeur de la lutte contre le cancer. Heureusement qu'il ne s'est pas dit « il me reste - à l'époque 3 ans - et on va faire un Plan cancer pour 3 ans ». Non. Il a engagé l'Etat dans un chemin qui maintenant depuis 20 ans fait que la France a sérieusement et largement, ce n'est pas le sujet du jour, mais monté en niveau sa prise en charge des cancers.

SALHIA BRAKHLIA
Donc vous comptez sur vos successeurs.

FREDERIC VALLETOUX
Vous savez, sur ces sujets-là, heureusement, il y a une espèce de permanence de l'effort de l'Etat. Et quand on s'engage sur des politiques de santé publique, qui sont toujours des politiques de long terme. On le fait toujours en regardant loin, à l'horizon.

JEROME CHAPUIS
Sur un plan personnel, est ce que vous êtes totalement à l'aise avec le texte qui va être présenté après demain ?

FREDERIC VALLETOUX
Je suis totalement à l'aise sur le texte. La seule réserve que, enfin, la seule réserve, la seule chose que moi j'avais émise en amont du texte, c'était effectivement qu'il y ait un effort qui soit fait sur les soins palliatifs et que les soins palliatifs ne deviennent pas un angle mort de la prise en charge des personnes, enfin, comment dire, de la prise en charge des personnes qui arrivent en fin de vie et qui sont confrontées notamment à la douleur. Très clairement, la réponse, on vient d'en parler, elle est là. Le président de la République a souhaité un soin, un programme massif de développement des soins palliatifs, et c'est une excellente chose.

JEROME CHAPUIS
Je vous posais la question, parce que, en juin 2023, vous aviez co-signé dans Le Monde un texte sur la…

FREDERIC VALLETOUX
Une tribune qui disait ça.

JEROME CHAPUIS
Voilà, mais qui disait : « Voilà, les personnes les plus fragiles et les plus isolées sont de fait les plus concernées par les demandes de morts anticipée ». Ça, ce texte prévoit de tenir compte de ça…

FREDERIC VALLETOUX
La réponse, notamment des soins palliatifs, c'est qu'effectivement il n'y ait plus un recoin du territoire qui ne puisse pas permettre une prise en charge en soins palliatifs. Donc, c'est majeur.

SALHIA BRAKHLIA
Frédéric VALLETOUX, les JO cet été vont être un enjeu sécuritaire, un enjeu logistique aussi, mais aussi un défi sanitaire. En temps normal, La situation, on le sait, elle est tendue à l'hôpital. Est-ce que déjà, pour les JO comme pour pendant le Covid, vous avez demandé à tous les soignants de ne pas prendre de vacances ?

FREDERIC VALLETOUX
Alors, on a demandé aux soignants, on a, on a permis, on a donné la possibilité à ceux qui le souhaitaient, là aussi, on n'est pas dans l'obligation, de pouvoir rester dans leur service, de fractionner leurs vacances. Et d'ailleurs, il y a une prime de fractionnement qui a été mise en place, de vacances, qui a été mise en place pour les hospitaliers concernés cet été. Mais un mot quand même sur le dispositif sanitaire. D'abord, il va concerner les hôpitaux de l'AP-HP et 12 hôpitaux périphériques qui sont franciliens, et hors AP-HP. Ça c'est la première chose. La deuxième chose, on ne s'attend pas à un pic de fréquentation dans les services hospitaliers qui soit énorme. Je veux rappeler que Paris est déjà la première destination touristique au monde, quasiment dans les grandes villes. Une des premières destinations touristiques au monde habituellement, et qu'on a l'habitude à Paris et en Ile-de-France, que l'été ne soit pas une baisse de fréquentation dans les hôpitaux très forte.

SALHIA BRAKHLIA
Sauf que là, on attend 7 millions de visiteurs. Et si on ajoute une possible canicule cet été, on saura faire ? On pourra recevoir tout le monde ?

FREDERIC VALLETOUX
Ne vous inquiétez pas, la chance qu'on a c'est que l'Ile-de-France est aussi une des régions qui est le mieux dotée en tissu, en tissu hospitalier et en tissu médical, en service médical. Donc de ce point de vue-là, on ne part pas non plus d'une feuille blanche. Habituellement, je vais vous donner un chiffre, habituellement, on considère que les services hospitaliers l'été, tournent entre 84 et 90 % de leur activité habituelle. Là, ils vont permettre d'absorber 100 % de ce qui est l'activité habituelle. Donc, voyez, entre 90 % et 100 %, c'est quelques points d'activité en plus. C'est comme si on était effectivement dans un mois de novembre ou décembre classique entre le 15 juillet et le 15 août. Donc tous les plannings aujourd'hui ont été faits et permettent de dire que, à ce jour, le dispositif sanitaire est prêt. Les hôpitaux sont prêts. La médecine de ville, on a travaillé avec eux, les pharmaciens, on travaille avec eux pour veiller à ce que, effectivement, tout le monde ne parte pas en vacances en même temps, donc de ce point de vue-là…

JEROME CHAPUIS
Le déplacement des véhicules d'urgence aussi, tout ça ?

FREDERIC VALLETOUX
Oui, c'est en train. Alors là, pour le coup c'est en train d'être mis en place avec la préfecture de police de Paris. Je coprésiderai avec Amélie OUDEA-CASTERA, avant la fin du mois d'avril…

SALHIA BRAKHLIA
La ministre des Sports.

FREDERIC VALLETOUX
Effectivement, un Comité sur l'aspect sanitaire de ces JO. Mais en tous les cas, je peux vous dire aujourd'hui que le dispositif est prêt.

JEROME CHAPUIS
Merci Frédéric VALLETOUX.

FREDERIC VALLETOUX
Merci à vous.

JEROME CHAPUIS
Ministre délégué en charge de la Santé et de la Prévention. Vous étiez l'invité du 8 :30 France Info.


Source : Service d'information du Gouvernement, le 11 avril 2024