Déclaration de M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics, sur le programme de stabilité économique de la France, à l'Assemblée nationale le 29 avril 2024.

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Circonstance : Débat d'orientation et de programmation des finances publiques à l' Assemblée nationale

Texte intégral

(…)

M. le président
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué chargé des comptes publics
Mesdames et messieurs les députés, je suis heureux de m'adresser à vous à l'occasion de ce débat sur le programme de stabilité, lequel tend à actualiser notre trajectoire macroéconomique et de finances publiques. Je tiens d'abord à remercier le président Éric Coquerel de m'avoir offert l'occasion de présenter cette trajectoire devant les membres de la commission des finances, le 17 avril, en compagnie du rapporteur général du budget, Jean-René Cazeneuve. Ce fut l'occasion d'expliquer et de détailler le sens de cette mise à jour mais aussi de répondre, en toute transparence, aux questions soulevées par les parlementaires. Le présent débat nous donne l'occasion d'évoquer à nouveau le sujet devant les députés et – demain – devant les sénateurs.

L'actualisation de notre trajectoire fait suite au ralentissement de l'économie mondiale que nous avons observé à la fin d'année 2023 et qui nous a conduits à réviser de 1,4% à 1% notre croissance pour l'année 2024, comme Bruno Le Maire l'a annoncé dès février. Nous ne sommes pas le seul pays européen à avoir abaissé notre prévision de croissance en début de cette année : en février, l'Allemagne a revu son pronostic à 0,2%, contre une prévision initiale de 1,3% ; de son côté, le gouvernement italien table désormais sur une croissance de 1% cette année, contre 1,2% précédemment.

Malgré cette conjoncture moins favorable, les fondamentaux de notre croissance restent solides, soutenus par les réformes structurelles, les investissements réalisés depuis 2017 et, de façon plus conjoncturelle, par l'accélération de la consommation des ménages permise par la baisse de l'inflation et du taux d'épargne. Dans son avis sur le programme de stabilité, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) juge la prévision de croissance optimiste, mais pas hors d'atteinte. La prévision du Gouvernement est d'ailleurs proche de celle de la Commission européenne, qui est de 0,9%. Le 11 avril, la Banque de France a conforté notre prévision en constatant un PIB en hausse de 0,2 % au premier trimestre, ce qui n'est pas " incompatible avec une prévision de 1% sur l'année ".

M. Boris Vallaud
Quel enthousiasme !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Enfin, cette prévision est cohérente avec les indicateurs conjoncturels : le climat des affaires retrouve sa moyenne de long terme et la confiance des ménages se redresse.

Dans ce contexte, nous maintenons les grands principes qui ont conduit notre action jusqu'à présent. À cette occasion, je veux réaffirmer deux choses.

Premièrement, nous gardons comme boussole la cible des 3% de déficit public à l'horizon 2027. Pour atteindre cet objectif, nous réajustons notre trajectoire avec une première marche crédible, qui tient compte du double effet de l'exécution du budget 2023 et de la révision de la croissance pour 2024 : ramener de 5,5% à 5,1% le déficit en 2024. La suite de la trajectoire est également modifiée : nous visons un déficit de 4,1% en 2025 et de 3,6% en 2026, pour atteindre 2,9% en 2027. Je rappelle qu'au début du premier quinquennat du Président de la République, avant les crises connues depuis 2020, notre politique avait déjà permis de ramener le déficit sous les 3% : 2,3% en 2018 et 2,4% en 2019. Nous maintenons notre engagement à revenir de nouveau sous le seuil des 3% d'ici à la fin du quinquennat.

Deuxièmement, on ne change pas une politique économique qui a fait ses preuves. Nous continuons de mener une politique de l'offre, qui, je le disais, soutient la croissance, la création d'emplois et l'activité partout sur notre territoire.

Mme Aurélie Trouvé
Ce n'est pas vrai !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Depuis 2017, ce sont 2,4 millions d'emplois qui ont été créés ; le taux de chômage est au plus bas depuis quarante ans ; la réindustrialisation permet à notre pays d'être l'une des locomotives de la croissance européenne. Mais, je le répète, nous ne prenons pas ces engagements relatifs aux finances publiques pour les agences, ni pour les investisseurs ; nous les prenons pour préserver des marges de manœuvre qui nous permettent de financer nos priorités et de préparer l'avenir du pays.

Cette trajectoire repose sur un effort partagé.

S'agissant de l'année 2024, je veux rappeler l'effort déjà consenti à l'occasion du décret d'annulation de février 2024 pour tenir notre objectif : 10 milliards d'euros de crédits ont été annulés sur l'ensemble du budget de l'État dans le cadre prévu par la loi organique relative aux lois de finances (Lolf). C'est inédit dans l'histoire budgétaire et cela témoigne de notre volonté de maîtriser nos comptes malgré l'impact du ralentissement de la croissance. Ce décret a conduit à des mesures d'économie et à des reprogrammations dans tous les ministères. Mais à ceux qui sont tentés de nous accuser d'austérité parce que nous demandons un effort supplémentaire à l'État, je réponds qu'on en est loin. Les 10 milliards de crédits concernés par le décret d'annulation, c'est au total moins de 1,5% des crédits ouverts pour le périmètre de dépenses de l'État, et c'est à mettre au regard des 1 600 milliards de dépenses publiques.

Je veux aussi rappeler que les économies ont été fixées en visant les dépenses publiques qui ont le moins d'effet sur notre croissance économique.

Il y a tout d'abord des économies ciblées, qui portent sur des dispositifs pouvant être pilotés en cours d'année et sur lesquels nos choix permettent de recalibrer et de modérer la hausse prévue en 2024, en veillant à préserver les ménages et les entreprises. Elles concernent notamment l'aide publique au développement (APD), MaPrimeRénov' et le compte personnel de formation (CPF).

Il y a par ailleurs un effort d'économie complémentaire réparti entre tous les ministères, en mobilisant notamment leur réserve de précaution. Ce sont des dépenses de fonctionnement et d'intervention, des subventions aux opérateurs et plus largement des dépenses que les ministères peuvent rapidement ajuster.

M. Pierre Cordier
N'oubliez pas les subventions aux collectivités territoriales !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Nous avons ainsi réduit les dépenses de fonctionnement de l'État et des opérateurs, au profit d'un État plus sobre. Ces efforts nous ont déjà conduits à réduire de 150 millions d'euros la facture énergétique de l'État, à céder pour 280 millions de biens immobiliers et à diviser par trois les dépenses de conseil en deux ans. Nous avons également reporté certains investissements immobiliers ou informatiques qui n'étaient pas encore lancés, et nous avons mobilisé la trésorerie des opérateurs sur tous les périmètres, notamment à Bercy. L'effort a été réparti de façon proportionnelle, en tenant compte du montant des dépenses réellement pilotables par les ministères, ce qui a conduit à exclure les dépenses dites de guichet. Au vu du contexte, nous avons par ailleurs sanctuarisé certaines enveloppes comme les dépenses hors masse salariale du ministère des armées ou du ministère de l'agriculture.

M. Paul Vannier
Mais pas de l'éducation nationale !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Chaque ministère a, de manière responsable, pu choisir comment affecter cette baisse de crédits au sein du budget qu'il gère, en identifiant ses marges de manœuvre, en proposant des mesures d'économie, en reportant certains projets et en donnant la priorité à certaines dépenses. Mais nous savons que, pour tenir l'objectif de 5,1% en 2024, il faudra aller au-delà, avec un effort supplémentaire, et cet effort, estimé à 10 milliards d'euros, devra être lui aussi partagé.

S'agissant du budget de l'État, une part importante des crédits mis en réserve de précaution ne sera pas utilisée. Les ministères devront, sauf cas exceptionnel, tenir leur budget dans les crédits disponibles, sans mobiliser cette réserve qui s'élève aujourd'hui, pour ce qui les concerne, à plus de 7 milliards. Nous allons piloter la gestion au mois le mois, dépense par dépense, pour le garantir. En cas d'alerte, nous réduirons drastiquement les seuils au-delà desquels un visa de Bercy sera nécessaire pour engager la dépense, afin d'opérer un contrôle quasi systématique.

En un mot, nous devons tenir la dépense en 2024, comme nous l'avons fait en 2023. Car, oui, les dépenses de l'État ont été tenues en 2023 : l'État a moins dépensé que prévu, et ce à hauteur de 7 milliards par rapport au budget initial, grâce à des mesures de pilotage qui ont porté leurs fruits. En 2023, nous avons augmenté la mise en réserve et pris un décret d'annulation de 5 milliards ; nous avons présenté une loi de finances de fin de gestion portant des annulations nettes ; enfin, nous avons renforcé le suivi de l'exécution des dépenses. En 2024, nous appliquerons la même exigence et la même méthode dans le pilotage des dépenses de l'État. Je le répète, ces mesures de bonne gestion ne remettent pas en cause nos priorités, ni les grands équilibres du budget 2024 : les dépenses vertes continueront d'augmenter en 2024, tout comme les budgets de la sécurité intérieure, des armées, de la justice, de l'éducation nationale et de la recherche.

En ce qui concerne les collectivités territoriales, nous avons eu l'occasion, avec Bruno Le Maire, Christophe Béchu et Dominique Faure, de redire devant le Haut Conseil des finances publiques locales (HCFPL), le 9 avril, que la maîtrise de nos dépenses publiques restait un effort partagé. L'objectif pour les prochaines années, conformément à la loi de programmation des finances publiques, c'est qu'entre 2024 et 2027, les dépenses de fonctionnement progressent un peu moins vite que l'inflation : 0,5 point en dessous. Cet objectif n'a pas varié depuis le débat sur la loi de programmation et l'adoption de celle-ci. En 2024, cela représente une augmentation maximum de 1,9%. Pour y arriver, il faut se poser la question de l'efficacité de l'action publique, des conséquences de l'enchevêtrement des responsabilités et de la façon de réduire le coût de notre action publique. Ce sera le sens des missions menées respectivement par Boris Ravignon et par le questeur Éric Woerth – j'en profite pour les saluer tous les deux. Leurs conclusions nous permettront de dégager des pistes de travail. Je demeure convaincu que c'est par le dialogue que l'État et les collectivités territoriales parviendront ensemble à construire des solutions face à la dégradation de nos finances publiques.

Dans le champ social, nous poursuivrons nos efforts de maîtrise de la dépense afin de tenir la trajectoire prévue par l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam). En 2024, nous continuerons à mener des réformes structurelles, pour plus de travail, plus de croissance et plus de recettes, poursuivant notre stratégie économique payante. Je tiens à rappeler qu'en 2023, la trajectoire de l'Ondam a été respectée : les mesures de régulation ont permis de compenser le dépassement des soins de ville mais aussi les aides en trésorerie accordées aux hôpitaux pour pallier l'inflation. Les dépenses de santé liées à la crise sanitaire ont été très significativement réduites, passant de près de 12 milliards en 2022 à 1 milliard en 2023.

En matière de recettes, enfin, nous avons souffert du ralentissement économique qui s'est produit à l'échelle mondiale en 2023. Au total, ce sont 21 milliards de recettes en moins que nous constatons en 2023, par rapport à ce que nous anticipions. À ceux qui sont tentés par un procès en insincérité, je veux rappeler deux choses : d'abord, ce retournement de la conjoncture et son impact sur nos recettes ont eu lieu tardivement dans l'année et n'ont été avérés qu'après l'adoption de la loi de fin de gestion ;…

M. David Guiraud
C'est faux !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
…ensuite, de tels écarts par rapport aux prévisions de recettes ont déjà été connus dans le passé, certains d'entre vous s'en souviennent probablement. En 2011, l'État avait vu ses recettes baisser de 700 millions d'euros pour l'impôt sur le revenu et de près de 6 milliards pour l'impôt sur les sociétés. En 2013, les recettes avaient également chuté, ce qui avait entraîné un écart de 1,3 point de PIB, soit 25 milliards d'euros de différence, entre l'objectif affiché dans le projet de loi de finances (PLF) et le déficit constaté.

Ce ralentissement des recettes que nous avons observé en 2023 aura des répercussions pour 2024, mais je le redis et Bruno Le Maire l'a rappelé : nous n'envisageons pas de changer notre politique fiscale. Cela ne veut pas dire que celle-ci ne doit pas permettre de prendre en compte des situations exceptionnelles, dans une logique d'effort partagé. Comme nous l'avons fait par le passé pour les énergéticiens, les sociétés d'autoroutes, les raffineurs de pétrole ou les laboratoires de biologie, nous prendrons des mesures en 2024, nous appuyant notamment – le Premier ministre l'a annoncé – sur les travaux des parlementaires. Je pense en particulier à ceux du rapporteur général Jean-René Cazeneuve, de Nadia Hai, du président Jean-Paul Mattei et de François Jolivet, qui auront l'occasion de présenter leurs conclusions d'ici à l'été. Nous nous sommes d'ores et déjà engagés à travailler sur la question des énergéticiens et des rachats d'actions.

J'en viens désormais à l'année 2025. Nous pourrons compter sur une croissance solide, prévue à 1,4%. Cette croissance sera soutenue par la consommation des ménages et par le rebond de l'investissement des entreprises et du commerce extérieur. Je veux le redire, la croissance et l'emploi sont les meilleurs alliés de nos finances publiques.

Malgré cette croissance solide, nous aurons là encore un effort important à faire, prioritairement sur les dépenses, avec un objectif : celui d'un déficit à 4,1% pour 2025. Pour y parvenir, nous devrons faire des économies dans tous les champs. Le travail est déjà engagé grâce aux revues de dépenses, qui doivent nous permettre d'identifier le plus finement possible les marges de manœuvre qui sont les nôtres tout en maintenant un haut niveau d'ambition en matière de réformes structurelles. Il est également engagé avec vous, parlementaires, grâce au dialogue que nous avons entamé à l'Assemblée nationale comme au Sénat.

En conclusion, je veux le redire devant la représentation nationale : dans la période que nous traversons et face à la conjoncture, cette nouvelle trajectoire reflète la détermination du Gouvernement à maîtriser la dépense publique, à tenir nos objectifs et à préparer l'avenir. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

(…)

M. le président
La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Permettez-moi de compléter les éléments de réponse apportés par Bruno Le Maire.

M. Jean-Philippe Tanguy
Lesquels ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Monsieur le président Coquerel, vous dites que la dette est un épouvantail qui servirait à justifier un programme de réforme auquel vous ne souscrivez pas. Non : la dette, c'est très concret. En 2023, la charge des intérêts de la dette s'élevait à 46 milliards, autant d'argent qui ne peut être utilisé pour investir dans les écoles, les services publics ou la transition écologique.

M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Ça correspond à 2% du PIB : c'est le pourcentage qui est important !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
En 2027, cette somme dépassera 70 milliards : ce n'est ni un épouvantail ni un concept abstrait ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) J'en viendrai aux arguments du Rassemblement national dans quelques instants, ne vous inquiétez pas.

M. Pierre Cordier
Ne soyez pas condescendant !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Les résultats de cette politique économique sont également très palpables : réduire le taux de chômage à 7,5 %, alors qu'il dépassait 10% au début des années 2010 – permettez-moi de le rappeler à M. Boris Vallaud –, c'est très concret !

Mme Aurélie Trouvé
Le chômage, vous l'avez augmenté depuis un an !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Créer 2,5 millions d'emplois, rouvrir des usines, réindustrialiser, c'est très concret ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

M. Nicolas Sansu
Dommage que les gens ne soient pas d'accord !

M. le président
Chers collègues, seul le ministre des comptes publics a la parole.

M. Jean-Paul Lecoq
Mais il raconte n'importe quoi !

M. Nicolas Sansu
C'est le ministre des mécomptes publics !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Monsieur Vallaud, j'ai bien écouté vos contre-propositions. S'agissant de la bonne tenue des comptes publics, permettez-moi de rappeler qu'une perte de recettes est déjà survenue en 2013 ; 25 milliards étaient venus à manquer entre le projet de loi de finances et l'exécution du budget. D'autres majorités ont connu des difficultés à prévoir les recettes ; à l'époque, personne n'a crié à l'insincérité.

J'en viens maintenant à votre plan de rebond, votre quatre-quarts – assez indigeste. Le premier quart consiste en un choc fiscal inédit – vous l'avez d'ailleurs reconnu –, avec plus de 38 milliards supplémentaires de recettes fiscales.

M. Boris Vallaud
Vous en avez supprimé 60 milliards !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Le deuxième quart, consacré aux économies, ne consiste qu'à évaluer des dispositifs, mais ne présente aucune proposition concrète d'économie.

M. Boris Vallaud
Mais si ! Nous vous les avons présentées dans votre bureau !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Quant aux deux derniers quarts, ils correspondent à des dépenses supplémentaires. Autant dire que ce plan de rebond n'est pas crédible au regard de l'objectif de redressement des finances publiques.

Madame Sas, nous avons déjà eu l'occasion de constater nos désaccords en matière d'écologie. Même après l'effort de diminution des dépenses de 10 milliards, le budget pour l'année 2024 est le plus vert de notre histoire (Protestations sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et groupe GDR-NUPES).

M. Nicolas Sansu
Tout est parfait, alors !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Nous n'avons jamais autant investi dans la transition écologique. Les dépenses vertes, qui s'élèvent à 40 milliards, sont conformes à la méthode qui a été définie et dont M. Coquerel doutait : le budget vert de l'État.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général
Très bien !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Nous l'avons d'ailleurs étendue aux collectivités territoriales et aux opérateurs de l'État, afin de savoir précisément où en est la transition écologique. En 2024, nous dépensons 40 milliards pour cette transition.

M. Sébastien Delogu
Ce n'est pas une dépense, c'est un investissement !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Après le décret d'annulation, 8 milliards supplémentaires y ont été affectés. On peut considérer que ce n'est pas assez…

Mme Eva Sas
En effet !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
…mais vous ne pouvez pas dire que nous avons sacrifié la transition écologique.

Mme Eva Sas
Mais si !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Ce n'est pas la réalité des chiffres que vous avez entre les mains.

M. Tanguy nous donne des leçons de finances publiques mais votre programme prévoit une exonération de l'impôt sur le revenu pour les contribuables de moins de 30 ans, la nationalisation des autoroutes et la baisse de la TVA, ce qui représenterait 100 milliards supplémentaires de déficit. Votre recette miracle consisterait à financer ce programme par la réduction des dépenses liées à l'immigration.

M. Jean-Philippe Tanguy
Entre autres !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
C'est à la fois mensonger et insincère.

M. Frédéric Cabrolier
Parole d'expert !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Par ailleurs, sans même débattre du fond, vous réclamez un projet de loi de finances rectificative, mais pour quoi faire ?

M. Jean-Philippe Tanguy
C'est la démocratie !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
S'agissant de l'année 2024, nous avons pris un décret d'annulation qui respecte scrupuleusement la Lolf, d'initiative parlementaire, qui a été réformée il y a quelques années. Il est possible de recourir à un décret pour procéder à des ajustements en période de crise ; c'est précisément ce que nous avons fait.

M. Jean-Philippe Tanguy
C'est vous, la crise !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
La diminution des dépenses de 10 milliards relève d'une bonne gestion ; elle est permise par la réserve de précaution de l'État, la contribution des collectivités territoriales et de nouvelles recettes. Un PLFR n'est pas nécessaire pour atteindre l'objectif de maintenir le déficit public sous la barre des 5,1% du PIB, ne vous en déplaise, monsieur Tanguy.

Ce ne sont pas les finances publiques qui vous intéressent, mais le coup politique que représente le PLFR. Ce sujet a d'ailleurs occupé la moitié de votre intervention !

Madame Trouvé, vous dites que nous menons la politique économique la plus bête du monde…

M. Jean-Philippe Tanguy
Ça, c'est vrai !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
…mais, manifestement, d'autres nous l'envient ! (Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.)

Mme Aurélie Trouvé
Ah bon ?

M. Maxime Minot
Plus c'est gros, mieux ça passe ! Michel Audiard avait raison !

M. le président
Mes chers collègues, laissez le ministre poursuivre son propos.

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Oui, je vous invite à regarder autour de nous. En Allemagne, le taux de croissance est de 0,2%, contre 1 % en France !

À combien avons-nous ramené le taux de chômage ? Avons-nous créé plus d'emplois ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.) Notre politique économique produit des résultats et nous avons raison de la poursuivre.

M. Pierre Cordier
Vous deviez résoudre tous les problèmes, mais vous n'avez rien résolu !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
J'en viens aux arguments du groupe Les Républicains. Mme Louwagie est très exigeante en matière de dépenses…

Mme Véronique Louwagie
Je parlais des dépenses non exceptionnelles !

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
…mais comme l'a souligné Bruno Le Maire, vous raisonnez comme si nous n'avions pas traversé quelques crises. (" Ah ! " sur plusieurs bancs LR.) Il était nécessaire de financer des dispositifs exceptionnels, que vous avez appelés de vos vœux et que vous avez soutenus, pour les collectivités territoriales et pour les entreprises, pour l'emploi et le chômage partiel. S'agissant de l'essence, vous vouliez aller beaucoup plus loin que ce que nous avons fait. Vous nous reprochez de ne pas être convaincants, mais nous avons annulé 10 milliards de dépenses en début d'année : ça ne s'était jamais fait ! Ce sont des économies concrètes.

Vous demandez quelle est notre crédibilité : nous reviendrons sur les économies à réaliser en 2025 à l'occasion du débat sur le prochain PLF.

Mme Marianne Maximi
Il y en aura un ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
Dans un programme de stabilité, nous n'allons pas dérouler par le menu les PLF successifs pour les prochaines années. Le propre d'un programme de stabilité consiste à tracer les grandes lignes, avant de débattre, le plus tôt possible je l'espère,…

Mme Marianne Maximi
Avant le 49.3 ?

M. Thomas Cazenave, ministre délégué
…de l'élaboration du budget.

J'ai examiné en détail le contre-budget du groupe LR : nous sommes d'accord sur plusieurs sujets, comme les dépenses des opérateurs de l'État. En revanche, vous proposez d'économiser 6 milliards sur le régime d'assurance chômage, alors même que le président de votre groupe, il y a peu, nous invitait à ne pas aller aussi loin que nous l'envisagions dans la réforme de ce régime. Nous ne sommes pas d'accord s'agissant des montants des économies figurant dans votre contre-budget.

Tels sont les éléments de réponse que je souhaitais apporter, en vous remerciant pour la qualité du débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.)

M. le président
Le débat d'orientation et de programmation des finances publiques est clos.


Source https://www.assemblee-nationale.fr, le 2 mai 2024